WASHINGTON, 23 fév - Le président américain George W. Bush a plaidé samedi pour une exploitation pétrolière du Refuge national de l'Arctique (Arctic National Wildlife Refuge) en Alaska, un projet qui a suscité de nombreuses critiques d'écologistes et démocrates.
"Nous devons réduire la dépendance de l'Amérique face aux fournisseurs étrangers (Golfe) de brut en encourageant une exploitation intérieure propre et sûre", a déclaré le président dans son allocution radiodiffusée hebdomadaire, entièrement consacrée à sa politique énergétique.
"Les nouvelles technologies le permettent et notre sécurité nationale rend (cette exploitation) urgente", a-t-il ajouté. "C'est vital pour la sécurité de notre économie. Nous devons écouter les habitants de l'Alaska, qui soutiennent une exploitation propre et sûre du Refuge national de l'Arctique (ANWAR)", a-t-il poursuivi. "Alors que notre économie continue de croître, la consommation de pétrole des Etats-Unis devrait augmenter d'un tiers pendant les vingt prochaines années. Notre demande d'électricité devrait augmenter de 45%", a affirmé le président, soulignant que sans mesure concrète, la dépendance énergétique américaine allait augmenter...
Ce projet fait partie du plan sur l'énergie de l'administration Bush, déjà adopté par la Chambre des représentants mais qui doit encore être examiné la semaine prochaine par le Sénat, contrôlé par les démocrates.
Mais de nombreux démocrates et les écologistes sont fermement opposés à l'exploitation du Refuge national de l'Arctique, qui s'étend sur 7,7 millions d'hectares de la côte nord de l'Alaska près de la frontière avec le Canada, et abrite quelque 150.000 caribous de Grant. Cette zone, qui contiendrait d'importantes réserves pétrolières et gazières, est protégée contre toute exploitation depuis les années 50.
En outre, les démocrates dénoncent un plan qui ne prévoit pas suffisamment d'économies d'énergie.
Le chef de l'opposition Richard Gephardt avait estimé en août, lors de l'approbation du projet par la Chambre des représentants, que l'administration était à "la solde des groupes d'intérêt".
Les démocrates n'hésiteront sans doute pas à reprendre cette accusation et tenteront de décrédibiliser la politique énergétique du gouvernement en exploitant l'affaire Enron.
Le scandale de la faillite de ce groupe énergétique, qui a ruiné des milliers de petits épargnants en manipulant ses comptes, comporte un important volet politique.
Vendredi, le General accounting office (GAO), sorte de Cour
des comptes dépendant du Congrès, a porté
plainte contre la Maison Blanche pour obtenir notamment les transcriptions
de ses conversations l'année dernière avec Enron,
et tenter de déterminer si ce groupe a influencé
la politique énergétique du gouvernement.
-------> Caribous et pétrole: le reportage en Realvideo 20Kb de Charles Marcoux sur radio-canada
-------> Ian Thomas le cartographe qui fut renvoyé
pour avoir cartographié la répartition des caribous
à
la Réserve Nationale de l'Arctique (Arctic National
Wildlife Refuge).
L'administration Bush, très liée à l'industrie pétrolière, souhaite autoriser le forage de puits dans une réserve naturelle d'Alaska. L'intérêt économique du projet semble faible au regard de son impact écologique.
FINANCIAL TIMES (extraits)
Londres
Pris dans un conflit d'intérêts qui oppose la
protection de l'environnement aux besoins croissants en pétrole,
les Gwich'ins se sont jetés dans une bataille politique
qui s'étend depuis le cercle polaire arctique jusqu'au
Texas, en passant par Washington. Les quelque 7 000 Gwich'ins,
qui vivent dans une quinzaine de villages répartis au nord-est
de l'Alaska et au nord-ouest du Canada, dépendent depuis
des siècles des caribous migrateurs de la vallée
de la rivière Porcupine [l'une des plus grandes hardes
du continent] pour leur nourriture, leurs vêtements et leurs
outils.
Ces animaux mettent bas sur un territoire d'environ 6 000 kilomètres
carrés situé à l'intérieur du cercle
polaire arctique, sur la plaine côtière. Or cette
zone recèlerait dans son sous-sol les plus grandes richesses
en hydrocarbures non exploitées du continent. Afin d'assurer
la sécurité énergétique des Etats-Unis,
l'administration Bush envisage d'ouvrir à l'industrie du
pétrole et du gaz ce territoire, qui se trouve dans l'Arctic
National Wildlife Refuge, une réserve naturelle d'environ
73 000 kilomètres carrés.
L'importance de ce gisement fait l'objet d'une vive polémique.
En 1998, l'US Geological Survey (USGS) a avancé une fourchette
oscillant entre 5,7 et 16 milliards de barils de pétrole
techniquement exploitables [alors que les Etats-Unis consomment
environ 7 milliards de barils par an]. Pour l'organisation écologiste
Alaska Wilderness League, l'étude de l'USGS, qu'elle considère
au mieux comme une pure conjecture, donne plutôt à
penser que le pétrole économiquement exploitable
s'élèverait à 3,2 milliards de barils.
LES INUIT SONT FAVORABLES À L'EXPLOITATION DU PÉTROLE
Les Gwich'ins, eux, soutiennent que l'exploitation du gisement
perturberait gravement, voire détruirait leur mode de vie.
Mais la classe politique et la majorité des habitants de
la région - y compris les Inuit indigènes de Kaktovik
- y sont massivement favorables. Frank Murkowski, sénateur
républicain de l'Alaska et tout-puissant chef de la commission
sénatoriale de l'énergie et des ressources naturelles,
mais aussi Tony Knowles, gouverneur démocrate de l'Etat,
figurent parmi les plus ardents partisans de ce projet [le 26
février, Frank Murkowski a déposé au Sénat,
au nom des républicains, une proposition de loi autorisant
les forages]. Parallèlement, la coalition Arctic Power
mène activement une campagne de lobbying. Appuyée
par les entreprises locale les plus diverses, elle reçoit
également le soutien de l'Alaska Oil & Gas Association,
dont les membres sont, entre autres, Chevron, Marathon Oil, Shell
Western, ExxonMobil et Phillips Alaska. L'exploitation est impossible
tant que le Congrès ne donne pas son feu vert, ce qui pourrait
prendre des mois. "Je sens que, si les partisans de l'exploitation
n'obtiennent pas gain de cause cette année, on n'en entendra
plus jamais parler", prédit le consultant Roger
Herrera, lobbyiste d'Arctic Power. Si l'on en croit les compagnies
pétrolières, avec les techniques modernes la production
se ferait dans des installations qui ne laisseraient qu'une faible
"empreinte" sur la fragile toundra.
De l'autre côté de la frontière, le Canada,
qui a classé le caribou parmi les espèces protégées,
s'oppose à tout forage dans la réserve naturelle,
à l'instar des autorités du Territoire-du-Yukon
et des Territoires-du-Nord-Ouest, ainsi que de diverses organisations
écologistes. Les adversaires américains de l'exploitation
du gisement, tels que la National Audubon Society, ont exhorté
Bush à perpétuer une prétendue tradition
républicaine de protection de l'environnement qui remonte
au début du XXe siècle.
Ainsi, c'est le président républicain Dwight D.
Eisenhower qui a créé la réserve naturelle
nationale de l'Arctique dans les années 50. Plus tard,
Richard Nixon a refusé de céder à la pression
des pétroliers, qui réclamaient l'autorisation de
forer. La réserve a été agrandie en 1980
sous la présidence du démocrate Jimmy Carter, même
si, en vertu d'un compromis élaboré à l'époque
au Sénat, la plaine côtière ne bénéficie
pas d'une protection définitive. [Le 27 février,
à la Chambre des représentants, un groupe réunissant
des républicains et des démocrates a déposé
une proposition de loi pour renforcer le statut de la réserve
afin d'interdire les forages.]
Ken Warn
Le destin de l'Artic National Wildlife Refuge (ANWR) est le destin de la Nation Gwich'in. Si le ANWR est sacrifié pour compenser les importants besoins en consommation énergétique des Etats Unis, les Gwich'in ne seront plus en mesure de continuer leur mode de vie ancestral et de le passer aux générations futures comme ils le faisaient depuis des temps immémoriaux.
La subsitance des Gwich'in, peuple du caribou, dépend de ces rennes d'Amérique du Nord. La région du troupeau des Caribous Porc-épic est l'une des plus importante. C'est un énorme champ de quelques 130 000 caribous qui entreprennent de vastes migrations annuelles. Les champs de pâturage d'été sont un endroit sacré pour les Gwich'in. Il est évident que n'importe quelle exploitation pétrolière dérangera de façon dramatique la migration des troupeaux de caribous. Lorsqu'ils disparaitront, la culture et les modes de vie du peuple Gwich'in seront aussi menacés.
Par un vote de 240 contre 189, qui eut lieu tôt dans la matinée du 2 août après plus de 14 heures de débat, le parlement a approuvé un large et vaste projet de loi concernant l'énergie que les Démocrates ont qualifié de pur et simple paiement aux industries pétrolières, gazifières et minières.
Suivant le passage du projet de loi sur l'énergie à la Chambre des Députés qui ouvrirait l'Artic National Wildlife Refuge à un néfaste forage pétrolier, le Senateur Joe Lieberman, a renouvelé son invitation à faire obstruction à toutes tentatives de faire passer une législation similaire au Sénat. "Je suis réellement déçu par le vote du parlement hier" déclara Liberman. Lieberman signala son support à une politique énergétique équilibrée, compréhensive qui conbinerait les sources d'énergie traditionnelles avec une insistance renouvelée sur les nouvelles technologies. Lieberman attira l'attention sur le fait que des études récentes sur le pétrole en ANWR le qualifiaient "d'économiquement récupérable". De plus il déclara : "cela serait une terrible erreur de ruiner un des derniers refuges de la vie sauvage dans le monde pour quelques mois de pétrole."
Voici les raisons pour lesquelles il faut refuser le développement pétrolier dans l'Artic National Wildlife Refuge:
Pour en savoir plus:
Gwich'in Steering Committee -
http://www.alaska.net/~gwichin
L'exploitation pétrolière en Arctique (Greenpeace)-
http://webplaza.pt.lu/public/greenpea/kampagnen/klima/northstar/exxonvaldezmain.htm