Par son “action progressiste” au language réactionnaire, le groupe Benetton contribue efficacement à la accentuer la confusion ambiante. Un écran de fumée bien épais que recherchent activement tous les publicitaires du monde entier. Les publicitaires sont des gens malins, ils essayent de faire croire que tout le monde sait décoder leurs messages, que nous ne sommes pas dupes. D’après eux, nous sommes habitués au language publicitaire et nous avons développé un esprit critique qui nous permet de choisir en toute connaissance de cause. Ils n’hésitent pas à nous flatter: “vous aimez la pub, vous avez l’esprit ouvert”. Pourtant, des sommes folles sont investies dans la publicité, son but est bien de nous influencer (pour être modéré), de nous manipuler (pour être réaliste), ce qui est assez contradictoire avec le discours que nous tiennent ces mêmes publicitaires. Comment parler encore de libre choix, lorsque des équipes d’experts en “communication” alignent des millions d’heures de travail dans l’art de manipuler les esprits ? Comment parler de libre choix lorsque le seul choix proposé est celui de consommer un produit ou un autre ? Peut-on encore parler de libertés lorsque la plupart des messages qui nous sont matraqués dans l’espace public ne contiennent plus qu’une seule idéologie: la consommation ? Ne devrait-on pas plutôt parler de propagande, et même de propagande totalitaire ? Quelques indices devraient nous aider à y penser. Un de ceux-ci est que les publicitaires n’hésitent pas à traiter les publiphobes de malades. Voici une ancienne annonce de l’ “Institut pour la promotion économique par l’action commerciale”: TITRE: La publicité profite à ceux qui lui font confiance. “La “publiphobie” est une maladie encore trop répandue qui consiste à détester la publicité. Un “publiphobe”, c’est un monsieur qui voit rouge sous l’influence des messages publicitaires. En fait, si le “publiphobe” n’aime pas la publicité, c’est qu’il n’a pas encore compris qu’il pouvait s’en servir. Car la publicité, en vous informant de mieux en mieux, vous permet de mieux acheter…donc de mieux vivre. Aujourd’hui, plus que jamais, ne soyez pas un publiphobe qui s’ignore. N’achetez pas n’importe quoi n’importe comment. Faites confiance à la publicité. Vous avez tout à y gagner.” Comme vous le voyez, la publicité ne supporte pas la contradiction. Chez R.A.P. on assume. On peut nous traiter de malades, pour autant qu’on n’essaye pas de nous “psychiatriser”. Loin d’être progressiste, la campagne Sisley nous ramène loin derrière et au ras des pâquerettes. La “stratégie” Sisley: vendre des culottes et des t-shirts en affichant sur nos trams et bus par centaines la même image suggestive d’une jeune femme entrouvrant les jambes sur sa petite culotte rose bonbon. Un peu plus loin, sur les murs (sur les nouveaux panneaux déroulants) furetivement, apparaît une jeune femme se caressant le sexe, son expression nous invite ardemment à (la) consommer. A travers la pub, ce sont des clichés stéréotypés, souvent incroyablement rétrogrades qui nous sont balancés tous les jours. Exemples: (Hommes) Quelques copains font du sport dans une rivières sauvage, franchissent tous les obstacles pour être premier à récupérer la canette de bière, que l’un d’eux a lancée dans un défi bien viril. D’autres, plus timides, jurent fidélité à leur voiture... (Femmes) Pendant ce temps, madame se soigne les cheveux avec la crème des shampoing, parce qu’elle le vaut bien. Elle fait la vaisselle avec “superbulle” qui n’attaque pas les mains. Elle entre littéralement dans le linge avec un expert blancheur, et, après avoir torché les mômes, se présente soumise, les cuisse écartées. Nous avons réalisé un mini sondage en ville (à propos de la campagne Sisley), interrogés 212 personnes, des hommes et des femmes aussi bien jeunes ou plus âgés. Il en ressort que 74% des femmes estiment que ce genre de pub n’a pas sa place dans l’espace public. 60% d’entre elles sont même choquées. Les hommes par contre ne sont que 36% à trouver ce genre de pub choquante, mais seulement 33% d’entre eux estiment que ce genre de pub a sa place dans l’espace public et n’est pas choquante. Ce résultat nous met assez à l’aise pour crier haut et fort que Sisley nous emmerde ! Beaucoup de gens disent que ce genre de campagne est avilissante. Ils ne disent pas: “Cachez ce sein que je ne saurais voir”, mais bien que la sexualité et les phantasmes relèvent de libertés à exercer dans les sphères privées et non imposées dans l’espace public par des commerciaux agressifs, cherchant uniquement et par tous les moyens à doper leur ventes. Il n’est pas question ici de s’attaquer à la “liberté d’expression”, au contraire, nous demandons des espaces pour que puissent s’exprimer les artistes et les citoyens. Nous dénonçons cette communication à sens unique où seuls ceux qui ont les moyens financiers pour le faire peuvent afficher leurs idées, ont le droit à la parole. Cette apparente liberté d’expression à laquelle on est tenté de croire, tant les messages ont l’air de transgresser joyeusement les tabous, n’est qu’un leurre. Flattant nos instincts les plus primaires, jouant sur nos penchants inavouables, la pub, contrairement aux apparences, n’a pas pour mission de nous rendre heureux, c’est tout le contraire. La pub doit nous rendre malheureux et frustrés pour nous mettre en condition afin que nous nous ruions dans les magasins pour y chercher une compensation. Consommer pour oublier…oublier ce rouleau compresseur capitaliste qui finira par nous réduire en poudre si nous ne parvenons pas à l’arrêter. Parce qu’elle est l’“organe” de propagande du système, s’en prendre à la pub est une bonne idée. Il faut mettre en lumière les mécanismes qui tendent à nous réduire à l’état de consommateurs lobotomisés. Rejoignez-nous ou soutenez R.A.P. PM Rap-Belgique@tiscalinet.be http://home.tiscali.be/RAP-Belgique/