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Une fin de prise d'otages dramatique

by Rob Jones (Moscou) Sunday, Nov. 03, 2002 at 9:56 PM

La stratégie de Poutine contre les preneurs d'otages entraîne une centaine de morts

La stratégie de Poutine contre les preneurs d'otages entraîne une centaine de morts

Une fin de prise d'otages dramatique

La "guerre contre la terreur" du président Poutine a amené la terreur extrême au cœur même de Moscou. Un groupe de 50 tchétchènes lourdement armés a pris le théâtre de la ville au milieu d'une comédie musicale populaire. 700 à 800 personnes furent pris en otages.

Quand les tirs ont commencé très tôt le samedi matin, initialement, selon les autorités, il s'agissait de tirs tchétchènes tuant des otages. Les forces de l'ordre spéciales ont investi le théâtre, utilisant une sorte de « substance spéciale », un gaz qui n'a pas seulement achevé un certain nombre de terroristes mais a aussi pris plus de 145 vies d'otages. Des centaines de personnes sont aujourd'hui encore hospitalisées, au moment où nous écrivons, avec des pertes de mémoire et en état de choc. Aujourd'hui, il est admis en Russie qu'aucun tchétchène n'avait tué d'otages !

Poutine a été prompt à clamer qu'il s'agissait d'une nouvelle attaque du réseau terroriste international. Il a aussi rapidement reçu carte blanche de la part des dirigeants des pays occidentaux pour ses actions, particulièrement de la part de Bush et Blair. Les preneurs d'otages venaient de Tchétchénie et étaient clairement liés au plus radical des groupes dont les leaders sont très proches de la secte islamiste wabbite. Mais beaucoup d'entre eux étaient de très jeunes femmes, l'une de tout juste 16 ans. Leur fondamentalisme religieux avait une teinte « russe » particulière ; selon certains otages, les preneurs d'otages buvaient !

Atrocités en Tchétchénie

Les revendications des terroristes étaient très claires- la fin de la guerre en Tchétchénie. Ces dirigeants mondiaux qui ont accouru pour soutenir Poutine oublient que la guerre en Tchétchénie, cyniquement lancée à la fin du pouvoir de Eltsine pour assurer l'élection de Poutine à la présidence, a causé la mort de dizaine de milliers de tchétchènes et de soldats russes. Le monde est resté aveugle devant les atrocités commises par les troupes russes là-bas, ceci incluse l'exécution de tout homme jeune en âge de se battre et les viols et meurtres de femmes. C'est la profonde brutalité de la guerre de Poutine qui a provoqué le désespoir de tchétchènes qui les a amenée à sombrer dans des actes de terreur aussi horribles que celui-ci.

Pendant la crise du théâtre, des parents d'otages ont organisé des manifestations anti-guerre. Les autorités ont refusé de les autoriser, menaçant d'utiliser les forces de l'ordre contre eux. En fait, ces manifestations étaient organisées par les preneurs d'otages qui ont demandé aux otages d'appeler sur leurs portables leur famille pour qu'elles organisent ces manifs. Ce qui est significatif, quoiqu'il en soit, c'est que la question tchétchène est à nouveau à l'ordre du jour. Depuis longtemps pour la première fois, de nombreux russes ont dit qu'il est temps d'arrêter à cette guerre.

Des larmes de crocodile de Poutine

Malgré le semblant de larmes télégéniques de Poutine s'excusant auprès des familles des morts, son attitude pendant le conflit a été perçue comme très inflexible et insensible. Des membres de l'administration, normalement responsables pour les moments de crise, ont même souligné qu'il brillait par son absence lors des négociations, les laissant au soin des politiciens de l'opposition et des acteurs du théâtre.

Pire a été encore le comportement des autorités après le dénouement. Tous les otages ont été éparpillés dans différents hôpitaux pendant que les autorités refusaient en bloc d'admettre que du gaz avait été utilisé. Les médecins ont du traiter les patients à l'aveugle en méconnaissant ce à quoi ils avaient affaire. Les familles n'eurent dans de nombreux cas pas de droit de visite. Les officiels ont sous-estimaient les chiffres, jusqu'à ce que les autorités de santé les contredisent affirmant que le chiffre des morts le dimanche après-midi s'élevait à 118 otages et 50 tchétchènes morts et 50 personnes toujours en soins intensifs. Devant les hôpitaux, les familles inquiètes ont été laissées, sous une pluie pourrie, pendant deux jours, cherchant à glaner des informations sur des personnes disparues. Dans beaucoup de cas le fils ou la fille étaient localisés mais un mari ou une femme manquaient.

« Une substance spéciale » tue une centaine de personnes

Le nombre réel de morts causées par l'usage de cette substance ne sera probablement jamais connu. Maintenant, la critique grandit quant au type de gaz qui aurait pu être utilisé. On parle de gaz de guerre, contre les jeunes hommes et les troupes relativement en bonne santé, pas contre des hommes d'âge mûr , des femmes ou des enfants. L'utilisation d'un gaz montre le mensonge des superpuissances et ex-superpuissances comme la Russie qui sont supposées avoir banni ces armes de destruction massive. Etait-il possible de terminer cette prise d'otages pacifiquement ? En 1995, la première guerre tchétchène a été en partie menée à sa fin après la prise d'un hôpital à Budyenovsk, dans le sud de la Russie, par des Tchétchènes. Le premier ministre de l'époque, Tchernomyrdin avait négocié en direct à la télévision avec les preneurs d'otages acceptant l'appel à un cessez-le-feu et un retrait des troupes. Le seul espoir pour conduire la récente prise d'otages à une fin pacifique aurait été, pour le gouvernement d'annoncer une fois encore, le retrait des troupes. Mais, ceci aurait entaché le prestige de Poutine.

Le capitalisme crée les conflits

Après la première guerre tchétchène, le capitalisme en Russie et bien sûr en Tchétchénie a été incapable de résoudre aucune des racines de ce conflit. L'argent attribué par le gouvernement à la reconstruction a été volé par des officiels du gouvernement, Les tchétchènes qui, des suites de la première guerre, avaient perdu leurs emplois, ont sombré dans le banditisme et le rapt. Les dirigeants russes ont alors à nouveau utilisé les moyens militaires pour contraindre la petite république montagneuse. Il est clair qu'en même temps que l'on se bat pour la fin de la guerre, il est nécessaire de créer une nouvelle alternative politique capable de s'opposer à Poutine et au capitalisme lui même, dans d'autres termes, un parti des travailleurs avec un programme socialiste capable de combattre pour les droits des travailleurs à travers la Russie et de garantir l'autodétermination de la Tchétchénie et de toute autre qui le souhaiterait. C'est seulement ainsi qu'il sera possible de commencer à dépasser les effets des guerres menées par le nouveau capitalisme russe.

Rob Jones
Moscou