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Stratégie américaine pour faire croire à la chute de Bagdad
by Gilles Martin Thursday April 10, 2003 at 11:26 AM
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Comment les médias ont été manipulés pour nous faire croire à la chute totale de la résistance irakienne...

De la chute de Bagdad ? 10/04/03

La guerre est finie. Bagdad est prise. Le peuple irakien s'est soulevé contre la tyrannie de Saddam Hussein. Nous vivons dans un monde formidable. Première image qui inonde la planète médiatique: une statut de Saddam déboulonnée: "l'analyse" des médias est limpide comme cet extrait du journal Le Monde: "les Bagdadis, munis d'une échelle et armés d'une corde en piteux état, la lui passent rapidement au cou, pour le faire chuter, au moins symboliquement. Mais le dictateur résiste, vacille, mais ne tombe pas. Il ne contrôle plus la ville, ses miliciens et ses Fedayins sont en pleine débâcle, mais son immense statue, elle, refuse de se laisser faire. La foule insiste, des jeunes s'attaquent au socle à l'aide d'une masse et d'un piolet. En vain. "

Qui a vu les images ne gardera pas la même impression de la scène. Ce ne sont pas les Bagdadis qui ont renversé la statut mais bel et bien des soldats US aidés de leur char. Qui observe l'image dans les rares plans larges verra que la place est cadenassée d'ailleurs par les chars américains. Le Monde parle de foule ? C'est vrai une centaine d'irakiens dans une ville de 5 millions d'habitants. La plupart des observateurs sur place s'accorde à le dire: la grande majorité des irakiens se planquent chez eux. Ce qui donnent à Libération l'occasion de commettre un titre schizophrénique: " Tous les Bagdadiens descendent dans la rue, mais aucun n'ose dépasser le pas de sa porte." Fallait oser.

De plus, les militaires US sont dépassés par l'enthousiasme nauséabond des médias. Ils avouent comme le Colonel McCoy "qu'il reste beaucoup de quartier à sécuriser." ( Libé, 10/04/03)
Mais les médias eux sabrent le champagne.

La radicalisation pro-coloniale des médias.

En un mois, les médias ont peu à peu lâchés la bride.
Avant l'éclatement du conflit, les grand médias européens étaient assez sceptiques sur la justification du conflit. Les critiques des pulsions guerrières de l'Amérique pleuvaient. Avec l'attaque américaine, le ton a peu à peu changé. Sous l'influence des innombrables dépêches américaines et des journalistes rangés dans leur camp, la tendance qui s'affichait était la suivante: deux camps s'affrontent et la population est prise entre deux feux. Il suffit de revoir la mémorable une de la récente de la Libre Match ou encore de l'analyse d'un carnage sur un marché irakien: missile américain ou tir de DCA irakienne ?

Depuis hier, un nouveau pas a été franchi. L'armée américaine est une armée de libération. Ce dernier saut qualitatif dans sa brutalité médiatique a formidablement été orchestré par l'appareil de propagande américain.

La technique de manipulation en trois temps.

1) D'abord en menaçant les journalistes qui ne sont pas sous contrôle US en donnant un signal fort: tirer sur l'Hôtel Palestine assassinant délibérément des journalistes et en visant la chaîne Al Jazira. L'avertissement est simple: cassez-vous. Ici c'est dangereux. Le traitement médiatique des infos doit nous appartenir pour donner au monde entier notre version des faits dans la capitale irakienne.

2) Organiser le pillage en impliquant des populations pauvres et faiblement politisées. Technique merveilleuse: on encourage et on protège arme au poing des pilleurs: ils finissent par remercier les soldats encore sous l'émotion des prises faites. Les médias n'ont plus qu'à filmer des scènes de liesse qui ne sont que des scènes de pillages. Je ne parle même pas de techniques plus classiques où l'on introduit des opposants organisés dans cette dite scène pour y apporter une dimension plus politique.

3) On annonce dans des régions hostiles au gouvernement irakien ( Kurdistan autonome) que Saddam Hussein est tombé que Bagdad fête les libérateurs. On obtient des scènes de joie dans la rue. On les filme et on les mélange subtilement aux images de ce qui se passe à Bagdad. J'ai vu sur certaines chaînes des images qu'on disait se passer à Bagdad être présentées comme se passant au Kurdistan autonome sur d'autres.

Ce mélange aura pour mérite d'accréditer l'idée que l'armée US occupe Bagdad en libérateur.

La guerre ne fait que commencer.

L'armée américaine et son énorme rouleur compresseur termine sans doute ce qu'on pourrait nommer la phase un de cette guerre: occupation militaire d'une grande partie du pays et mise sur pied d'une administration fantoche.

C'est ce que l'Amérique va nommer "La fin de la guerre." Pourtant la vraie guerre va sans doute commencer maintenant: celle de la résistance de la population irakienne à la colonisation de leur pays. L'enjeu réel pour les haut cadres du parti Baath et les officiers de l'armée irakienne ( dont la plupart n'ont ni été tués, ni arrêtés) est d'organiser cette résistance en l'amplifiant en essayant de lui donner une direction centrale et en se ménageant une base arrière. ( En Syrie ???) En ont-ils les moyens?

Il est notable que la guerre d'Algérie et la guerre du Vietnam n'ont jamais été nommé comme tel par les armées d'agressions. Une guerre coloniale ne dit pas son nom; Hier comme aujourd'hui, on parlera de " pacifier une région." Ou de sécuriser une ville. On nous expliquera que des actes de terrorisme sont commis, que des combattants illégaux sont arrêtés, etc…

Un vocabulaire que les militants contre le colonialisme et l'impérialisme connaissent. Notre travail de résistance sera sans doute d'expliquer ces mécanismes au sceptique et remonter le morale à ceux qui pensent que tout est perdu.

L'armée israélienne a mis six jours pour conquérir les territoires que l'on sait. Elle y est toujours embourbée.
Idem pour le Liban Sud ou une guérilla a chassé une des armées les plus puissantes et les plus modernes du monde.
Non tout espoir n'est pas perdu de voir l'Amérique perdre et mordre la poussière.

Plus que jamais vive la résistance du peuple irakien.

Gm.