Présence
militaire étasunienne au Guatemala
Depuis la mi-janvier, des militaires étasuniens sont arrivés
dans le département du Péten, dans la nord du pays. Leur présence
est justifiée par leur prétendue participation à des oeuvres sociales.
Avec plusieurs jours de retard, les députés du Congrès guatémaltèque
ont légalisé cette présence de troupes étrangères dans le cadre
du «Plan Nouveaux Horizons», plan qui devrait bénéficier
à la population du Péten, puisque les militaires étasuniens son
supposés participer à la construction de cinq écoles, de 5 ponts,
de puits (d'eau) et de routes. C'est du moins la version officielle.
L'agence
AP parlait ce vendredi 16 février du « Plan Nouveaux Horizons»
comme un excercice MILITAIRE conjoint des forces armées étasuniennes
et guatémaltèques.
Objectif
mMilitaire, objectif social? Les deux? En tout cas, cette présence
nord-américaine dans un pays où fut commis un génocide contre les
indigènes mayas avec des armes étasuniennes, israéliennes et taiwanaises,
ne peut qu'inquiéter l'observateur attentif et les organisations
de la société civile, surtout dans un contexte de remilitarisation
du pays contre la «délinquance et l'insécurité».
Cette présence de troupes sur le territoire national est contraire
aux accords de paix signés il y a quatre ans et qui mettaient fin
à un conflit sanglant de 36 ans. Dans les accords signés entre le
gouvernement guatémaltèque et la guérilla (URNG), il est stipulé
que des contingents militaires étrangers ne pourront être présents
que dans des cas exceptionnels et que leur nombre ne pourra être
supérieur à 90 personnes. Selon Púlsar,
les militaires nordaméricains seraient déjà au moins plus de 250.
Ainsi,
s'il ne s'agit pas d'un travail social, on est en droit de se poser
la question du pourquoi de cette présence militaire.
-
La société civile, les mouvements sociaux guatémaltèques ne se
sont pas encore tout à fait relevés du conflit armé. On ne se
trouve pas dans une situation comparable à l'Equateur où les indigènes
(beaucoup moins nombreux qu'au Guatemala) sont devenus une véritable
force politique.
Quant à une reprise de la lutte armée par des groupes de paysans,
elle serait justifiée économiquement et socialement mais, aux
dernières nouvelles, ce ne serait pas le cas.
- Le
guerre civile qui ensanglanta le pays a laissé énormément de gens,
des deux camps, n'ayant connu que la violence. Ce constat et la
pauvreté dans laquelle vit la majorité de la population expliquent
en partie le développement tous azimuts de la criminalité organisée.
Et particulièrement dans le Petén qui est une région de
forêts tropicales et humides où, malgré le rythme affolant
de déforestation, les organisations criminelles peuvent plus facilement
agir.
Le narcotrafic, en plein boom dans cette région est peut-être
une explication.
-
L'immigration illégale, aussi, peut servir d'hypothèse. Le Mexique
appliquant la politique de fermetur de son puissant voisin du
nord. Des milliers de migrants d'Amérique centrale, du Sud et
d'Asie traversent chaque année le Guatemala pour tenter leur chance
au Nord. Et l'on sait que les dirigeants étasuniens et mexicains
considèrent cette question comme une priorité à règler.
- Une
autre hypothèse pourrait être éventuellement un aggravement des
relations du gouvernment guatémaltèque avec les autorités de Belize,
ancienne colonie britanique et paradis fiscal réputé.
Le Guatemala n'a jamais accepté la non-incorporation du Belize
au sein de son territoire national.
-
Une autre hypothèse serait celle d'écraser toute véléité de révolte
chez les paysans du Petén face aux sacages de la biodiversité
par les entreprises pétrolières et autres multinationales.
- Et
puis, finalement, la présence des troupes militaires étasuniennes
pourrait être justifiée aussi par la résistance zapatiste au Chiapas.
Le Petén et le Chiapas (la Selva Lacandona) forment un
même territoire. Ils sont juste l'un à côté de l'autre. Y aurait-il
une stratégie d'encerclement de l'Armée Zapatiste de Libération
Nationale pour qu'ils ne puissent se replier au Guatemala dans
le cas d'une offensive de l'armée mexicaine? Offensive que je
crois peu probable et qui contredirait tous les discours pacificateurs
du nouveau président mexicain Vicente Fox?Il
est difficile exactement de savoir mais il faut observer cela
de près…
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Il
y a donc de nombreuses raisons qui pourraient justifier la présence
étasunienne. Mais quelle qu'elle soit, c'est inquiétant
car l'Empire, via des manoeuvres militaires, via la dollarisation,
...) étend de plus en plus ses tentacules (l'Argentine, l'Equateur,
la Colombie, Porto Rico,...) sur une Amérique latine qui, elle,
développe de plus en plus ses capacités de résistance
au néolibéralisme. A nous d'être vigilant pour
empêcher l'American Way of life de détruire encore davantage
ce que l'Oncle Sama considère comme étant son territoire. |