Echec de l'OMC, victoire de l'Humanité by Ana Martin, Arantzazu Saratxaga, Josu Egireun Monday September 15, 2003 at 09:59 PM |
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L'OMC a clôturé sa Ve Conférence ministérielle par un échec fracassant. Et l'écho de ce fracas résonne sur ces terres d'Amérique latine où l'on rappelle une « résistance depuis plus de 500 ans ». La Conférence s'est donc soldée par une échec et ce malgré les énormes pressions exercées tout autant par les multinationales (ERT, ICC, UNICE...) que par les Etats-Unis et l'Union européenne sur les « pays en voie de développement », et tout particulièrement sur le groupe des 22 regroupé autour du Brésil.
L'OMC a clôturé sa Ve Conférence ministérielle par un échec fracassant. Et l'écho de ce fracas résonne sur ces terres d'Amérique latine où l'on rappelle une « résistance depuis plus de 500 ans ». La Conférence s'est donc soldée par une échec et ce malgré les énormes pressions exercées tout autant par les multinationales (ERT, ICC, UNICE...) que par les Etats-Unis et l'Union européenne sur les « pays en voie de développement », et tout particulièrement sur le groupe des 22 regroupé autour du Brésil. Les pressions et les vils marchandages n'ont pas manqué. Ainsi, dans une tentative désespérée de la dernière heure, on a proposé au Brésil d'être accepté dans le bloc des pays dévelooppés (avec tous les avantages consécutifs dans l'OMC) dans le but de briser la cohésion de son groupe de pays alliés. Le Brésil a notoirement refusé cette « proposition » (entre autres raisons parce que c'était tout bonnement se mettre la corde autour du cou) et Zellick, le représentant des Etats-Unis, n'a pas pu s'empêcher de montrer sa rage en déclarant qu' « à Cancún, certains sont venus travailler alors que d'autres ne sont pas venus pour travailler. C'est cela qui s'est passé. »
Les mouvements sociaux qui ont animé les mobilisations contre ce sommet ont évidement une toute autre perception des choses. Nous étions conscients que depuis Seattle, où le Millenium Round a dû être reporté, l'OMC battait de l'aile mais qu'il fallait encore de grands efforts pour la mettre en échec, même si nous étions sur la bonne voie. Une voie qui a su surmonter l'épreuve des attentats du 11 septembre et la difficulté pratique de mener des mobilisations pendant le sommet de Doha au Quatar.
Nous savions que nous venions à Cancún dans un contexte d'une crise interne visible de l'OMC, illustrée par le fait qu'au cours du processus préparatoire, aucun document de consensus n'avait pu être rédigé afin d'encadrer les négociations. Nous étions également conscients que malgré les difficultés rencontrées afin d'organiser les mobilisations à Cancun, elles allaient êtres massives, entre autres parce que nous avions obtenu grâce à la solidarité internationale les fonds nécessaires pour que 10.000 paysan/ne/s et des communautés indigènes puissent participer. De plus, nous comptions sur la mobilisation de la jeunesse et des syndicats. Il y eu finalement 200.000 personnes contre l'OMC dans les rues de Cancún.
Mais ce qui constitue le fait le plus important de ces mobilisations, ce sont ses caractéristiques. D'une part, il y a cette marée verte (la couleur des foulards et casquettes de la Via Campesina) qui a innondé les rues de la ville le 10 septembre, une marée constituée par les communautés indigènes et paysannes qui sont arrivé du Mexique profond ou même de Corée, avec le message que l'OMC volait leur vie et qu'il était urgent de faire échouer le sommet. D'autre part, il y a une compréhension politique claire – surtout après la constitution du groupe des 22 – que pour mettre en échec le sommet, la pression des mouvements sociaux était nécessaire.
Il y a eu ainsi l'articulation de deux dynamiques de lutte; ce que l'on appelait ici l'«inside » (à l'intérieur du sommet) et l'« outside » (dans la rue). Dès le premier jour, les protestations se sont faites aussi à l'intérieur du palais qui abritait le sommet (grâce à la présence de délégués d'ONG et d'organisations sociales); elles ont perturbé les cérémonies officielles tandis que les manifestations massives et les actions de tout type se déroulaient dans les rue, le tout créant un climat de chaos et d'instabilité.
Et puisqu'il y avait une compréhension claire de la crise qui se dévelopait dans le sommet, on a opté pour radicaliser la lutte, en transgressant les règles établies par eux, entre autre la « Zone rouge » qui interdisait l'accès au Palais des Congrès.
C'est pour cela que le 10 septembre nous avons « brisé » la « Zone rouge » et, bien qu'en nombre réduit au final, nous avons pu pénétrer dans cette zone. Mais l'élement déterminant de la confrontation à partir de ce jour-là fut la mort de Lee Kyung Hae, ce drame qui a permis de créer une véritable communauté entre les différents mouvements sociaux, avec un profond sentiment de solidarité et la conscience qu'il fallait agir ensemble tout en gardant la tête froide.
Le capital politique accumulé était énorme, tout comme la sympathie de la population de Cancun, il ne fallait donc pas le gaspiller par des méthodes inappropriées. C'est pour cela que la manifestation du 10 septembre se voulait non-violente tout en étant très radicale; on ne voulait pas se limiter à nous arrêter à l'arrivée, mais bien de mettre à bas les barrières qu'ils nous avaient dressées. Le caractère organisé de l'objectif de la marche prenait forme dans son ordonnance même; les femmes étaient en première ligne afin d'affirmer le caractère pacifique et elles étaient protégé par un service d'ordre du Black Bloc afin d'empêcher toute tentative d'infiltration par des provocateurs et de mener à bien le renversement des barrages à l'aide d'énormes cordes tirées par des centaines de personnes.
Le barrage s'est finalement renversé et, de là, symboliquement, on a mis le feu à l'OMC et... au drapeau des Etats-Unis. Et tout cela dans un face à face littéral avec un énorme dispositif policier qui n'a pu qu'assister, impuissant, au spectacle.
Dès que le barrage fut abattu, la marche s'est arrêté car l'on ne cherchait pas l'affrontement avec la police, l'événement est devenu un hommage à celui qui était devenu le symbole de cette lutte, à notre frère Lee. Comme on le souligne dans la Déclaration du Réseau des Mouvements Sociaux, « La mort de Lee est un cri des opprimés et un coup mortel contre l'OMC ». Il aura fallu 24 heures pour confirmer, non pas encore la mort de l'OMC – pour cela nous devons continuer à lutter – mais bien l'échec fracassant de l'OMC en sa Ve Conférence Ministérielle. Un échec qui représente un véritable triomphe pour l'humanité.
Il s'agit désormais de maintenir vivace notre engagement. Car la lutte contre l'OMC et les politiques néolibérales ne s'arrête pas le 14 septembre 2003 à Cancun, elle doit au contraire se poursuivre dans tous les pays, sur tous les continents. Nous qui avons été à Cancun, nous sommes convaincus que l'éffort valait le coup, que le mouvement sort renforcé de cette lutte et que, plus que jamais, il faut globaliser la lutte, la solidarité et l'espérance.
Ana Martin, Arantzazu Saratxaga, Josu Egireun (activistes de l'organisation sociale antiglobalisation basque « Etam Munduan »)
Texte publié par nos camarades d'Espacio Alternativo (Etat espagnol), http://www.espacioalternativo.org
Traduction: http://www.sap-pos.org