a Dernière modification le : 17 mars 2003 ENVOYER CET ARTICLE A DES AMIS 1. La situation actuelle des droits humains en Irak : Des violations massives des droits humains sont perpétrées à l'encontre de toutes les catégories de la population en Irak. La plupart des victimes sont des opposants présumés et leurs proches, ainsi que des membres des minorités ethniques et religieuses. Au fil des années, AI a recueilli des informations sur les violations suivantes : Les « disparitions » Les exécutions extrajudiciaires et les autres homicides illégaux, notamment les massacres de civils au moyen d'armes chimiques L'incarcération de prisonniers d'opinion La détention prolongée sans inculpation ni jugement Des procès inéquitables Le recours systématique à la torture et notamment les châtiments tels que la flagellation, l'amputation de l'oreille et le marquage au fer rouge sur le front. Les expulsions d'individus contre leur gré L'application répandue de la peine de mort Le recrutement d'enfants dans les rangs des forces armées 2. La libération récente de prisonniers politiques en Irak : Le Conseil de commandement de la révolution, la plus haute instance de l'exécutif en Irak, a diffusé le 20 octobre 2002 le décret n°25 signé par le président Saddam Hussein et ordonnant la libération de tous les prisonniers politiques. Selon certains médias, 50'000 à 100'000 prisonniers auraient été libérés mais aucune liste des prisonniers libérés n'a été publiée à ce jour. Les familles demandant des informations sur leurs proches emprisonnés n'ont reçu aucune réponse positive de la part des autorités. Amnesty International s'était félicité de l'annonce de cette amnistie tout en demandant que le nom de tous les prisonniers politiques qui auraient bénéficié de cette amnistie soit précisé. L'organisation n'a reçu aucune réponse de la part des autorités irakiennes. Elle craint que ces libérations soient conditionnelles et que le risque d'être à nouveau arrêtés persiste pour les opposants politiques Cette amnistie ne concerne pas les milliers de personnes ayant été victimes de « disparitions » dans les années 80 et leur sort reste inconnu. 3. Amnesty International et l'utilisation d'armes chimiques contre les Kurdes : En 1988, Amnesty International a vigoureusement condamné les attaques chimiques contre les civils kurdes. A cette époque, la communauté internationale n'a pas dénoncé ces violations, non par manque de mécanismes de protection des droits humains mais par manque de volonté politique. En réalité, alors que ces attaques étaient largement connues, plutôt que de condamner publiquement le gouvernement irakien et d'exercer des pressions pour qu'une enquête de l'ONU soit menée, de nombreux États ont continué à vendre des armes au gouvernement irakien. 4. La position d'Amnesty International sur une intervention militaire en Irak : Amnesty International exige une amélioration drastique de la situation déplorable des droits humains en Irak. De nos jours, des violations graves des droits humains ont lieu dans toutes les régions monde. Nous ne pouvons pas être choqués par certaines situations et choisir d'ignorer certaines autres. La communauté internationale devrait rechercher des solutions qui assurent une amélioration de la situation des droits humains en Irak et non une détérioration, des pertes inutiles en vies humaines et un accroissement des souffrances. Amnesty International n'était ni opposée, ni ne soutenait l'intervention militaire en Afghanistan. Notre position est similaire pour l'Irak. Notre politique générale n'est jamais de se prononcer sur la légitimité ou l'opportunité de l'utilisation de la force militaire. Néanmoins, nous nous prononçons sur la manière dont les droits humains et le droit humanitaire sont respectés. Nous nous opposons également à la vente et à la fourniture d'armes et d'équipements militaires ou d'entraînements militaires aux forces gouvernementales ou groupes armés susceptibles de commettre des violations des droits humains. Amnesty International appelle tous les gouvernements et groupes armés à protéger de manière primordiale les populations civiles et à garantir que les droits humains et le droits humanitaire soient respectés lors de toute action. Nous encourageons à envisager toutes les mesures diplomatiques et judiciaires avant de recourir à la force 5. Un changement de régime en Irak et la protection des droits humains : Les États-Unis appellent à un changement de régime en Irak. Amnesty International est une organisation apolitique qui ne soutient ou ne rejette aucun gouvernement ni système politique. Quel que soit le pouvoir en place, il ne peut y avoir de protection efficace des droits humains sans responsabilité pour les violations au niveau national et international. Afin de développer une culture des droits humains, l'éducation aux droits humains doit être favorisée, de même que le développement d'organisations et d'institutions œuvrant pour les droits humains. 6. Les conséquences probables d'une guerre sur les droits humains en Irak et dans les pays voisins : Tout recours à la force soulève la question de la sécurité des civils dans les zones de conflit. Prendre intentionnellement des civils pour cibles ou utiliser des boucliers humains est clairement considéré comme un crime de guerre. Un grand nombre de victimes civiles peut également être le résultat d'erreurs technique de certaines armes, d'une riposte militaire disproportionnée ou d'une distinction confuse entre les civils et les militaires lors d'une guerre urbaine. Les tueries peuvent aussi être le fait de soulèvements internes en Irak ou de l'instabilité dans les régions frontalières Il est fort probable qu'une intervention militaire engendre une crise humanitaire, une augmentation du nombre de déplacés internes et du nombre de réfugiés essayant de traverser la frontière vers la Turquie, l'Iran, la Syrie, la Jordanie et probablement aussi vers le Koweït et l'Arabie Saoudite. Garantir la sécurité et la mise à disposition des ressources nécessaires dans les camps de réfugiés a toujours constitué un défi pour la communauté internationale. Il est possible que certains pays - malgré l'obligation internationale d'assurer l'accueil des réfugiés - ferment leurs frontières, obligeant les civils qui fuient les combats à rechercher la sécurité à l'intérieur des frontières irakiennes. Les camps pour déplacés internes seront vraisemblablement hors d'atteinte de l'aide internationale 7. L'impact des sanctions de l'ONU Les conséquences des sanctions sur la population irakienne ont été mises en évidence par des organismes des Nations unies, des organisations non gouvernementales, des journalistes et des universitaires. Il existe un consensus général sur le fait que les sanctions contribuent fortement à la crise humanitaire que connaît l'Irak. Bien que l'accès à la nourriture et aux médicaments, entre autres produits de base, se soit amélioré depuis 1998, la situation demeure critique d'une manière générale. Les sanctions ont porté atteinte au droit à la nourriture, à la santé, à l'éducation ainsi que, dans bien des cas, à la vie de centaines de milliers de personnes dont de nombreux enfants. Certains affirment que le régime irakien manipule délibérément le régime des sanctions à des fins de propagande. Ceci n'exonère toutefois pas le Conseil de sécurité des Nations unies de sa part de responsabilité pour ne pas avoir prêté attention aux appels lancés en vue de la levée de toutes les dispositions des sanctions qui entraînent des violations graves des droits du peuple irakien. 8. Le cas de l'Afghanistan Durant les opérations militaires en Afghanistan menées par les Etats-Unis, la Grande Bretagne et d'autres forces, des civils ou des combattants capturés ont été blessés ou tués. Amnesty International exige que des enquêtes soient menées à ce sujet. Au cours du conflit, Amnesty International était également préoccupée par la protection et le bien-être des réfugiés et des déplacés internes. Certains de ces réfugiés ont été poussés à retourner dans des régions non sécurisées une fois la défaite des Talibans assurée. Amnesty International craint que le conflit en Irak résulte en des problèmes similaires. 9. La position d'Amnesty sur le dossier des violations des droits humains en Irak publié par le gouvernement britannique : Amnesty mène depuis plus de 20 ans des recherches sur les graves violations des droits humains commises par le gouvernement irakien. Le dossier publié par le Foreign Office a repris bon nombre de nos conclusions et l'organisation se félicite de l'attention donnée à cette question, quoique tardivement. Néanmoins, le dossier ne donne aucune recommandation sur la manière de traduire en justice les responsables présumés de ces crimes. Il n'explique pas non plus, si le conflit a effectivement lieu, comment la communauté internationale pourra garantir que le nouveau gouvernement post-conflit assume pleinement son engagement de protéger les droits humains. Donner une attention sélective et opportuniste aux droits humains ne sert qu'à porter atteinte aux standards internationaux en matière de droits humains.