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Une Constitution contre les peuples ?
by Attac Bxl Saturday, May. 08, 2004 at 12:23 PM
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Les battements des ailes d’un papillon peuvent, dit-on, provoquer les effets les plus inattendus. Ainsi, les attentats de Madrid et le renversement de majorité qui s’en est suivit aux élections législatives espagnoles (la chute du Gouvernement Aznar), n’auraient pas pour principale conséquence, au plan européen, la remise en cause de l’occupation impériale de l’Irak, mais, au contraire, le très rapide déblocage du projet de Constitution européenne, que d’aucun annonçait comme enterré après les échecs successifs de la catastrophique présidence européenne italienne, et dont l’un des aspects essentiels est d’ancrer l’Europe dans l’orbite états-unienne, au point d’inscrire sa collaboration à l’OTAN dans ses principes fondateurs..

Une Constitution con...
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Le sommet européen qui s’est clôturé en mars dernier à Bruxelles en a ainsi décidé : les Gouvernements des 15 états membres se le sont jurés, la nouvelle Europe (élargie à 25 états membres dans l’intervalle) aura “sa Constitution” pour le 17 juin 2004 au plus tard - soit dans 3 mois ! Et pas n’importe laquelle : un projet de texte suffisamment ouvertement ultra-libéral et militariste que pour avoir provoquer son rejet par l’ensemble des acteurs et mouvements sociaux européens, réunis en novembre 2003 au Forum Social Européen à Saint-Denis, les amenant à proclamer le 9 mai 2004 journée d’action européenne contre la Constitution.

Un projet ultra-libéral et militariste

Faut-il oui ou non une Constitution européenne ? La question n’est sans doute pas tellement là. S’il l’on soutient la construction d’une “ autre Europe ”, d’une Europe sociale et solidaire, alors oui, de toute évidence, il faut un nouveau traité, qui comble le déficit démocratique actuel des institutions européennes. Il faut un texte qui fixe les compétences réelles de chacune des instances de l’Union (Conseil, Commission, Parlement), afin que les citoyens que nous sommes sachent où se prennent les décisions et quels est notre pouvoir d’intervention sur celles-ci.

Mais ce n’est pas de cette Constitution là dont il est question aujourd’hui. Le projet soumis aux Gouvernements européens tend au contraire à figer le processus de construction européenne uniquement sur des bases économiques ultra-libérales. Il constitutionnalise un ordre économique dominé par les marchés financiers et une Banque Centrale Européenne à son service. Il consolide, et coule dans le marbre, le principe d’une Europe de la libre concurrence, dans le cadre d’une économie de marché ouverte (article II-69 du projet de Constitution). Il fait la portion congrue aux services publics, transformés pour l’occasion en “ services d’intérêt général ”, dont on peut craindre que la nouvelle appellation ne soit que le prélude de leur “ délégation ” (comprenez “ sous-traitance ” et “ privatisation ”) à des entreprises privées. Il ancre définitivement l’ensemble des pays européens dans le giron impérial des Etats-Unis, en faisant à plusieurs reprises référence à la coopération étroite que l’Union européenne devra obligatoirement établir avec l’OTAN (1).

Un véritable débat sur le projet de Constitution européenne : un impératif démocratique !

Si la dénonciation de ce texte fut vive dans les discussions tenues au Forum Social Européen, la mise en place d’une mobilisation effective dans chaque pays n’a donné, jusqu’à présent, que peu de résultats. Disons-le franchement, par leur tactique d’atermoiements, les partisans de ce projet de Constitution ont réussi, si pas à démobiliser et diviser les forces progressistes, du moins à endormir leur vigilance. Oubliés, apparemment, les engagements pris à Saint-Denis. Malgré leurs critiques vis-à-vis de ce projet constitutionnel, les organisations syndicales ont très vite fait cavalier seul et se sont désolidarisées du calendrier de mobilisation établi en commun au FSE. Résultat des courses : dans la plupart des pays européens, le 9 mai 2004, qui devait marquer un moment fort d’opposition à ce projet de Constitution, ne donnera sans doute pas lieu à des mobilisations imposantes. Plus aberrant encore : les partis politiques pourraient même en profiter pour se présenter aux élections européennes sans même aborder la question !

Il est pourtant urgent de briser la chape de plomb qui semble s’être tout doucement instaurée. Ouvrir un débat public et citoyen sur le contenu de ce projet de Constitution est un impératif démocratique ! Comment imaginer que les citoyens européens seraient amenés à élire leurs représentants au Parlement européen (sans beaucoup de pouvoir, au demeurant) au moment même où on leur impose un texte constitutionnel, et que la teneur de ce texte ne ferait même pas partie du débat électoral ?

Il est urgent de sortir les forces progressistes de leur léthargie (involontaire ou non), sans quoi les citoyens européens pourraient se réveiller un beau matin avec une Constitution ultra-libérale, inamovible et intouchable (puisque toute modification devra requérir l’unanimité des 25 états membres), sans même qu’un débat démocratique n’ait pu avoir eu lieu.

Il est urgent de mettre cette question à l’ordre du jour, d’entamer la discussion publique et démocratique de ce texte, de demander à nos représentants, dans nos parlements nationaux, sur les listes électorales qui nous seront prochainement soumise, de prendre position ... et de tenir leurs engagements. Attac, association citoyenne, y contribuera pour sa part, à n’en pas douter...

(à suivre .... )

Borhane MICHIELS
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(1) analyse dans “21 exigences d’ATTAC pour le traité constitutionnel”, novembre 2003 - disponible sur
www.france.attac.org/IMG/pdf/21_exigences.pdf

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