Porto Alegre est devenue la ville qui sert de modèle à la sociale-démocratie européenne ainsi qu'à la gauche de la gauche trotskisante en mal de perspectives gestionnaires et de nouveaux mensonges. Il fut un temps où certain-e-s militant-e-s allaient se faire conter des histoires à l'Est, aujourd'hui dans un autre registre c'est à Porto Alegre. C'est le modèle participatif qui fascine cette gauche-là. Cette participation consiste en la gestion par la population de 10% du budget de la ville. Il s'agit en quelque sorte pour le Parti du travail (PT) d'intégrer un peu plus encore la population au mode de gestion parlementaire bourgeois. Ce système est comme il se doit interclassiste. Le résultat en est par exemple que les quartiers pauvres s'entredéchirent pour des projets de première nécessité plutôt que de s'allier dans la lutte, cependant que les quartiers riches demandent des courts de tennis et plus de flics. Cela n'est que de la poudre aux yeux, la mairie ayant droit de veto si un projet ne lui plaît pas. Il n'y a pas que la classe politique française qui vient faire sa campagne électorale à Porto Alegre. Le PT se sert du FSM comme d'une vitrine. Les enfants des rues ont été priés de se faire discrets comme durant tous bons jeux olympiques. Le FSM est sponsorisé par les gouvernements de Porto Alegre et de l'Etat de Rio Grand do Sul. La police est, elle aussi, très participative. Ça donne tout de suite un petit air accueillant. Plus que partout ailleurs dans le monde, la police est ici pour nous protéger, notamment de nous-mêmes. C'est ainsi qu'au campement de la jeunesse qui réunissait des milliers de personnes la police était omniprésente. Des détachements de la police montée se tenaient aux alentours du camping prêts à intervenir alors qu'à l'intérieur les flics patrouillaient à pied, à moto et à cheval. Cela ne semblait curieusement pas trop déranger. Il faut dire que vu le nombre de léninistes et autres groupuscules trotskistes présents au camping cela n'était pas trop en contradiction avec l'image qu'ils/elles se font du socialisme. C'était la foire aux partis. Pour avoir une idée du nombre de chapelles présentes on peut par exemple voir combien il y a de combinaisons possibles avec les mots suivants : parti, union, socialiste,communiste, travailleurs, ouvriers, Brésil, IV, travail, populaire, démocratique ... Des sectes trotskistes défilaient de plus régulièrement dans le camping bannières au vent tels les krishna. C'est toutefois la base du PT qui semblait la plus massivement représentée, les trotskistes tentant comme à leur habitude de faire de l'entrisme. La manif anti-capitaliste du 31 janvier La manif anti-capitaliste du 31 janvier qui partait du campement de la jeunesse devait donner le change à la parade officielle du FSM. Ce fut un bon exemple de la tentative de mainmise du PT sur tout mouvement social qui prétendrait à une certaine autonomie. Alors qu'il était l'instigateur de la marche d'ouverture, le PT semblait craindre toutes fausses notes dans le protocole. Il ne put donc s'empêcher de nous envoyer deux camions sono d'une puissance aussi monstrueuse qu'est sa force d'inertie pour le mouvement social. Entourer de très peu de militantEs le PT hurlait sa bonne parole socialiste étatique perché sur les camions couvrant ainsi les slogans du bloc autonome - libertaire. Il tenta de transformer la manif anti-capitaliste, susceptible de critiques envers un FSM interclassiste, en une marche de la jeunesse saluant l'ouverture du forum. Ce manège dura jusqu´à ce que la manif rejoigne la marche du FSM. Des manifestantEs n'ayant que trop longtemps supporté cette agression décidèrent alors de réagir. Les camions sono furent bloqués et empêchés durant un long moment de faire la jonction avec la marche officielle. La manif commença à scander "o povo unido, govierno sem partido" (le peuple uni gouverne sans parti). Perchés sur leurs camions nos adeptes du socialisme autoritaire tentèrent alors de faire étalage de toute leur science de la manipulation. Ils/elles commencèrent par cesser leurs imprécations pour le socialisme étatique et s'essayèrent sans succès à des slogans plus consensuels contre l'ALCA. Tout fut essayé, la musique pour faire danser les gens, la lecture du noms des personnes tombées en argentine, ils/elles finirent même par autoriser un anarchiste à prendre le micro durant quelques secondes sur le camion. Rien y fit. Après un long moment, les manifestantEs ayant obtenu que les camions mettent la sourdine et les gros bras du PT commençant à faire leur apparition le barrage fut levé. La manifestation suivit la marche sur quelques centaines de mètres avant de bifurquer sur la gauche pour occuper une maison dont le plancher s'avèrera malheureusement trop pourri pour être habitable. Il n'y eut pas de blesséEs malgré le déploiement immédiat de la police montée et anti-émeute et les tentatives de provocation policière qui lancèrent un motard toute sirène hurlante à travers la foule. Il y aurait encore beaucoup de choses à dire comme par exemple le nombre incroyable de flics patrouillant à pied, à moto, à cheval, en voiture, en jeep et en van autour des concerts qui le soir réunissaient des milliers de personnes. Jamais je n'ai vu des concerts (gratuits et autorisés) autant fliqués. Les flics, matraque bien en vue, se permettaient même de tracer à travers la foule qui ne réagit toutefois pas à cette provocation.Mais je pense que ce qui illustre le mieux l'avenir du FSM, ce sont les accords signés à Porto Alegre entre le candidat aux prochaines élections présidentielles brésiliennes Lula (PT) et les émissaires du gouvernement de l'Etat impérialiste français de "gauche". Pendant ce temps, au camping, la base du PT nous parlait de socialisme, de changement social et de révolution!