[Le Raconteur Belge] Les altermondialistes mouchent Verhofstadt by Vincent Decroly Wednesday May 07, 2003 at 11:44 PM |
vincent.decroly@lachambre.be |
[Le Raconteur Belge]
Mondialisation Les
altermondialistes mouchent Verhofstadt Depuis
1999 et l'échec retentissant du sommet de l'Organisation Mondiale
du Commerce à Seattle, le mouvement altermondialiste s'est imposé
progressivement sur la place publique : manifestations, contre-sommets
et forums sociaux se sont enchaînés. Face à un tel
phénomène, verts et socialistes n'ont pas manqué
de marquer leur intérêt, mais sans grande incidence sur
leurs votes au Parlement. De son côté, le Premier ministre
s'est fendu, aux automnes 2001 et 2002 de deux lettres ouvertes aux
altermondialistes. Extraits de ces lettres ouvertes et de réponses
qu'individus et organisations leur ont données. François
HOUTARD : (Lettre
ouverte à Monsieur Guy Verhofstadt, Premier Ministre de Belgique,
Centre Tricontinental, 6-11-02.) *** Guy
VERHOFSTADT : (Lettre
ouverte aux antimondialistes, septembre 2001.) Felipe
VAN KEIRSBILCK : (Lettre
ouverte de Guy Verhofstadt : cinq mensonges et une " vérité
", Collectif de Solidarité contre l'exclusion, 31-10-01.) Guy
VERHOFSTADT : (Guy
Verhofstadt, Lettre ouverte aux alter-mondialistes - "De Doha à
Cancun : l'hypocrisie sous la compassion de l'Occident", octobre
2002.) Eric
TOUSSAINT : (Monsieur
Verhofstadt : Doha n'est pas le bon agenda car le monde n'est pas une
marchandise, CADTM, novembre 2002.) *** (Lettre
ouverte aux alter-mondialistes - "De Doha à Cancun : l'hypocrisie
sous la compassion de l'Occident", octobre 2002.) Stefaan
DECLERQ : (Réponse
à la lettre ouverte aux altermondialistes de Guy Verhofstadt,
Oxfam solidarité, 18-10-02.) *** Guy
VERHOFSTADT : (Lettre
ouverte aux alter-mondialistes - "De Doha à Cancun : l'hypocrisie
sous la compassion de l'Occident", octobre 2002.) Stefaan
DECLERQ : (Réponse
à la lettre ouverte aux altermondialistes de Guy Verhofstadt,
Oxfam- solidarité, 18-10-02.) François
HOUTART : (Lettre
ouverte à Monsieur Guy Verhofstadt, Premier Ministre de Belgique,
Centre Tricontinental, 6-11-02.) *** Guy
VERHOFSTADT : (Lettre
ouverte aux alter-mondialistes - "De Doha à Cancun : l'hypocrisie
sous la compassion de l'Occident", octobre 2002.) Felipe
VAN KEIRSBILCK : (Lettre
ouverte de Guy Verhofstadt : cinq mensonges et une " vérité
", Collectif de Solidarité contre l'exclusion, 31 octobre
2001.) *** Guy
VERHOFSTADT : (Lettre
ouverte aux alter-mondialistes - "De Doha à Cancun : l'hypocrisie
sous la compassion de l'Occident", octobre 2002.) Eric
TOUSSAINT : (Monsieur
Verhofstadt : Doha n'est pas le bon agenda car le monde n'est pas une
marchandise, CADTM, novembre 2002.) *** Guy
VERHOFSTADT : (Lettre
ouverte aux alter-mondialistes - "De Doha à Cancun : l'hypocrisie
sous la compassion de l'Occident", octobre 2002.) Eric
TOUSSAINT : (Monsieur
Verhofstadt : Doha n'est pas le bon agenda car le monde n'est pas une
marchandise, CADTM, novembre 2002.) *** Guy
VERHOFSTADT : (Lettre
ouverte aux antimondialistes, septembre 2001.) Felipe
VAN KEIRSBILCK : (Lettre
ouverte de Guy Verhofstadt : cinq mensonges et une " vérité
", Collectif de Solidarité contre l'exclusion, 31 octobre
2001.) *** Guy
VERHOFSTADT : (Lettre
ouverte aux antimondialistes, septembre 2001.) "Comme
l'indiqua Benjamin Barber : "Si la justice ne peut être partagée
de manière égale, l'injustice se répartira de manière
égale. Si tous ne peuvent bénéficier de la prospérité,
la paupérisation - matérielle et spirituelle - s'imposera
à nous tous. C'est la dure leçon que nous apprend l'interdépendance". (Lettre
ouverte aux alter-mondialistes - "De Doha à Cancun : l'hypocrisie
sous la compassion de l'Occident", octobre 2002.) Stefaan
DECLERCQ : (Réponse
à la lettre ouverte aux altermondialistes de Guy Verhofstadt,
Oxfam solidarité, 18 octobre 2002.)
"Vous avez voulu vous adresser aux " alter-mondialistes "
sous forme de lettre ouverte, ce dont il faut se réjouir (
)
Mais il reste un obstacle majeur sur la voie du dialogue que vous souhaitez
: le fait d'affirmer d'entrée de jeu que " la mondialisation,
le marché et le libre-échange constituent la seule méthode
avérée pour triompher de la pauvreté ". Or,
c'est précisément cela que nous contestons. Soyons précis
: libre-échange ou économie de marché signifient
capitalisme (dixit Milton Friedman), c'est-à-dire une philosophie
de l'économie qui débouche, dans les faits, sur les plus
grandes inégalités de l'histoire, alors que jamais l'humanité
n'a disposé d'autant de moyens pour résoudre ses problèmes."
"Seattle, Göteborg, Gênes
Des dizaines de milliers
de personnes qui descendent dans la rue pour proclamer leurs opinions.
Une bouffée d'air dans cette ère post-idéologique."
"Il qualifie notre époque de " post-idéologique
", alors que jamais dans l'histoire une idéologie (la
sienne, celle du monde marchandise et de l'homme pur consommateur)
ne s'est si brutalement et si uniformément imposée,
malgré les ravages que la religion monétariste laisse
dans son sillage, malgré le démenti quotidien des faits
qui ne ressemblent jamais au paradis annoncé."
"Les pays les plus pauvres ont besoin de fonds accrus. Ces fonds
peuvent provenir d'une opération de remise de dette, à
condition que le produit ne soit pas d'emblée affecté
à l'achat de nouvelles limousines pour l'élite au pouvoir.
L'initiative PPTE (Pays Pauvres Très Endettés) renforcée,
qui lie l'allègement de la dette à un programme de lutte
contre la pauvreté et de réformes économiques,
va dans le bon sens mais peut encore être élargie à
davantage de pays démunis. La mise en uvre de l'initiative
pourrait en outre être accélérée dès
lors qu'on la lierait aux efforts visant un accroissement de l'aide
au développement. Et pourquoi ne pas réunir l'ensemble
des bailleurs de fonds multilatéraux, bilatéraux et privés
dans le fonds PPTE et le lier plus fortement aux " Objectifs de
développement humain des Nations Unies pour le millénaire
? "
"Vous dites que l'initiative pour l'allégement de la dette
des Pays pauvres très endettés (PPTE) va dans le bon sens.
C'est totalement contraire à la vérité. Cette initiative
en application depuis 1996 n'a offert à aucun des pays concernés
une véritable solution au problème de la dette, qui étrangle
une population largement démunie. Pire, pris ensemble, les 42
PPTE ont remboursé depuis trois ans 3.000 millions de dollars
de plus que ce qu'ils ont reçu sous forme de prêts. L'initiative
PPTE a impliqué des doses encore plus fortes de privatisation,
de déréglementation et d'ouverture forcée des marchés
locaux aux produits des multinationales du Nord. Conséquence
: la disparition de producteurs locaux, des licenciements massifs, la
privatisation des services publics et une augmentation de l'inégalité
comme vient de le démontrer une étude interne de la Banque
mondiale."
Guy VERHOFSTADT :
"Les développements survenus au sein de l'Organisation Mondiale
du Commerce l'année passée à Doha ont pris une
tournure prometteuse, vers le libre échange et un développement
accru. Mais nous n'avons pas besoin d'attendre l'Organisation Mondiale
du Commerce. En tant qu'Européens, nous pouvons d'ores et déjà
intensifier nos propres efforts (
) La pauvreté de par le
monde requiert une approche commune. La ligne à suivre - le libre
échange mais pas rien que le libre-échange - a été
arrêtée depuis longtemps. L'heure est venue d'agir et d'intervenir
là où le libre échange affiche ses faiblesses."
"La Belgique - par le biais de l'Union européenne - continue
à s'opposer, au sein de l'Organisation Mondiale du commerce aux
demandes des pays en voie de développement. Lors du dernier sommet
de l'OMC à Doha, l'Europe a revendiqué davantage de mandats
pour l'OMC : des services essentiels, tels que l'eau potable, les soins
médicaux ou l'enseignement, sont désormais privatisables.
Je ne comprends pas le lien avec votre thèse " d'intervenir
là où le libre échange affiche ses faiblesses".
"Entre les deux groupes vivent environ trois milliards de personnes
qui ont également bénéficié des effets de
la mondialisation. Des peuples, principalement asiatiques, qui se sont
arrachés en une seule génération à la lutte
quotidienne qu'il fallait mener pour trouver un logement, des vêtements
et de la nourriture. Ils sont la preuve que la mondialisation, le marché
et le libre échange constituent la meilleure méthode -
la seule méthode avérée - pour triompher de la
pauvreté."
"Vous citez l'exemple de quelques pays asiatiques qui se sont arrachés
en une seule génération
à la pauvreté.
Ce fut de très courte de durée. La crise financière
de 1997 a touché ces pays de plein fouet. Ce n'est pas un hasard
si les termes 'tigres asiatiques' sont aujourd'hui complètement
démodés."
"Pour nous convaincre des bienfaits du libre-échange sur
l'élimination de la pauvreté, vous citez certains pays
asiatiques. On peut imaginer qu'il s'agit des "tigres" et
des "dragons". Mais leur exemple semble prouver tout le contraire.
Tous ont connu pendant trois décennies au moins une intervention
massive de l'Etat. Tous ont reçu des aides extérieures
considérables, en fonction de leur situation géostratégique
dans une politique de "containtment" vis-à-vis du communisme
(durant plus de 20 ans, la moitié du budget de la Corée
du Sud fut financé par les Etats-Unis). Il faut encore y ajouter
deux choses - mais cela constitue probablement des "externalités"
par rapport aux calculs économiques. Tout d'abord, tous furent
au départ des dictatures, militaires ou civiles (ou un régime
colonial a Hong Kong), où les droits civiques et sociaux n'ont
été que progressivement conquis par des luttes souvent
sanglantes. Ensuite, le prix du "miracle économique"
a été payé par une exploitation de la main d'uvre
digne du 19e siècle européen, en durée et conditions
de travail et en prohibition du syndicalisme. Quant aux bienfaits "du
libre-échange" des capitaux financiers, à l'origine
de la crise asiatique, il faudrait demander aux quelques 20 millions
de travailleurs qui ont perdu leur emploi, ce qu'ils en pensent."
"Nous devons pour cette raison oser accorder aux pays pauvres une
voix plus grande. Ils expriment leurs besoins avec insistance mais ne
sont bien souvent pas entendus. Ma proposition de création d'une
structure d'autorité politique internationale, fondée
sur les organisations et groupements régionaux, permet une concertation
multipolaire démocratique à l'échelle mondiale,
où la voix des continents plus pauvres pèserait davantage
que par le passé."
"C'est dans la proposition qui la conclut que cette subtile lettre
porte sa vérité : on peut s'en sortir mais
"
avec encore plus d'instances supranationales, un nouveau G8 réunissant
non plus des Etats, mais des organisations continentales comme l'UE,
l'ALENA nord-américaine, etc., et qui édicterait des "
normes éthiques " en " sollicitant l'avis de sages
" : plus de lois, mais des vux pieux ; plus d'Etat démocratique,
mais une diplomatie des experts ; plus de libre expression du conflit
social, mais le consensus confidentiel entre chefs d'Etats. C'est l'extrapolation
au monde entier du fonctionnement actuel de l'Union Européenne
: technocratique, ultra-libérale et anti-démocratique."
"Nous pouvons dès aujourd'hui déjà permettre
plus de libre échange. L'initiative européenne dite "Everything
but Arms" de février 2001 - initiative par laquelle les
48 pays les plus démunis se sont vu accorder un accès
au marché européen sans droits de douane ni contingents
- constitue une étape majeure."
"Vous dites qu'il faut soutenir l'initiative européenne
" Everything but arms " (Tout sauf les armes). C'est un comble
de la part du Premier Ministre belge car cette initiative concerne les
49 Pays les Moins Avancés parmi lesquels figure le Népal.
Or, c'est justement vers le Népal que la Belgique veut exporter
des armes très prochainement (ce qui provoque des remous au sein
même de votre gouvernement)."
"Alors que le monde entier a les yeux rivés sur l'évolution
de la crise irakienne, des questions plus urgentes ont disparu de l'actualité.
(
) La pauvreté en tant que thème est-elle passée
de mode ? Ne s'agissait-il pas de la question du siècle : comment
éviter une lutte des classes violente entre les plus pauvres
et les plus riches de ce monde ? Entre deux milliards de personnes qui,
chaque jour, essayent de survivre dans une lutte contre la faim et la
maladie, et un demi-milliard de personnes dont la préoccupation
principale est de démêler l'intrigue du feuilleton télévisé
quotidien ? La différence de revenus entre les deux est aujourd'hui
en moyenne de un à trente. Le problème réside dans
le fait que cette différence ne se réduit pas, mais au
contraire qu'elle se creuse."
"Selon
vous, la question du siècle est "d'éviter une lutte
des classes violente entre les plus pauvres et les plus riches de ce
monde". Vous brouillez carrément les cartes. Selon vous,
les plus pauvres seraient 2 milliards et les plus riches 500 millions.
Vous faussez les chiffres. La vérité, Monsieur Verhofstadt,
commanderait de dire qu'une infime minorité de la population
mondiale concentre une richesse astronomique. Il y a sur terre 7,1 millions
de millionnaires en dollars ou en euros (Financial Times, 18 juin 2002).
Leur fortune cumulée représente 26.200 milliards de dollars
soit 25 fois plus que le revenu annuel de la moitié de la population
de la planète (3 milliards d'habitants de la planète survivent
avec moins de deux dollars par jour). La richesse de ces millionnaires
a fortement progressé : 18 % d'augmentation en 1999, 6 % en 2000
et encore 3 % en 2001. Ils constituent la classe capitaliste "
mondiale ", elle est composée d'une majorité de riches
résidents au Nord, mais les riches du Sud y occupent une place
non négligeable. Les millionnaires d'Amérique latine détiennent
13 % du gâteau."
" Vous prônez ardemment la tolérance envers de nombreux
modes de cohabitation et de styles de vie. Mais n'est-ce pas justement
grâce à la mondialisation que nous vivons aujourd'hui dans
une société multiculturelle, tolérante, qui rend
tout cela possible?"
"C'est la mondialisation libérale qui permet la diversité
des cultures et des modes de vie. " C'est trop énorme pour
qu'on discute ! L'ensemble des livres, des films, des spectacles et
de la presse appartiendra bientôt à 3 ou 4 consortiums
financiers, Mac Donald's occupe la place Rouge et le Tibet, en attendant
la chapelle Sixtine et le Machu Pichu, des langues et des peuples disparaissent
au profit d'un anglais minimal et des rites d'Halloween amoureusement
préparés dans les supermarchés : c'est la diversité
culturelle!"
"A mon sens, être pour ou contre la mondialisation sans esprit
critique n'a pas de sens. La question se pose plutôt de savoir
comment tout un chacun, y compris les moins favorisés, peut bénéficier
des avantages manifestes de la mondialisation."
"Martin Khor, directeur du Third World Network en Malaisie, rappelle
: " quand les peuples combattaient l'esclavage, l'appartheid ou
le colonialisme, ils ne revendiquaient pas le partage des bénéfices
de l'esclavage, de l'apartheid ou du colonialisme. Ils combattaient
le système même. Ainsi nous ne nous revendiquons pas de
partager les bénéfices de la mondialisation. Nous devons
combattre le système même de la mondialisation tel qu'il
est aujourd'hui "