Présidence belge: Un Conseil extraordinaire pour tenter d\'éviter les violences en marge des sommets Une Union européenne des polices contre... qui ? Göteborg saccagée : les Quinze n\'ont pas oublié. Ni la Belgique, qui accueillera bientôt tous les sommets. Embryon d\'union policière contre les « fauteurs de troubles ». MARTINE DUBUISSON Pour éviter tout « remake » de Göteborg, un Conseil extraordinaire Justice - Affaires intérieures (« JAI ») a été convoqué en ce début de présidence belge, vendredi. Objectif : approfondir la coopération européenne en matière de sécurité, lors des sommets européens et événements du même type. Résultats ? Les Belges se disent satisfaits - même si l\'idée d\'un fichier européen des fauteurs de troubles n\'a pas été retenue. Car il a fallu naviguer entre deux cultures : celle des Scandinaves, Hollandais ou Français, peu enclins à la manière forte; et celle de l\'Allemagne, du Royaume-Uni ou de la Belgique, plus habitués à une prévention forte. Les Quinze se sont dès lors accordés sur une coopération laissant une certaine latitude aux Etats : l\'échange d\'informations se fera au départ des fichiers nationaux; et chaque pays décidera s\'il ferme sa frontière à certains hooligans (l\'accord de Schengen prévoyant des exceptions à l\'absence de frontières). Dans un souci d\'équilibre entre liberté et sécurité, et en évitant l\'amalgame entre casseurs et opposants démocratiques, le Conseil a tenu à rappeler son attachement à la liberté d\'expression et de rassemblement, pour autant que la sécurité des citoyens et de leurs biens ne soit pas menacée. Voilà pourquoi, a expliqué le ministre belge de l\'Intérieur, Antoine Duquesne, assisté de son collègue de la Justice, Marc Verwilghen, les Quinze prônent le dialogue avec les ONG, les partenaires sociaux, la société civile, et les organisateurs de manifestations. Mais puisque l\'on ne pourra jamais empêcher toute violence, les Quinze veulent renforcer la coordination en matière de répression. Pas en inventant de nouveaux instruments (même si les compétences d\'Europol pourraient être élargies), mais en structurant et systématisant ceux qui existent : Convention Schengen; coopération dans le domaine de l\'ordre et de la sécurité publics; task force des responsables des services de police de l\'Union. Le Conseil, s\'il rappelle que le pays hôte est responsable du maintien de l\'ordre, a donc défini cinq mesures opérationnelles. Un : la coopération policière. Il s\'agit d\'activer, dans chaque Etat, un point de contact permanent pour le recueil et l\'échange d\'informations; de recourir aux officiers de liaison des Etats et aux spotters accompagnant les fauteurs de troubles potentiels; de former les policiers au maintien de l\'ordre international. Deux : l\'échange d\'informations (avant, pendant et après les événements), voire de rapports d\'incidents et d\'évaluation. Trois : le franchissement des frontières. C\'est l\'éloignement et le refoulement des casseurs; l\'organisation de patrouilles de police mixtes; mais aussi l\'utilisation de toutes les possibilités légales nationales permettant d\'empêcher les personnes notoirement connues pour des faits troublant l\'ordre public de se rendre dans le pays hôte, s\'il y a de sérieuses raisons de croire qu\'elles s\'y livreraient à des actes violents. Quatre : la coopération judiciaire. Comme la préparation de commissions rogatoires types; le recours à des points contacts joignables 24 heures sur 24; ou le jugement sans délai anormal d\'auteurs de troubles violents. Cinq : les mesures d\'organisation - dont le dialogue avec les organisateurs d\'événements. Mais, au fond, c\'est quoi un fauteur de troubles ? La définition de l\'ordre public reste très générale dans nos pays, reconnaît Duquesne. Il faut une série d\'indices graves et de comportements violents. Le passé fournit des informations utiles. Mais il faut du bon sens dans l\'appréciation. On n\'en saura pas plus...· © Rossel et Cie SA, Le Soir en ligne, Bruxelles, 2001 ------------------------------------------------------- vendredi 13 juillet 2001, 19h57 L\'UE veut s\'en prendre aux casseurs sans limiter les libertés BRUXELLES, 13 juil (AFP) - Les ministres européens de l\'Intérieur se sont engagés vendredi, un mois après le sommet de Goeteborg et l\'approche de celui de Gênes, à intensifier la coopération policière pour lutter contre les casseurs qui menacent désormais toutes les grandes réunions internationales. Mais les mesures spectaculaires souhaitées par l\'Allemagne, comme la création d\'un fichier européen des fauteurs de troubles ou la généralisation des interdictions de sortie de territoire à l\'approche d\'événements sensibles, ont été repoussées au nom de la défense des libertés fondamentales. Cette réunion extraordinaire des ministres de l\'Intérieur avait été décidée à l\'issue du sommet européen de Goeteborg, les 15 et 16 juin en Suède, durant lequel quelques centaines de casseurs venus en particulier d\'Allemagne et du Danemark avaient dévasté le centre-ville. Trois d\'entre eux avaient été blessés par la police suédoise, qui avait tiré à balles réelles. Les Européens avaient alors pris conscience qu\'ils n\'étaient plus à l\'abri des débordements qui, depuis la réunion de Seattle fin 1999, accompagnent de manière quasi-systématique les manifestations anti-mondialisation. Le ministre français de l\'Intérieur Daniel Vaillant a résumé le dilemme qui se posait aux responsables européens: \"il faut arriver à renforcer la sécurité de ce type de réunion tout en respectant le droit de circulation et la liberté de manifester\". Soulignant que ces droits étaient garantis par sa Constitution, la France s\'est opposée à une ligne plus dure défendue par l\'Allemagne et, dans une moindre mesure, la Grande-Bretagne ou l\'Italie. Le Danemark, les Pays-Bas, la Finlande et la Grèce ont également souligné les problèmes que leur poserait la mise en oeuvre de mesures trop répressives. Les ministres ont finalement choisi de puiser dans l\'arsenal prévu par les accords de Schengen sur la libre-circulation des personnes, en affichant leur volonté d\'en activer certaines dispositions. Selon M. Vaillant, les Européens pourront dans ce cadre rétablir de manière coordonnée les contrôles aux frontières dans plusieurs pays à l\'approche d\'un événement sensible. L\'Italie a d\'ailleurs annoncé vendredi qu\'elle rétablissait ces contrôles à l\'occasion du sommet du G8 à Gênes la semaine prochaine. Cela devrait rendre plus difficile la venue des casseurs qui ne risqueraient plus d\'être seulement contrôlés à leur arrivée dans l\'Etat organisateur mais aussi dans les pays de transit. Les ministres sont également convenus de \"rendre possible des patrouilles préventives communes\", avec l\'aide de physionomistes chargés d\'aider la police d\'un autre pays à repérer les casseurs potentiels. Outre un échange accru d\'informations, des \"officiers de liaison\" pourraient être dépêchés par les Etats membres dans un pays accueillant un événement à risque. \"Aucun d\'entre nous n\'a l\'intention de transformer son pays ou l\'Union européenne en une forteresse assiégée. Ce serait faire trop d\'honneur à une minorité\", a assuré à l\'issue de la rencontre le ministre belge de l\'Intérieur Antoine Duquesne, dont le pays assure la présidence tournante de l\'UE. Dans leur communiqué final, les ministres ont d\'ailleurs pris soin de souligner en préambule que les citoyens européens peuvent \"exprimer librement leurs opinions et se rassembler de manière pacifique\". Mais le commissaire européen chargé de la Justice et des Affaires intérieures, Antonio Vitorino, a souhaité que les organisations anti-mondialisation manifestant en marge des sommets soient plus actives dans la lutte anti-casseurs. \"C\'est aussi dans l\'intérêt de ceux qui manifestent de coopérer étroitement avec les autorités politiques pour isoler les casseurs\", a-t-il estimé.