Indict (" inculpation ", en anglais), association à but non lucratif fondée en 1996, rassemble des personnalités et des organisations dont l'objectif est l'inculpation des dirigeants irakiens devant un tribunal international, pour crimes de guerre, crimes contre l'humanité et génocide. Indict nous présente les enjeux de la campagne engagée depuis 1987. Depuis 1979, le régime baasiste en Irak a violé massivement, et viole encore, les droits de l'Homme et les droits des peuples, en Irak et dans la région. La liste des crimes commis par Saddam Hussein et les responsables irakiens est terrible : invasions de l'Iran et du Koweït ; utilisation d'armes chimiques contre les citoyens kurdes en Irak, et contre l'Iran ; génocide des kurdes en Irak ; répression de dizaines de milliers de citoyens irakiens ; destruction des régions habitées par les Arabes des Marais ; assassinats politiques en Irak et dans le monde ; enlèvement et détention de citoyens du Koweït ; violations répétées des résolutions du Conseil de Sécurité. Des documents détaillent ces actes criminels qui font fi à la fois de tout sentiment humain et des lois internationales. Traduire en justice les dirigeants irakiens responsables de ces crimes graves et répétés représenterait une avancée capitale dans la mise en place d'une juridiction internationale. Le Tribunal permettrait, en outre, dix ans après la guerre, de souligner la distinction, en droit, entre le peuple irakien et ses dirigeants actuels. Le fait de traduire aujourd'hui les dirigeants irakiens devant un tribunal ajouterait du poids aux Tribunaux Internationaux qui travaillent aux dossiers des criminels en ex-Yougoslavie et au Rwanda. Ceux qui veulent poursuivre en justice les responsables du régime de Pol Pot au Cambodge et d'autres criminels de guerre dans le monde y gagneraient en crédibilité. Le projet d'instaurer une Cour Pénale Internationale, soutenu par l'Assemblée Générale des Nations Unies, s'en trouverait avancé. Instituer un tribunal pour inculper Saddam Hussein et le juger est un objectif difficile à atteindre. La résolution 687 établissant le cessez-le-feu de la guerre du Golfe, signée par le Conseil de sécurité le 3 avril 1991, n'incluait pas de clause exigeant la reddition des dirigeants irakiens et leur jugement. Cette clause, incluse dans une première version de la Résolution 687 mais abandonnée pour des raisons de " real politique ", aurait pu permettre d'instituer en droit la distinction nette entre gouvernants et gouvernés en Irak. Dix ans après la guerre, cette distinction est plus que jamais vitale pour le peuple irakien. Elle existe pourtant dans la résolution 688 du Conseil de Sécurité, exigeant que cesse la répression, menée par le régime, de la population. En droit, le processus légitimant la disparition du régime passe obligatoirement par l'inculpation de Saddam Hussein et de ses complices. La répression du peuple irakien, le danger permanent que représente le régime de Saddam Hussein pour les pays voisins (deux agressions majeures en 1980 et en 1990), et pour la communauté mondiale, le développement et l'utilisation d'armes de destruction massive le justifient amplement. Les personnalités qui ont fondé INDICT, sont conscientes des imperfections émaillant la mise en place progressive d'un système judiciaire international. Néanmoins, elles restent persuadées que leurs efforts pour instituer un Tribunal Pénal International aboutiront, et permettront à l'avenir que des criminels comme Pol Pot et Saddam Hussein ne demeurent pas impunis. Pol Pot n'est plus. Son régime appartient au passé du Cambodge, même si les terribles blessures ouvertes par sa brutalité sont loin d'être refermées. Mais en Irak, la terreur se vit au quotidien. La répression touche tous les Irakiens, y compris les proches de la famille de Saddam Hussein. L'inculpation des dirigeants irakiens reste une tâche difficile, mais la Campagne menée par Indict est un chaînon essentiel entre le Tribunal Pénal International, qui existe déjà pour l'ex-Yougoslavie, et la Cour Pénale Internationale, qui ne sera pas réalité effective avant quelques années. Une conférence sur la constitution d'un tribunal pour juger les dirigeants irakiens a lieu à Paris ce mois-ci, en Avril 2000. Souhaitons que l'urgence de son établissement fasse l'unanimité.