Sur internet, les restrictions à la liberté d’expression se précisent, Mutations-Radicales en est une nouvelle fois victime. Début juillet, je m’aperçois que le moteur de recherche Google ne crache plus aucune des pages de notre site, ce que confirment les statistiques de visite. Actuellement, il n’y a plus aucune visite depuis Google.fr ou Google.com, alors que durant les 7 derniers mois (de décembre 2001 à juin 2002), Google assurait environ 55% des visites à Mutations-Radicales ! D’un coup, c’est plus de la moitié de nos visiteurs potentiels qui sont supprimés.
>>> Les détails sur : http://www.mutations-radicales.org/courriers/liberte-expression/google-censure.htm

Pourtant, à l’occasion de l’affaire concernant le Réseau Voltaire qui s’était plaint, à tort semble-t-il, d’une censure de Google, Google avait affirmé qu’il tenait beaucoup à la liberté d’expression. Voici un extrait des réponses faites par Google à cette occasion :

<< Merci de nous avoir fait part de votre réaction au sujet de Réseau Voltaire.

Chez Google, nous croyons fermement à la liberté d'expression et nous n'exerçons pas la moindre censure sur les sites Web explorés. Nous nous sommes efforcés de déterminer la raison pour laquelle le site de Réseau Voltaire n'apparaissait plus dans nos résultats de recherche, ce qui nous a permis de constater que les tentatives d'accès à ce site par notre robot d'exploration avaient été délibérément bloquées.

Nous pensons qu'il s'agit d'une erreur ou d'un accident ; toutefois, nous respectons pleinement la décision des Webmasters qui ne souhaitent pas autoriser Google à accéder à leur contenu.

Notre logiciel automatique d'exploration du Web a essayé d'accéder plusieurs fois au site de Réseau Voltaire, mais cet accès a été systématiquement refusé.

Nous avons signalé ce problème à Réseau Voltaire : s'ils suppriment la commande qui provoque ce blocage, leur site sera visité lors du prochain passage de notre robot et il devrait apparaître à nouveau dans notre index dans quelques semaines.

Encore une fois, merci d'avoir pris le temps de nous écrire à ce sujet et merci de l'intérêt que vous portez à Google.

Cordialement,
L'équipe Google>>

D'autre part, on peut lire ceci sur le site de Google (http://www.google.fr/intl/fr/remove.html) :

"Pour Google, la qualité des résultats de recherche est une priorité essentielle. Par conséquent, Google abandonne l'indexation des pages de votre site seulement sur demande du webmaster responsable de ces pages. Cette règle est nécessaire pour garantir que vos pages ne sont pas supprimées de notre index par erreur (ou selon des critères arbitraires).

Google ayant pour mission de fournir des résultats de recherche exhaustifs et impartiaux, nous n'avons pas l'intention de « censurer » les informations disponibles sur le Web."

Evidemment, nous n'avaons fait aucune demande pour refuser l'indexation de nos pages.

J’ai d’abord envoyé un mail à Google (le 03 juillet 2002), sans obtenir de réponse pour l’instant.

Ensuite, nous avons envoyé une lettre recommandée avec accusé de réception, avec l’espoir d’obtenir une explication.
L’accusé de réception indique que Google a reçu la lettre le 09 juillet. Nous attendons la réponse.
On peut craindre que l’on n’ait jamais de réponse. Généralement, on ne prend pas de gants avec les gens trop contestataires qui ont le mauvais goût de sortir des discours à la mode et d’utiliser la liberté d’expression pour dire des choses dérangeantes. C’est ce que nous avons pu constater avec Indymedia France (qui, c’est "amusant", a dû fermer, car des gens ont trouvé qu’Indymedia était encore trop libertaire !), Lautre.net, et quelques autres.
De plus, nous n'aurons sans doute guère de soutien. Quand c'est le Réseau Voltaire, tous les militants s'inquiètent d'une possible censure ; quand il s'agit d'une communauté contestataire ayant un fondement religieux, tout le monde se réjouit et voudrait aller encore plus loin dans la mise à l'écart.

Il y a 99 % de chance pour que la disparition de www.mutations-radicales.org de l’index Google soit due à une censure volontaire de la part du célèbre et efficace moteur, et pas à une quelconque erreur technique.

Cette censure a pu se dérouler de deux manières :

1. La plus probable : diverses personnes (anonymes ou pas) et associations ont signalé (pour protéger les enfants et la morale publique, bien entendu) que www.mutations-radicales.org comportait des textes non convenables sur la sexualité (et sans doute sur d’autres sujets), et qu’il serait bon pour la réputation de Google que ce site disparaisse du paysage cyberspatial. Il n’y a peut-être même pas eu besoin de menace de procès pour que Google, pourtant si attaché à la liberté d’expression, s’exécute dare dare, et épure son index des pages jugées indésirables par les bien-pensants.

2. La moins probable : Google, par souci de présenter une façade avantageuse, a pris lui-même l’initiative d’expurger de son index les pages trop dérangeantes au regard des canons actuels (qui sont de plus en plus serrés). Pas la peine de voir si les opinions exprimées sont illégales ou pas, ce n’est pas la question. L’opinion commune juge que des idées ne devraient pas avoir le droit de s’exprimer, et fait le ménage même si la justice n’a rien à redire.

Mais si vous êtes contestataires, vous avez le droit de vous exprimer voyons, sur la lune, sous les océans, en plein désert ou au bord d’une autoroute, là où personne ne peut vous entendre. Voilà la conception moderne de la liberté d’expression. Les niaiseries, le commerce et les rabâchages ont accès à tous les médias de masse tandis que les idées utopiques, révolutionnaires, émancipatrices, dérangeantes… ont le droit de s’exprimer au milieu de l’Antarctique. Google, comme toute entreprise commerciale, se contrefout de la liberté d’expression, sauf si ça peut rapporter des dollars. S’il risque des ennuis, des pertes d’image et des procès, il ne va pas s’embarrasser d’un petit site de merde rempli d’insanités.

Soit, nous continuerons donc de hurler dans le désert. On se doutait bien que la relative liberté existant sur internet n’allait pas durer longtemps, et la reprise en main a d’ailleurs été plus rapide que prévue. Les prétextes habituels : terrorisme, pédocriminalité, pornographie, prostitution, piratage…, seront invoqués pour exclure, contrôler, filtrer, judiciariser, labelliser... De manière directe ou indirecte, les contenus dérangeants seront écartés. Il suffira par exemple que les principaux outils de recherche vous excluent pour que vous deveniez introuvable, ou qu’ils donnent plus d’importance au référencement payant, ou qu’ils placent en queue de peloton les sites jugés non-convenables.

Après Voilà.fr, c’est au tour de Google de nous censurer. Qui sera le suivant ? A l’image de ce qui s’est passé récemment, avec la fermeture d'Indymedia France (pourtant si conformiste et dans le vent) à cause d'accusations d'antisémitisme, les censures finiront par toucher tout ce qui sort un tout petit peu du cadre.

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Je m’étais déjà inquiété des limites pouvant être posées à l’accès à l’information sur internet. Seuls des moteurs de recherche non-commerciaux (et excluant les sites à but commercial qui ont, eux, toute la place voulue) pourraient garantir l’accès à tous les sites indépendants. Mais pour ça il faudrait des groupes de gens (avec quelques moyens financiers) vraiment attachés à la défense de toutes les expressions…

Notre groupe est classé secte (de manière abusive et arbitraire) par l'Etat français, quelques milices privées et les R.G. (ce qui nous a déjà valu de nombreuses discriminations). Je sais bien que nous sommes détestés par pas mal de gens, mais la question n'est pas là. On ne demande pas que nos idées soient approuvées, défendues ou comprises, on parle ici de la défense du droit fondamental à la liberté d'expression, sujet qui concerne en principe tous les contestataires. La liberté d'expression ne peut être, surtout à notre époque technologique où elle peut s'exercer sans limitations techniques, une simple "non-interdiction" qui est dans la pratique réservée aux élites et aux conformistes du fait des censures publiques ou privées et des simples mécanismes du marché.

Ce n'est pas les médias dominants qui risquent de s'inquiéter de ce genre de censure, surtout si elle s'exerce contre des parias tels que nous. Les médias habituels (et même certains organismes indépendants) vont même plutôt se réjouir de notre mésaventure, sans se douter que leur tour viendra un jour ou l'autre, s'ils font partie de ceux s'écartent trop de la Doxa.

Comme le disait un spécialiste des nouvelles technologies : avec l’informatique, la censure pourra être beaucoup plus efficace qu’avant.

David Myriam, webmaster

 

PS : dans la droite ligne de ce qui avait été engagé par la gauche (LSQ), la droite au pouvoir en France a encore facilité l'accès des polices à toutes nos informations de communications, voir analyse d'IRIS sur LOPSI : http://www.iris.sgdg.org/documents/lopsi.html