Le "Syndrome de l’Otan" : armes, profits et mensonges

Qui cache depuis dix ans les dangers de l’uranium appauvri et pour quels intérêts?
Après des années de souffrances, des soldats belges déposent plainte contre leur gouvernement. Mais pourquoi l’Otan cache-t-elle la vérité depuis dix ans? Si le scandale de l’uranium éclate enfin, c’est grâce à la lutte acharnée menée depuis dix ans - aux USA, puis en Grande-Bretagne et en France - par des associations de soldats victimes et par une poignée de scientifiques et de militants courageux. Dont Christine Abdelkrim-Delanne qui vient de publier La Sale Guerre propre . Historique de ce combat.
MICHEL COLLON

26.000 soldats US souffrent
de "maladies inconnues"

 "J’ai été blessé le 26 février 1991 par un “tir ami” impliquant des munitions à l’uranium appauvri, raconte Jerry Wheat (3ème division blindée US dans le Golfe). En octobre, j’ai ressenti des douleurs abdominales violentes. J’ai quitté l’armée. J’ai envisagé de me suicider car il n’y avait aucune réponse et aucun traitement. On m’a dit que ma maladie n’était pas réelle, que c’était dans ma tête. Notre gouvernement devrait arrêter d’utiliser l’uranium appauvri. S’il ne le fait pas, qu’il assure au moins le suivi médical de ceux qui en ont besoin. Souvenez-vous, ce triste héritage des fautes du gouvernement n’est pas nouveau. Il y a environ 50 ans, des Vétérans ont été utilisés comme cobayes humains pour les essais nucléaires. Puis le gouvernement a testé le LSD sur d’autres. Puis ils ont utilisé l’agent orange au Vietnam."
 Au retour de la guerre du Golfe, en 1991, de nombreux soldats américains et britanniques constatent certains troubles: cancers, maladies des poumons et de la peau, lésions cérébrales. Et malformations monstrueuses chez des enfants nouveaux-nés.
 On observe les mêmes pathologies dans la population irakienne, constate le professeur Selma Al Taha, directeur d’un laboratoire de génétique: "Depuis la guerre, nous enregistrons une augmentation importante de malformations congénitales: hydrocéphalies (ndlr: gonflement du cerveau), encéphalites, spina-bifida (ndlr: fermeture incomplète des os de la colonne, privant la moëlle épinière de protection), mais aussi malformations monstrueuses des bras et des jambes, absence de cœur et de tête."
 Son collègue Al Askri, spécialiste en médecine nucléaire, souligne "une forte augmentation des problèmes de thyroïde et des cancers. Nous voyons quotidiennement environ cinquante patients présentant un cancer." C’est dans le sud, foyer intense de la guerre qu’on trouve le plus fort taux de leucémie des enfants.
Une enquête scientifique approfondie et indépendante est indispensable
Les symptômes du "syndrome de la guerre du Golfe" étant très divers, plusieurs causes possibles ont été avancées au fil des années: uranium appauvri, vaccins imposés aux soldats, pesticides, bombardement d’usines chimiques… Complexe, la question nécessiterait une recherche scientifique approfondie et coûteuse. Les Etats-Unis et l’Otan nient tout lien avec l’uranium appauvri ou toute faute de leur part. Mais c’est justement leur refus d’entreprendre cette recherche scientifique qui leur a permis de nier le syndrome du Golfe depuis dix ans.
 Pourtant, l’armée américaine a dû reconnaître récemment que 132.749 anciens combattants étaient "inaptes au service" dont 20% atteints de "maladies inconnues". Mais elle rejette toutes les études notamment du très officiel département des Vétérans ou du centre de recherche des forces navales de San Diego, et s’obstine à prétendre qu’il s’agit de "victimes du stress de guerre".

Qui ne cherche rien, ne trouve rien

Malgré l’obstruction systématique de l’armée US, la vérité va faire lentement son chemin… Le 7 mai 1991, le professeur allemand Sigwart Gunther découvre des débris de projectiles de formes et de poids bizarres sur l’autoroute, dans le désert irakien. "J’ai vu des enfants jouer avec ça. J’ai appris qu’une petite fille qui en possédait était morte de leucémie." Quatre instituts allemands différents y découvrent une radioactivité énorme. La police saisit et fait disparaître le projectile, mais ne peut empêcher Gunther de sonner l’alerte. Peu entendue, hélas.
 En 1992, une étude du Bureau d’évaluation technologique du Congrès US, constate que, sur 148 tués officiellement reconnus, 34 l’ont été par des "tirs amis". Et conclut: "Impossible de prévoir le nombre de décès ultérieurs parmi les soldats portant des éclats d’uranium appauvri dans leur corps".
 Serait-ce pour cela que l’armée US aurait, après la guerre, ramené en secret aux USA des matériels américains et irakiens contaminés? En tout cas, en janvier 92, sous la pression des associations de vétérans, le Bureau d’investigation du Congrès américain lance une enquête. Et en mars, le service de santé de l’armée recommande d’identifier les soldats portant des éclats dans leur corps "pour observer et cataloguer les signes de toxicité rénale chronique et de cancer". Mais pendant cinq ans, le nombre de soldats contaminés ne sera jamais publié.
L’armée US en flagrant délit de mensonges répétés
Systématiquement, l’armée US cache les informations alarmantes. Ainsi, cinq mois après la fin de la guerre, un incendie fait rage durant six heures à la base US de Doha, près de Koweït City, détruisant 4 chars Abrams, 660 obus de 120 mm et 9.720 de 25 mm, tous chargés en munitions à l’uranium appauvri. 3.500 soldats sont présents et on détecte une contamination supérieure aux normes admises. Une note précisant le danger d’inhaler des particules n’est pas distribuée au personnel qui nettoiera le hangar sans aucune protection, buvant même l’eau d’un jerrycan proche. Mais à la fin de la journée, des officiers viennent coller des étiquettes “radioactivité” sur les débris de munitions. Et deux mois plus tard, les équipes chargées de décontaminer porteront toutes des masques, gants et combinaisons de protection.
 Pendant sept ans aussi, l’armée US refusera de révéler combien de soldats ont été contaminés parmi les équipes chargées de réparer - sans protection - les véhicules de combat endommagés par les “tirs amis”.
 Depuis 1992, Vétérans et autorités US se sont livrés à une bataille de chiffres. Jusqu’en mars 98, le Pentagone maintient que la contamination à l’uranium ne concerne que 35 personnes. Mais des documents secrets déclassifiés permettent au chercheur Dan Fahey d’obliger le Pentagone à reconnaître publiquement son “erreur”: il y en aurait 113. Au moins.
 La détermination des Vétérans a été l’élément décisif pour contrer la mauvaise foi des autorités américaines qui, aujourd’hui encore, ne cherchent qu’à gagner du temps et semer le doute. Ce que Fahey résume ainsi: "Qui ne cherche rien, ne trouve rien".

Deux femmes admirables, Sara et Carol, ont lancé la résistance

Sara Flounders est cofondatrice de l’International Action Center, une organisation présidée par Ramsey Clark (ex-ministre américain de la Justice) qui lutte contre toutes les guerres impérialistes des Etats-Unis: Vietnam, Grenade, Panama, Nicaragua, Libye, Somalie et bien sûr la guerre du Golfe.
 Dès 1992, Sara Flounders auditionne plus d’une centaine de soldats et commence les premières recherches sur le lien avec l’uranium. En 1997, dans son livre Metal of Dishonour (Le Métal de la honte), elle publie un des premiers témoignages de Vétérans: "J’étais volontaire par patriotisme, raconte Carol H. Picou, je voulais aider. Infirmière militaire, j’étais dans le premier hôpital de campagne à entrer en Irak (…) dans le désert irakien. Il y avait des munitions partout, des obus, des bunkers soufflés, et notre unité médicale de 150 personnes a traversé tout cela sans aucune protection. Nous étions sept femmes. Nous sommes toutes malades. D’autres membres de l’unité sont morts. Les chars (irakiens) étaient brûlés et les corps carbonisés. Je n’avais jamais vu une chose pareille. J’ai arrêté mon véhicule et j’ai pris des photos. J’étais très inquiète. Nous nous sommes dits: “C’est la route de l’enfer.” On ne nous avait pas avertis de la contamination.
"Je ne pouvais plus contrôler mes intestins, ni mon sphincter"
En Irak, j’ai commencé à remarquer des taches noires sur ma peau. Je sentais un changement en moi. Je ne pouvais plus contrôler mes intestins, ni mon sphincter. Ils m’ont dit que c’était mécanique et que je devrais faire des examens en rentrant. A mon retour, j’ai commencé à poser des questions et j’ai eu peur pour ma carrière militaire. Un “Vétéran atomique (ndlr: c’est ainsi que l’on nomme les 250.000 soldats – chiffres américains officiels – irradiés durant les expériences nucléaires américaines entre 1942 et 1963) m’a dit que j’étais empoisonnée par l’uranium appauvri. Un médecin civil a diagnostiqué: encéphalopathie due à l’exposition à une substance toxique, anomalies du système immunitaire, etc.
 L’armée n’a retenu pour mon invalidité que “l’incontinence urinaire et intestinale d’origine inconnue“. On m’a licenciée, on m’a évidemment supprimé mon assurance maladie militaire. En février 94, un contrôle a révélé la présence d’uranium. Je suis allée à Washington et je me suis publiquement exprimée. Aujourd’hui, j’ai un grave problème de mémoire. J’ai une encéphalopathie d’origine toxique, une détérioration de la thyroïde, une dégradation musculaire. Je souffre d’incontinence de la vessie et des intestins et je ne peux pratiquement plus me servir de mes mains et de mes pieds. Le bébé d’un membre de notre unité est né sans oreilles, sans yeux et le cœur à droite."
 Depuis lors, Carol a beaucoup témoigné à travers le monde. Son courage, ainsi que l’action de Sara Flounders et de l’International Action Center ont fait reculer le mur du silence.

Encore une histoire de fric?

A qui profite le crime? Qui a intérêt à ce qu’on emploie des tonnes d’uranium appauvri?
En septembre, un colonel de l’armée yougoslave, chargé de l’enquête sur les sites bombardés par l’Otan et de la protection des soldats, me disait qu’il existe des métaux autant ou plus performants pour percer les blindages que l’uranium appauvri. Mais l’employer permet de résoudre l’épineux problème du traitement de ces déchets nucléaires (qui restent radioactifs pendant des milliards d’années). L’industrie nucléaire transformerait donc certains pays - et certains peuples - en poubelles nucléaires.
 N’étant pas expert, je ne peux juger des “mérites” des divers composants possibles. Il serait important que des chercheurs honnêtes et indépendants creusent cet aspect. Quand on voit employer des armes aussi criminelles, ne faut-il pas chercher quels intérêts se cachent derrière?
La faute aux vaccins? A la pilule anti-sommeil? Ou au business?
Diverses hypothèses tentent d’expliquer le "syndrome du Golfe et des Balkans"… Selon Pamela Asa, chercheur en biologie nucléaire, l’armée US aurait clandestinement introduit une substance non autorisée, le squalène, dans le cocktail de vaccins administrés à ses soldats. Réaction? D’abord, l’armée US nie que ses laboratoires disposent de squalène. Puis, elle admet son utilisation mais après la guerre. Enfin, elle avoue l’avoir expérimenté avant la guerre, mais refuse d’ouvrir ses archives. Or, une enquête du Congrès américain montre que le nombre de vaccinés est septante fois supérieur aux chiffres officiels. Les soldats auraient servi de cobayes pour des tests secrets.
 Même accusation contre l’armée française. Ses comprimés de pyridostigmine (prévention contre les gaz de combat) auraient été imposés aux soldats sans autorisation légale, malgré leurs dangereux effets secondaires. Aux USA, ce produit n’a toujours pas obtenu l’autorisation de la Food and Drug Administration.
 Autre suspect: le Canard enchaîné a découvert que "dans le plus grand secret, l’état-major français a expérimenté une pilule anti-sommeil alors interdite à la vente". 14.000 boîtes de Modafinil, acheminées sous un faux nom en refusant de dire aux soldats ce qu’ils avalaient (beaucoup refusèrent). Une telle pilule magique anti-fatigue promet évidemment de juteux bénéfices. Mais la loi française interdit, sous peine de prison, tout test pratiqué sans informer le sujet de la nature du produit et des risques. L’armée française se serait-elle mise hors la loi pour servir de gros intérêts financiers?
 Le livre d’Abdelkrim examine encore divers suspects dont un pesticide. Que conclure? D’abord, que la conspiration du silence, organisée par les Etats-Unis et l’Otan, est responsable de cette incertitude qui exacerbe  l’angoisse des victimes. Deuxièmement, que les symptômes des soldats occidentaux pourraient provenir de différents facteurs: uranium, vaccins, médicaments spéciaux ou pollutions locales. Mais, dans chacun de ces cas, ce livre démontre que les armées occidentales ont utilisé des produits dangereux en cachant les risques. Elles s’accrochent donc à la théorie des “malades dans leur têtes”, car toute enquête révélerait des fautes gravissimes. Troisièmement, les populations d’Irak et des Balkans n’ont pas reçu ces vaccins ou autres produits, c’est donc bien l’uranium qui cause ces cancers et ces malformations monstrueuses, il faut donc interdire sur le champ cette arme criminelle.

Ils savaient, et ils n’ont rien dit

Quatre mois avant la guerre du Golfe, l’état-major US diffuse des “Consignes en cas d’accident de transport des munitions à l’uranium appauvri”. Révélatrices:
"Si les emballages sont endommagés, ils doivent être remplacés avant de poursuivre le transport. Un contrôle de contamination radioactive doit être effectué. S’ils sont contaminés, ils doivent être décontaminés selon les méthodes décrites au chapitre 7 …" On notera que ces mesures strictes visent un accident de transport, même pas une explosion! Il y avait donc bien un danger grave?
 Bien sûr, et ils le savaient. Le 22 juillet 1990, le lieutenant-colonel Ziehm avait écrit dans un rapport officiel: "Il y a eu et il continue d’y avoir une inquiétude quant à l’impact de l’uranium appauvri sur l’environnement. Si personne ne doute de l’efficacité de l’UA sur le champ de bataille, ces munitions peuvent devenir politiquement inacceptables et susceptibles d’être, en conséquence, retirées de l’arsenal." ( p 202). C’est donc en parfaite connaissance et pour éviter la protestation que les dirigeants militaires US ont organisé la conspiration du silence!
Pourquoi a-t-on licencié Asaf Durakovic?
Cette conspiration dure toujours. Asaf Durakovic, professeur de médecine nucléaire, chargé d’examiner les soldats du 144e New Jersey Transport Corps, en avait envoyé 24 à la clinique des Vétérans de Boston. Les recherches avançaient, mettant en évidence des traces de radioactivité. Brutalement, ses dossiers et échantillons sont détruits et, en février 97, son poste est supprimé pour “raisons budgétaires”. A la même époque, les docteurs Burroughs et Slingerlan perdent aussi leur poste pour avoir demandé du matériel de recherche performant. Durakovic écrira à Clinton pour "dénoncer le complot dont sont victimes les Vétérans". Sans réponse.
 Mais en Europe aussi, la protestation s’organise. A Manchester, en janvier 99, un ensemble d’ONG lancent une grande campagne d’information. Et certains pays finissent par s’inquiéter. En août, le ministre finlandais de l’Environnement organise une équipe d’enquête au Kosovo. L’Otan refuse de collaborer, mais l’équipe persévère et conclut que les risques sont sérieux. En novembre, le gouvernement italien approuve une note très critique. En Belgique, une série d’articles de Frédéric Loore fait grand bruit dans le Journal du Samedi. Le ministre Flahaut tente d’abord de minimiser, puis doit reculer…
 Messieurs nos ministres, que saviez-vous exactement?
Monsieur le ministre Flahaut, quand dites-vous la vérité? En octobre 99 et en février 2000, vous affirmez "ne pas être au courant de risques de santé pour les militaires après des opérations dans les Balkans".   Mais le 7 janvier 2001, vous reconnaissez que l’Otan avait averti des risques et que vous avez fait discrètement effectuer des tests d’urine à leur retour! Selon le syndicaliste Marc De Ceulaer, les avertissements de l’Otan n’ont pas été portés à la connaissance du public car il s’en serait suivi un mouvement contre l’envoi de soldats en Bosnie. Tout ceci exige un débat pour établir la vérité.
 De deux choses l’une. Ou bien les ministres belges successifs n’ont pas été informés par les Etats-Unis des dangers de l’uranium appauvri. Et alors la Belgique ne devrait-elle pas quitter une organisation qui méprise à ce point la vie humaine, y compris de ses propres soldats? Ou bien ils étaient au courant, et dans ce cas ne devraient-ils pas être jugés pour complicité?

Paris et Londres produisent aussi des armes à l’uranium. Et ont aussi étouffé la vérité.

En 1993, la petite anglaise Kimberley Office meurt dès sa naissance de malformations congénitales graves. Son père, soldat dans le Golfe, et sa mère, soutenus par les associations de vétérans, forceront finalement l’armée britannique à entamer une étude pilote en 1998. Résultat officiel: rien.
 Mais les autorités britanniques sont-elles fiables? Elles produisent ce type d’armement depuis 1979, ont mis très longtemps à le reconnaître et ont d’abord nié publiquement avoir utilisé des armes à l’uranium pendant la guerre du Golfe.
 Les autorités françaises ont longtemps nié produire ou utiliser ce type d’armes. Illégales et condamnées par les Nations-Unies dans une (discrète) résolution de 1996. Mais, en 1994, la revue française pacifiste Damoclès relève la présence de déchets lors d’essais d’armes. En 1998, elle révèle que Giat Industries produit 60.000 obus 120 mm à l’uranium.
 En 1998, Christine Abdelkrim-Delanne, l’auteur du livre récent La Sale Guerre propre, interroge les autorités françaises. A-t-on analysé la terre et l’eau dans les zones d’essai des armes à l’uranium? Le personnel était-il protégé? Comment peut-on être certain qu’aucun soldat français n’a été contaminé? Sans réponse.
 En août 2000, le ministre de la Défense, Alain Richard, affirme encore solennellement qu’aucun soldat français n’a été victime de munitions à l’uranium dans le Golfe. Mais les soldats s’organisent et leur association Avigolfe riposte en publiant une longue liste de soldats malades ou décédés: Frédéric Bissérieix, décédé de tumeurs à 32 ans; A.N., mort à 43 ans de cancer généralisé; M.C. décédé de lymphome, M.L., mort en 1992 d’un cancer du poumon… L’enquête démontre que les autorités militaires ont, comme leurs collègues US, refusé de répondre aux angoisses des soldats, de leur transmettre des dossiers médicaux complets ou de mener des recherches sérieuses. Le livre d’Abdelkrim épingle les nombreux mensonges et dissimulations du ministre Richard et de l’armée.
 A présent, certaines puissances européennes tentent de rejeter la faute sur les seuls Etats-Unis et d’en profiter pour promouvoir leur projet d’Euro-armée. Mais ils ont tous fait pareil.

L’embargo empêche de secourir la population irakienne

 La tactique actuelle des médias pro-Otan est de limiter le débat aux seuls soldats occidentaux. Mais en Irak, des millions de gens sont menacés car une infime particule d’uranium inhalée suffit à détraquer le système immunitaire. Et l’embargo empêche de les secourir. Un crime après tant d’autres…
 "Nous ramènerons l’Irak à l’âge de la pierre", avait annoncé le président US George Bush. On a bombardé, en violation des conventions internationales, de multiples sites civils: centrales électriques, stations de pompage et d’épuration de l’eau, sites pétroliers, silos de céréales, entrepôts alimentaires… Une cruauté délibérée. En octobre 90, l’Institut de Washington pour le Moyen-Orient recommandait de frapper "les stations de pompage et d’épuration des eaux de Bagdad sans lesquelles la population urbaine devra passer plusieurs heures par jour à chercher l’eau et à la purifier".
 On a aussi bombardé, sans se préoccuper des effets sur l’environnement et la santé, les sites militaires de production d’agents chimiques et biologiques, les centrales nucléaires, les usines d’armements, les complexes pétrochimiques et leurs produits hautement toxiques.
 La liste des crimes commis est longue: usage des effroyables (et illégales) “bombes à fragmentation” dont chacune sème des centaines d’éclats meurtriers pour les populations, milliers de soldats irakiens ensevelis vivants dans le désert, massacre de milliers de soldats en fuite sur “l’autoroute de la mort”… Quinze ans après le Vietnam, l’armée US ne fut nullement plus “civilisée”.
 Mais le pire crime est certainement l’embargo. Aujourd’hui encore, tout un peuple est privé des moyens de se nourrir et de se soigner. Ce scandale doit cesser immédiatement! C’est dans la population irakienne que l’uranium a fait le plus de victimes. Toute une génération est en péril. Il faut d’urgence les secourir en finançant les recherches et les soins nécessaires.
 Christine Abdelkrim a visité l’Irak, cet "enfer empli de cris et de souffrances" et son livre a le mérite de montrer que l’uranium appauvri et l’embargo contre l’Irak sont deux aspects d’une même guerre barbare. Menée par des gens pour qui la vie humaine ne compte pas.

Pour faire justice

L’ancien ministre Ramsey Clark (voir page 2) a bien défini ce qu’il faut exiger:
"Les armes à l’uranium appauvri représentent une menace inacceptable pour la vie, une violation de la loi internationale et une atteinte à la dignité humaine. Pour sauvegarder le futur de l’humanité, nous exigeons l’interdiction internationale inconditionnelle de la recherche, la production, les essais, les transport, la détention et l’utilisation de l’uranium appauvri à des fins militaires.
 De plus, nous demandons que toutes ces armes et tous les déchets radioactifs soient immédiatement isolés et stockés, que l’uranium appauvri soit classé “substance radioactive à risque”, que les zones contaminées soient nettoyées et que ceux qui ont été exposés puissent recevoir des soins médicaux appropriés."

Et qui doit payer? Le principe “pollueur = payeur” n’est que simple justice.
L’Otan, les firmes privées qui ont produit ces armements et les divers gouvernements qui ont produit, utilisé ou laissé utiliser ces armes doivent prélever sur leurs budgets militaires de quoi financer:
1. Des recherches scientifiques approfondies et indépendantes sur les effets de l’uranium appauvri et sur les symptômes constatés.
2. Une campagne d’information des populations d’Irak, de Bosnie et de Yougoslavie, ainsi que des soldats et autres personnels menacés.
3. Des mesures d’isolement immédiat des zones contaminées, ainsi que d’évacuation et de traitement des déchets et équipements suspects.
4. Des soins de qualité et des dédommagements pour toutes les victimes: populations locales ou soldats occidentaux.
5. Une commission d’enquête indépendante, constituée de personnalités scientifiques non liées à l’industrie de l’armement ou à l’armée, afin de rechercher les responsables des actes commis dans ces guerres et ceux qui ont étouffé l’information sur les dangers de l’uranium.
De plus, le gouvernement belge arrêtera immédiatement, unilatéralement et inconditionnellement toute politique d’embargo qui aggrave la situation de la population irakienne et empêche de la secourir."


Pourquoi l’Otan ne respecte aucune vie…

A nouveau, l’Otan est prise en flagrant délit. Mais a-t-elle menti seulement sur ses armes perverses et sa “guerre propre”? Ou aussi sur ses véritables objectifs?
Souvenez-vous: les guerres contre l’Irak, en Bosnie ou contre la Yougoslavie étaient toutes “humanitaires”. Mais aujourd’hui, le peuple irakien reste soumis à un embargo impitoyable, rien n’est réglé en Bosnie transformée en protectorat occidental corrompu et invivable tandis qu’en Yougoslavie deux milles civils ont été tués par les bombardements de l’Otan. Quant au Kosovo, il est ethniquement “nettoyé” par ses protégés de l’UCK.
 Et transformé en poubelle nucléaire. En octobre dernier, j’invitais à Bruxelles Snezana Pavlovic, experte nucléaire de Belgrade, pour un grand débat sur l’uranium. Cette Serbe nous a dit: "Notre gouvernement avait prévu l’usage d’armes à l’uranium et organisé la protection des soldats visés. En Serbie, les sites contaminés sont délimités et interdits d’accès. Mais pas au Kosovo occupé où  l’Otan nie tout danger. En fait, ce sont surtout les civils albanais, particulièrement les enfants, qui seront victimes de l’uranium."
 De la santé des Albanais, l’Otan se foutait complètement. Et aujourd’hui, le nombre de cancers augmente fortement au Kosovo. Ainsi qu’en Bosnie. Par exemple, à Bratunac où se sont réfugiés les civils serbes issus de zones bombardées par l’Otan en 95 dans les faubourgs de Sarajevo, le cimetière est trop petit car, tous les trois jours, quelqu’un meurt de cancer.
"Faisons la guerre pour vendre" (Bill Clinton)
Ce terrifiant constat d’échec amène à se demander: quels étaient leurs véritables objectifs? En vérité, la guerre de l’Otan n’avait rien d’humanitaire, avouait Bill Clinton (en privé) à la veille de la guerre: "Si nous voulons des relations économiques solides, nous permettant de vendre dans le monde entier, il faut que l’Europe soit la clé. C’est de cela qu’il s’agit avec toute cette chose (sic) du Kosovo."
 Un de ses proches confirmait: "Pour que la globalisation marche, l’Amérique ne doit pas craindre d’agir comme la superpuissance omnipotente qu’elle est. La main invisible du marché ne fonctionnera jamais sans un poing caché. McDonalds ne peut être prospère sans McDonnell Douglas, le constructeur de l’avion F-15. ."    C’était donc bien une guerre pour les superprofits des multinationales, pour briser la résistance d’un pays prétendant garder une économie indépendante. Pour ceux qui veulent dominer et exploiter le monde, une vie humaine ne vaut rien. Ni celle des soldats américains ou européens, ni celle des Irakiens, des Serbes et des Albanais, tous délibérément contaminés.
 Voilà pourquoi Javier Solana, responsable hier de l’Otan et aujourd’hui de la future Euro-armée, a organisé cet été le “secret défense” sur tous les projets et analyses militaires européens. Provoquant la colère, mais en vain, d’une majorité des europarlementaires privés de tout contrôle. Est-ce aux peuples de juger s’il faut faire la guerre ou est-ce aux multinationales et aux généraux? Monsieur Solana a répondu. Aujourd’hui, nous payons les conséquences. Il faut arrêter l’Otan!

Pour (s’) informer:

* Christine Abdelkrim-Delanne, auteur de ce livre La sale guerre propre, sera au Forum Festival Irak ce samedi 20 janvier, Passage 44, Bruxelles. 16 heures débat, 19 h spectacle (voir page XXXX).

* Débat à Tournai le 9 février, organisé par la coalition pour l’interdiction des armes à l’uranium appauvri.  A19h30, à l\'EPI, 21rue Duquesnoy. Avec Frédéric Loore, journaliste à l’origine des révélations en Belgique et auteur de La
guerre invisible
(sortie début février) et Pierre Pierart, professeur honoraire de l\'Université de Mons. Info: didier.caluwaerts@wol.be
La Coalition peut vous fournir documentation et conférenciers partout en Belgique. Elle prépare un grand débat avec des soldats victimes et des experts à l’Université de Bruxelles le 15 février. Info: 02/ 511.63.10. ou csotan@caramail.com


* Trois livres de Michel Collon exposent les médiamensonges du Golfe: Attention, médias!, ceux de la Bosnie: Poker menteur et ceux du Kosovo: Monopoly – L’Otan à la conquête du monde. Editions EPO. Diffusés notamment à la Librairie Internationale 02 / 513.69.07.

* Le film Sous les Bombes de l’Otan – 15 Belges en Yougoslavie ( 43 minutes) révèle également des médiamensonges importants et le vrai visage de la guerre dite “propre”. 350 FB. Diffusion: Ligue Anti-Impérialiste, 68 rue de la caserne, 1000 Bruxelles, 02 / 504.01.40.

* La vidéo Otan, Kosovo et médias présente le seul débat contradictoire accepté par Jamie Shea, porte-parole de l’Otan. Avec Olivier Corten, professeur à l’ULB et Michel Collon, journaliste. Révélateur. Même diffuseur.

* Le film La Guerre radioactive secrète du Français Martin Meissonnier sera projeté au week-end Globalisation et santé, organisé par Médecine pour le Tiers Monde  le 4 février à 14h, à Dworp (Brabant). Avec Pierre Piérart (Médecins pour la Prévention de la Guerre nucléaire) et le docteur Colette Moelaert (Médecine pour le Tiers Monde) Infos et inscriptions: tél. 02/504.01.47, fax 02/513.98.31, g3w@ngonet.be. Ce film, excellent pour introduire un débat, est disponible à l’asbl Projet Vidéo: 02 / 504.01.56.

* Sites utiles: www.lai-aib.org/balkans
WWW.STOPNATO.ORG.UK
www.emperors-clothes.com

* Solidaire prépare plusieurs dossiers et témoignages exclusifs sur l’uranium. Michel Collon prépare un film documentaire sur la situation générale au Kosovo. Infos et réactions: michel.collon@skynet.be