Le coup d'envoi fut donné vendredi soir aux Tanneries, avec des projections de films militants du collectif "cine insurgente", revenant en images et commentaires sur la révolte populaire argentine ayant éclaté il y a un an, et se renouvelant depuis par des actions et manifestations, mais aussi par la mise en place et l'expérimentation d'alternatives au système telles que les assemblées populaires, les magasins gratuits et autres lieux de réunion et de vie occupés. Olivier, du Comité Chiapas de Lausanne, introduisit ensuite le débat, partant de ses observations lors de son voyage en Argentine, et de sa connaissance des "piqueteros" et autres mouvements de chômeurs, dont les pratiques autogestionnaires sont partie intégrante de la rébellion populaire. La discussion fut l'occasion d'évoquer "l'exemplarité de la situation argentine" en terme de crise du capitalisme, de mener un début de réflexion sur les moyens d'action ici et là bas, les causes de l'extraordinaire adhésion de la population à la contestation, et d'envisager quelques possibilités d'actions de soutien plus locales. Dans le même temps, le collectif PRINT (http://print.squat.net) se fit le relais d'une large initiative de contre-information radiophonique portée par le réseau Indymedia, en diffusant toute la soirée les sons d'une radio réalisée depuis les rues argentines, à l'occasion de ces 3 jours de solidarité, et permettant de goûter l'ambiance sonore de manifestations, actions et autres assemblées populaires en direct, le tout entrecoupé de musiques et analyses par des "médiactivistes" présent-e-s sur le terrain. Ce fut aussi l'occasion de présenter le réseau de médias indépendants Indymedia, dont une brève description se trouve ici: http://print.squat.net/docs/let-indymedia_cest_quoi.txt La soirée se termina par une boum latino-disco-tekno, sur fond d'images diverses et variées. Le lendemain, samedi, c'est une bonne soixantaine de personnes qui a répondu à l'appel, place du Bareuzai, pour soutenir le peuple argentin. Peu après 17h, un cortège se mit donc en marche au son de nombreuses casseroles, comme l'ont fait quantité d'argentins dans les moments les plus vifs de la contestation du pouvoir économique et politique. Une banderole "politiciens, capitalistes, qu'ils s'en aillent tous/toutes!" en tête (traduction du célèbre "que se vayan todos", véritable mot d'ordre de la révolte là bas), la manifestation a remonté la rue de la Liberté, bondée en ces moments de consommation frénétique, pour pénétrer dans une agence France Télécom, et l'occuper bruyamment quelques minutes. Pourquoi France Télécom? Parce qu'il s'agit de l'une de ces compagnies implantées en Argentine, qui a fait pression sur le gouvernement pour que celui-ci aille plus avant dans le processus de déréglementation dicté par le FMI, et hausse le cout des services (eau, électricité, communications), pour augmenter leurs profits. Une manière, pour nous autres dijonnais-es, de montrer que c'est aussi localement que nous pouvons agir solidairement de ceux et celles qui, là bas, critiquent et tentent d'arrêter la dictature capitaliste. La manifestation s'en est ensuite retournée à la place du Bareuzai, sur laquelle fut déployée une zone de gratuité, pour faire écho une fois de plus aux moyens de lutte pour le moins originaux et concrêts que les argentin-e-s pratiquent depuis un an désormais. Vêtements, mais aussi livres, brochures, chaussures et autres usensiles furent disposés sur la place grâce à quelques structures agrémentées de panneaux prônant la pratique active, ici et maintenant, de la gratuité ("ici, tout à voler", "zone de gratuité", "rien à payer", etc.). L'idée était également de faire un pied de nez au "marché de noël", non loin de là, constituant un hymne supplémentaire à la consommation outrancière, en cette période ou les traditions viennent au secours des appels frénétiques du capitalisme. Interloqués au départ, nombre de gens se sont ensuite servis, visiblement touchés par l'initiative, curieux de nos motivations et idées. Ce fut aussi l'occasion d'informer sur la zone de gratuite mise en place à l'espace autogéré des Tanneries au cours des mois derniers. Une expérience à renouveller, en affirmant, encore et toujours, la nécessité de dépasser les rapports marchands auxquels nous contraint en permanence cette société! -- un participant Ci-dessous, le tract distribué pendant la manifestation: Que se vayan todos ! Une journée mondiale d'action anticapitaliste et solidaire avec les révoltes populaires d'argentine. En Trente ans l'argentine sera passée de la dictature militaire à la dictature des marchés. Fidèles aux dogmes libéraux du Fond Montaire International et de la Banque Mondiale, l'Etat argentin a ouvert ses marchés, industrialisé, privatisé, coupé les budgets de protection sociale, d'éducation et de santé, accéléré le pillage et l'exportation en occident de ses ressources naturelles. Mais quand les investisseurs se sont retirés pour s'attaquer à d'autres contrées, le rêve capitaliste s'est transformé en cauchemar et le pays s'est vu comme bien d'autres entrainé dans une crise financière sans précédent. Le niveau de vie des classes moyennes a considérablement baissé au cours des dix dernières années. L'interdiction de retrait banquaire fut la cerise qui fit déborder le vase et les amena à rejoindre les luttes des plus démuniEs. La révolte a explosé le 20 décembre 2001 quand plus d'un million de personnes prirent les rues afin de taper sur leurs poëles et casseroles et firent tomber le gouvernement. Une rebellion populaire retentissante s'est ensuite répandue à travers le pays sous le slogan « que se vayan todos ! » (ndt: « qu'ils/elles s'en aillent tous/toutes » comprenez toute la classe politique). Un mouvement continu s'est développé dans ce qui est devenu un laboratoire vivant des luttes: assemblées populaires, bloquages de routes par des comités de chômeureuses, marché de troc, émeutes et pillages de supermarchés, reprise d'usines par les ouvrierEs, autonomisation de villages et quartiers... Un espace où l'autogestion et la démocratie directe sont quotidiennement réinventées par l'échange solidaire, l'éducation populaire, la partage des ressources. Un nombre croissant de gens y apprennent à décider pour eux-même ensemble de leur vie sans s'en plus s'en remettre aux institutions politiques. Au cours de ces dernières années, les manifestations anticapitalistes se sont multipliées à travers le monde. Aujourd'hui les révoltéEs argentinEs concrétisent l'espoir que d'autres sociétés puissent naître des décombres de l'Etat et du marché. Ce mouvement reste malgré tout fragile et le gouvernement essaie tant bien que mal de sauvegarder sa "légitimité" et les intérêts des investisseurs étrangers en réprimant les manifestations (arrestations massives, escadrons de la mort...), en barricadant ses banques régulièrement ravagées et en appelant à de nouvelles élections. Le 20 décembre de cette année, un appel a été lancé, en argentine et partout à travers le monde, pour une journée mondiale d'action visant à démontrer que celles et ceux qui créent des alternatives aux dictatures ne sont pas seuleEs et briser le silence absolu des médias occidentaux sur ces révoltes (des fois que cela donnerait de mauvaises idées... hein?). De nouveau depuis quelques semaines et alors que le peuple argentin a le couteau sous la gorge, le Fond Monétaire International et diverses banques, grandes entreprises et chaînes de supermarché françaises et européennes qui ont pris le contrôle de l'économie argentine (dont France Telecom, EDF, le Credit Agricole, Carrefour...) ont relancé une offensive pour imposer une hausse draconienne (+ de 30%) du prix des ressources de base (eau, nourriture, électricité..) et imposer de nouvelles coupes dans les budgets sociaux. A l'heure des fêtes de fin d'année, grande foire annuelle de la consommation, la solidarité internationale peut s'exprimer pour nous en dénonçant le rôle barbare joué par les institutions internationales et entreprises françaises et européenne à l'étranger. Il s'agit de démasquer, derrière les campagnes publicitaires prestigieuses, les envers misérables de la richesse occidentale et de la surabondance de produits. Cette solidarité nous semble d'autant plus logique qu'ici aussi on privatise, on adapte les gens à l'économie et l'on criminalise celles et ceux qui ont le malheur d'être pauvres et/ou insatisfaites d'une vie aliénée et dont le nombre ne cesse de croître. Reste à briser nos télés-supermarchés et à commencer à construire collectivement nos révoltes. Qu'ils/elles s'en aillent tous/tes... ici et là-bas ! Pour des infos, textes, brochures: Collectif avantipepol@ - c/o espace autogéré des tanneries 17 bvd de chicago - 21000 Dijon - tanneries@squat.net Pour plus d'info INDEPENDANTES sur l'argentine en français, anglais, espagnol: www.argentina.indymedia.org A vous de jouer aujourd'hui! Rejoignez la parade des casseroles de la résistance pour un jeu de piste à la recherche des nouveaux bourreaux du peuple argentin. Puis réalisons ensemble une grande zone de gratuité pour commencer la construction d'un autre monde en développant des alternatives au rapports marchands. Et le reste de l'année aussi...