Ce qui, il y a quelques décennies, était considéré comme une forme de débauche extrême, et de comportement contre nature, est aujourd'hui admis comme entrant dans la norme. L'homosexualité n'est plus une perversion. Les relations hors mariage ne constituent plus un délit. La nudité du corps humain peut être exposée de toutes les façons, au théâtre, au cinéma et même dans les défilés de rue. L'érotisme est un élément clef de notre culture, dit-on, et les scènes d'amour défilent sur les écrans. Est-ce vraiment cela, la liberté? La «libération des moeurs» est-elle un signe de réel progrès? Certes, on ne peut omettre de mentionner un argument qui souligne que ces nouveaux modes de vie mettent fin à des siècles d'hypocrisie. L'homme moderne ne serait pas moins sage, dans ses pratiques sexuelles et ses excès, que ses ancêtres. Il se serait seulement affranchi d'un moralisme puritain et d'un rigorisme affecté pesant lourdement sur la conscience de ses prédécesseurs. Il aurait simplement le courage de s'exposer tel qu'il est, de ne plus avoir honte de son animalité et de ses instincts. Bref, la modernité nous aurait ainsi débarrassés de la duplicité dans laquelle nous tenaient les obsessions du péché de la chair et la tentation des démons imaginaires. On comprend que dans ce nouvel élan, l'islam fasse parfois figure de revenant inquiétant. Le voile, synonyme de contrainte et d'oppression, et le corps de la femme que l'on cache, comme s'il fallait en avoir honte, nous rappellent un passé lourd de faux-semblants où la dissimulation l'emportait sur la franche et naturelle joie de vivre sans tabous. Si nous avons mille raisons d'être effarés devant la condition des femmes afghanes, prisonnières d'un régime qui est cependant loin de représenter les véritables enseignements du Prophète de l'islam, nous ne nous étonnons plus guère du sort qui est fait en Occident à celles dont on achète la chair, ou dont on vend les charmes pour satisfaire les appétits de la gent masculine. Pourtant, il y a une autre vérité. Combien de mères et pères, à l'heure actuelle, sont inquiets lorsqu'ils voient leurs filles grandir au sein de groupes sociaux qui ne connaissent aucune limite? A cette adolescente qui vit sa première aventure, on recommande d'utiliser un préservatif. Le temps des premières amours est éphémère, et très rares sont les couples qui restent liés par fidélité. Il est admis que les jeunes filles rencontrent plusieurs partenaires avant de trouver un conjoint véritable. Ce qui est valable aussi pour les garçons. Cette banalisation de la relation sexuelle, en regard de civilisations qui insistent sur l'importance de la virginité et sur l'institution du mariage, dévalorise complètement les notions de la famille et de la stabilité du couple. Dans une authentique tradition religieuse, le mariage signifie que les époux s'engagent à préserver les liens qui unissent leur petite communauté destinée à grandir dans l'harmonie et le respect mutuel. Le Coran définit d'une très belle façon l'amour conjugal: «Parmi Ses signes (les signes de Dieu) est qu'Il a créé à partir de vous-mêmes, pour vous, des épouses, pour que vous trouviez auprès d'elles le calme et le gîte, et qu'Il a établi entre vous des liens de tendresse et de miséricorde. Il y a en cela des signes certains pour des gens qui méditent.» (Coran, 30, 21) La tradition juive insiste également sur le caractère essentiel des liens conjugaux, sur le port du voile et les règles de la pudeur. Le fameux Rabbin Yossef 'Haïm affirme ainsi: «La pudeur est très importante pour la femme. D'abord au niveau de la tenue vestimentaire: il est interdit de porter un habit qui laisse découverte une partie de son corps, à l'exception du visage, du cou et des mains.» (Les Lois des Femmes, ouvrage recommandé par le grand rabbin de Jérusalem, Shalom Messas, éd. Salem Yshua, Jérusalem.) Peut-on dire que nos sociétés modernes offrent aux jeunes la garantie de cette stabilité dans le couple? Devant l'étalage perpétuel de la chair qu'elles autorisent au prix de la dignité humaine, n'incitent-elles pas les nouvelles générations à ne rien se refuser? Ce sont les femmes qui sont les premières victimes d'un tel système. Les hommes se servent en toute impunité. Combien de jeunes filles en font la triste expérience? Livrées à des partenaires occasionnels avides de jouissance, elles sont ensuite écartées pour d'autres conquêtes. Bien sûr, certains affirmeront qu'elles ne sont pas à plaindre, puisqu'elles en retirent, elles aussi et librement, leur part d'agrément. Il faut bien que jeunesse se passe. Mais avec le temps, beaucoup d'entre elles finissent par en payer le prix. Le commerce du plaisir se termine toujours par une surenchère de méfiance réciproque. Combien de femmes aujourd'hui souffrent en silence de l'absence de fidélité de leur mari! A ces derniers en effet, notre société permissive donne des occasions faciles de vivre des aventures extraconjugales. Il y a certes une autre vérité. Des cultures orientales nous enseignent que lorsque l'on possède une perle précieuse, il faut la conserver avec attention. Une perle précieuse, cela s'enveloppe dans du velours. Et l'écrin où soigneusement et délicatement on la pose n'a pas pour fonction de la briser, mais bien d'en protéger l'éclat et la splendeur. Plus une perle a de la valeur, plus on la tient à l'abri des regards indiscrets. Elle n'a pas de prix; elle est inestimable. Et la maisonnée qui la possède voit en elle se refléter la jeunesse, la famille et l'avenir de la communauté. Elle ne se découvre que dans la stricte intimité du couple où elle brille et resplendit de mille feux. Ce qui n'est pas interdit. La pudeur favorise ainsi un réel épanouissement sur le plan sexuel, qui n'a rien à voir avec la morne lassitude de gens gavés par le grand déballage de l'érotisme contemporain. On exhibe au contraire une pièce de cent sous sans trop y songer. Elle passe de mains en mains et l'on finit par n'en ressentir aucune gêne. Ternie par ce commerce, elle perd hélas, de façon si précoce, la grâce de l'innocence. Évidemment, toute femme voilée n'est pas forcément un parangon de vertu. Pas plus qu'une femme plus ou moins habillée n'est nécessairement un démon. Il reste que la modernité ne protège plus le sentiment de la pudeur, valeur essentielle qui est aux origines de notre humanité.