Commission de l’Intérieur, des Affaires générales et de la Fonction publique Séance du 27.03.2002 Question orale à Monsieur Duquesne, Ministre de l'intérieur concernant le décès de Monsieur Tatchi déposée par Marie-Thérèse Coenen (ECOLO) Monsieur le Ministre Ce samedi, un Kosovar Monsieur Bekim Tatchi, est décédé au centre 127 bis à Steenokkerzeel. Il était depuis le 18 mars au centre et avait signé le 19, une demande de rapatriement. Il était traité par méthadone, et était suivi par un médecin du centre. 1. Une autopsie devait être faite pour établir la cause exacte de ce décès, pour le moins étonnant. Avez-vous les premiers résultats de cet examen ? 2. La presse parle "d'overdose". Cela pose question. Comment est-ce possible dans un centre fermé de mourir d'overdose ? Cela veut-il dire qu'il y a dès lors de la drogue dans le centre 127 bis ? 3. L'enquête judiciaire se poursuit-elle ou sera t-elle classée sans suite si le décès est considéré comme normal ? 4. Vous avez fait savoir que pour vous, le centre n'avait aucune responsabilité dans ce décès. Sur quoi vous basez-vous pour affirmer cela ? Une enquête administrative est en cours. Est-elle déjà clôturée ? Dans quel cas, serait-il possible d'en disposer en commission, de manière à faire toute la lumière ? 5. Pouvez-nous confirmer si oui ou non, Monsieur Tatchi a demandé de l'aide d'un médecin auprès du personnel ? Avez-vous recueilli le témoignage des membres du groupe avec qui il a passé la dernière soirée ? Des membres du personnel qui étaient de garde cette nuit là ? compte-rendu analytique de la Commission Questions jointes de - M. Pieter De Crem au ministre de l'Intérieur sur "le décès d'un demandeur d'asile au centre fermé de Steenokkerzeel" (n° 6836) - Mme Kristien Grauwels au ministre de l'Intérieur sur "le décès d'un homme au centre fermé de Steenokkerzeel" (n° 6850) - M. Karel Van Hoorebeke au ministre de l'Intérieur sur "le décès d'un demandeur d'asile au centre fermé de Steenokkerzeel" (n° 6856) - Mme Marie-Thérèse Coenen au ministre de l'Intérieur sur "le décès de M. Tatchi" (n° 6859) Pieter De Crem (CD&V): Un demandeur d'asile vient de décéder au centre d'accueil 127bis de Steenokkerzeel. Le ministre peut-il nous informer sur les circonstances de ce décès ? S'agissait-il d'un demandeur d'asile débouté ?Quelles mesures le ministre compte-t-il prendre ? Kristien Grauwels (AGALEV-ECOLO): Ce week-end, un homme est décédé au centre fermé de Steenokkerzeel. Une enquête judiciaire et administrative est en cours. Connaît-on déjà les causes du décès ? Est-il exact que cette personne avait introduit une demande d'asile mais qu'elle y avait renoncé rapidement ? Dans l'affirmative, quelle est l'explication ? Cet homme aurait été toxicomane. Qui a établi cela ? Pourquoi, dès lors, a-t-il été placé dans un centre fermé ? Faisait-il l'objet d'un suivi médical ? A-t-il réclamé en vain une aide médicale ? Allait-il être expulsé le 3 avril prochain ? Connaît-on déjà les causes de la mort d'un autre homme, décédé dans le même centre lors d'une tentative d'évasion ? Antoine Duquesne, ministre (en français): Après examen des rapports dont je dispose, je mesure le nombre d'inexactitudes que j'ai lues et entendues, depuis samedi dernier, à propos du décès de ce ressortissant kosovar. Certains ont fait des déclarations contraires à la vérité, allant parfois jusqu'à constituer une véritable désinformation.Le sommet a sans doute été atteint par le président de la Ligue des droits de l'homme, qui a affirmé que le fait qu'une enquête doive avoir lieu était déjà suspect en soi! J'ai même appris, à ma stupéfaction, que j'aurais personnellement bloqué l'adoption de l'arrêté royal réglant les conditions de maintien dans les centres fermés. Les remous créés autour de ce décès étaient un prétexte pour exiger la fermeture des centres fermés et pour arrêter les expulsions. Si des manquements sont constatés, des sanctions seront prises. Si non, le personnel et la direction du centre peuvent compter sur mon soutien. Je n'ai pas l'intention de revenir sur la politique d'éloignement que j'applique actuellement. Quant à l'arrêté royal réglementant les centres fermés, je l'ai fait approuver par le Conseil des ministres du 6 décembre 2000. S'il n'a pas encore été adopté, c'est parce que certains ne veulent plus y voir figurer la possibilité explicite de pouvoir maintenir des mineurs non accompagnés. Il n'est pas question d'accorder un accès automatique des mineurs non accompagnés au territoire. Cela ne ferait que favoriser le développement de filières. Par ailleurs, je plaide pour la mise en place de centres sécurisés. Ceci dit, la possibilité de maintien de mineurs non-accompagnés doit être préservée, ce maintien devant être limité au minimum, le temps de trouver une solution appropriée. Je suis donc disposé à ne plus prévoir expressément le maintien des mineurs non accompagnés dans le nouvel arrêté royal, dans la mesure où les centres sécurisés seront effectivement créés. Cet arrêté royal est prêt, mais n'a pas encore été publié. Ceux qui me le reprochent sont ceux-là mêmes qui l'ont bloqué. Il a été convenu de réunir un groupe de travail inter-cabinets après Pâques pour finaliser ce dossier, de sorte que l'arrêté puisse enfin être publié au Moniteur. Quant aux faits, le premier rapport de mon administration n'indique que des conclusions provisoires que je vais vous livrer. La personne qui a été trouvée morte samedi dernier au centre 127bis était un candidat réfugié kosovar qui y était maintenu depuis le 18 mars, date à laquelle sa demande d'asile a été déclarée irrecevable par l'Office des Étrangers. Il avait renoncé à sa demande d'asile le lendemain de son maintien. Son retour était prévu le 3 avril prochain à destination de Pristina. Il n'a fait part de sa dépendance à l'héroïne que le lendemain de son arrivée en centre fermé. Il était suivi médicalement par le médecin du centre et s'est vu prescrire un traitement de substitution à l'héroïne. La veille de son décès, il a participé à des activités sportives. Jusque tard dans la nuit précédant son décès, il s'est entretenu avec un autre occupant du centre avant d'aller dormir. Un compagnon de chambre l'a encore entendu ronfler durant la nuit. Il a été retrouvé inanimé dans son lit le lendemain à 10h00, une ambulance est arrivée à 10h05. Le SMUR, appelé d'urgence, est arrivé à 10h24 et reparti à 11h07 sans pouvoir le sauver ni déterminer la cause du décès. La direction a alors averti le parquet. Une délégation de parlementaires a également été reçue. Le rapport d'autopsie mentionne que le décès est lié à une cause toxicologique. Un rapport définitif est promis dans quelques semaines. J'attends celui-ci avant de me prononcer sur ce dont nous ne savons pas encore si c'est une overdose. Il arrive que de la drogue soit trouvée au cours des fouilles organisées à l'entrée. De nombreux toxicomanes sont maintenus dans des centres fermés. En cas de besoin, constaté par le médecin, ils sont dirigés vers un centre médical spécialisé. Cette disposition figurait déjà dans le précédent arrêté royal. Je n'ai aucune objection à l'ouverture d'une enquête judiciaire mais j'ignore si cela a été fait. Le rapport de mon administration n'étant que provisoire, je n'envisage pas de le communiquer. L'assistance médicale est organisée différemment selon les centres et ce, pour des raisons historiques. Pour les centres 127 et 127bis, le médecin est rattaché au ministère de la Santé publique. J'attends le feu vert de ma collègue Madga Aelvoet pour généraliser cette solution. Je n'ai pas été informé des résultats éventuels de l'enquête judiciaire relative au décès du ressortissant albanais lors d'une tentative d'évasion. Tout lien avec cet autre décès me paraît pour le moins prématuré. Pieter De Crem (CD&V): En ce qui concerne l'arrêté royal, le ministre a mis le doigt sur un problème épineux. Lorsque nous en saurons davantage, nous pourrons revenir plus en détails sur cette affaire. Karel Van Hoorebeke (VU&ID): Je souhaite attendre les résultats de l'autopsie. Je voudrais néanmoins poser quelques questions d'ordre général à propos de l'accompagnement médical dans les centres fermés. Il est très difficile pour les accompagnateurs du centre d'évaluer la gravité des plaintes médicales des demandeurs d'asile et de déterminer si les douleurs sont simulées ou pas. La direction et le personnel n'ont rien à se reprocher. Nous devons néanmoins évoluer vers un système organisé de soins rapides et adéquats dans les centres d'asile fermés. Je suppose que le ministre nous informera spontanément des résultats des rapports. Antoine Duquesne (en néerlandais): Bien entendu. J'attends les rapports des autorités judiciaires.