reportage photo réalisé par Arnaud Leblanc (IMC-Belgium)
27
janvier à Landquart (50 km de Davos)
Le
27 janvier dernier, une manifestation contre le World Economic Forum était annoncée.
Les autorités officielles ont rapidemment interdit le rassemblement et transformé
les montagnes suisses en un bunker policier et militaire. Face à cela, les manifestants
ont décidé d'aller le plus près possible de Davos...
Le
World Economic Forum regroupe les décideurs du monde économique
actuel, des politiques et des représentants des grandes institutions
économiques comme le F.M.I. ou la Banque Mondiale. Loin de tout aspect
officiel, de nombreuses décisions naissent à l'intérieur
de ses murs. Les lobbyes financiers viennent parler de l'avenir du monde, on
y prend le maximum de contacts et bien loin de la masse citoyenne, on redirige
le monde à sa guise et principalement selon son propre profit personnel
et sa propre vision du monde. Malheureusement les choix entrepris par cette
bureaucratie touchent bien plus de personnes que celles qui ont le privilège
d'être acceptées entre ses murs.
De
nombreux citoyens clament chaque année leur opposition à cette
nouvelle nomenklatura. Le nouvel ordre mondial doit passer par eux. La démocratie
si durement gagnée dans certains pays ne doit pas s'effacer pour une
poignée de bureaucrates au pouvoir. Au contraire même, l'uniformisation
des Droits devient leur leidmotif, sur chaque continent, chaque humain doit
avoir les même chances de vivre dignement.
Ici,
les manifestants, partis en train, bloqués à la gare de Landquart qui par la
suite bloqueront cette même gare, arrêteront leur train pour rejoindre le blocage
de l'autoroute et finiront leur journée dans les rues de Zurich entre gaz lacrymogènes,
autopompes et barages de fortune.
La
journée du 27 janvier a commencé dans la pluie. Une légère
bruine accompagnait les manifestants de la Rote Fabrik à la gare de Zurich.
Une légère tension était perceptible au sein de l'assemblée,
la police suisse n'avait, jusque-là, pas lésiné sur la
répression et chacun s'attendait à voir l'accès à
la gare protégé par la police. Ainsi, le rendez-vous était
donné à plusieurs centaines de mètres de celle-là.
Dés
le point de rendez-vous rejoint, le groupe "Rythms Of Resistance"
accompagné par plusieurs volontaires musicaux a commencé à
battre le rythme et la marche vers la gare pouvait commencer...
Avec
grand plaisir, les prévisions concernant la répression matinale
se sont révèlées fausses et les manifestants ont investi
la gare et le train qui les amènera à Landquart. Le tout en musique
et sous le regard étonné des usagers des transports férovières
ce jour-là.
Le
voyage fut marqué encore et toujours par la musique. Le train lui-même
devenait un instrument de musique, porte-bagages, rampes, appuies de fenêtres...
Tout servait la cause musicale. Des autochtones se sont même joints à
la fête quand il s'est agit de chanter un "Let My People Go"
à la sauce anti-Davos.
A
l'approche du moment fatidique du changement de train, la tension a recommencé
à monter. Combien de policiers seront à Landquart pour accueillir
le convoi ? Vont-ils charger le train ? ... Que va-t-il se passer ?
Landquart. (petite gare
au millieu des montagnes suisses)
... A quelques villages montagnards
de chez Heidi...
L'arrivée
des manifestants par le train Zurich/Landquart était, évidemment
prévue à l'avance par les forces de l'ordre. Les rails étaient
jallonnés de barbelés sur plusieurs centaines de mètres
en aval de la gare. Cette dernière était entourée par le
même dispositif. Il avait été
question le soir précédent de cet état de guerre dans lequel
la police avait jeté la gare. Les manifestants s'attendaient donc à
êtres confrontés à une forte présence policière
qui les obligeraient à se souder en un seul bloc compact et solidaire.
Heureusement,
ces prévisions se sont révèlées trop péssimistes
et la police s'est faite discrète pour l'arrivée de la masse protestataire
et la musique a pu recommencer...
Ainsi,
les manifestants ont investit la gare et rejoint le train qui s'apprêtait
à partir pour Davos.
Après
plusieurs minutes à l'intérieur du train à destination
de Davos, les activistes ont du se rendre à l'évidence. Le train
ne partira pas... Les manifestants s'attendaient évidemment à
ce blocage. Il fut alors temps de bloquer cette gare "Si nous ne partons
pas, personne ne partira...". Cette action était un maillon des
actions qui se menaient un peu partout aux alentours de Lanquart. En effet,
l'autoroute était aussi en proie à l'action d'autres activistes.
Pendant
près de deux heures et demi, la gare a été bloquée
pacifiquement. Le blocage d'un tel lieu est très simple, il suffit de
maintenir les portes des différents trains ouvertes. Cette seule action
suffit a paralyser le lieu et elle ne nécessite que très peu de
personnes qui devront fournir un effort plus que raisonnable.
Pendant
ce temps, le gros de la foule se divertit comme il peut... Musique, Dance, Chants...
Le soleil lui-même est revenu et la fête continue.
La
police s'est montrée discrète mais bien présente, un barrage
s'est ainsi formé pour dissuader les manifestants de joindre Davos à
pied... 50 km de montagne plus loin.
Avant le départ
des manifestants, une poignée d'entre-eux investissent une prairie juste
à côté des voies. Ils souhaitaient agir alors que d'autres
activistes sur l'autoroutes entamaient son blocage. En effet, elle était
situé à moins de cinquante mètres des rails. Mais les barbelés,
les balles en caoutchoucs et le départ imminent du train les a dissuadé
de continuer l'action.
Ce que la police
n'avait pas l'air d'avoir prévu est pourtant arrivé. Après
avoir tiré avec des balles en caoutchouc et ainsi repoussé les
manifestants, ils n'ont pas pu s'empêcher de tirer avec des grenades lacrymogènes.
L'autoroute était à moins de trois mètres derrière
le barage et une grenades a évidemment terminé sa course au millieu
de l'embouteillage. Les gaz n'avaient pas beaucoup d'effet sur les manifestant
qui se mouvaient avec aisance dans la large prairie mais les "civils"
gazés et bloqués dans leur voiture ont surement peu apprécié...
L'action de
blocage de la gare terminée, les manifestants ont décidé
de repartir vers Zurich.
Après
quelques centaines de mètres, ils arrêtent le train pour rejoindre
leurs amis qui entamment une action de blocage de l'autoroute. Cette dernière
causera des dizaines de kilomètres de bouchons dans les deux sens.
Peu de manifestants
avait pu rejoindre et se manifester à Davos (entre 300 et 400 personnes).
Mais ce n'est pas pour cela que la journée fut vaine, les activistes
avait bloqué les voies ferrovières et autoroutières de
la vallée. Malgré le dispositif policier et militaire déployé
contre eux, ils avaient montré que la répression n'empêche
pas de donner de la voix...
Après
encore une heure passée à faire la fête entre autoroute
et rails, les manifestants acceptent de reprendre le train vers Zurich. La fête
fait place à la fatigue. Les machines reprennent leur élan et
chacun se repose pour être prêt à affronter la soirée
et la street party, initialement prévue dans le centre administratif
de Zurich.
Les cars eux-aussi
s'apprêtent à partir et rejoindre Zurich et les petit camarades
venus en train.
Mais
les naveteurs n'hésitent pas à arrêter le train de temps
en temps pour saluer les cars d'activistes quand ils passent à la hauteur
d'un pont (ici, des italiens en principe...). Le train a beau rouler a une bonne
allure, les embouteillages visibles ne seront plus visibles que près
de trente à quarante minutes plus tard...
Zurich.
Les
autorités n'ont évidemment pas permis aux manifestants de descendre
dans la grande gare de zurich. Ils ont donc entammé une marche vers le
centre à partir d'une gare en périphérie.
Malheureusement
des échaufourées ont commencé entre les forces de l'ordre
et les manifestants à hauteurs de l'avenue "des banques". Les
policiers étaient bien décidés à ne pas laisser
s'approcher un quelquonque activiste. Balles en caoutchouc, lacrymogènes
et auto-pompes... Tout est bon pour écarter la foule.
Les forces
de l'ordre iront même jusqu'à poursuivre le cortège dans
les rues de Zurich. Enragé dans les quartiers financiers, ils se montreront
beaucoup plus docile quand la manifestation rejoindra le centre touristique
et culturel de la ville. En effet, la protection virulente de la police se limitait
aux quartiers où les magazins de luxe et les banques occupaient le plus
de place. Ces quartiers, un samedi soir, étaient vides et la police se
souciait bien peu de la protection des "civils" qui passaient du bon
temps dans les quartier touristiques où les manifestants furent repoussés...
Cette course
poursuite dans les rues de Zurich fut éprouvante pour tous et chacun
était heureux de rejoindre le camion sono des italiens et la masse de
manifestants qui venaient d'arriver avec les cars. La musique aurait pu commencer
et la fête prendre place mais la police ne le voyait pas ainsi, et la
musique et son camion fût même une des cibles principales des tirs
de gaz.
Malgré
cela, certains manifestants (difficilement perturbable par les charges de la
police) ont choisis la détente musicale pendant que d'autres montaient
des barricades.
Mais la tension
ne faisait que monter et le camion sono lui-même dut renoncer à
la street party. Le mot d'ordre à 20h30 était clair, chacun rejoint
la Rote Fabrik pour terminer la fête dans un lieu plus tranquille...
Photos et commentaires : Arnaud Leblanc pour Indymedia-Belgium ( arnaudleblanc@swing.be
)