Comment le gouvernement des USA gouverne son peuple par la crainte. by yannindy Thursday June 06, 2002 at 08:24 PM |
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La réponse du gouvernement des USA concernant sa manière de traiter les informations à sa disposition avant le 11 septembre fournit un exemple instructif quant à la façon dont certaines politiques intérieures américaines en viennent à ressembler à ce qui est décrit dans "1984" d'Orwell.
Jeudi 06 Juin 2002 Par Amir Butler (Traduction Yannindy) Dans son
classique "1984", George Orwell décrit une société où une guerre
perpétuelle contre de vagues ennemis est employée pour étouffer la population
grâce à la peur. Un système raffiné de fausses informations a été mis en
place pour s'assurer que la population reste constamment sous la peur de
l'ennemi". La réponse
du gouvernement des USA concernant sa manière de traiter les informations à sa
disposition avant le 11 septembre fournit un exemple instructif quant à la
façon dont certaines politiques intérieures américaines en viennent à
ressembler à ce qui est décrit dans le livre. LE CHARME EST BRISE Au lendemain
du 11 septembre, une voile d'intimidation a été jeté sur les médias
américains, étouffant les discours publics et tout débat. Dans un article
dans du Guardian le 18 mai, le journaliste vétéran Dan Rather décrit le
climat dans lequel les journalistes se sont soudainement trouvés opérer: "C'est
une comparaison obscène - vous savez que je ne suis pas sûr de l'aimer - mais
vous savez, il y avait un moment en Afrique du Sud où les gens mettaient des
pneus en flammes autour du cou des personnes qui ne marchaient pas droit. Et par
certains côtés la crainte, ici, est d'être lynché, d'avoir le pneu en
flammes du manque de patriotisme mis autour de votre cou. Maintenant c'est cette
crainte qui empêche les journalistes de poser les questions vraiment
importantes." Ce climat de
la crainte s'est brusquement terminé le 17 mai. C'était ce jour que CBS a
diffusé l'information selon laquelle le gouvernement des USA avait reçu des
avertissements à propos des attaques du 11 septembre. Howard a résumé l'effet
que cette révélation a eu sur les médias américains, quand il a dit qu'en ce
seul jour, "le climat des médias de la capitale a été transformé". Kurtz décrit
la réaction: "Les
journalistes ont assailli le porte-parole Maison Blanche Ari Fleischer et le
conseiller de sécurité nationale Condoleezza Rice lors des briefings hier,
avec du scepticisme et même de l'indignation dans leurs voix, quand ils ont
exigé des explications détaillées. En bref, le ton était de loin différent
de celui des réseaux qui agitaient des drapeaux après les attaques du 11
septembre, au moment où le Président Bush, surfant sur une vague de
popularité et de patriotisme, était traité avec déférence par les médias.
En effet, l'administration probablement n'a jamais fait face à des journalistes
aussi hostiles qu'hier." Les vannes se
sont ouvertes, et une volée de "révélations" ont commencé à
apparaître dans tous les médias du monde. Les médias s'étaient réveillés
de la stupeur du faux patriotisme. L'édifice en décomposition du discours
public montrait ses premiers signes de la vie après le 11 septembre. Le
résultat a été une série de révélations - chacune pire que la précédente
- accusant le gouvernement des USA d'avoir eu connaissance, avant le 11
septembre, que des attaques de cette nature devaient avoir lieu. Le journal
d'ABC a rendu compte le 15 mai que Bush avait été averti plusieurs semaines
avant le 11 septembre du risque d'un détournement mené par Al-Qaeda. Le
Washington Post a rendu compte le 18 mai qu'une note avait été envoyée à
Bush le 6 août avec le titre, "Ben Laden déterminé à frapper les
USA". Le même article signale que le bureau de FBI à Phoenix avait
publié une note d'avertissement selon laquelle des complices de Ben Laden
peuvent s'exercer dans les écoles locales de vol. Les médias
ont ensuite découvert que l'administration Bush avait reçu un rapport en 1999
qui décrit en détail un risque de voir des complices de Ben Laden détournant
des avions et les pilotant sur le Pentagone et d'autres bâtiments marquants. L'International
Herald Tribune a indiqué le 21 mai que même les alliés arabes avaient averti
qu'une telle attaque était imminente. De même, The Guardian a rapporté que
les Anglais avaient également averti les USA de la menace. Des rapports
indiquant que le gouvernement philippin a également averti les USA ont été
recyclés et une nouvelle vie leur a été donnée la semaine qui a suivi le 11
septembre. L'agent
Coleen Rowley a écrit une lettre de 13 pages au directeur du FBI Robert Mueller
dans le magazine Times. Datée du 21 mai 2002, la lettre charge le FBI
"d'une subtile déformation des faits" par le directeur Mueller et
d'autres "aux niveaux les plus élevés de la direction du FBI".
Rowley a ensuite énuméré huit faits qui, selon elle, "ont jusqu'ici
été omis, sous-estimés, camouflés et/ou déformés dans un effort pour
éviter ou minimiser une gêne personnelle et/ou institutionnelle pour le FBI
et/ou peut-être même pour des raisons politiques peu claires". La
lettre est une bombe et, comme Rowley elle-même le dit, "pose des
questions sur le respect des certaines valeurs, qui sont fondamentalement celle
d'intégrité et qui sont au cœur de la mission et du
mandat du FBI ". Chaque jour,
les nouvelles révélations émergent quant à ce que l'administration Bush et
d'autres parties du gouvernement ont su avant le 11 septembre. Il est probable
que ce que nous entendons maintenant est uniquement la partie émergée de
l'iceberg. L'AMÉRIQUE SE RÉVEILLE Quand les
médias se sont réveillés, elle a aussi réveillé le public de sa stupeur. En
fait, la réaction publique a fait passer la réaction des médias pour faible. Les familles
de ceux qui sont morts dans les attaques terroristes du 11 septembre ont été
justement outragées. Fox News a rendu compte le 16 mai 2002 des déclarations
de certaines familles de victimes. Bill Doyle, qui a perdu son fils dans
l'attaque sur le WTC, a résumé l'opinion générale des victimes quand il a
dit, "je crois que notre gouvernement en entier a laissé tomber les gens.
Il est choquant, chaque fois que vous allumez la TV, de voir ce que l'on y dit.
Si notre président était au courant en août, quelqu'un a dû le signaler aux
aéroports. Ont-ils été alertés par le FBI ou la C.I.A?" Pour la
première fois depuis le 11 septembre, l'opposition a agi comme une opposition.
Les démocrates ont mené la charge au congrès pour qu'une enquête complète
soit faite sur les événements du 11 septembre et la manipulation des données
des services secrets. La représentante Cynthia McKinney, dans un rapport public
daté du 16 mai 2002, a accusé l'administration Bush d'essayer de dissimuler
ses échecs en refusant de tenir une audition au congrès. Elle a dit, "la
raison pour laquelle l'administration Bush s'était vigoureusement opposée à
des auditions au congrès est maintenant claire. L'administration Bush s'est
engagée dans une conspiration du silence. Si des personnes loyales et patriotes
n'avaient pas révélé tout ceci, la Maison Blanche aurait gardé ces
informations secrètes." Le sénateur
Richard J. Durbin (représentant démocrate de l'Illinois et membre du comité
des renseignements du sénat), après avoir vu la note de sept pages du FBI
envoyée en juillet 2001, a déclaré que les similitudes avec les incidents du
11 septembre étaient telles que "pendant que vous la lisiez, vous en aviez
le souffle coupé". En effet. Les
révélations ont également coupé le souffle des alliés traditionnels, comme
l'expert néo-conservateur, Bill Kristol du Weekly Standard. Kristol a remis en
cause les secrets de l'administration Bush. Dans le dernier numéro, il demande: "N'est-il
pas possible que certains devraient être réprimandés ou même perdre leur
travail, quand 3000 Américains sont tués dans une attaque terroriste? Ces huit
derniers mois, l'administration Bush a essentiellement indiqué que tout et
chacun a fonctionné à la perfection. C'est absurde et insoutenable." Un sondage de
CBS a montré le sentiment du public: 65 pour cent de gens disent croire que le
gouvernement des USA "cachait quelque chose". SEMAINE DE LA HAINE Le
gouvernement des USA a répondu en lançant une campagne rappelant la semaine de
la haine décrite dans le livre d'Orwell. Pendant la
semaine de haine, les gens du commun ont été tirés vers une frénésie
guerrière au moyen de cortèges, de défilés militaires, d'émissions
télévisées, la création d'effigies, des chansons, des photographies
truquées et des rumeurs. Le département de fiction du ministère de la
vérité lancerait une série de pamphlets décrivant les atrocités commises
par l'ennemi. D'autres analyseraient les archives des journaux, changeant et
embellissant des nouvelles pour les inclure dans des discours de la semaine de
la haine. La chanson de haine, une chanson composée spécialement pour la
semaine, serait jouée sans fin - son rythme sauvage, brutal, ressemblant au
battement d'un tambour de guerre. L'affiche de la semaine de la haine a été
placardée partout - l'image d'une figure monstrueuse d'un soldat eurasien, de 4
mètres de haut, avec un visage mongol sans expression et un
pistolet-mitrailleur à la hanche. L'affiche a été conçue de sorte que le
museau du pistolet vous regarde où que vous soyez. Placardée partout les
villes, elle assure que, où que vous soyez, on vous rappelle que vous êtes
toujours sous la menace de l'ennemi". Vous ne pourriez pas vous sentir en
sécurité - vous êtes toujours sous la menace. La réponse
de l'administration Bush à ce changement soudain était atypique et en accord
avec la façon dont le gouvernement des USA avait géré des crises semblables
dans le passé. Remplacez le soldat eurasien de la semaine de la haine d'Orwell
par un musulman barbu et portant turban et vous avez la semaine 2002 de la
haine. Il n'y avait aucun besoin d'affiches, parce qu'ils ont eu la dernière
vidéo de Ben Laden- la confirmation terrifiante que cet homme qui est
maintenant, dans l'esprit de l'Américain moyen, venu à représenter rien moins
que le mal à l'état pur, était vivant et en bonne santé. Le 6
décembre 2001, le Ministre de la Justice John Ashcroft a accusé les gens
émettant des critiques sur la législation antiterroriste draconienne de
l'administration Bush d'être des "complices" du terrorisme. Il a dit,
"à ceux qui effrayent les gens qui aiment la paix avec des fantômes de
liberté perdue, mon message est ceci: Votre
tactique aide des terroristes, parce qu'elles érodent notre unité nationale et
diminuent notre résolution. Elles donnent des munitions aux ennemis de
l'Amérique, et créent la confusion chez les amis de l'Amérique." En
d'autres termes, si vous allez remettre en cause les politiques de votre
gouvernement, vous pouvez aussi bien être un terroriste vous-même. Ainsi, dans
un rapport rappelant le fameux "l'ignorance, c'est la force" d'Orwell,
le vice-président Dick Cheney a répondu à ceux qui exigent des faits, en les
nommant "complètement irresponsables et totalement indignes de chefs
nationaux dans un moment de guerre". Cheney ne s'est jamais dit que c'est
exactement parce que l'Amérique est dans un "moment de guerre" qu'il
y a un besoin vital de comprendre les erreurs qui ont mené au 11 septembre.
Malgré tout, dans le monde Orwellien de Cheney, l'ignorance des faits égale la
force contre la terreur. De la même
manière que "Le Parti" dans "1984" d'Orwell contrôlait les
gens par la peur produite par un état de guerre sans fin, de même
l'administration Bush a répondu aux préoccupations du public avec un tsunami
d'avertissements de risque d'attaques terroristes. Le message était clair: une
attaque par Al-Qaeda n'était pas simplement probable, elle est imminente et
cette fois, ils peuvent utiliser des armes nucléaires. Le message primaire aux
américains était un message de peur. Le Washington
Post (le 19 mai 2002) a rapporté une "montée subite soudaine dans des
messages d'Al-Qaeda" arrêté par des agences de renseignements
américaines. Les décrivant comme "vagues mais menaçantes", des
fonctionnaires anonymes de l'administration des USA s'en sont servis pour
prouver qu'Al-Qaeda pourrait projeter une autre attaque. De hauts responsables
ont indiqué que les messages ont suivi le même modèle que ceux détectés
avant le 11 septembre et que cela "indique une action imminente". Le Boston
Globe a alors rendu compte le 19 mai que des membres d'Al-Qaeda louaient des
appartements et y entreposaient des explosifs. Des avertissements aux
"propriétaires d'appartement" ont été diffusés, pour qu'ils
recherchent n'importe quel indice suspect. Reuters a
indiqué le 20 mai que le FBI avait alerté les forces de l'ordre d'Orlando
d'une menace d'Al-Qaeda d'empoisonner l'eau. Le 24 mai, le
département des transports a publié des avertissements comme quoi des
terroristes attaqueraient probablement des systèmes de transit et d'autres
systèmes des chemins de fer. Un rapport de l'Associated Press, le même jour, a
indiqué que le FBI en était à mettre en garde le public contre les plongeurs
qui, d'après eux, constituent une menace terroriste possible. Un bulletin de
FBI a averti que "certains membres de réseaux terroristes ont cherché à
constituer des équipes de plongeurs dotés de possibilités offensives". Le
vice-président Dick Cheney a déclaré à Fox News le 20 mai 2001: "Je
pense que les chances d'une future attaque sur les États-Unis sont presque une
certitude. Elle pourrait se produire demain, la semaine prochaine, l'année
prochaine, mais ils continueront à essayer. Et nous devons être prêts." Robert
Mueller, directeur du FBI est rentré dans le jeu à son tour, annonçant que
bientôt l'Amérique serait inondée par "des attaques suicides".
"Je pense que nous verrons cela dans le futur, je pense que c'est
inévitable", a-t-il déclaré à Associated Press le 20 mai. "Il y
aura une autre attaque terroriste. Nous ne pourrons pas l'arrêter. C'est
quelque chose avec quoi nous devons vivre." Le 21 mai,
Associated Press a rapporté que le secrétaire de la défense Donald Rumsfeld a
dit que les terroristes acquerraient certainement bientôt les armes
nucléaires, chimiques et biologiques. Il l'a décrit cela comme étant
"inévitable", déclarant que "c'est le monde dans lequel nous
vivons." Tom Ridge,
directeur de la sécurité intérieure, a déclaré le 21 mai qu'il n'était pas
question de savoir s'il y aurait d'autres attaques, mais quand (Washington Post
22 mai). Le Président George Bush s'est joint à ces déclarations et, avec
l'éloquence qu'on lui connaît, a déclaré: "Al Qaeda est actif, ils
complotent, font des projets, vous savez, ils essayent de nous frapper". UNIQUEMENT POUR MAINTENIR LES
GENS EFFRAYES Dans
"1984", Orwell a décrit les bombes qui tombaient sur Londres pendant
"la guerre sans fin": Les missiles,
qui sont tombaient quotidiennement sur Londres dans le livre, étaient
probablement tirées par le gouvernement d'Océania lui-même, 'juste pour que
les gens continuent à avoir peur'. Quand les
gens ont peur pour leurs vies et celles de ceux qu'ils aiment, les échecs
passés du gouvernement semblent insignifiants. Ils ont peur pour leur
sécurité et leur survie. Ils deviennent malléables et sont prêts à accepter
n'importe quelle politique ou loi que le gouvernement pourrait décider, pour
autant que ce soit nécessaire pour "leur protection". Clairement,
le but de ce tsunami de peur était de distraire les gens qui critiquent la
gestion des événements du 11 septembre par l'administration Bush. Une étude
des derniers rapports montre des montées subites dans des alertes à la terreur
à des intervalles intéressants. Il y a eu un pic dans les alertes au beau
milieu de la polémique sur la législation anti-teroriste. Il y a eu un autre
pic lors de la polémique sur les budgets militaires. Ils refont surface
maintenant, alors que des questions gênantes sont posées au gouvernement. Dans un rare
moment de franchise, Ari Fleischer, attaché de presse du président, a admis le
lien entre la polémique actuelle et les recrudescences d'alertes. Le Washington
Times (le 22 mai 2002) le rapporte: Les
dernières alertes ont été publiées "en raison de toute la polémique
qui a eu lieu la semaine dernière," a dit Ari Fleischer, le porte-parole
de Bush, se rapportant aux rapports indiquant que le président avait reçu un
briefing de la C.I.A en août au sujet des menaces terroristes, y compris des
plans de détournement d'avions civils américains par le Réseau al Quaeda de
Osama Ben Laden. Peu
surprenant après une telle campagne de terreur: un sondage de CBS a constaté
que 33 pour cent d'Américains croient qu'une attaque sur les États-Unis sont
maintenant "très probables". Il y a une semaine c'était 25 pour
cent. Pour donner
au public un sentiment de menace continu, les USA ont introduit un système de
gradation de la terreur en mars 2002. À l'extrémité inférieure de la balance
est le vert qui ne représente aucune menace, alors le bleu qui signifie une
menace générale, le jaune signifiant une menace élevée, l'orange qui
représente une menace significative et finalement le rouge qui signifie une
menace grave. En dépit de la masse des alertes de terreur pour tout et
n'importe quoi, des bombardements d'appartement aux plongeurs suicides, les USA
n'ont pas modifié l'état d'alerte officiel. Celui-ci reste jaune. Le jaune
semble un état particulièrement juste pour les États-Unis. Comme couleur
traditionnellement liée à la poltronnerie, il reflète convenablement le refus
du gouvernement de répondre aux questions gênantes sur ce qui s'est vraiment
produit avant le 11 septembre, et il reflète exactement la façon dont ils ont
essayé de manœuvrer leurs électeurs par la crainte. -- Amir Butler est le directeur exécutif
du Comité musulman australien des affaires publiques (AMPAC), membre du shura
d'IISNA (une organisation australienne nationale de da'wah), et maintient
www.amirbutler.com, un site web populaire de commentaire politique et social. --COMBATTRE L'ECHEC
PAR LA CRAINTE