De Berne à l’Antarctique, un seul «Non à la guerre!»

Des millions de citoyens descendront samedi dans la rue pour s’opposer aux visées de George Bush.

 

Dans 2 articles, le Courrier, parle du mouvement pour la paix et des actions du conseil municipal de Genève contre la guerre.

 

http://www.lecourrier.ch/essai.htm?/Selection/sel2003_123.htm

 

Plus de 300 villes du monde entier, dont de nombreuses cités d’Amérique du Nord, s’apprêtent à dire un «non» retentissant à la guerre de l’administration Bush contre l’Irak. La Suisse participera à cette première manifestation pacifiste globale avec un seul cortège. Mais il s’annonce massif!

BENITO PEREZ

Le souffle de Florence tourne à la tempête. La proposition du Forum social européen, en novembre dernier, de faire du 15 février une Journée continentale contre la guerre connaît un retentissement phénoménal. Au fur et à mesure que l’intervention militaire étasunienne contre l’Irak se précise, des centaines de villes du monde entier ont rallié leurs sœurs européennes et s’apprêtent à manifester ce samedi. «Ce sera une journée historique», prédit Pierre Vanek, de la Coalition genevoise contre la guerre. Au dire du militant de solidaritéS, jamais une mobilisation coordonnée au niveau international n’a pris une telle ampleur. Raison de plus, expliquait hier le collectif pacifiste devant la presse, de participer à ce mouvement global en se rendant, samedi, à Berne, pour la manif nationale.
Un petit tour des cinq continents confirme ces propos optimistes. Sur le site de la coalition étasunienne United for Peace1 (UfP), on recense pas moins de 357 cortèges prévus dans autant de villes! Et ce, bien que le Vieux Continent ait plutôt axé sur des défilés nationaux – dans les capitales – à l’instar des Suisses.
A en croire la liste diffusée par UfP, les mobilisations devraient être particulièrement nombreuses aux Amériques et en Asie. Sans toutefois bouder l’Océanie et l’Afrique. Et même l’Antarctique, où la station de McMurdo devrait connaître sa première contestation de rue de l’histoire...
«Au soir du 15 février, on comptera ceux qui ont dit non à la guerre en millions de personnes», prophétise Pierre Vanek. Tim Clennon, pacifiste étasunien de Genève, renchérit: «Aux Etats-Unis comme en Suisse, toutes les couches de la population se sentent concernées. Profs, ouvriers, étudiants, pères de famille, comme moi, iront exprimer leur désapprobation.»
Surtout que «l’opposition politique de certains pays» tend à redonner espoir aux pacifistes, pense Gaétan Morel. «Plus il y aura de monde dans la rue, plus on donnera de poids à l’action politique de ces pays», précise le militant de No War, l’organisation à l’origine du défilé collégien du 31 janvier.

PÉRIL... SÉCURITAIRE
En Europe, beaucoup de regards seront tournés vers la Grande-Bretagne de Tony Blair. Bastion du soutien à George W. Bush, Londres sera également ce week-end le théâtre d’un gigantesque rassemblement pacifiste. Certains, rappelant la marée humaine de septembre dernier, évoquent pour samedi le chiffre d’un million de manifestants!
Une perspective qui ne réjouit pas vraiment les autorités britanniques. Prétextant des «menaces terroristes», blindés et soldats ont fait, ces derniers jours, leur apparition dans la capitale, souligne Pierre Vanek.
Le député y voit une volonté de «contrer la mobilisation». Thèse confirmée par Tim Clennon, qui relève que les autorités ont aussi tenté d’interdire Hyde Park aux manifestants. Le militant étasunien dénonce également les entraves à la manifestation de New York. En effet, la Grande Pomme a décidé de réintroduire des contrôles d’identité à grande échelle. Un dispositif identique à celui instauré après les attentats du 11 septembre 2001. «Cela aura, par exemple, pour conséquence que tous les cars de manifestants arrivant en ville seront fouillés et contrôlés», s’indigne M. Clennon. Qui se demande, ironique, si New York s’est inspiré du dispositif suisse lors du Forum de Davos...
Plus radical encore: le défilé prévu samedi à Budapest a été purement et simplement interdit. Un acte d’allégeance du Gouvernement hongrois envers les Etats-Unis, analyse Paolo Gilardi, du Groupe pour une Suisse sans armée. Mais aussi, souligne Tim Clennon, «la preuve que ceux qui disent que manifester ne sert à rien se trompent. Sinon pourquoi les gouvernements auraient-ils si peur d’être désavoués dans la rue?» Et samedi, le désaveu s’annonce pour le moins massif.

1 http://unitedforpeace.org

 

Le cortège de samedi dans les rues de Berne (13 h 30, Schützenmatte, à côté de la gare) s’annonce plutôt bien, à en croire ses organisateurs.

Partout les organisateurs se disent dépassés par l’engouement populaire. «Jamais je n’avais vu ça», s’enthousiasme Matteo Poretti, pourtant rompu aux mobilisations syndicales. Le Vaudois insiste sur la diversité des inscrits: «La nouveauté, c’est que la plupart des gens qui nous ont appelés ne sont pas des militants. Souvent, ils n’ont plus manifesté depuis des années!» «On sent un frémissement, les gens nous font un très bon accueil», confirme le Chaux-de-Fonnier José Sanchez. En Valais, nul doute que la manifestation de samedi dernier a engendré des vocations. Car malgré deux grands bus complets, Joël Varone estime que la grande majorité des manifestants ne s’est pas encore fait connaître. «Il s’y rendront en train», prévoit-il. Tout comme les Neuchâtelois du bas, qui ont rendez-vous à 12 h 30, à la gare, pour un départ collectif3.
Devant cette mobilisation exceptionnelle, la plupart des collectifs cantonaux appellent désormais à choisir le rail4. Et pour contrer des tarifs souvent prohibitifs, ils invitent les manifestants à se regrouper par dix, afin d’obtenir un tarif de groupe. Contactés, les CFF ont indiqué qu’ils mettraient des wagons supplémentaires pour accueillir les militants. BPz

 

«Aux USA, seul Bush veut vraiment la guerre»

PROPOS RECUEILLIS PAR
GABRIELE FONTANA

Après le coup de tonnerre du 18 janvier, lorsque plus de 300 000 personnes ont défilé contre la guerre aux quatre coins des Etats-Unis, le mouvement pacifiste nord-américain ne pouvait rater son rendez-vous avec son homologue de la «Vielle Europe». Plus de 100 cortèges sont donc agendés samedi, avec New York comme figure de proue.
Personnage historique du pacifisme étasunien, Tom Hayden participera à n’en pas douter à l’un de ces défilés. Journaliste à The Nation, écrivain prolifique, militant infatigable, l’ancien sénateur démocrate en Californie analyse pour nous la montée du mouvement contestataire.

Le Courrier: Comment est né ce mouvement pacifiste aux USA?
Tom Hayden: Le mouvement contre la guerre est issu de la rencontre du mouvement contre la mondialisation néolibérale, qui a fourni la masse des manifestants, et de quelques activistes pacifistes de longue date. Il était encore tout petit il y a quelques mois seulement, à cause de la perception générale selon laquelle l’opinion publique avait changé suite aux attentats terroristes du 11 septembre 2001 et à l’accusation d’antipatriotisme que l’administration Bush collait à tout opposant à sa politique. Mais ce mouvement antiguerre a grandi de façon incroyable, bien plus rapidement que celui contre la guerre du Vietnam. Les médias commencent aussi à le couvrir de façon plus objective.

Qui se mobilise aux Etats-Unis?
– Il y a surtout des étudiants, des artistes, des militants issus des classes moyennes, même parfois modérés, une bonne partie des Eglises, y compris leur hiérarchie. Les syndicats ne sont malheureusement pas très actifs à l’exception du secteur public dans lequel on se bat contre les coupes dans les budgets sociaux. Mais le manque de mobilisation ne signifie pourtant pas que les travailleurs et leurs organisations soient pour la guerre. Même s’ils restent un peu en retrait dans les prises de positions publiques, on compte aussi sur pas mal d’entrepreneurs, de militaires et surtout de journalistes qui ont des doutes. Les «Américains tranquilles» ne sont pas forcément hostiles. Au contraire, il n’y a presque personne, en dehors de la Maison-lanche, qui pousse vraiment à la guerre.

Pourquoi l’argumentation officielle a-t-elle de la peine à passer?
– Quand ils sont en campagne électorale, les politiciens mentent, fabriquent des informations, font appel aux peurs. Mais, ici, il ne s’agit plus de gagner une charge politique mais une guerre. Or eux se comportent de la même façon, comme s’il s’agissait d’une simple campagne électorale.
»Après le 11 septembre, aux Etats-Unis on se disait: si Al-Qaida a frappé le Pentagone à Washington, le Word Trade Center à New York, dans quelques mois ce seront peut-être une arme bactériologique à Los Angeles ou des bombes atomiques dissimulées dans des valises à Chicago. L’administration Bush a attisé cette hystérie par des annonces continuelles de menaces terroristes. Mais, maintenant, les gens commencent à se demander ce que l’Irak a à voir avec Al-Qaida et à se demander si leurs sentiments patriotiques n’auraient pas été exploités. S’il n’y a pas une autre attaque terroriste contre des citoyens américains, je crois que le public va se détacher de Bush. La question est: quand?

Les démocrates ne paraissent pas en mesure de l’aider à changer d’idée...
– Le Parti démocrate rencontre l’écueil d’apparaître comme faible sur le thème de la sécurité. Après le 11 septembre, les démocrates sont devenus des «yesmens» de Bush, étant en accord avec tout ce que le président disait. Et ils n’ont même pas réussi à le faire correctement! Ils ont ensuite bougé, lentement, jusqu’à voter, en majorité, contre la politique irakienne de Bush. Mais ils ne s’affichent pas. Ils attendent que le mouvement pacifiste ait bâti un climat qui rende plus facile pour eux de parler ouvertement ou que Bush fasse une erreur. Ils ne sont donc pas une force qui pousse au changement. Mais le mouvement pacifiste a déjà modifié l’alchimie politique au point que quelques démocrates commencent à se dire qu’ils doivent s’exprimer plus nettement.

George W. Bush n’est-il pas déjà assez populaire pour faire l’économie d’une guerre?
– Après les dernières élections législatives, considérées comme un triomphe pour Bush, on en est toujours à 51% pour les républicains et 49% pour les démocrates. Il a fallu le décès dans un accident d’avion du sénateur progressiste du Minnesota Paul Wellstone pour changer la balance politique et donner aux républicains le contrôle du Sénat.
»Bush n’est pas l’empereur incontesté des Etats-Unis. Il a volé les dernières élections et il n’a pas gagné une autre légitimité depuis. Il y a une vraie crise de légitimité aux Etats-Unis. Bush doit donc s’appuyer à fond sur le patriotisme.

Le président peut-il changer d’avis?
– Bush ne veut savoir qu’une seule chose: est-ce que je vais gagner cette guerre rapidement? Il veut que ce conflit soit derrière lui quand il entamera la campagne pour sa réélection. Il veut cette garantie: on va gagner vite, le peuple de Bagdad va déployer des drapeaux des Etats-Unis et je pourrai conduire une campagne électorale avec ces images de Bagdad et de Kaboul qui démontrent quel grand président j’ai été. Mais les politiques de guerre sont toujours imprévisibles et dangereuses. Ses conseillers le rassurent. Mais les militaires ne sont pas si convaincus.

Quel est l’impact de la résistance internationale à la guerre?
– Le mouvement général contre la guerre est très important. Le comportement de la France et de l’Allemagne au Conseil de sécurité est dû à la pression pacifiste. Même Tony Blair a dû assumer deux visages différents suite à l’opposition qu’il rencontre. Les Etats-Unis peuvent aller bientôt à la guerre sans les Nations Unies. Mais ils savent que, dans ce cas, ils auront un prix élevé à payer. Déjà ils risquent de perdre le soutien de la Russie et de la Chine au Conseil de sécurité. Et c’est le mouvement pacifiste qui a rendu prudent l’ONU: il a donc su compliquer la stratégie guerrière de Bush et Powell. Peut-être pas jusqu’à l’empêcher mais au moins au point de rendre bien plus compliquée sa mise en application.

L’Empire américain n’est-il qu’une chimère?
– Même si cette guerre n’a pas lieu ou si elle est gagnée en six mois le problème de l’Empire américain est devant nous. Il a commencé avec la fin de la guerre froide quand des idéologues conservateurs, comme Paul Wolfowitz et Richard Perle, ont théorisé la nécessité pour les Etats-Unis de combler le vide créé par la fin du monde bipolaire. Ils ont d’abord promu l’idée d’un Empire américain fondé sur la suprématie militaire et l’utilisation d’armes nucléaires plus performantes. Ensuite, ils ont profité de l’élection de Bush et du 11 septembre pour créer l’infrastructure économique et militaire de cet Empire. Dans le climat de peur qui s’est installé aux Etats-Unis, leur approche est parue soudainement plus raisonnable et l’invasion de l’Irak était leur priorité depuis une décennie. Maintenant, le pendule revient en arrière: l’opinion publique commence à douter.

 

 

 

 

«Genève, ville de paix, contre la guerre», crie le Conseil municipal
VILLE DE GENÈVE • La plupart des élus ont réitéré leur opposition au conflit qui se prépare en Irak. Seuls les libéraux se sont abstenus.

 

http://www.lecourrier.ch/essai.htm?/Selection/sel2003_122.htm

 

MARCO GREGORI

«Genève, ville de paix, non à la guerre!» Ce message va prochainement se répandre dans la cité et sera également diffusé sur des panneaux à la place des Nations. Le Conseil municipal a voté, hier soir, une motion dans laquelle il demande au Conseil administratif de témoigner de l’objection profonde des élus face au conflit irakien qui se prépare. Seuls les libéraux se sont abstenus, ce qui leur a valu une volée de bois verts des autres partis.
«Partout dans le monde, des opposants à la guerre crient de plus en plus fort contre le massacre programmé», entame Jacques François, élu de solidaritéS et initiateur de la proposition

… «le vrai scandale serait de se taire». Et, ajoute Guy Jousson, du Parti du travail, «il n’est jamais trop tard pour parler». Et tant pis si, à l’image de la radicale Michèle Ducret, certains craignent que «cette motion n’ait pas un grand retentissement».

 

DANS LE «NEW YORK TIMES»

A vrai dire, ce n’est pas la première fois que la Municipalité prend position contre la guerre. En janvier, le Conseil municipal votait la publication dans la presse étasunienne d’un message similaire. Celui-ci a été publié le 7 février dans le New York Times, ce qui, selon le conseiller administratif Christian Ferrazino, «a eu un certain écho».

 

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Je ne voulais publier que des extraits mais le premier article est trop bon si bien que je l’ai publié presque en entier.

 

Quand au 2ème article, il montre que des municipalités peuvent s’engager de matière active pour aider à construire un monde meilleur. Cette initiative est heureuse et j’espère que d’autres administrations politiques ici et ailleurs s’en inspireront.