arch/ive/ief (2000 - 2005)

Vendredi 21 mars, 5h30, Dr Colette Moulaert depuis Bagdad.
by Bert De Belder Monday March 24, 2003 at 01:05 PM

« Faites la grève contre cette guerre ! »

« Nous allons bien ici. Cette nuit, on a vécu trois heures de bombardements. Il y en avait à quelques centaines de mètres de nous, peut-être un kilomètre : il y a l'Hôtel Palestine, puis le Tigre, et c'était sur la rive en face. Nous ne savons pas combien de sites ont été touchés. Selon la TV irakienne, il y a beaucoup de blessés à Basra, mais apparemment les Irakiens se sont bien défendus et l'armée américaine ait reçu un sérieux coup. L'Irak dit avoir abattu un avion américain, et qu'il y a déjà des morts américains. »

Je demande si elle et son collègue Dr Geert Van Moorter étaient descendu dans les abris. « Non, me répond-elle de manière laconique, parce que les Irakiens ne l'avaient pas demandé, et on dit ici que les ‘shelter' ne servent pas à grand chose, vu l'expérience de Al-Ameriya. » (C'est l'abri civil qui a été touché par une bombe de précision lors de la première Guerre du Golfe, causant 408 morts.)

Est-ce que les médecins de Médecine pour le Tiers Monde ont pu aller dans les hôpitaux ? Pas encore, me dit Colette. « On a voulu y aller avec les journalistes, mais ils avaient d'autres intérêts que nous, et ça a échoué. Ce matin, nous allons travailler pour pouvoir obtenir l'autorisation officielle pour pouvoir faire du travail médical. Nous voudrions passer la nuit qui vient à un hôpital. Nous avons un team fantastique ici avec nos amis algériens, qui comptent parmi eux un médecin-chirurgien jordanien. Lui, il veut former une équipe médicale avec nous. Ca serait excellent : un médecin urgentiste (Geert), un pédiatre (Colette) et un chirurgien. »

Et comment les Irakiens réagissent-ils aux bombardements ? « Nous n'avons pas pu interviewer beaucoup de gens. Il reste très peu de monde à Bagdad. Tous ceux qui pouvaient le faire, sont partis à la campagne, où y ont amené leurs familles. Apparemment, on s'est préparé ici à une longue guerre dure. »

Colette me demande comment les gens en Belgique, en Europe, dans le monde entier réagissent contre la guerre. « Parce que ces nouvelles-là n'arrivent pas jusqu'ici. » Je lui raconte des milliers de gens dans les rues de Bruxelles, d'Anvers, de Gand, dans d'autres villes. Des centaines de milliers de gens à Berlin, Madrid, Rome, Paris, Londres, Washington, New York, Boston. Des écoliers qui ont quitté leurs écoles pour aller manifester. Je lui dis que les manifestants à Bruxelles ne voulaient pas quitter l'ambassade US, qu'ils y sont restés de bien avant 17h jusqu'après 20h. « Ah, c'est formidable, exclame Colette. Ces nouvelles vont être très importants pour la morale des gens ici ! »

Je lui dis aussi que beaucoup de gens, particulièrement les femmes d'origine arabe, m'ont demandé de transmettre leur soutien et leurs remerciements à Colette et à Geert à Bagdad.

Colette me dit encore que des activistes de paix ‘Human Shield' se trouvent actuellement dans des cibles civiles, qui risquent d'être attaqués bientôt… « Vous devez augmenter la résistance contre cette guerre atroce, me dit-elle. Ne peut-on pas appeler à la grève ? Demande-le surtout à mes copains de Caterpillar ! Par hasard, il y a encore deux enfants dans notre hôtel. Si on voit la peur dans leurs yeux… Il est nécessaire de stopper cette guerre ! »