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FGTB: Evaluation de l'Accord Gouvernemental
by FGTB Wednesday July 16, 2003 at 01:32 AM

La FGTB a pris connaissance du fait que le nouveau gouvernement avait l’ambition, compte tenu du réel danger de déflation et de récession, de donner de nouveaux incitants pour la reprise économique, pour la création de deux cent mille nouveaux emplois et pour un passage rapide à une société de connaissance afin de maintenir la prospérité dans une Union européenne élargie et dans un environnement mondialisé.

La FGTB se réjouit de pouvoir constater que le gouvernement veut faire une synthèse des préoccupations économiques, sociales et écologiques en voulant mener une politique d’encouragement du développement durable qui laisse une marge pour la concertation sociale. Ce dernier point sera immédiatement concrétisé par l’organisation d’une conférence sur l’emploi en septembre.

Même si les intentions sont bonnes, diverses orientations restent vagues et suscitent des questions – en partie à cause de l’absence d’évaluation claire du coût et d’un financement indicatif.

De plus, on ne sait toujours pas dans quelle mesure les différentes mesures – y compris celles en matière de sécurité sociale – permettent de maintenir un équilibre suffisant entre les salariés et les indépendants et plus encore, dans quelle mesure les mesures fiscales contribueront à davantage ou à moins de justice fiscale.

Un architecte peut très bien avoir de bonnes intentions. Son travail ne pourra être évalué que quand la maison sera terminée. La FGTB suivra donc la mise en oeuvre concrète de l’accord gouvernemental avec vigilance.

1. EMPLOI

L’ambition du gouvernement de créer 200.000 nouveaux emplois correspond tout à fait à la priorité qu’a demandée la FGTB pour l’emploi. La FGTB veut donc participer de façon constructive à la conférence sur l’emploi de septembre mais constate déjà que l’objectif des 200.000 emplois supplémentaires:

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ne sera qu’une apparence trompeuse si le gouvernement décide parallèlement de supprimer des dizaines de milliers d’emplois dans les entreprises publiques.
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ne sera que de la poudre aux yeux si ce chiffre est obtenu en promouvant les (petits) boulots à temps partiel. C’est pourquoi la FGTB s’oppose aux incitants supplémentaires qui seraient orientés vers la promotion des emplois précaires.
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doit surtout être orienté vers la promotion de l’emploi chez les salariés en âge de travailler et pas en encourageant le travail autorisé après l’âge légal de la pension.

La FGTB se réjouit toutefois que le gouvernement ait clairement fait référence, à l’annonce de la conférence sur l’emploi, à la responsabilité des employeurs et qu’il veuille supprimer les anomalies des anciennes réductions de charges en:

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ne proposant pas de réductions des charges linéaires mais bien des réductions ciblées.
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demandant des efforts supplémentaires et concédés après concertation sur la formation et la création d’emplois.
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veillant, lors de la nouvelle réduction des charges, à supprimer les pièges salariaux – comme la FGTB l’exigeait. Ainsi, les augmentations salariales ne seront plus freinées par peur de perdre les réductions de charges et la nouvelle technique permettra de viser, lors des prochaines négociations de l’AIP, à une augmentation du revenu mensuel brut garanti.

La FGTB attend que toutes les mesures d’emploi annoncées puissent être discutées en profondeur lors de la conférence sur l’emploi et que l’on travaille avec un ordre du jour ouvert. La FGTB utilisera en tout cas la conférence pour:

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souligner que les réductions de charges ne permettent pas nécessairement de créer des emplois et donc élaborer des propositions pour mieux coordonner les nouvelles réductions des charges. Ainsi, il nous semble nécessaire de rendre plus efficace l’extension des réductions de charges pour les plus de 55 ans en rendant plus difficile le licenciement des travailleurs âgés (surtout celui des ouvriers).
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exiger des efforts supplémentaires pour rattraper le retard que la Belgique a pris dans les efforts de formation: aujourd’hui, nous sommes revenus au niveau de 1998 en termes d’efforts de formation et le fossé par rapport aux autres pays voisins est devenu deux fois plus grand.
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exiger qu’en contrepartie des avantages pour les employeurs, il y ait également des avantages pour les travailleurs. Si le plafond pour la réduction des cotisations patronales est relevé à 2000 euros, tous les travailleurs qui ont un salaire mensuel jusqu’à 2000 euros doivent bénéficier d’une réduction des charges. Ceci permettrait de donner une augmentation à près d’1,5 million de travailleurs (860.000 personnes de plus que le groupe qui bénéficie actuellement d’une cotisation réduite).
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veiller à un financement alternatif suffisant de la sécurité sociale qui compensera au moins les nouvelles réductions de charges et qui sera plus favorable à l’emploi, comme demandé dans notre mémorandum.
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conclure des accords concrets sur la façon dont la suppression du contrôle de chômage et l’introduction d’un accompagnement, avec des programmes de formation, pourraient aboutir de façon optimale à un emploi régulier et ainsi éviter que cette mesure n’aboutisse à un nouveau mécanisme d’exclusion pour les chômeurs. A ce sujet, nous plaiderons également pour une augmentation des moyens de fonctionnement pour l’accompagnement et pour la suppression immédiate de l’art.80, ce qui n’empêche pas qu’il faut lutter contre les abus dans l’assurance chômage.
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La politique industrielle, l’innovation, la recherche scientifique, les investissements publics et la mobilité doivent être mis à l’ordre du jour de la conférence sur l’emploi:

La FGTB:

- signale qu’il est inacceptable de réintroduire un plafond pour les cotisations sociales alors qu’il y a un manque de moyens pour un véritable système d’adaptations au bien-être tant des plafonds de calcul que des allocations sociales mêmes.

- souhaite plus de clarté sur l’orientation prise pour décourager la pension anticipée. Elle souligne qu’actuellement les personnes qui ont encore une carrière de 45 ans sont plutôt rares. Elle n’acceptera pas de mesure qui revient à une diminution déguisée des pensions des travailleurs.

2. SÉCURITÉ SOCIALE

La FGTB se montre satisfaite de la volonté du gouvernement de maintenir des soins de santé accessibles et de qualité et de tenir compte – en prévoyant une croissance des dépenses de 4,5% en termes réels – de l'augmentation des coûts résultant du vieillissement et de l'existence de besoins nouveaux. Mais cela implique aussi une plus grande responsabilisation du côté de l'offre.

En ce qui concerne les allocations, l'accord gouvernemental prévoit la mise en œuvre d'une programmation pluriannuelle "permettant une liaison au bien-être de certains plafonds et seuils de revenus ainsi que de certaines allocations sociales".
Cette intention est très importante pour la FGTB, mais elle reste encore très vague.

C'est pourquoi la FGTB exige :

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Une programmation pluriannuelle avec un contenu significatif qui, selon la FGTB, doit être lancée en 2004 déjà et qui doit donner une idée précise de la future liaison des allocations et des plafonds de calcul au bien-être afin d'offrir des perspectives réelles aux allocataires.
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L'ampleur des marges budgétaires offertes pour les améliorations sociales et les intentions précises en matière de financement alternatif.
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Le mode de financement des améliorations sociales proposées pour les indépendants qui ont droit à un statut social décent, mais à condition qu'ils fassent un effort de financement équivalent à celui des salariés.

Force est de constater que l'accord gouvernemental n'offre aucune perspective pour une amélioration des allocations de chômage alors que le chômage ne cesse d'augmenter de semaine en semaine et que même un programme d'emploi ambitieux ne pourra pas remettre au travail tous les demandeurs d'emploi.

La FGTB, constatant que le gouvernement veut qu'on s'attelle rapidement à harmoniser le statut ouvrier et employé, se réjouit de constater que le gouvernement entend respecter ce qui a été convenu dans le cadre de l'AIP, c'est-à-dire de régler question par priorité entre les interlocuteurs sociaux.

3. ENTREPRISES PUBLIQUES ET SERVICES PUBLICS

La FGTB rappelle son opposition à la suppression possible de dizaines de milliers de postes de travail dans les entreprises publiques. Elle rejettera le désengagement massif ou la marginalisation des travailleurs les plus vulnérables et souvent les plus jeunes et exigera qu’une véritable concertation soit entamée avec les syndicats des services publics et insiste entre-temps pour qu’il y ait:

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certitude que le pool de la mobilité soit seulement organisé et géré par la fonction publique. Il serait inacceptable de recourir à des agences d’intérim
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une alternative au Plan Vinck de façon à ce que la SNCB soit capable de relever le défi de l’augmentation sensible du trafic de voyageurs tout en respectant la qualité des services et en garantissant la sécurité. Il faut donc chercher un juste milieu entre le plan d’entreprise et le plan d’investissement. A ce sujet, la mise en service rapide des trains à deux étages est un élément très important.
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un projet crédible et une stratégie claire pour garantir l’avenir des services et de l’emploi à La Poste de façon à rassurer le personnel
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un plan de nomination à la fonction publique pour le personnel contractuel plutôt que de prévoir pour eux un plan de pension complémentaire

4. FISCALITE

La FGTB doute que les mesures fiscales annoncées (qui impliquent une augmentation importante des impôts indirects) contribueront effectivement à rendre la fiscalité plus équitable et à éliminer les discriminations fiscales entre le travail et le capital :

* La lutte contre la fraude fiscale et la volonté d'organiser une meilleure perception de l'impôt font partie des priorités de la FGTB, mais la question est de savoir si les mesures annoncées – qui vont dans le bons sens – permettront de concrétiser rapidement une action "monnaie d'échange" ambitieuse qui rapporte suffisamment pour financer les réductions de charges annoncées. Celles-ci entraînent une diminution immédiate des recettes alors que les mesures de lutte contre la fraude ne produiront leurs effets qu'à moyen terme.
* Il n'est pas question d'une cotisation sociale généralisée susceptible de rendre plus équitable le financement alternatif de la sécurité sociale
* La directive européenne concernant l'épargne qui entrera en vigueur en 2005 prévoit que les Belges qui ont placé leur épargne dans d'autres pays de l'UE paieront un précompte mobilier progressivement plus important (allant jusqu'à 35%). De plus, 75% du produit de ce précompte seraient versées au Trésor belge. Alors que la FGTB avait proposé d'affecter ce produit à la sécurité sociale à titre de financement alternatif, le gouvernement propose d'instaurer une régularisation fiscale pour permettre de rapatrier les capitaux placés à l'étranger contre paiement d'une amende. Pour la FGTB, cette mesure pose des questions d'ordre éthique et moral.

C'est pourquoi la FGTB exige que l'instauration de cette mesure soit subordonnée à des conditions très sévères :
o Une amende suffisamment lourde, même si le tarif peut être moins élevé pour les petits épargnants;
o Une liaison stricte à la suppression immédiate des titres au porteur (dématérialisation des titres) et donc à la création d'un cadastre des fortunes;
o Le produit des amendes doit être affecté à la sécurité sociale ou, compte tenu du caractère unique de cette mesure, au Fonds de vieillissement.
* La FGTB constate que la note gouvernementale prévoit plusieurs nouvelles mesures fiscales pour soutenir les entreprises et en premier lieu les PME (nouvelle dispense des réserves d'investissement, nouvelles possibilités pour les particuliers d'investir dans les PME) et des diminutions de TVA. Elle demande que ces mesures soient neutres sur le plan budgétaire.
* La FGTB constate également que l'accord gouvernemental prévoit une baisse continue de la pression fiscale et parafiscale. La FGTB pense plutôt
o qu'il faut à court terme une redistribution de la pression fiscale au profit des revenus du travail et de certains revenus de remplacement qui n'ont pu profiter de la réforme fiscale (not. Les travailleurs prépensionnés à partir du 1/1/2004);
o qu'à cette fin, le gouvernement devra élargir son programme de travail fiscal en renforçant la taxation du capital et en prenant des mesures anti-fraude plus énergiques.

5. L’ENVIRONNEMENT, LA MOBILITÉ ET LE DÉVELOPPEMENT DURABLE

En matière de mise en œuvre du protocole de Kyoto, la FGTB relève notamment avec satisfaction :

* la volonté de réaliser la nécessaire réduction des émissions de gaz à effet de serre, notamment par une fiscalité plus verte, incitant les divers secteurs à adopter des technologies plus efficaces en matière énergétique et à réduire la consommation énergétique, sans toucher socialement les ménages.
* La décision de création immédiate de la Commission nationale climat et de soutien maximal à la recherche et développement de technologies plus efficaces en matière énergétique.

La FGTB estime toutefois nécessaire de clarifier les points suivants:

* les accords de branche qui seront conclus dans les entreprises doivent donner lieu à une information et à une concertation avec les représentants des travailleurs, qui seront directement concernés par ces accords.
* Les réductions d’impôt qui seront étendues pour les mesures prises dans les habitations viseront aussi les dispositifs visant aux économies d’énergie.
* La cotisation de compensation des accises devrait également s’appliquer aux transports en commun. - Le nouveau plan d’équipement indicatif qui doit être élaboré doit également contenir une politique visant à maîtriser la demande. Sans cette politique, les systèmes d’énergie alternative (qui doivent remplacer les centrales nucléaires) risquent d’être insuffisants.

En matière de mobilité, la FGTB relève notamment le fait que le Gouvernement souhaite encourager une approche globale favorisant l’utilisation des transports ferroviaires, maritime, fluvial, le recours aux transports publics, une meilleure protection des usagers faibles, …
En matière de déplacements domicile-lieu de travail, la FGTB soutient le développement de transports publics de qualité à un prix le plus bas possible et demande qu’une concertation avec les partenaires sociaux et avec les régions soit organisée pour tendre vers une approche globale et cohérente qui viserait notamment :

* une meilleure correspondance entre les horaires de tous les moyens de transports publics
* une meilleure correspondance entre les horaires des transports publics et ceux des entreprises
* l'aménagement de suffisamment de parkings aux alentours des gares
* la mise au point de plans de transport d'entreprise et l'organisation de transports collectifs par les entreprises (ramassage des travailleurs à la gare), certainement dans les entreprises non encore desservies par les transports en commun
* des mesures visant à mieux desservir les zonings industriels par les transports en commun.

6. PROMOTION DE LA DEMOCRATIE

Le mémorandum de la FGTB comprenait plusieurs propositions pour approfondir la démocratie politique et économique.

La FGTB

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Regrette que l'accord gouvernemental ne fasse pas la clarté sur l'octroi du droit de vote aux immigrés et espère qu'une majorité pourra être trouvée au Parlement pour réaliser cette revendication.
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Constate que l'accord gouvernemental prête de l'attention à la mise en œuvre des obligations européennes en matière d'information et de consultation des travailleurs et en ce qui concerne le lancement d'un dialogue social adapté dans les PME. La FGTB quant à elle continuera à œuvrer dans le cadre de la concertation en faveur d'une présence syndicale adaptée dans les PME et attend que le gouvernement intervienne au cas où cette concertation échouerait.

7. JUSTICE

La FGTB note avec satisfaction que l’accord gouvernemental offre une réponse à sa revendication d’améliorer l’accès à la justice en augmentant et modalisant les conditions de revenus.

L’amélioration de la compréhension et de la transparence des documents judiciaires participe également à l’amélioration de cette accessibilité, comme nous l’avons obtenu dans le cadre de la Charte de l’assuré social.

De même, la spécificité des juridictions du travail et de son auditorat est préservée et même renforcée (nouvelle compétence relative au surendettement). Il faudra cependant être attentif au développement de formules extra judiciaires de résolution de conflits (médiations etc.) afin de ne pas donner naissance à une justice à deux vitesses.

La FGTB regrette cependant que ce chapitre Justice soit muet sur le volet de la réforme du droit pénal social, réforme pourtant nécessaire pour améliorer l’effectivité de la lutte contre la fraude sociale.

8. EUROPE

La FGTB constate que l'accord gouvernemental défend une vision proche de la sienne :

*
renforcement des politiques économique, sociale et budgétaire et un meilleur équilibre entre les politiques économique, sociale et écologique avec un rôle plus important pour les partenaires sociaux;
*
impulsions nouvelles et mobilisation de moyens européens pour la recherche et le développement, le développement de nouveaux réseaux en matière d'infrastructures de transport, d'énergie et de télécommunications
*
renforcement du processus décisionnel par la suppression de la règle de l'unanimité dans des domaines comme la fiscalité, la sécurité sociale et l'environnement.

La FGTB estime qu'il faudrait ajouter l'instauration d'une base juridique solide aux services d'intérêt général.

La FGTB souscrit à ces objectifs et attend, en ce qui concerne la règle de l'unanimité, du gouvernement qu'il tire les conclusions qui s'imposent au cas où la Conférence intergouvernementale ne donnerait pas les résultats escomptés.

La FGTB se réjouit aussi de l'équilibre proposé par le gouvernement dans la stratégie de Lisbonne entre la filière économico-financière et la filière sociale. De même, le Gouvernement soutient la concertation sociale tripartite instaurée.

9. UN COMMERCE MONDIAL PLUS JUSTE

La FGTB retrouve certaines prioritaires de son mémorandum dans les orientations relatives à un commerce mondial plus équitable et une globalisation plus humaine :

* La révision du texte de l'AGCS en vue d'y intégrer une définition et des critères permettant de faire une distinction entre services commerciaux et services non commerciaux, ce qui doit permettre d'exclure des négociations des secteurs de service comme la santé, le logement, l'enseignement, la culture et le secteur audiovisuel.
* La demande belge posée au niveau européen de revoir le mandat de négociation accordé en 1999 à la Commission.
* L'engagement de défendre le respect des normes sociales arrêtées par l'OIT.
* L'encouragement du comportement éthique des entreprises belges à l'étranger.
* La Belgique veut contribuer à la réforme des institutions financières internationales en vue d'assurer une plus grande transparence de leur fonctionnement.
* La poursuite de l'objectif de la création d'un conseil de sécurité économique, social et écologique au sein des Nations Unies, dans lequel seraient impliquées les grandes institutions internationales (Fonds monétaire international, Banque mondiale, Organisation mondiale du commerce et l'Organisation internationale du travail)