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SERBIE : LES CONFLITS DE CLASSE SONT UN APHRODISIAQUE POUR LA COMMUNICATION
by . Wednesday September 10, 2003 at 10:02 AM

Ces derniers temps en Serbie, politiciens et bureaucrates syndicaux semblent beaucoup s'intéresser à l'anarcho-syndicalisme.

SERBIE : LES CONFLITS DE CLASSE SONT UN APHRODISIAQUE POUR LA COMMUNICATION


http://cnt-ait.info/article.php3?id_article=766


Ces derniers temps en Serbie, politiciens et bureaucrates syndicaux semblent beaucoup s'intéresser à l'anarcho-syndicalisme.

C'est ainsi que Dusan Mihajlovic, ministre d'Etat de la police, a, en
public, demandé pourquoi un camarade de l'Initiative Anarcho-Syndicaliste
avait été libéré au bout de trois jours lors de l'état d'urgence. Il s'en
est aussi pris à quelques gros hebdomadaires qui avait parlé de l'IAS de
cesser de le faire car avec ces articles " ils transformaient les
anarchistes en héros " et que " la dernière chose dont on a besoin, c'est
d'anarchistes ".
Dragan Milovanic, ministre d'Etat du travail, a prononcé un discours
télévisé contre l'anarcho-syndicalisme.

Aleksandre Vlahovic, ministre d'Etat aux privatisations, a présenté
devant les caméras de télévision sont rapport annuel sur la
privatisation. Il a indiqué que la privatisation se passe bien mais que "
des groupes subversifs anarcho-syndicalistes distribuent leur journaux,
poussent les ouvriers à la grève, chassent les investisseurs étrangers et
tentent de renvoyer le pays vers le moyen-âge ".
Miljenko Smiljanic, secrétaire général de la Confédération des Syndicats
Autonomes de Serbie, la plus grande centrale syndicale, a affirmé que si
le gouvernement refusait de signer un accord avec lui, on risquait
d'assister " à un développement de l'anarcho-syndicalisme ". il faut dire
que plusieurs syndicats adhérents à cette confédération sont en contact
avec l'IAS, et que ce bureaucrate craint de perdre des adhérents.
Pour répondre à ces calomnies, le groupe de Belgrade de l'IAS a écrit le
texte suivant, publié le 10 juillet dans le plus grand hebdomadaire de
Serbie, le " NIN " (journal d'information hebdomadaire). C'est
certainement, depuis la création de ce magazine en 1935, la première fois
qu'un texte signé par un collectif, et non par un individu, est publié.
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Récemment, il est beaucoup question d'anarcho-syndicalisme, et le plus
souvent on en parle sur la base de préjugés ou d'idées intentionnellement
fausses. Nous ne sommes pas surpris par le peu d'éducation et le haut
degrés d'ignorance des membres du gouvernement. Leurs responsabilités et
leurs connaissances éclatent au grand jour, mais jamais ils ne prennnent
leurs responsabilités ; par contre, nous sommes enragés de voir que des
représentants auto-proclamés des travailleurs, les bureaucrates
syndicaux, racontent des choses insensées en public, et font le travail
du gouvernement en lui donnant " la main de la réconciliation ".
Durant ces derniers mois, monsieur Milenko Smiljanic [1], président de la
SSSS, a constamment mis en garde le gouvernement serbe que, s'il refusait
de coopérer avec lui, il devrait faire face à une radicalisation des
protestation, à la création d'anarcho-syndicats, et enfin, à une fou
déferlement des masses.
Pour tous ceux qui connaissent un peu les positions des
anarcho-syndicalistes, que ce soit ici ou ailleurs dans le monde, il est
clair que nous sommes en face d'une propagande bon marché, faite par un
bureaucrate dont les positions sont sérieusement ébranlés par des
adhérents insatisfaits et excédés. Les anarcho-syndicats n'ont jamais et
nul part propagé la violence gratuite et l'émeute dans les rues. Ce que
nous disons depuis longtemps, c'est que si nous parvenons à obtenir nos
droits de façon civilisée, nous ne sommes pas prêts à accepter les
barbaries et que nos vies soient modelés selon leur bon plaisir. Au
contraire, nous devons alors réagir de la seule façon qu'ils
comprennent.En ce sens, Smiljanic a tout à fait raison de défendre les
ouvriers de Kragujevac qui s'en sont pris violemment aux représentants du
gouvernement [2] : si il est facile pour les politiciens de continuer
leurs activités criminelles, l'ouvrier licencié après des années de
travail, lui, n'a plus aucune perspective dans cette société. Notre idéal
est une société sans violence. Notre but est une société libre
d'individus responsables, égaux et solidaires.Durant toutes les guerres
passées, des anarcho-syndicalistes ont été diffamés, arrêtés, torturés et
assassinés pour leurs anti-militarisme. Nous ne sommes vraiment
fétichistes de la violence. Mais cela ne signifie pas que nous allons
nous asseoir, les mains sur le cul, et accepter que nos vies se dégradent
sous le rouleau compresseur des privatisations. Nous utilisons tous les
moyens à notre disposition, qui ne sont pas en
contradictions avec notre éthique et qui peuvent servir les travailleurs
et autres opprimés, pour arriver à nos fins.Quoiqu'il en soit, laissez
nous retourner la question, laissez nous interroger l'Etat et les patrons
sur ce qu'ils pensent de la violence. Qui commence les guerres et
pourquoi ? Qui utilise la police à l'encontre de ceux qui pensent
autrement ?Qui envoie des vigiles et des gardes du corps lorsqu'il veut
reprendre par la force les usines occupées par les ouvriers ? Qui propage
et met en place un modèle économique qui pousse des millions d'êtres
humains dans uneconstante exploitation ? C'est ça la violence, une
violence très évidente et très brutale.
Mais, c'est la violence qu'utilisent les patrons et politiciens pour que
leurs intérêts soient intouchables.

Les bureaucrates syndicaux mettent en garde le gouvernement sur "
l'anarcho-syndicalisme ", afin de gagner les sympathies du gouvernement
et de défendre leurs privilèges obtenus par les négociations et la
pacification des ouvriers. Nous n'espérons pas des politiciens qu'ils
aient une haute opinion de nous, nous n'avons que faire de ce qu'ils
pensent (si jamais ils pensent), mais une des raisons pour laquelle les
bureaucrates syndicaux tentent de diffamer et de rejeter nos méthodes
dans la lutte pour les droits des ouvriers est intéressante : des
adhérents désappointés des " grands " syndicats, face aux fossiles de la
bureaucratie syndicale et aux montagnes de mensonges, commencent à
quitter massivement leurs centrales syndicales. Comprenant
progressivement l'inefficacité des syndicats hiérarchisés et
autoritaires, plusieurs unions locales et régionales de la SSSS ont pris
contact avec notre syndicat. Chaque être humain civilisé et responsable
comprend qu'il est clair que sa voie sera mieux entendue dans des
syndicats
non-hiérarchiques, fonctionnant sur la base dela démocratie directe, où
les décisions ne sont prises que par les adhérents, et pas par des
bureaucrates, payés par ceux d'en haut, et qui n'ont pour cela pas les
mêmes intérêts que ceux qu'ils sont sensés représentés.
Contrairement aux principales confédérations, dans notre syndicat, les
décisions de sont prises ni par les leaders (SSSS), ni par le
gouvernement serbe (ASNS) ni par des fonds étrangers (Nezavisnost) mais
uniquement par les adhérents [3]. Nos statuts ne permettent aucune autre
option dans la prise de décision.
Lors de la marche de protestation du 25 juin, Smiljanic et sa clique ont
constamment tenté de nous séparer des autres manifestants, même si ils
devaient donner des réponses affolées aux ouvriers qui voyaient les
vraies raisons de leur comportement. (...)
Nous allons répéter ce qui est à la base de notre action. Nous n'avons
choisi d'attaquer personne. Nous vivons tous cette guerre permanente de
l'Etat contre la société et des patrons contre les travailleurs. Cela
apparaît clairement dans les relation de l'Etat vis-à-vis des médias
[4]... Nous répondons à ces attaques. Nous nous défendons. La société
peut organisé sa résistance de différentes façons, mais la seule façon
d'en finir une fois pour toute avec cette société d'exploitation, le
pouvoir d'humains sur d'autres humains, la souffrance, la douleur, la
pauvreté et les mensonges,consiste en l'organisation, ici et maintenant,
de syndicats révolutionnaires qui ne cesseront le combat qu'une fois que
nous vivrons dans la liberté.
Cela signifie que nous n'avons pas besoin d'un nouveau Valensa ou d'un
autre bureaucrate qui renforcera sa position avec l'Etat, sur le dos des
ouvriers. Aussi, conscients des origines et des moyens qui nous ont mis
dans cette situation humiliante, il est clair pour nous que nous refusons
de nous interroger sur des questions comme quel parti doit être au
pouvoir ou s'il faut collecter des signatures pour tel politicien contre
tel autre. Est-ce que le changement de gouvernement peut amener quoi que
ce soit d'important aux travailleurs ? Combien de fois faut-il
expérimenter que l'on ne peut porter notre confiance sur des politiciens
? Les politiciens et lespatrons travaillent ensemble pour défendre leurs
privilèges. Laissons les à leurs querelles, et concentrons nous sur nos
buts : une vie meilleure ici et maintenant.Devons nous protester dans les
rues ? Bloquer les routes ? Occuper les usines jusqu'à ce que nos
revendications soient satisfaites ? Demander la journée de quatre heures
?La grève générale jusqu'à la satisfaction de tous nos objectifs ?
Quelqu'un peut-il nous interdire ces actions ?

Un régime dictatorial a d'ores et déjà été renversé par ces formes
d'actions, et un autre s'est servi du chaos pour accéder au pouvoir. Nous
ne devons plus jamais laisser les politiciens et les patrons utiliser nos
luttes pour leurs propres buts. Nous n'avons pas besoin d'une
nouvellecoopération avec les partis politiques. Nous n'avons pas besoin
de leur soutien. Pour la création de nouvelles relations sociales,
égalitaires et non-hiérarchiques entre les êtres humains, comme pour tous
les apports positifs de la civilisation que nous avons obtenu contre les
forces sombres de l'obscurantisme, nous n'avons pas besoin de chefs ou de
leaders, mais juste d'un peu de respect mutuel. Les " penseurs "
post-modernes tentent de nous convaincre que nous vivons dans une époque
où les idéaux ne représentent plus rien. Nous n'embrassons pas cette
idée, caren acceptant une telle conception, le genre humain devrait
considérer que les faibles créatures qui dans l'histoire n'ont recherché
que la satisfaction de leurs petits intérêts égoïstes auraient eu raison.

Avant toute chose, nous luttons pour la dignité humaine.

Groupe local de Belgrade de l'Initiative Anarcho-Syndicaliste

Pour tout contact :
Secrétariat International : is@inicijativa.org

Article de HOBOCTb, Numéro double, N°14/15 été/sept 2003

c/o CESL - BP 121 - 25014 Besançon cedex
Mail (nouvelle adresse) : novost@no-log.org

[1] Leader de la plus grande centrale syndicale de Serbie, la
Confédération des Syndicats Autonomes de Serbie (SSSS en serbo-croate),
syndicat officiel de l'appareil d'Etat yougoslave à l'époque titiste,
puis syndicat qui a apporté son soutien à Milosevic pendant son régne.
[2] Les ouvriers de l'usine de voitures et de fusils " Zastava " à
Kragujevac ont tenté de cogner le ministre des finances lors de sa
visite.

[3] L'ASNS est le syndicat jaune du gouvernement serbe, son dirigeant est
le ministre du travail ; Nezavisnost (indépendance) est un syndicat très
lié à l'AFL-CIO américaine.

[4] Le gouvernement serbe a récemment lancé des poursuites judiciaires
contre plusieurs magazines (dont NIN) et stations de radio et de télé qui
ont critiqué son oeuvre.