Criminalisation des luttes

En Irak, on tue des civils.
En Belgique on expulse ceux qui en parlent.

Le 17 février 2003, des militants pacifistes d'une quinzaine de nationalités différentes, membres de l'organisation écologiste Greenpeace menaient des actions mettant en cause la collaboration de la Belgique avec les préparatifs de guerre. Ils dénonçaient ainsi les autorisations que le gouvernement continue à délivrer à l'armée américaine, et qui portent essentiellement sur du soutien logistique et le droit de transit pour des soldats et du matériel militaire via le port d'Anvers.

Un certain nombre de militants furent arrêtés durant cette action pacifique. Tous furent relâchés ensuite sans inculpation. Le lendemain, le Ministre de l'Intérieur émettait des ordres d'expulsion et d'interdiction indéfinie de la zone Schengen contre sept activistes, provenant du Canada, de Nouvelle Zélande, de Hongrie, de Tchéquie et de Slovaquie.

Une frontière à perméabilité sélective

A la frontière belge, les soldats et les armes américains passent, mais pas les pacifistes.
Pourtant, tout le monde sait qu'en principe les contrôles aux frontières intérieures du territoire européen Schengen sont supprimés (article 2 de la Convention d'exécution de 1990 de l'accord de Schengen).

Mais, dans des situations où l'ordre public ou la sécurité nationale d'un pays seraient menacés, et après consultation des autres pays signataires de l'accord, certaines formes de contrôle aux frontières peuvent être restaurées pour une période limitée. Le problème est que ce qui devait être tout à fait exceptionnel le devient de moins en moins. Selon l'organisation State Watch [www.statewatch.org], les contrôles aux frontières ont repris à 26 reprises en deux ans, dont seize fois pour contrer des manifestations lors de sommets internationaux, des manifestations alter-mondialistes ou pacifistes. Dans la plupart des cas, ce sont des centaines voire des milliers de citoyens qui sont restés bloqués aux frontières. Au-delà de la question de la mobilité des personnes et du respect de la liberté de circulation, il s'agit surtout de violations de plus en plus banalisées du droit pour chacun de manifester et d'exprimer ses opinions.

Sur le plan de l'ordre public et de la sécurité nationale, il y a deux poids, deux mesures : d'une part, l'acharnement contre des militants non violents et, d'autre part, la passive collaboration avec un Etat de plus en plus perçu comme l'un des plus dangereux de la planète.