Amnistie internationale Index AI : MDE 15/041/00 DOCUMENT PUBLIC Londres, 19 octobre 2000 ISRAËL ET TERRITOIRES OCCUPÉS Usage abusif de la force meurtrière I. Résultats de la mission d'enquête d'Amnistie Internationale Extraits "Lors des récentes manifestations, les forces de sécurité de l'État hébreu ont eu tendance à recourir davantage à des méthodes militaires qu'à des méthodes permettant de maintenir l'ordre tout en préservant la vie humaine." "Les forces de sécurité n'ont cessé d'enfreindre les normes internationales relatives aux droits humains ainsi que les règles d'engagement israéliennes, qui n'autorisent le recours aux armes à feu que lorsque des vies humaines sont directement menacées." "Les armes utilisées étaient propres à causer la mort, adaptées à des situations de combat et non au maintien de l'ordre dans le cadre de manifestations violentes." II. Études de cas Manifestations en Israël Des mouvements de protestation ont eu lieu dans plus de 30 villes et villages sur tout le territoire de l'État hébreu à compter du 29 septembre. Des manifestations auxquelles la police ne s'était pas opposée ö comme à Haïfa ou au village de Reine, non loin de Nazareth ö se sont déroulées pacifiquement, sans perte de vie humaine. À Umm el Fahm, après deux jours de manifestations aux conséquences fatales, la police s'est abstenue d'intervenir le troisième jour et le mouvement de contestation s'est déroulé sans que nul ne soit blessé. Dans certains cas, en particulier dans le nord d'Israël, à Nazareth, à Umm el Fahm, à Saknin et à Araba, les responsables de l'application des lois ont employé les mêmes méthodes militaires qu'à Gaza et en Cisjordanie pour maintenir l'ordre : ils se sont présentés en force face aux contestataires et ont rapidement ouvert le feu avec des munitions en métal recouvertes de caoutchouc et des balles réelles, sans tenter d'utiliser des moyens non létaux pour disperser la foule. Parfois, après le décès d'un manifestant, il semble que les forces de sécurité aient fait usage de gaz lacrymogène en grande quantité et contraint les contestataires à se disperser. Autorité palestinienne / Territoires occupés Dans un certain nombre de cas, des témoins ont déclaré que des policiers palestiniens et d'autres personnes avaient ouvert le feu sur des membres des FDI et des gardes-frontières. D'après des porte-parole de l'Autorité palestinienne, ces événements auraient uniquement eu lieu après que les forces de sécurité de l'État hébreu eurent tiré des munitions en métal recouvertes de caoutchouc et des balles réelles sur des manifestants. Toutefois, un soldat israélien gardant le tombeau de Joseph, à Naplouse, a été blessé par un Palestinien qui avait tiré dans le tombeau ; ce militaire est mort, l'Autorité palestinienne ayant omis de le faire évacuer vers un hôpital en garantissant sa sécurité. Un certain nombre d'éléments recueillis à Ramallah, à Naplouse et dans la bande de Gaza laissaient à penser que la tactique de riposte musclée adoptée à l'égard des manifestants qui lançaient des pierres s'était rapidement traduite par l'utilisation de munitions en caoutchouc ; des balles réelles ont également été fréquemment employées. Des preuves accablantes indiquaient que dans bien des cas, Tsahal avait ouvert le feu sur des manifestants qui jetaient des pierres, tuant et blessant des Palestiniens, y compris des enfants, alors que ni la vie de membres des forces de sécurité ni celle d'autres personnes n'était directement menacée. Des balles logées dans les maisons situé à la périphérie de sites de manifestations à Naplouse, à Ramallah et à Bethléem, tendaient à indiquer que des responsables de l'application des lois employant des balles réelles avaient souvent mal ajusté leur tir, tuant ou blessant parfois des personnes qui n'étaient aucunement impliquées dans les manifestations. Des éléments d'information indiquaient par ailleurs que des individus n'ayant joué aucun rôle dans les mouvements de protestation mais qui marchaient à portée de tir de postes de l'armée israélienne avaient été atteints par des coups de feu, et parfois tués (ainsi, Mustafa Farajeh, a été abattu alors qu'il marchait en compagnie d'un ami à Beit Sahur, le 5 octobre 2000, et Hisham Muqbel, âgé de quarante-trois ans, a été tué le 8 octobre 2000, apparemment par un soldat qui se trouvait à une distance de plusieurs centaines de mètres, à l'entrée de la colonie de Netzarim, dans la bande de Gaza). Enfin, des éléments permettaient de conclure que des ambulances et des professionnels de la santé avaient été atteints par des tirs, et que l'évacuation de certains blessés avait été retardée. Ainsi, Muhammad Sami al Jabari, qui travaille comme infirmier pour la Société palestinienne du Croissant-Rouge, a indiqué avoir été blessé par balle à la joue le 6 octobre 2000, alors qu'il installait un blessé sur un brancard à Bab al-Zawiyeh, dans la ville d'Hébron.