Le phénomène de la « Ligue Arabe européenne » et la violence qui en résulte dans le quartier de Borgerhout à Anvers, en Belgique, est caractéristique de situations qu’on a vu hélas se développer avant-guerre et donner lieu aux excès tragiques que seuls les négationnistes et l’extrême droite nient aujourd’hui. Extrême droite qui est désignée du doigt par les uns, les autres préférant s’en prendre au « lobby juif ». Le conflit israélo-palestinien au Proche-Orient ne sert pas, comme le prétendent les médias, de moteur, mais de prétexte à une flambée de violence qui n’a absolument rien de spontané. Bien au contraire. Les milices de la « Ligue Arabe européenne », organisation inconnue il y a encore six mois, tente - depuis son site Internet, entre autres - de mettre en place des actions orchestrées, avec un double objectif : mettre en difficulté la communauté juive d’Anvers – et de toute la Belgique, par extension –, en utilisant comme paravent le conflit israélo-palestinien, tout en stigmatisant le mouvement d’extrême droite Vlaams Blok. Ce dernier, en quête de respectabilité, cherche à confirmer les 33% de votes en sa faveur aux dernières élections municipales. L’assassinat d’un membre de la communauté maghrébine, ce mardi, à Anvers, a servi de catalyseur à une explosion de violence dirigée contre la communauté juive et la police belge, accusées, pêle-mêle, de faire le jeu de «puissances occultes racistes à l’encontre de la communauté musulmane». Bien qu’utilisant de grosses ficelles, il ne faut pas négliger les conséquences graves et nuisibles sur la pérennité de l’Etat de droit, en Belgique, mais aussi, plus largement, en Europe. Le gouvernement belge a réagi fermement, dans un premier temps, par l’arrestation du leader du mouvement, ce vendredi, sous l’inculpation de rébellion en bande, entrave à la circulation, dégradation de véhicules et coups volontaires à un agent des forces de l'ordre. Guy Verhofstadt, le Premier ministre belge, a comparé, ce jeudi, le comportement de la Ligue «à une bande de malfrats malintentionnés», et envisage son interdiction pure et simple. La croissance incontrôlée des jeunesses hitlériennes ou de la Mafia ont historiquement les mêmes racines. Les risques de dérapage sont considérables, quand on sait les conséquences monstrueuses qu’ont eu la dégénérescence de ces mouvements «de jeunesse» ou de «protection», qu’ils étaient au départ. Les méthodes sont bien les mêmes. Menaces de mort, intimidations, coups et blessures : la Camorra n’a rien à leur envier. La «Ligue Arabe européenne» utilise, par ailleurs, les grands classiques de l’embrigadement des masses : un leader charismatique – Dyab Abou Jahjah – qui s’exprime parfaitement en français et néerlandais, attise les frustrations d’une communauté de 30.000 personnes vivant dans des conditions difficiles. Les manifestations de «solidarité» envers le peuple palestinien ne sont, en réalité, que des répétitions qui servent à tester la réactivité de l’opinion et des autorités pour les actions à venir. Discours «musclés», création de «patrouilles» - c.à.d. de milices pour «surveiller la police» - qui arpentent la ville dans des tenues noires et tentent de terroriser les autres minorités. A la couleur de l’uniforme près, ce sont exactement les ingrédients que l’on trouvait chez les S.A. La marge de manoeuvre est relativement étroite dans la mesure où la «Ligue», comme tous les mouvements subversifs, joue de toute la gamme des droits que lui offre la démocratie – depuis les lois anti-racistes jusqu’à la défense de la pluralité politique – pour tenter de justifier la mobilisation de masses derrière des actions violentes, qui relèvent elles-mêmes d’actes racistes et discriminatoires à l’égard des autres communautés. Le gouvernement belge a tout intérêt, comme il a commencé à le faire, à montrer une détermination sans failles à l’égard de tels phénomènes pour éviter qu’ils n’embrasent tout le pays, puis toute l’Europe, comme ses initiateurs en ont exprimé l’intention. Anvers, Bruxelles, Paris, Marseille, Londres, Berlin, Rome, Barcelone, pour ne citer que les principales, sont toutes des villes européennes à forte densité arabo-musulmane. Leurs porte-parole ont beau tenter de rassurer l’opinion - "L'Islam est contre la haine, d'où qu'elle vienne", a déclaré, par exemple, l'imam Yousfi - les actes de violence et d’intimidation de ces dernières semaines viennent contredire, de manière flagrante, ces paroles lénifiantes. Un vent du Sud, venant souffler sur des braises alimentées par les relais islamiques en Europe, s’est transformé insidieusement en une menace tout à fait concrète. Les arguments de certains ministres «politiquement corrects», ou de médias résolument pro-arabes, en vue de faire passer ces tendances pour marginales, volent en éclats devant la réalité des faits. Considérer les minorités agissantes, qualifiées d’«intégristes» ou d’«extrémistes», comme «négligeables» constitue une erreur profonde d’évaluation, qui pourrait avoir des conséquences graves. Un homme politique français déclarait récemment que les «extrémistes» ne représenteraient que 10% de la communauté musulmane en France tout au plus. Bien qu’un peu simpliste, ce calcul attribuerait tout de même 600.000 activistes à cette mouvance ! Ces factions, qui ont une conception du «mal» pour le moins très différente de la nôtre, s’autorisent des aménagements particuliers avec la loi : «Extrémiste en quoi ? On peut être extrémiste dans son combat contre le mal…» L’utilisation d’une image «raciste», qu’ils veulent renvoyer à ceux qui critiquent leur action, devient systématique, et ce pour mieux neutraliser leurs détracteurs. Tous les prétextes sont bons : la police, venue procéder à des arrestations pour des délits de droit commun, est prétendument «raciste» ; des crimes attribués à des déséquilibrés – comme celui de Berghout – deviennent, à leurs yeux, «racistes». Bref, ils qualifient tout comportement antagoniste de la société à leur égard de «raciste». Les déclarations de cheik Omar Bakri devraient achever de convaincre ceux qui douteraient encore de la volonté hégémonique et dictatoriale de l’Islam : «Nous transformerons l’Occident en régime islamique par une invasion physique ou culturelle». Et pour enfoncer le clou : «Il serait idiot de croire que ces pays [occidentaux] pourront un jour atteindre le niveau de l’islam. Il leur faut beaucoup de temps, ne serait-ce que pour comprendre l’islam. Le seul moyen de mettre fin à leur racisme est de les exhorter à se joindre à l’islam…» Sans commentaires... Un ensemble d’attitudes irresponsables, tendant à nier la réalité, à ne pas adopter une attitude de défiance, pour éviter d’être taxé de racisme, ou encore qui consiste tout simplement à se mettre des oeillères pour ne pas se «sentir concerné», peuvent mener à une véritable catastrophe : l’indifférence tue. Une réponse tenant compte du respect de l’individu et des communautés peut et doit être apportée. Mais le respect est une valeur bilatérale. L’absence de réciprocité serait génératrice de tous les excès qui mèneraient inévitablement à l’anarchie. La première des obligations est donc la lucidité. Commencer par admettre la gravité de la situation est déjà un grand pas, qui permettra de mieux l’appréhender et de l’empêcher de déraper. Gouverner c’est aussi prévoir. La prévention, mais aussi l’éducation, sont toutes deux des clés essentielles. Enfin, la vigilance et l’application, sans concessions, de la loi dans toute sa rigueur, pour les irréductibles, ceux pour qui il est trop tard, ou qui veulent se placer en marge des lois, est désormais indispensable à la survie d’une société civile, attaquée dans le fondement même de ses valeurs. Il ne s’agit pas de répondre à la violence par la violence, mais de lui opposer tous les moyens légaux, y compris la force, si nécessaire. Il est grand temps de mettre en place les structures permettant d’appliquer les mesures prises pour défendre le droit des citoyens, celui des victimes, de ceux qui accomplissent leurs devoirs, face à ceux qui ne revendiquent que des droits et alternent menaces et violences pour imposer aux autres un modèle qui ne ferait que servir leur desseins exclusifs. Nos gouvernements le peuvent. Les moyens ne manquent pas. C’est une question de volonté politique. Les Jahjah et autres Bargouthi sont trop heureux de faire de leur procès une tribune politique, où ils s’arrogent le rôle de martyr d’une société qu’ils abhorrent et qu’ils voudraient soumettre à leurs propres règles. Parmi les médias, ou les partis traditionnellement «révolutionnaires», ceux qui, par dogme ou par intérêt immédiat, récupèrent ces actions en relayant les «causes», les frustrations à l’égard de «l’establishment», des «lobbies» du «marché» ou de la «répression», ont un comportement irresponsable et auto-destructeur. Ils contribuent au lancement d’un engin explosif qui va leur retomber inévitablement sur la tête. Si quelques revendications - condamnant certains excès - peuvent être considérées comme légitimes, ils prennent toutefois une énorme responsabilité en systématisant les amalgames, exploités par des mouvements subversifs pour mener à des situations chaotiques. Quand Leïla Chahid, la représentante de l’Autorité Palestinienne en France, déclare : «Al-Qaïda continuera à utiliser tous les foyers de tension grave dans le monde qui peuvent mobiliser l'opinion publique musulmane», le lien avec la propre pression qu’elle cherche à exercer n’est pas anodin. Dans une Europe qui s’apprête à élargir le nombre de ses membres à 25, et où la libre circulation des biens et des personnes est déjà une réalité, l’absence de zones de «non-droit» doit être une exigence primordiale de la part de nos gouvernements. C’est aux autorités judiciaires de définir précisément les limites des actions qui peuvent être considérées comme légales, et à l’exécutif d’appliquer cette distinction sans faiblesse. Au-delà, elles deviennent des délits de droit commun pour lesquels la loi doit être appliquée avec la plus grande fermeté. [i]Dura lex, sed lex[/]. La vision de «républiques islamiques» ou de l’état dans lequel se trouve le Liban aujourd’hui, après un énième plan de sauvetage, consécutif à trente cinq années de guerre civile, nous indique clairement qu’il n’est de l’intérêt de personne de laisser Borgerhout devenir un nouveau Beyrouth. L’avenir de nos démocraties en Europe est à ce prix.