La Belgique essaie d'interdire Dyab Abou Jahjah, le chef de l'AEL – « Arab European League » - qui, le 18 novembre dernier, a répandu ses milices dans les rues d'Anvers pour « contrôler le comportement et les pratiques de la police" . Mais Jahjah fait déjà recette auprès de bon nombre d'immigrés musulmans qui sont un demi-million en Belgique. Arrivé clandestinement à Bruxelles en 1991, Jahjah déclare « avoir autant le droit de manifester à Anvers que le Vlaams Blok ». À peine passé, l'émoi suscité par l'apparition des milices de la Ligue arabe européenne et les émeutes d'Anvers, le monde politique belge semble reprendre pied et vouloir calmer le jeu, ayant en point de mire les prochaines élections législatives du 15 juin 2003. Des parlementaires, emmenés par le président du sénat, Armand De Decker ont déposé une proposition de loi visant à préciser la portée de la loi de 1934 sur les milices privées. Ils proposent ainsi d'en élargir l'interdiction à tout groupe organisé ayant pour objectif de se substituer ou de contrôler les forces de l'ordre en dehors des dispositions légales existantes. Une attaque directe contre les milices de la Ligue arabe européenne de Dyab Abou Jahjah. Nul doute cependant que celui-ci, devenu en quelques jours une véritable « star , et tenu, par sa mise en liberté conditionnelle, pour trois mois au silence sur la place publique, ne prépare cependant, dans les cercles privés, la réplique. L'épisode en tout état de cause a mis à jour l'énorme malaise de la société belge face à une immigration forte de près d'un demi-million de musulmans. Un électrochoc, après l'apparition des patrouilles de la Ligue arabe européenne La Belgique a subi un électrochoc avec l'apparition dans les rues d'Anvers, le 18 novembre, des premières patrouilles vêtues de noir de la Ligue arabe européenne (AEL - Arab European League) chargées de « surveiller et de contrôler le comportement et les pratiques de la police anversoise pour éviter que notre communauté n'endure ce que les juifs d'Anvers ont dû subir pendant la Seconde guerre mondiale »(sic), selon l'annonce faite par l'AEL. L'étincelle s'est produite quelques jours plus tard, le 26 novembre, lorsque des scènes d'émeute ont éclaté à Borgerhout - une banlieue « difficile » de la métropole flamande – après que Mohamed Achrak, 66 ans, de nationalité belge, ait assassiné un jeune professeur de religion islamique de 27 ans, fils de ses voisins marocains. Crime de déséquilibré et/ou crime raciste : toujours est-il que la rue s'est enflammée et que, très vite, les militants de l'AEL et son chef, Dyab Abou Jahjah, sont apparus sur le terrain « pour calmer les jeunes », selon Jahjah, « pour les exciter », selon les autorités anversoises au premier rang desquelles la bourgmestre d'Anvers, Léona Detiège. Avant même les émeutes de Borgehout, l'apparition des patrouilles de l'AEL avait soulevé une tempête à travers le pays : Guy Veroofstadt, Premier ministre, comme la plupart des ténors politiques, tous partis politiques confondus, ont dénoncé comme inacceptables de telles pratiques, proclamé qu'il n'y a pas de place dans la cité pour des zones de « non droit », et invoqué la loi de 1934 interdisant les milices privées. Antoine Dusquesne, ministre de l'Intérieur jugeait « malsaines et contestables » ces initiatives, les qualifiant de véritables « provocations », rappelant à cette occasion que tout citoyen est en droit, s'il le juge nécessaire, de dénoncer des « dysfonctionnements » de la police à l'autorité compétence, le Comité P et l'Inspection générale des polices. Que des groupes s'organisent dès lors pour procéder de manière systématique à des contrôles et prendre des photos est, a-t-il martelé, en marge de la légalité. Quant à Armand De Decker, président du Sénat, il déclarait pour sa part que, si la loi actuelle était insuffisante, rien n'empêchait le législateur d'améliorer l'ordre juridique. Enquêtes et droit d'injonction du ministre de la Justice : Abou Jahjah sera arrêté la veille des funérailles du jeune Achrak puis relâché cinq jours plus tard sous condition. Suite notamment aux nombreux appels au calme de la famille de la victime, les cérémonies d'adieu se dérouleront sans incident : de là à penser que les autorités ont mis Abou Jahjah à l'écart pour éviter tout dérapage en un moment difficile..... Au coup de tonnerre d'Anvers, a répondu une classe politique sous le choc, se répandant en grandes déclarations et agissant, une fois de plus, dans le désordre. Ces déclarations politiques : pas question de laisser s'installer dans la rue des « forces parallèles »... semblaient cependant tomber dans le vide. La même semaine, en effet, insultes racistes, antisémites et violences dans des écoles bruxelloises, menaces de mort contre des étudiants juifs à l'Université libre de Bruxelles, nouvel attentat contre la Grande Synagogue d'Anvers... multiplient les signaux d'alarme et génèrent dans le pays un sentiment de « trop plein ». Le débat fait rage entre ceux qui refusent ces violences physiques, verbales et contre l'État de droit, et ceux qui, au nom de la défense des plus défavorisés, justifient tout et n'importe quoi. Le gouvernement se devait de dépasser le stade des invectives. Aussi, le premier acte concret sera posé par Laurette Onckelinx, ministre de l'Égalité de chances, qui a organisé dans l'urgence, le 9 décembre, une grande « table ronde » rassemblant toutes les sensibilités chrétiennes, juives, musulmanes, laïques, ainsi que les partenaires sociaux, patronat et syndicats, pour relancer le dialogue et définir des lignes d'action. Le rappel à l'ordre d'Anvers a été entendu jusque dans les plus hautes sphères, puisque le Prince Philippe et la Princesse Mathilde ont honoré de leur présence cette réunion. La déclaration commune finale appelle « hommes et femmes à vivre les uns avec les autres, en égalité de droits et de devoirs » et énonce deux principes : d'une part, la « Belgique est un pays dont le caractère multiculturel est une richesse » et, d'autre part, « notre pays à choisi la voie de la citoyenneté partagée ». Et d'inviter à la tolérance, au respect des différences, des cultures et des religions, au respect de l'autorité de l'État et du socle des valeurs qui fondent la démocratie. Les participants ont reconnu qu'il existe « de graves problèmes » de discrimination à l'embauche, au logement, dans l'enseignement et la santé et ont adopté une « un programme de travail dont l'acteur principal et véritable coordonnateur sera le Centre pour l'Égalité des Chances. Satisfaction officielle tous azimuts : Philippe Marckiewicz, président du Comité de Coordination des Organisations Juives de Belgique (CCOJB) salue l'initiative mais insiste sur l'indispensable travail à faire pour « relever le niveau éthique de la société » et « améliorer la moralité du citoyen pour faire disparaître le racisme, l'islamophobie, l'antisémitisme ». Un travail à mener, dit-il, d'urgence et en priorité au niveau de l'école. Il souligne également que l'exemple doit venir « d'en haut », des responsables communautaires religieux aussi bien que laïques. Nordin Maloujhmoun, Président de l'exécutif des musulmans va plus loin : au-delà, dit-il, de la satisfaction d'avoir pu enfin se faire entendre, la communauté musulmane demande rapidement des mesures concrètes, des résultats tangibles, sur le plan de l'emploi, de l'accès au logement, de l'école. Si, dans l'immédiat, l'annonce de ces engagements semble avoir calmé le jeu, rien n'est moins sûr. Car la Belgique est en pleine campagne électorale et le plus petit incident pourra être - et sera - récupéré par toutes les forces en présence, de l'extrême droite - très structurée en Flandre et particulièrement à Anvers où le Vlaams Blok représente 33% de l'électorat - à l'extrême gauche. L'AEL n'a-t-elle pas annoncé son intention de s'allier avec le Parti du Travail Belge (PTB, dernier reliquat dissident extrémiste du parti communiste....) pour constituer une liste électorale pour le prochain scrutin ? Il est en effet à craindre, quoi que s'en disent les promoteurs, que ces belles déclarations restent au niveau des intentions ou ne se traduisent sur le terrain que lentement, trop lentement pour éteindre un incendie qui ne demande qu'à reprendre. Et cet exercice de « rencontre multiculturelle » n'est pas le premier du genre. Un doute sur les suites effectives de la seconde « grand-messe » Au printemps dernier, Laurette Onckelinx avait une première fois rassemblé autour d'elle les représentants de la société civile, toutes confessions confondues, pour tenter de faire baisser la tension, après les nombreux actes d'antisémitisme et de violence commis à travers le pays. Il était alors question, surtout, de ne pas importer en Belgique un conflit extérieur. Puis, dans le discours prononcé à l'occasion de la fête nationale, le 21 juillet, le Roi Albert II avait, lui aussi, appelé les communautés à la tolérance et au respect mutuel, après qu'un couple de Marocains ait été assassiné, à Bruxelles par un voisin notoirement raciste. Le chef de l'État avait alors, fait sans précédent, nommément cité les « préoccupations légitimes » des communautés juives et musulmanes du pays. Six mois plus tard, on se pose encore la question du devenir de ces beaux discours et déclarations d'intention. D'où un certain scepticisme quant aux suites effectives de cette seconde « grand-messe ». Sur le plan plus spécifiquement politique, il semble que le Parlement veuille reprendre la main. Ce qui avait choqué avec l'apparition de l'AEL et dans les discours de son leader, Dyab Abou Jahjah, c'était la volonté délibérée d'un groupe de se placer au-dessus de l'autorité publique. D'où le souci, dans l'urgence, de « trouver la faute »de manière à pouvoir dissoudre la Ligue et mettre à l'écart son leader. Son arrestation, sur injonction ministérielle, puis sa libération très rapide ont été interprétées par certains d'abord comme un abus de pouvoir de l'autorité publique, faisant d'Abou Jahjah un « prisonnier politique », puis comme un cinglant désaveu du gouvernement par la justice, un véritable revers politique, ce dont ne doutent d'ailleurs pas les partisans d'Abou Jahjah. Une proposition de loi visant à étendre la loi de 1934 à tout groupe se prévalant du droit de contrôler les forces de police en dehors du cadre prévu par la loi Il faut, estime, le monde politique, rétablir la hiérarchie des valeurs et rappeler aux citoyens que c'est à l'État que revient la tâche de faire respecter le droit, garant de la démocratie. À ce stade, les juristes n'ont pas, semble-t-il, encore trouvé la faille qui permette d'assimiler clairement la Ligue à une « milice privée » et sa dissolution par décision de justice. Mais le message, lui est passé. Et c'est le président du Sénat, Armand de Decker, parfaitement cohérent avec ses déclarations précédentes, qui a pris l'initiative de déposer, le 13 décembre, une proposition de loi visant à étendre la loi de 1934 à tout groupe se prévalant du droit de contrôler les forces de police en dehors du cadre prévu par la loi. Car, dit-il, il y a bien, en Belgique, une structure prévue à cet effet, accessible à tout citoyen.. Même si l'Assemblée actuelle vit ses dernières semaines, rien n'empêche les parlementaires d'agir rapidement. Ici encore, il s'agit de volonté politique. Le chef de l'AEL est entré clandestinement en Belgique en 1991, sur base d'une déclaration par laquelle il affirmait être un membre armé mais déchu du Hezbollah Qui est Dyab Abou Jahjah ? Difficile de cerner le personnage qui, pourtant, ne se cache pas beaucoup - d'autant que les derniers événements lui ont offert une plate-forme médiatique quasiment inespérée. Né le 24 juin 1971 à Bintjbeil , au Liban sud, Dyab Abou Jahjah n'a rien d'un « défavorisé » : issu d'une famille aisée (son père est professeur d'université, sa mère enseignante), Dyab Abou Jajhah avoue être entré clandestinement en Belgique, le 14 février 1991, sur base d'une déclaration par laquelle il affirmait être un membre armé, mais déchu, et condamné à mort du Hezbollah et demandait à pouvoir bénéficier du statut de réfugié politique. « Un prétexte », reconnaît-il aujourd'hui. Un statut qui lui sera refusé le 25 janvier 1995 par le Commissariat aux Réfugiés après qu'il ait étudié avec l'Office des Etrangers son récit et identifié de nombreuses invraisemblances. Ce refus sera confirmé en appel six mois plus tard. Interviewé le 6 décembre 2002 par le quotidien bruxellois « Le Soir », Abou Jahjah nie avoir jamais appartenu au Hezbollah tout en affirmant avoir « beaucoup de sympathie » pour ce mouvement qui, dit-il, « n'est pas un mouvement terroriste mais bien un mouvement de résistance ». Il dit, en revanche, avoir « fait partie du front de résistance libanaise » (contre l'armée israélienne alors au Liban sud), ce dont , précise-t-il, « je suis fier ». Le chef de l'AEL affirme avoir résisté « les armes à la main » à l'occupation israélienne, sans préciser les opérations auxquelles il aurait participé. Sur son entrée en Belgique, il admet avoir fait, en 1991, des déclarations « qui ne doivent pas être prises à la lettre, précise que sa vie n'a jamais été mise en danger au Liban et que son départ pour l'Europe a été motivé par le manque de perspectives dans son pays d'origine. Impossible d'obtenir le statut de réfugié mais Abou Jahjah, qui persiste dans sa volonté de s'installer en Belgique, entame en 1992 des études universitaires - candidature en philologie à l'ULB puis licence en sciences politiques à l'Univesrité Catholique de Louvain - et introduit une demande de naturalisation, une procédure qui passe par l'aval du Parlement. La commission des naturalisations de la Chambre refuse, par principe et selon une jurisprudence bien établie, la naturalisation à des candidats ayant fait partie d'organisations terroristes et ayant porté les armes dans leurs rangs. Abou Jahjah contourne la difficulté en obtenant, dès 1996, la nationalisation par une simple procédure administrative, soit en se mariant - en 1994 ( ?) lui-même dit ne plus savoir exactement quand - avec une Belge. Divorce. Un mariage fugace dont les circonstances sont suspectes au point que la justice anversoise enquête afin d'entamer éventuellement une procédure en destitution de la nationalité, procédure extrêmement rare. Selon le code des naturalisations, des naturalisés peuvent en effet être déchus de la qualité de Belge « s'ils manquent gravement à leurs devoirs de citoyens. Ceux-ci peuvent concerner des atteintes à la sûreté de l'État, des activités terroristes, des crimes graves ou le fait d'avoir contracté un mariage blanc - donc illégal - dans le seul but d'obtenir la naturalisation ». Une chose est certaine : Abou Jahjah est bel et bien dans le collimateur de la justice, seule habilitée à préciser les manquements dont il se serait rendu coupable. À noter que s'il perd sa naturalisation, Abou Jahjah ne serait plus éligible aux législatives.... Dyab Abou Jahjah crée, le 22 février 2000 l'ASBL Al Rabitha qui deviendra le 28 décembre 2000, l'Arab European League. L'AEL apparaît pour la première fois publiquement le 1er avril 2002 dans un appel à manifester à Anvers en faveur du peuple palestinien. Une manifestation qui se déroule à proximité du quartier juif et qui dégénère. Les mosquées d'Anvers se désolidarisent du mouvement mais Abou Jahjah apparaît en leader BCBG et charismatique, au discours provocateur. Depuis, la presse flamande lui consacre de nombreuses pages. Il y a annoncé notamment sa volonté de créer un parti islamique en Belgique en vue des prochaines élections et y réclame la reconnaissance de l'arabe comme quatrième langue nationale. Aujourd'hui, il réfute cette demande, déclarant qu'il s'est à l'époque fait « piéger » par le journaliste de l'hebdomadaire « Knack ». L'AEL revendique entre 800 et 900 membres dans toutes les grandes villes de Flandre, à Bruxelles et à Charleroi. Politiquement, le mouvement se définit comme « pan-arabe » - prônant un « islam moderne, dynamique et consensuel », fermement engagé pour la défense du peuple palestinien et du peuple irakien. Abou Jahjah ne semble pas prendre parti entre sunnites et chiites et place l'arabisme au premier plan. Il s'avoue profondément anti-américain et contre Israël et dit « comprendre pourquoi Ben Laden agit comme il le fait ». Son discours, il appuie sur les difficultés et les frustrations vécues par les allochtones (nouvel euphémisme politiquement correct en Belgique : on ne dit plus « immigrés » mais « allochtones »....) et développe un discours particulièrement virulent à l'égard de ceux qui, parmi les allochtones « intégrés » participent à la vie politique du pays, en tant qu'élus. À ceux-ci, il reproche de trahir la cause et à ceux qui leur ont ouvert la porte des partis traditionnels, de se servir des élus allochtones « puis de les jeter ». L'AEL s'élève par ailleurs contre le concept de l'intrégration-assimilation et se réfère au combat des Black Panthers aux États-Unis dans les années 60. Abou Jahjah sait cependant qu'il doit agir « par la voie légale » et peut compter sur un noyau dur de partisans très politisés, au discours radical - à la limité identique à celui du Vlaams Blok - dont beaucoup ont fait des études supérieures. Il annonce sa volonté de créer un parti pour les prochaines élections : un parti qui, assure-t-il, accueillera « aussi des Belges ». Il pourrait faire alliance pour cela avec le petit parti d'extrême gauche, le Parti du Travail de Belgique (PTB) qui était d'ailleurs à ses côtés lors de la manifestation organisée à Bruxelles le 10 novembre contre la guerre en Irak, contre les États-Unis et contre Israël. Une manifestation qui se voulait « pacifiste » selon les organisateurs mais au cours de laquelle ont été lancés des slogans en faveur de Ben Ladden et des insultes antisémites. À noter qu'une nouvelle manifestation contre la guerre en Irak et de soutien au peuple palestinien est d'ores et déjà programmée par l'AEL pour le 19 janvier 2003. Par ailleurs, dans une interview accordée au quotidien néerlandais de Volkskrant, du 7 décembre, il souligne que la communauté musulmane « ne doit pas laisser tomber son droit à manifester parce qu'il y a à Anvers une communauté juive »...Il précise ensuite que si l'AEL ne passera pas par le quartier juif, ce qui, dit-il, « serait une provocation », elle a cependant autant le droit de manifester à Anvers que le Vlaams Blok. Le mouvement est dans le collimateur de la justice depuis l'été. Mais les enquêteurs - sûreté de l'Etat et police fédérale - n'ont semble-t-il encore rien de solide contre l'AEL. Des perquisitions menées à l'occasion de l'arrestation de Abou Jahjah à son domicile, également siège de l'AEL, et à celui de son trésorier à Charleroi n'ont pas donné grand chose, sinon des indications sur le mode de financement - qualifié par « Le Soir » de « banal » - de l'Association : 1,5 million de francs belges (environ 371.840 euros) reçus en 2 ans, dont un million (24.789 euros) provient d'une association de femmes palestiniennes ( ! ! !) et le reste de donateurs privés d'Arabie saoudite, du Koweit, d'une chaîne de télévision égyptienne. Si l'AEL devait sérieusement prendre pied dans la cette ville, ce serait avec une connotation beaucoup plus intégriste Quoi qu'il en soit, Abou Jahjah, est pris très au sérieux. Les événements d'Anvers en ont fait, surtout auprès de certains groupes de jeunes, une véritable star, une idole politique. Charismatique et beau parleur, il séduit un public qui n'attendait qu'une chose, se trouver un meneur. Il ne semble pas encore très implanté à Bruxelles où les milieux musulmans tiennent à s'en démarquer clairement, à l'image de Rachid Madrane, chef de groupe PS au conseil communal d'Etterbeek qui refuse le repli identitaire proposé par l'AEL à qui il reproche d'adopter une logique de ghetto. Né en Belgique en 1968, de parents arrivés dans le pays en 1959, il refuse « de se laisser faire la leçon par un Abou Jahjah...qui n'est en Belgique que depuis 1991 ». Accueil identique pour Nordin Maloujahmoun, président de l'exécutif des musulmans de Belgique, pour qui « le Libanais » Abou Jahjah « n'est pas des nôtres ! ». Ce qui ne signifie pas que ses idées n'ont pas d'échos dans la capitale, mais plutôt qu'elles n'y ont pas encore la forme d'une structure officiellement organisée et agissante. Les responsables de la communauté musulmane de Bruxelles comme les autorités publiques sont, en tout cas, convaincus d'une chose : si l'AEL devait sérieusement prendre pied dans la cette ville, ce serait avec une connotation beaucoup plus intégriste. Ce qui n'est pas la moindre des inquiétudes, pour les uns comme pour les autres. Abou Jahjah ne cache pas son intention d'étendre ses activités aux Pays-Bas Inquiets également, les voisins hollandais : Abou Jahjah ne cache pas son intention d'étendre ses activités aux Pays-Bas où vit une communauté musulmane de près de 890.000 personnes. L'objectif annoncé est d'ouvrir dès février 2003 deux antennes, l'une à Rotterdam, la seconde à Amsterdam. Mais La Haye ne se laissera pas surprendre. Le ministre de l'Intérieur néerlandais a déjà fait savoir que le mouvement était sous haute surveillance et qu'une enquête a été ouverte sur les préparatifs de l'organisation dans le pays . Il a également lancé un avertissement : « pas question de voir se dérouler dans le pays des scènes d'émeute comme à Anvers. L'incitation à la haine ou l'obstruction aux mesures de police sont, a-t-il rappelé, strictement interdits. » La classe politique néerlandaise dans son ensemble se veut vigilante, les chrétiens démocrates demandant purement et simplement d'interdire dès maintenant l'organisation. Preuve de cette inquiétude s'il en est : l'énorme intérêt manifesté par la presse néerlandaise, à l'instar de la presse belge et surtout flamande, à l'égard d'Abou Jahjah.