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Le partenaire d'affaires de Bush se paie une tranche d'Iraq
by Greg Palast (posted by Yannindy) Wednesday December 17, 2003 at 10:38 AM

Noël est en avance pour James Baker III

Ho ho ho. Noël est en avance pour James Baker III

 Pendant toute l'année, les elfes de son bureau d'avocats, Baker Botts du Texas, ont travaillé jour et nuit pour éviter que les familles des victimes du 11 septembre puissent obtenir la moindre information d'Arabie Saoudite sur le financement d'Al Quaeda par la famille royale de ce pays.

 Ce fut un dur travail, mais la récompense est arrivée début décembre, quand le président Bush a nommé James Baker III, un des associés de la firme, responsable de la "restructuration" des dettes de l'Iraq.

  Et qui va donc encaisser la montagne d'argent grâce au plan de Jim Baker? Réponse: son client, l'Arabie Saoudite, qui réclame 30.7 milliards de dollars US à l'Iraq, (plus 12 milliards de dédommagements pour la première guerre du Golfe).

 La marionnette au bout du fil.

 Voyons ce qui se passe ici.

 Nous parlons de quelque chose qui s'appelle 'dette souveraine'. Et à moins que Georges Bush ne se soit enfin confessé et se soit nommé Pacha d'Iraq, il n'est pas leur souverain. Mr Bush n'a donc aucune autorité pour prendre le contrôle des biens ou des dettes de ce pays.

 Mais le président ne va pas laisser une chose aussi triviale que le droit international se mettre en travers d'un profit rapide pour Mr Baker. Pour contourner le problème du manque de légitimité de Bush en ce qui concerne la dette iraquienne, la maison blanche a monté un joli petit subterfuge. Le président, selon le communiqué de presse officiel, n'a pas nommé Mr Baker, il a "répondu à une requête du conseil de gouvernement iraquien". Donc, Bush agit sous l'autorité d'un gouvernement fantoche qu'il a imposé par les armes au peuple iraquien.

 (Je ne doute pas cependant que ce "gouvernement" iraquien ait des connaissances en matière de finances internationales. Un de ses membres-clé, Ahmed Chalabi, est un escroc notoire et a été condamné pour ces faits).

 L'équipe Bush a certainement vu l'autre avantage à ce que ce soient les gouvernants fantoches d'Iraq qui fassent semblant de choisir Baker. Le Sénat n'aura en effet pas à discuter ni approuver cette nomination.

 Si vous avez un peu de mémoire, vous vous souviendrez que Henry Kissinger a fui la commission d'enquête sur le 11 septembre, sa firme de consultance entre les jambes, après que le Sénat lui ait demandé de fournir la liste de ses clients. Dans le cas de Jim Baker, qui agira de facto comme secrétaire US du trésor pour les affaires internationales, les élus du Congrès n'auront donc aucune chance de lui demander qui paie sa firme.. et ne pourront même pas lui demander de résoudre d'éventuels conflits d'intérêt.

 Pour l'administration Bush, cela marque un nouveau plancher dans leur politique de nominations de personnes ayant un conflit d'intérêt notoire.

 Ou peut-être qu'il n'y a pas de conflit du tout. Bien sur, dans ce cas, il faut bien voir que la travail de Baker n'est pas de protéger une nouvelle démocratie iraquienne, mais bien de protéger une vieille théocratie saoudienne.

 L'Iraq doit quelque chose entre 120 et 150 milliards de dollars, selon qui compte. Et celui qui compte est très important.

 Le plus gros de la soi-disant dette saoudienne a été donné à Saddam Hussein pour financer une guerre locale pour les Saoudiens contre leur ennemi juré, les chiites d'Iran. Et, selon un ancien diplomate saoudien, les cheiks du royaume ont fourni environ 7 milliards de dollars US à Saddam (sous la table, évidemment) dans les années 80 pour construire une "bombe islamique".

Les Iraquiens d'aujourd'hui et leur descendance à naître doivent-ils être mis dans une prison de débiteurs pour rembourser les fonds secrets versés à Saddam?

James Wolfensohn dit "Non!". Wolfensohn, président de la banque mondiale, n'a jamais figuré sur ma liste de cartes de Noël, mais dans ce cas-ci, il a raison: l'Iraq devrait tout simplement éliminer cette dette de 120 milliards.

En temps normal, c'est la banque mondiale qui est chargée de la restructuration d'après-guerre. C'est pourquoi le nom officiel de la banque mondiale est "Banque internationale pour la reconstruction et le développement". C'est un des domaines d'expertise de cette banque. Bush a envoyé Baker en vitesse, pour éviter cette suppression pure et simple de la dette que la banque mondiale aurait certainement promu.

"J'ai arrangé le problème en Floride"

Pourquoi le président Bush est-il à ce point concerné par les désirs de Mr Baker? Que lui doit-il? Remontons aux élections de 2000.

Il y a deux semaines, Baker disait: "J'ai arrangé les élections en Floride pour George Bush". C'était le sens de sa remarque à une audience de notables russes, qui m'a été rapporté par un collègue de la BBC assez surpris.

C'est Baker, le conseiller de la famille Bush, qui a imaginé la stratégie de déplacer le compte des votes de Floride en 2000 vers une cour suprême remplie de politiciens.

La prétention de Baker d'avoir réglé les élections n'est pas une confession. C'est la vérité. Il cherchait à impressionner des clients potentiels de l'ex-Union Soviétique en montrant à quel point il avait ses entrées chez les grand garçons de la maison blanche. La firme de Baker est déjà un joueur de premier plan dans le grand jeu "Voler le pétrole de la mer Caspienne". (Un responsable d'Exxon-Mobil, client de Baker Botts, a été accusé d'évasion fiscale sur des pots-de-vin payés au Kazakstan).

C'est de famille

Durant des années, Baker a pris la responsabilité de mettre du beurre dans les épinards de la famille Bush. Comme conseiller en chef chez Carlyle, le groupe d'investissement marchand d'armes, Baker s'est arrangé pour que la firme engage le président Bush 41 après qu'il se soit fait virer de la maison blanche et le président bush 43 pendant que son papa était encore en fonctions.

En y repensant, je suis peut-être un peu trop critique par rapport au gouvernement fantoche iraquien. Après tout, ce n'est pas comme si Georges Bush avait été élu par les électeurs. Ce serait peut-être plus correct de dire que deux gouvernements fantoches se sont mis d'accord pour laisser celui qui a toujours tiré les ficelles de venir sur scène, saluer le public, prendre le job, prendre l'argent, et s'enfuir.

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Greg Palast est l'auteur de "The best democracy money can buy". Il est aussi journaliste d'investigation pour la BBC et The Observer. Il a été le premier à dévoiler le trucage des élections en Floride organisé par Jeb Bush pour permettre à son frère d'être nomme président.

http://www.gregpalast.com