COURRIEL D\'INFORMATION ATTAC (n°206) Mardi 30/01/01 Un duplex par satellite a créé les conditions physiques d\'un échange verbal entre les délégués du Forum Social Mondial et quelques personnes présentes à Davos. Quatre personnes du côté suisse, qui à elles seules ont plus de pouvoir que l\'ensemble des participants du Forum Social Mondial, plus encore sans doute, et une dizaine de représentantes et représentants à Porto Alegre se sont faits face durant une heure trente. Faisons dialoguer chaque partie du \"divide\" maintenant que le triomphalisme de l\'année passée au WEF, chute du NASDAQ, fin de la \"nouvelle économie\", n\'est plus de mise dans le Forum et que même là il faut bien que la réalité entre et chasse le trop d\'idéologie aveugle. C\'est avec l\'idée que les médias peuvent servir aussi à mettre en relation qu\'Article Z a organisé un duplex entre Porto Alegre et Davos. Du côté du Forum Social Mondial la réponse a été claire: dialoguons! Il a donc permis à ce que l\'émission puisse avoir lieu et l\'a aidée à se réaliser en lui donnant quelques moyens de le faire depuis Porto Alegre. Pour le WEF: non. Pourtant le jour même, dimanche 28 janvier, recontacté par l\'équipe de production il a dû se réunir de nouveau afin de réévaluer sa position, probablement car la mauvaise presse de la veille et l\'attention même du Financial Times entre autre au Forum Social Mondial, pouvaient donner matière à discussion. Toujours non. L\'argument avancé est que le WEF ne veut pas discuter, s\'il s\'agit de le critiquer, en dehors du WEF. On s\'étonnera sans doute de l\'argument et de l\'attitude des autorités téléguidée par le WEF, la veille. Il y avait là à portée de main et de voix assez d\'opposants pour que le WEF daigne discuter et favoriser l\'expression de la contradiction et de la critique. Sans doute comme on ne peut pas donner du canon et de l\'armée à Porto Alegre, mieux vaut éviter ces \"petites gens là\" surtout quand elles ne se limitent pas à la contradiction mais qu\'elles construisent et se mettent d\'accord sur des propositions d\'alternatives. Grâce à une église protestante le duplex a tout de même pu être organisé dans un endroit un peu à l\'écart du centre de la ville de Davos. L\'équipe de production qui travaillait depuis des semaines à prendre des contacts a réussi à obtenir de quelques participants du WEF leur accord à titre personnel. Les refus en série sont aussi démonstratifs. Le FMI et la Banque mondiale tout d\'abord, l\'OMC ensuite. Pascal Lamy a décliné l\'offre sous le prétexte d\'un conflit de date. Du côté des multinationales Bill Gates, Jean Marie Messier, bien d\'autres ont refusé de participer. Jeffrey Sachs qui avait accepté de prendre part à cette émission d\'une durée de une heure trente, est arrivé au début du duplex à 19H30 et est reparti à 19H45 car il avait rendez-vous à 20H00. La liaison satellite ayant eu du retard... personne en dehors des quelques personnes (beaucoup de journalistes) présents à Davos n\'ont pu entendre son dialogue avec les délégués du FSM qui n\'aurait duré que quelques minutes: juste assez selon lui sans doute pour comprendre et écouter, discuter et échanger... Sans dévoiler le contenu de l\'émission dont vous pourrez voir les retransmissions, sur Arte Vendredi soir en particulier, sur le site internet www.madmundo.tv cette semaine, et ailleurs, je résumerai l\'attitude des uns et des autres présents à Davos. Pour George Soros qui se définit comme spéculateur, ce qu\'il est, les conséquences négatives sont bien réelles mais il n\'a pas l\'air de se sentir concerné, le véritable responsable c\'est en fait la spéculation, pas le spéculateur. Pour Njörd Edlund (porte-parole de ABB multinationale présente dans 100 pays et employant plus de 150 000 personnes) il faut créer les conditions économiques, sociales et environnementales favorables à tous mais il ne sait pas comment... il en sent le besoin et l\'envie sans donner d\'autres éléments que son humanité sans doute réelle et son souci de développement sans doute sincère. Pour John Ruggie (secrétariat général de l\'ONU) il faut établir un dialogue critique avec les multinationales qui prendrait avant tout la forme de la diplomatie feutrée et de la politesse anglo-saxonne (il juge contre productif la colère de cette femme argentine qui accuse nommément les « gens de Davos » et le système de la dette des enfants qui meurent par dizaine de milliers dans le monde chaque jour). Pour Marc Molloch-Brown n\'existe pas de salut en dehors de l\'économie libérale et de son avatar la mondialisation, parce comme elle est ouverte elle crée de la croissance et que la croissance résorbe la pauvreté. L\'UNDP publie des chiffres nous dit-il, ils montrent le besoin de croissance selon lui ; pas un mot comme redistribution dans sa bouche. Ils étaient tous venus sans note, sans papier, sans donnée, sans proposition, ils étaient tous venus pour écouter les doléances de ce peuple dont on leur a dit sans doute qu\'il existait, par curiosité « ce qu\'ils sont violents » aura été leur conclusion une fois le lien satellite terminé. Pas un ne se posera une question où ne proposera d\' aller plus loin.), sans cravate pour M Ruggie car il faut savoir rester simple (mais avec de superbes boutons de manchette invisibles à la caméra), sans autre langue de dialogue que l\'anglais, sans idée mais avec une infinie bonté et une once de paternalisme. On demande à M Soros quel est le volume des échanges sur les marchés financiers et quel est le nombre d\'enfants qui meurent chaque jour. Il ne sait pas... \"sûrement plusieurs milliards pour ce qui concerne les marchés, et plusieurs millions pour les enfants\". M Stedile (MST) à Porto Alegre propose de redonner la terre à ceux qui la travaillent, de permettre l\'accès de la production locale aux marchés locaux bloqués par les transnationales. M Ruggie donne un exemple qui doit édifier le brave paysan en lui disant qu\'il se trouve à Davos, petit village d\'un pays, la Suisse, qui il y a encore cent ans était avant tout rural. Son économie aujourd\'hui est florissante. En ne résistant pas aux forces du marché veut-il sans doute expliquer, il a su faire la transition avec succès. La Suisse a su tirer partie de la mondialisation, pourquoi pas les paysans du Brésil sous-entend-il. Il est vrai que le Brésil n\'est pas encore un paradis fiscal qui protège tous les trafics et permet tous les crimes financiers, oublie M Ruggie. Bernard Cassen demande alors aux quatre présents de faire une pétition de demandant la mise en place de la Taxe Tobin, l\' interdiction des paradis fiscaux, l\'annulation totale et sans condition de la dette des pays du Tiers-monde et de la faire signer à l\'intérieur du WEF. Peine perdue, répond Georges Soros, personne elle ne récoltera aucune signature. L\'anecdote que vous ne verrez pas puisqu\'elle se déroulait dans la salle a été le regard de désarroi, bref, et de panique de MM Ruggie et Molloch-Brown lorsqu\'on a proposé concrètement que l\'ONU s\'engage officiellement a demandé l\'annulation totale de la dette du Tiers Monde sans condition ainsi que la révocation du Global Compact. L\'assistant se lève, plonge entre les deux et échange quelques phrases. On a l\'air satisfait. L\'UNDP répond que l\'ONU n\'est pas engagée là-dedans mais que ce sont les pays, que ceux-ci proposent un allègement à certains s\'ils se conforment à quelques règles: pour lui le bon fonctionnement de l\'éducation et de la santé. Comme l\'avait déclaré Walden Bello au début nous vivons dans deux réalités différentes qui n\'ont rien d\'autre en commun que ce lien satellite aujourd\'hui. Il précise que pour résoudre les problèmes de la planète il suffirait sans doute de mettre dans une fusée toutes les personnes présentes à Davos et de les envoyer dans l\'espace. Laurent Jésover, public attentif à Davos lors du duplex. Rédacteur journal@attac.org Des photos sont en ligne sur le site Internet Imprimer le Courriel d\'information: Format RTF http://attac.org/attacinfo/attacinfo206.zip Format PDF http://attac.org/attacinfo/attacinfo206.pdf