T'as pas tout à fait tort, Wayich, les femmes musulmanes, comme les autres, ont tout à fait le droit de faire ce qu'elles veulent. Sauf que le débat ne se place pas du tout là. Derrière ce qui est évoqué, ce sont les questions de la domination masculine et du retour du religieux dans la vie quotidienne, et au delà, dans la gestion de la chose publique. Et ça, ça concerne tout le monde. On ne s'est pas battuEs pendant des siècles contre les pouvoirs chrétiens-cathos pour une certaine liberté de penser (et d'agir ou d'être) pour voir régresser certains principes "républicains" sous la pressions d'extrémistes musulmans. Cette histoire de voilette est finalement un épiphénomène qui ne montre que la partie émergeante de l'iceberg. Ce que l'on ne voit pas, c'est le courant du "retour à la morale et à la piété" qui allie religieux intégristes de tous bords (ici, des cathos s'entendent à merveille avec des musulmans). Ce courant lobbyie dans les allées du Pouvoir pour essayer de l'influencer. Cela peut aller de l'association musulmane qui démarche un échevin pour essayer de faire supprimer les cours de natation pour les fillettes dans les écoles communales, jusqu'au Pape qui essaye de faire inscire une référence au Dieu chrétien dans le projet de Constitution européenne. Si on observe la vie politique, on remarque que le retour de la droite dans de nombreux pays européens (en particulier en France) s'est accompagné d'une sorte de "retour vers un certain ordre moral" - inscrit par exemple en filigrane de la question de l'insécurité. Cet ordre moral ne se situe pas loin de valeurs religieuses. Et derrière tout cela ce ne sont pas les femmes qui partent gagnantes. Bref dans ce cas-ci, d'une part, Leman, a clairement dérapé dans ses propos; d'autre part, le Mouvement Jeune Musulman qui semble avoir pris les rennes de la protestation, s'inscrit de manière assez exemplative, dans la dynamique d'influence politique évoquée plus haut. Il ne s'agit d'ailleurs ni plus ni moins que d'un parti (fondé notamment par le bien connu JEAN-FRANçOIS BASTIN ABDULLAH ABU ABDULAZIZ, converti en 1972) qui prépare les prochaines élections de 2003. Le site web dont l'adresse est mentionée plus haut est assez instructifs des objectifs du parti MJM. Les extraits suivants invitent à la réflexion : "(...)REINTEGRATION DE L'ISLAM. La réintégration des musulmans dans l'islam implique donc la réintégration préalable de l'islam dans son authentique et originelle expression (qui est aussi bien " politique " que " religieuse "). L'islam, en effet, a été purement et simplement congédié des législations laïques qui sont en vigueur aujourd'hui, peu ou prou, dans la totalité des pays dits islamiques de la planète. Ou bien, ce qui est plus grave encore, il a été supplanté par une caricature d'islam privé de toute signification. Un islam dépourvu de toute défense (djihâd), de toutes lois (châri'a), de tout Etat (dawla) propres à en assurer l'expression véritable et un développement harmonieux ! L'UNE NE VA PAS SANS L'AUTRE. Les deux réintégrations du musulman dans l'islam, et de l'islam dans l'islam, vont donc de pair. On ne peut en aucune manière se contenter d'une seule, au détriment de l'autre ! MJM rejette toutes ces tentatives naïves (mais bien plutôt perverses) qui consistent à enseigner un islam dogmatiquement correct à des musulmans totalement impuissants (quand ils y sont réceptifs) à l'appliquer concrètement dans leur vie pratique. En tout état de cause, les " Jeunes Musulmans " se refusent catégoriquement à prôner, comme cela se fait hélas ! le plus souvent, à la va-vite, et au je-m'en-foutisme généralisé, l'intégration sommaire, génératrice de tant de désillusions et de confusions, d'un musulman éloigné de l'islam, dans un islam lui-même éloigné de ses fondements (djihâd, châri'a, Etat islamique).(...) (...)Les " Jeunes Musulmans " affirment haut et clair leur intention d'introduire l'islam en politique, c'est-à-dire, dans la rue, dans la cité ; ils manifestent formellement leur volonté d'en exiger une représentation officielle, conforme à sa véritable expression." Comme le défend le MJM, il s'agit bien ici de rentrer dans le "jeu" démocratique et politique. Or le projet du MJM n'est sûrement pas celui qui servira le mieux les progressistes. Si l'on veut que l'Esprit tende à l'ouverture, la plus grande vigilance s'impose donc quant à certaines velléités d'évolution politiques. Non pas que des mouvements comme le MJM représentent par eux-mêmes un péril immédiat. Mais il ne faut pas négliger l'influence, qu'elle soit réelle ou symbolique, de l'entrée d'un tel mouvement dans le "jeu", sur le débat politique et, par là, sur l'évolution de la société, jusque dans la quotidienneté.