Mais qui se cache derrière le G-8 ?

Le Premier ministre Verhofstadt: "Je ne comprends pas les manifestants…"

Le Premier ministre Verhofstadt était fâché à Gênes. Pas sur la police italienne qui avait abattu un manifestant. Mais bien sur les dizaines de milliers de manifestants. "Je ne comprends pas ces manifestants, le G-8 est ici précisément pour essayer de trouver une solution aux grands problèmes du monde." Le président des USA, Bush, a même accusé les manifestants de sabotage: selon Bush, ils veulent empêcher que le G-8 sauve les pauvres de la planète en continuant à développer le libre marché.

Qui est le G-8? Pouvons-nous compter sur Verhofstadt et Bush pour que ce club prenne à cœur les intérêts des populations du nord et du sud? Quelques données.

Qui est le G-8?

Le G-8, ou plutôt le G7+1, sont les 7 pays capitalistes les plus importants (Etats-Unis, Japon, Allemagne, Royaume-Uni, France, Italie et Canada) plus la Russie. Des pays capitalistes, car la Chine, aujourd’hui deuxième puissance industrielle, en tant que pays socialiste, ne participe pas au sommet. La Russie y participe depuis quelques années, même si son PNB est aujourd’hui dépassé par ceux de l’Australie, de l’Espagne, de la Corée du Sud et du Mexique.

Le cadre ci-dessous donne un aperçu du PNB et de la population des pays membres du G-8, et – en comparaison – les chiffres pour l’ensemble des pays en développement, de l’Afrique sub-saharienne, des pays les moins développés et de la Chine. Remarquez que la Chine compte à elle seule plus d’habitants que tous les pays du G-8 réunis. (Source: PNUD - Rapport 2001 sur le développement)

  Produit national brut
en milliards de $ US
Population totale
en millions d’habitants
Etats-Unis 9.152,1 280.4
Japon 4.346,9 126,8
Allemagne 2.111,9 82,0
Royaume-Uni 1.441,8 59,3
France 1.432,3 59,0
Italie 1.171,0 57,5
Canada 634,9 30,5
Russie 401,4 146,2
TOTAL G-8 20.692,3
= 68.2 % du produit mondial brut (= 30.351,4)
841.7
= 14,4% de la population mondiale (= 5.862,7)
Pays en développement 5.826,7 (= 19,2%) 4.609,8 (= 78,6%)
Afrique sub-saharienne 309,8 (= 1,02%) 608,8 (= 10,4%)
Pays les moins développés 169,4 (= 0,56%) 591,3 (= 10,1%)
Chine 4.534,9 (=14,9%) 1.264,8 (= 21,6%)

Le G-8 est donc le groupe des pays capitalistes « les plus puissants ». Depuis 1975, date de la première réunion à Rambouillet, près de Paris, ils se rencontrent régulièrement. Ce sommet est ‘informel’, il ne prend aucune décision définitive. Mais ce petit cercle de l’élite politique mondiale donne des orientations qui déterminent la vie de milliards de personnes.

La politique ‘humanitaire’ du G-8

La globalisation de l’économie, c’est le déploiement des multinationales sur le monde entier. Les pays du G-8 met tout en œuvre pour soutenir le déploiement de leurs multinationales. Ils utilisent pour cela le Fonds monétaire international (FMI), la Banque mondiale (BM) et l’Organisation mondiale du commerce (OMC) comme instruments pour briser toute résistance à cette recolonisation. Et ceux qui ne se soumettent pas à la toute-puissance des multinationales sont sanctionnés par un embargo (Cuba, Irak, République populaire de Corée) ou par une guerre ouverte (Irak, Yougoslavie,..).

Les élites financières et politiques du G-8 défendent bec et ongles et renforcent l’ordre mondial capitaliste, qui envoie des millions de gens à la mort. Au cours des 50 dernières années, depuis la création de la BM et du FMI, l’économie mondiale a quintuplé, le commerce extérieur est douze fois plus important, et les investissements à l’étranger 25 fois. Mais au cours de la même période, la contradiction entre riches et pauvres a grandi de façon dramatique. En 1960, les 20% les plus pauvres avaient 2,3% des revenus mondiaux, et en 1994 seulement 1,1%. La spéculation a gonflé pour atteindre 1000 milliards de dollars (45.000 milliards de francs) par jour. Le Programme des Nations Unies pour le Développement donne les chiffres suivants dans son Rapport 2001 sur le développement:

1,2 milliard d’hommes doivent s’en sortir avec moins d’un dollar (45 francs) par jour, 2,8 milliards avec moins de 2 dollars (90 francs) par jour.

L’électricité a été inventée en 1831, mais un tiers de l’humanité ne peut toujours pas en profiter.

Un milliard de personnes n’ont pas l’eau courante et 2,5 milliards n’ont pas d’installations sanitaires de base.

854 millions d’adultes, dont 543 millions de femmes, ne savent ni lire ni écrire

Chaque année, 11 millions d’enfants de moins de 5 ans meurent de maladies facilement évitables

La moitié des enfants africains atteignent l’âge d’un an sans vaccins contre la diphtérie, la coqueluche, le tétanos, la polio et la rougeole.

Malgré les évolutions vertigineuses dans l’industrie pharmaceutique, deux milliards de personnes n’ont toujours pas accès aux médicaments essentiels et bon marché

Tandis que dans 40 pays le revenu moyen par habitant a augmenté de plus de 3% par an depuis 1990, le revenu par tête est aujourd’hui plus petit qu’il y a 10 ans dans 80 pays. Dans les pays riches aussi, les problèmes prennent de l’ampleur. En outre, les moyennes nationales cachent souvent les vrais problèmes. Ainsi, à New York, le nombre d’enfants nés dans la pauvreté est passé de 44 à 52% entre 1990 et 1996. Dans beaucoup de grandes villes européennes, on constate une augmentation importante des cas de tuberculose. 130 millions de gens vivent dans la pauvreté, 34 millions sont chômeurs, 8 millions sont sous alimentés.

La globalisation capitaliste, une bénédiction pour l’homme de la rue ? Bush et ses comparses du G-8 trouvent que oui …

Face à cela, il est de plus en plus clair qu’une politique socialiste peut représenter une réelle alternative. Le PNUD indique que les PNB par habitant du Pakistan et du Vietnam sont comparables, mais le Vietnam arrive beaucoup mieux à augmenter le bien-être de sa population. Le revenu moyen en Chine augmente de 8% par an. Le pays arrive à faire diminuer la pauvreté à la campagne, malgré l’inégalité grandissante suite à l’introduction d’éléments capitalistes dans l’économie. Et les résultats de Cuba sur les plans des soins de santé, de l’enseignement et de la protection sociale, malgré les sérieux problèmes économiques que le pays a connus ces derniers dix ans, sont peut-être encore l’exemple le plus clair.

D’autre part, les pays de l’ancienne Union soviétique, maintenant qu’ils sont reconquis par le capitalisme sauvage, sont les plus grandes victimes du « marché libre » : selon le rapport du PNUD (2001) la Russie et la Roumanie se portent moins bien aujourd’hui qu’en 1980, la Bulgarie et la Lettonie moins bien qu’en 1985 et la Biélorussie, la Lituanie, la Moldavie et l’Ukraine font moins bien qu’en 1990. La plupart des pays de l’Afrique sub-saharienne font également partie de ce groupe.

La dette extérieure: le G-8 tient le tiers monde en otage

Sans aucun doute la déclaration finale du sommet de Gênes contiendra-t-elle un paragraphe sur l’allégement des dettes du tiers monde. Depuis de nombreuses années, c’est devenu un rituel. Mais malgré tous les soi-disant allégements, malgré les remboursements qui ont entre-temps largement dépassé le montant emprunté, la dette extérieure n’en finit pas d’augmenter.

L’Amérique latine avait en 1970 une dette extérieure de 60 milliards de dollar. En 1980, ce montant était de 222,5 milliards. Et en 1998, la dette totale avait grimpé jusqu’à 750 milliards de dollar, malgré le fait que la région avait déjà procédé à des remboursements supérieurs à ce montant, malgré 20 ans de soi-disant ‘initiatives d’allégement de la dette’.

Le montant annuel remboursé par l’Amérique latine aux pays riches était de 53 milliards entre 1986 et 1988, et est passé à 86 milliards de dollars entre 1991 et 1996. 30% des revenus de la région y sont consacrés.

L’organisation ‘Drop the Debt’, qui revendique l’annulation des dettes du tiers monde, a calculé que les montants que les pays africains rembourseront au cours des six prochaines semaines seraient suffisants pour payer tous les frais du luxueux sommet de Gênes…

Le soutien du G8 au fonds anti-sida, une blague de très mauvais goût…

Un des thèmes de discussion qui revient le plus souvent aux infos, c’est le soutien au fonds anti-sida. Le secrétaire général de l’Onu, Koffi Annan, veut récolter 10 milliards de dollar avant la fin 2001. Provisoirement – a déclaré Annan à l’ouverture du G-8 – les pays les plus riches ont promis 1,2 milliard de dollar. L’Italie espère ‘peut-être’ pouvoir faire aller ce montant jusqu’à 2 milliards de dollar…

Deux milliards de dollar…Une contribution importante à la santé publique dans le monde, ou une énième tentative de redorer leur blason ? Quand on sait que l’ensemble des revenus (produit national brut) des pays du G-8 atteint à peu près 20.000 milliards de dollar, il est facile de comprendre que le montant promis en représente le dix millième.

On pourrait comparer ce « généreux geste » à celui de quelqu’un qui gagne 800.000 francs (donc quelques 10 millions par an), et qui crie sur tous les toits qu’il va sauver le monde en versant chaque année 1.000 francs à l’opération 11.11.11…

En outre, ce montant correspond à peu près au quart de celui que les Etats-Unis, au courant de l’année 2002, consacreront au développement de leur fameux bouclier de l’espace, le ‘National Missile Defence’. Ce qui ne profite qu’à l’industrie de l’armement, tandis que le monde menace de sombrer dans une nouvelle course aux armements.