Les archives de la CIA l\'affirment
L\'impérialisme américain a bien financé le massacre de 500 000 communistes indonésien en 1965
Récemment \" déclassés \", des documents top secrets des services secrets américains confirment ce dont le monde entier se doutait depuis 37 ans. L\'Oncle Sam a financé des milices fascistes \'Kap-Gestapu\' en Indonésie pour permettre un des plus grand massacre de l\'après-guerre.
Mao Ning, Solidaire
Les imprimeries officielles des Etats-Unis (G.P.O.) viennent de publier plus de huit cent pages de commentaires jusqu\'ici tenus confidentiels, à propos des événements survenus voici 37 années. Les G.P.O. n\'ont pas attendu le consentement de la C.I.A. pour entamer la parution des archives. Loin d\'être un hasard, la date de parution coïncide curieusement avec l\'élection d\'une nouvelle présidente, Megawati Soekarnopoutri, dans ce même pays insulaire du sud-est asiatique. Celle-ci n\'est autre que la file aînée du président Soekarno, héros de l\'indépendance nationale et renversé par un sanglant coup d\'Etat en 1965 par le futur dictateur Suharto.
Soekarno, anti-impérialiste
Soekarno symbolise encore aujourd\'hui pour les 200 millions d\'Indonésiens l\'idéal de la souveraineté nationale, du progrès et de la lutte contre l\'impérialisme. Une fois l\'indépendance acquise en 1954, Soekarno convoquait dans la ville de Bandung (1) une conférence rassemblant tous les leadeurs du tiers monde en lutte : le nationaliste Egyptien Nasser, le Ghanéen Nkrumah, Nerhu l\'Indien et surtout Zhou En-Lai, premier ministre de la Chine socialiste, sont montés au créneau pour dénoncer les agissements du colonialisme mourant et de l\'impérialisme (2). Cette rencontre, qui n\'a laissé malheureusement qu\'un souvenir, mais elle a tout de même constitué un formidable souffle pour les peuples encore colonisés. A l\'époque, le parti communiste indonésien (PKI) occupait les avant-plans de la politique nationale, et nombreux étaient les observateurs qui prédisaient un basculement de l\'archipel dans le camp du socialisme. Cela suffisait à l\'impérialisme américain pour commanditer un bain de sang d\'où sortirait une dictature militaire, obéissant au doigt et à l\'œil aux diktats de Washington.
1965-1966 : Années sanglantes
La fin du mois de septembre 1965 voyait le début du putsch militaire. Soekarno écarté, le pays a immédiatement sombré dans l\'horreur. Dans un télégramme du 15 avril 1966, l\'ambassadeur américain en poste à Jakarta, Marshall Green commentait : \" Nous ne savons pas si le chiffre exact [de communistes tués] est plus près de 100 000 ou de 1 million, mais nous pensons qu\'il est plus sage de pencher vers le chiffre le plus bas, surtout en face de la presse. \" (3) N\'empêche, un télégramme de février 1966 parlait de 80 000 morts dans la seule île de Bali, précisant : \" Et c\'est loin d\'être terminé. \" Selon des témoins rencontrés à l\'époque, \" si un chef de village était membre du PKI , toute la population, homme, femmes et enfants, était passée au fil de l\'épée. \" Ce scénario s\'est répété à travers l\'archipel, ce qui n\'a pas empêché un diplomate en poste à Djakarta , Richard Cabot Howland , de proposer un bilan de - seulement - 105 000 morts, sans doute pour ne pas trop nuire à l\'image de l\'allié qu\'était devenu le général Suharto, président élu par son homologue de la Maison Blanche, Lindon Jonhson.
Suite et pas fin
L\'essentiel du matériel militaire, ainsi que la formation au maniement des armes a été fourni par l\'ambassade américaine. \" Cela est pour confirmer que nous avons fourni à Malik 50 millions de roupies qu\'il avait réclamées pour financer le mouvement Kap-Gestapu \", écrivait le 2 décembre 1965 William P.Bundy , sous-secrétaire d\'Etat pour l\'Extrême-Orient. Adam Malik, chef de file de la \'Gestapu\' locale, s\'était jusque là taillé une solide réputation de trotskiste (4). Son portrait ornera par la suite pendant des décennies le Ministère des Affaires Etrangères de Suharto. En 1976, il récidive avec ses compagnons d\'armes dans l\'île de Timor, où il semblerait que 250 000 des 650 000 habitants aient été passés par les armes. De leur côté, les conseillers américains, satisfait de leurs collaborateurs locaux, concluaient leur dossier sur ces termes : \" Les chances de détection ou de révélations ultérieures de notre soutien dans cette affaire sont aussi minimes qu\'elles peuvent l\'être dans une opération clandestine. \" Soulignons aussi au passage que la liste des cadres du PKI avait été communiquée aux escadrons de la mort, ce qui met en avant une certaine négligence de la part des communistes.
Quelques leçons fondamentales
L\'échec de la révolution indonésienne et le drame qui a suivi, obligent les communistes du monde entier à se prémunir contre les infiltrations des services de renseignement au service de la bourgeoisie et des fascistes.(5) C\'est aussi valable pour les militants du Parti du Travail de Belgique, ainsi que pour tous les mouvements progressistes, notamment ceux qui militent contre la mondialisation capitaliste.
Chacun doit avoir en tête, l\'idée que s\'opposer au système capitaliste, ne fût ce qu\'en paroles, fait de lui une cible potentielle des la Sûreté de l\'Etat, ou du KOSMOS, le service de renseignement du Vlaams Blok. Le Parti du Travail possède en la matière une solide expérience, et l\'expérience indonésienne ainsi que celles d\'autres organisations nous ont appris certaines précautions élémentaires. Il ne s\'agit point de psychose, de paranoïa ou de sectarisme comme aiment le répéter nos adversaires. C\'est une question de bon sens.
Ainsi, en 1987, nous avons pu découvrir dans une salle où nous nous apprétions à tenir une réunion importante, un micro dissimulé par la Sûreté de l\'Etat qui a reconnu sa responsabilité. Le second semestre 2001 s\'annonce mouvementé en Belgique. Nous appelons tous les militants progressites, tiers mondistes qui participreont aux rassemblements de protestation contre l\'Union Européenne à suivre quelques conseils de prudence.
Notes :
1. Du 18 au 24 avril 1955
2. Encyclopédie du Monde Actuel, La Stratégie, pp. 58-59
3. Les citations suivantes sont rapportées par le quotidien Le Monde, 30/07/2001
4. Le Monde, 30/07/2001
5. Des exemples avaient déjà précédé celui du PKI. En 1927, les colonialistes occidentaux armaient les nationalistes en Chine contre le Parti Communiste Chinois. Les rafles et les exécutions qui s\'en suivirent ont fait jusqu\'en 1930 près de 600 000 victimes. A chaque fois que les organisations ne sont pas tout à fait conscientes de ce qui leur arrive, elles riquent l\'annihilation complète. (cf. Récits de l\'Armée Rouge en Chine, Ed. Langues Etrangères de Beijing, 1961)