A première vue, ça a l¹air bien : 24 films gays et 24 films lesbiens au programme, plus une série de films étiquetés Œmixtes¹. C¹est quand on va voir dans les détails que ça cloche : si l¹on dénombre 18 longs métrages gays, on n¹en trouve que 9 lesbiens, parmi lesquels 2 films des années 70 réalisés par des hommes et aux thématiques complètement dépassées, et un déjà sorti en salles. Le reste de la programmation Œlesbienne¹ étant constituée de courts, et parfois très courts, métrages. Pardon? On déraille et c¹est pas des manières de tenir ces comptes d¹apothicaire? A priori pourquoi pas, mais là où c¹est vraiment inquiétant, c¹est que quand on demande des explications à l¹équipe organisatrice, on sent qu¹il y a bel et bien un malaise. ³La programmation reflète en exacte proportion la participation des lesbiennes au Festival,et vous savez que dans les associations mixtes il y a toujours beaucoup moins de filles que de garçons² Tels Quels se revendique d¹être une association mixte, en effet, et à ce titre elle perçoit des subsides de la part de pas mal de pouvoirs publics, qu¹elle est censée utiliser à l¹intention d¹un public mixte. Ces dernières années, le public de lesbiennes se pressant dans les couloirs du Botanique pour aller regarder des images qui leur parlent sur grand écran est impressionnant : on se demande où se cachent toutes ces femmes le reste du temps! Quand à l¹équipe organisatrice, il semble qu¹elle dispose d¹une technique infaillible pour faire fuir toutes les lesbiennes souhaitant participer : cette année encore, on nous rapporte l¹histoire d¹une défection de ce genre. Et les filles qui se sont proposées pour aider n¹ont pas été invitées. Pourquoi? En fait, cette année, l¹équipe ne compte plus aucune lesbienne. La Présidente de Tels Quels, si vous le lui demandez, vous répondra qu¹elle est ³gay². Son appartenance au sexe féminin sert-elle donc d¹alibi à l¹organisation? Et puis qu¹est-ce que c¹est que ces manières? Est-ce que les lesbiennes qui militaient dans les associations de sensibilisation à la souffrance des malades du Sida dans les années 80 ont tenu des discours du style ³Bon, OK, je travaille, mais seulement à proportion du nombre de lesbiennes atteintes²??? ³C¹est normal, c¹est parce que la production de films lesbiens est beaucoup plus faible que la production gaie² Ca ça fait mal, parce que ce sont les lesbiennes elles-mêmes qui nous le disent. Il s¹agit de la Parole du Père Bien Apprise, et récitée automatiquement chaque fois que l¹occasion s¹en présente (³Filles, n¹oubliez jamais que vous ne valez pas grand chose, qu¹à ce titre vous ne méritez pas grand chose, et contentez-vous de ce qu¹on veut bien vous donner - ou il vous en coûtera.²) Il s¹organise des festivals de films lesbiens partout dans le monde, notamment à Paris à l¹automne, et dans la longue histoire de ce Festival, ça n¹est jamais arrivé qu¹on doive supprimer des journées de projection par manque de films! Des films lesbiens de qualité, il y en a. Il suffit de bien vouloir les chercher. Le pire, c¹est qu¹alors qu¹un des thèmes retenus par Tels Quels pour ce Festival est celui de la mémoire de la déportation des homosexuels lors de la deuxième guerre mondiale, l¹équipe organisatrice utilise des méthodes de flics dignes de toute structure de philosophie autoritaire. Ainsi, alors que nous distribuions pacifiquement des tracts aux lesbiennes venues voir des films au Botanique pour les informer de la situation, on nous a accusées de troubler l¹ordre, on nous a envoyé de vilains sbires de sécurité, on nous a arraché nos tracts... c¹est tout juste si on n¹a pas tenté de nous tabasser, pour nous faire la leçon. Vraiment, ça ne tourne plus rond au Tels Quels. Et les lesbiennes en colère que nous sommes sont bien décidées à le faire savoir. A la mesure de notre frustration de voir sombrer un des évènements festifs les plus agréables au sein de la communauté gay et lesbienne de Bruxelles (et probablement celui qui favorisait le mieux les rencontres et échanges entre ces deux communautés) dans la médiocrité mercantile.