Les leçons du 21 avril: comment combattre la droite et l'extrême droite? by La RIposte (France) L'Unité (Belgique) Tuesday April 30, 2002 at 11:21 AM |
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Une analyse à contre-courant de l'antifascisme superficiel et qui refuse de transformer un pyromane (Chirac) en pompier...
Pour la première fois depuis 1969, la gauche a été éliminée au premier tour d'une élection présidentielle. Au deuxième tour, l'électorat de gauche se trouve devant le spectacle lamentable d'un duel entre deux réactionnaires irréductibles: Jacques Chirac et Jean-Marie Le Pen. Que les choses soient claires: la responsabilité de cet échec repose entièrement sur les épaules des dirigeants de la gauche gouvernementale. Pendant cinq ans, ils ont mené une politique en décalage complet avec les aspirations sociales qui les ont portés au pouvoir en 1997. Les conséquences sociales dramatiques d'une politique prétendument "socialiste", mais en réalité tournée vers la satisfaction des intérêts particuliers des grands groupes industriels et financiers, ont fait le lit du Front National.
Bien sûr, dès le 21 avril, tous les chefs de file, au PS comme au PCF, ont parlé de la nécessité de "tirer les leçons" de cette débâcle. Hélas ! ils en sont incapables, comme la suite des événements l'a amplement démontré. Leurs programmes pour les présidentielles — ambigus, timides, et, en ce qui concerne celui du PS, largement axé sur la "sécurité" — ces programmes qui ont fait triompher la droite, ont tout simplement été reconduits tels quels pour les législatives. Quelles "leçons" ont été tirées, au juste, par ces illustres "états-majors", si ce n'est qu'il ne leur restait plus qu'à se jeter dans les bras de Chirac, au deuxième tour?
La principale leçon qu'il faut retenir de cette défaite est la suivante: un gouvernement "de gauche" qui privatise à tour de bras, qui s'agenouille devant les banques, devant la Bourse, devant les capitalistes; un gouvernement qui résiste avec acharnement aux aspirations légitimes des salariés en termes de salaires, de conditions de travail, de lutte contre la précarité, qui affiche une indifférence hautaine à l'égard des travailleurs menacés par des licenciements ou par la fermeture de leur entreprise, comme cela a été le cas pour les salariés de Péchiney, de Michelin, de Moulinex, d'AOM-Air Liberté, et de tant d'autres — un tel gouvernement se coupe de sa base sociale, l'exaspère, et permet ainsi à la classe dirigeante de l'écarter du pouvoir à la première occasion.
Précarité et privatisations
Certes, dans la politique appliquée par Jospin depuis 1997, tout n'a pas été négatif. En dépits de leurs limites, les emplois-jeunes sont un pas en avant. La CMU aussi. Cependant, dans l'ensemble, les réalisations du gouvernement ont été un mélange de réformes sociales bâclées et insuffisantes, d'une part, et, d'autre part, de contre-réformes réactionnaires empruntées directement au "plan" d'Alain Juppé. De manière générale, la reprise économique de 1997-2001 n'a guère profité qu'aux capitalistes. Certes, le taux de chômage a baissé — une baisse amplifiée par le trucage des statistiques — mais ce qu'il faut surtout souligner, c'est que le nombre d'emplois stables et qualifiés a reculé cependant que celui des emplois précaires explosait. Le nombre de salariés par intérim a pratiquement doublé sous le gouvernement de gauche, pour atteindre plus de 700 000 à la fin de 2001. Le nombre de CDD a également très fortement progressé — au mépris des critères établis dans le Code du Travail — et ce tout particulièrement dans la Fonction Publique. 18% de la population active âgée de moins de 30 ans est au chômage, et 30% de cette même population occupe un emploi précaire. Les postes à temps partiel, que des centaines de milliers de personnes ont dû accepter faute de mieux, ont contribué, avec toutes les autres formes d'emplois précaires, à grossir le rang de ceux que les Américains appellent les working poor, c'est-à-dire les "pauvres en activité". Selon le CREDOC, les foyers réduits à la misère représentent plus de 5 millions de personnes. Dans cette population durement exploitée et désespérée, le Front National a trouvé de nombreux électeurs: 38% des chômeurs et 30% d'ouvriers non qualifiés. A présent que la France est entrée dans une nouvelle récession économique, cette large masse de gens écrasés continuera de grandir. Au sommet de la pyramide sociale, par contre, les 10% les plus riches de la population n'ont cessé de s'accaparer une part toujours plus importante de la richesse nationale, sous la droite comme sous la gauche.
Parmi les engagements figurant dans le programme que le PS et le PCF ont présenté en 1997, l'introduction de la semaine de travail de 35 heures occupait une place centrale. Ce projet a été décisif dans le ralliement électoral qui a porté la gauche au pouvoir. Cependant, aujourd'hui, cinq ans plus tard, le bilan de la loi sur les 35 heures est plus que mitigé. A ce jour, seulement un tiers des salariés est concerné par les dispositions de cette loi, et, sur ce tiers, au moins un tiers encore estime que les 35 heures ont été appliquées à son détriment. En effet, la loi comportait de nombreuses concessions et omissions favorables au patronat, de sorte que, très souvent, des mesures de flexibilité et d'annualisation, ainsi que des clauses liées à la productivité, ont permis aux patrons de reprendre bien plus qu'ils ne cédaient.
Les emplois créés par la loi sur les 35 heures auraient été bien plus nombreux si, dans le secteur public, le gouvernement n'avait pas, d'une part, refusé d'embaucher et, d'autre part, favorisé la précarité. Par ailleurs, le financement des 35 heures s'apparente à une immense escroquerie grâce à laquelle les capitalistes ont encaissé des subventions n'ayant aucun rapport avec le coût réel des emplois créés. Le Ministère de l'emploi est devenu une véritable officine de ristournes au profit des capitalistes. En 1999, 104 milliards de francs ont été versés dans leurs coffres, au seul titre des 35 heures. Finalement, ces transferts de fonds n'ont été qu'une façon détournée d'effectuer une baisse très importante des charges patronales, au mépris de l'engagement formel de ne pas le faire que Jospin avait pris en 1997.
Jospin a mis en œuvre un programme de privatisation — ou d'"ouverture du capital", pour utiliser le vocabulaire voilé des ministres — nettement plus important en valeur que les gouvernements de Balladur et de Juppé réunis. Il a ainsi achevé de démanteler ce qui restait du secteur public élargi sous Mitterrand et Mauroy en 1982. Cette politique scandaleuse, diamétralement opposée aux engagements de Jospin, aux textes votés lors des différents congrès du PS, ainsi qu'aux principes élémentaires du socialisme, a été vivement applaudie par les places financières du monde entier. Cependant, pour les salariés victimes des privatisations, elle s'est partout traduite par une nette dégradation de leurs conditions de travail et de la sécurité de l'emploi, mais aussi par des attaques directes contre les salaires. Au moyen des privatisations, Jospin et Hue ont jeté de nouveaux marchés, c'est-à-dire de nouvelles sources de profit, dans la gueule toujours grande ouverte des spéculateurs. De nombreuses privatisations ont été pilotées sous la responsabilité directe du ministre PCF des transports, Jean Claude Gayssot. De son côté, Robert Hue — après s'être entouré de "professionnels de la communication", qui analysaient ses discours, lui soufflaient des "petites phrases", et lui conseillaient vestes et cravates — se creuse aujourd'hui la cervelle pour s'expliquer comment, sous sa direction, le PCF a plongé jusqu'à 3,4%. Pourtant, la réponse saute aux yeux: pour son électorat potentiel, un parti "communiste" qui privatise, qui emboîte le pas à la direction socialiste sur toutes les questions essentielles, n'a plus tellement d'utilité. Pour remonter la pente, le Parti Communiste doit à tout prix mettre son programme en conformité avec son nom.
Par delà les différences qui existent entre les dirigeants du PS et ceux du PCF, leur "socialisme" est, dans la pratique, d'un genre bien particulier: il ne doit en aucun cas empiéter sur les intérêts de la Bourse, ni porter atteinte aux profits des capitalistes, ni vexer les barons de la presse ou de la télévision. Autrement dit, c'est un socialisme complètement vidé de sa substance.
On pourrait énumérer bien d'autres raisons de la défaite de la gauche, comme par exemple le fait de ne pas avoir abrogé la loi Pasqua-Debré, raciste, discriminatoire, et dont les termes s'inspiraient directement, et parfois mot pour mot, du programme du Front National. Le droit de vote des étrangers, ciblés par la propagande haineuse du Front National, est resté lettre morte. La corruption et les "caisses noires", mettant en évidence l'existence de liens financiers entre les appareils des partis de gauche et les milieux capitalistes, ont écœuré bon nombre d'électeurs, apportant au passage de l'eau au moulin lepéniste. Enfin, signalons que la politique étrangère du gouvernement Jospin ne s'est guère distinguée de celle de la droite. Les ventes d'armes aux dictatures se sont poursuivies. Et de nombreux jeunes, notamment ceux d'origine arabo-musulmane, ont été scandalisés, à juste titre, par les prises de position de Jospin sur le Proche-Orient.
Cette situation a généré un sentiment d'amertume et d'hostilité parmi de larges couches de la population. Depuis le début du gouvernement Jospin, la société française est dans un état de fermentation sociale permanente. Le nombre de jours de grève a progressé fortement d'année en année, dans le secteur public comme dans le privé. Des centaines de milliers de grévistes et de manifestants ont tenté d'infléchir la politique du gouvernement, de la rendre plus conforme à leurs besoins et aspirations. Si l'ampleur de la contestation n'a jamais atteint le niveau des grèves de 1995, elle n'en était pas très loin, notamment en mars 2000. À ce moment, devant la brusque montée des mouvements sociaux sur plusieurs fronts, dans l'Éducation Nationale, au Ministère des Finances, pour la défense des retraites, dans les hôpitaux et dans d'autres secteurs, Jospin a dû hâtivement battre en retraite et "accepter la démission" de deux de ses ministres — lesquels, pour leur rendre justice, ne faisaient que mettre en application les consignes de Jospin lui-même. La résistance syndicale a empêché le gouvernement d'aller aussi loin qu'il n'aurait voulu, que ce soit dans ses attaques contre les services publics ou dans la "réforme" des retraites, mais elle n'a pas réussi à changer l'orientation fondamentalement pro-capitaliste de sa politique.
Chirac et Le Pen
Dès le lendemain du premier tour, les dirigeants du PS et du PCF ont rallié la candidature de Jacques Chirac. Chirac paraît certain de l'emporter au deuxième tour. Devant la perspective d'une victoire, ou même d'une percée électorale importante du candidat du Front National, une partie importante de l'électorat de gauche votera pour Chirac. Cette réaction est compréhensible. Cependant, la victoire de Chirac ne règlera strictement rien, et, par ailleurs, ne mènera pas non plus à un affaiblissement du Front National.
La situation actuelle est une aubaine pour Chirac. Il a le beau rôle. Mais, une fois au pouvoir, sans doute avec un groupe FN renforcé à l'Assemblée Nationale, Chirac n'hésitera pas à reprendre à son compte un certain nombre des mesures socialement rétrogrades contenues dans le programme du Front National, exactement comme il l'a fait en 1986-1988 et en 1995-1997. Le fameux "plan Juppé" était une version édulcorée du programme économique de Le Pen. Il est de notoriété publique que les élus du RPR collaborent avec les élus du FN dans de nombreuses instances municipales et régionales. En se posant de façon démagogique comme le représentant de la "démocratie" contre "l'intolérance" il veut faire oublier le caractère ultra-réactionnaire de son programme économique et social, d'une part, et, d'autre part, la politique raciste qu'il a appliquée dans le passé. Tragiquement, au lieu de démonter cette hypocrite mascarade, Hollande et Hue se sont rangés derrière le candidat du RPR.
En appelant à voter Chirac, et en présentant celui-ci comme le "rempart de la république" face à Le Pen, les instances dirigeantes du PS et du PCF ne rendent pas service à la gauche. Au contraire, elles ne font que la désarmer davantage face à la droite. Cette nouvelle capitulation est un boulet politique de plus à traîner dans la bataille électorale des législatives, qui s'annonçait déjà particulièrement rude.
Admettons que l'appel à voter Chirac fasse diminuer le pourcentage des voix qui se portent sur Le Pen: cela ne signifie aucunement qu'il en sera réellement affaibli. Bien au contraire, le ralliement du PS et du PCF autour de Chirac est une véritable aubaine politique pour Le Pen, dont un des arguments essentiels repose sur l'idée que les intérêts qui animent le PCF, le PS, le RPR et l'UDF — la "bande des quatre" — sont fondamentalement les mêmes. L'opposition à Le Pen, la nécessité de lui "faire barrage", sert de prétexte à une politique de collaboration de classe. Pendant que les dirigeants de la gauche passent leur temps à faire des déclarations creuses sur le thème des "droits de l'homme", il importe aux gens sérieux de comprendre ceci: plus les dirigeants socialistes et communistes expliqueront que la différence entre Chirac et Le Pen est plus importante que la différence entre eux-mêmes et Chirac, plus il renforceront les effectifs et le potentiel électoral de l'extrême droite.
Les Fabius, Strauss-Kahn, et autres dirigeants de l'aile droite du PS, qui s'appuient sur le désarroi de l'électorat de gauche pour chanter des airs "républicains" au profit de Chirac, ont sans doute des motifs inavoués en vue des prochaines législatives. Dans le cas où le FN emporterait un nombre significatif de sièges et où ni les autres formations de droite, ni la gauche, n'auraient à elles seules une majorité parlementaire, on pourrait se trouver devant la possibilité d'une coalition gauche-droite, sous prétexte, encore une fois, de faire "bloc" contre le Front National. Ainsi, le ralliement à Chirac au deuxième tour des présidentielles préparerait la voie à une coalition parlementaire sur le programme économique et social de la droite.
Si la responsabilité de l'échec de la gauche aux présidentielles revient, fondamentalement, aux dirigeants socialistes et communistes, les candidatures d'extrême gauche en ont aussi une part. Certes, les critiques que ces minuscules organisations émettent au sujet du PS et du PCF sont, dans l'ensemble, valables. Mais leur sectarisme, leur refus de soutenir les organisations traditionnelles du salariat, et leur incitation à l'abstention, ont contribué à la défaite de la gauche. Le score de l'extrême gauche — de 10%, ce qui, si on y ajoute celui du PCF, donne 14% — a néanmoins une importante signification. Il est symptomatique du fait que des centaines de milliers de jeunes et de travailleurs sont à la recherche d'une alternative nettement plus à gauche que la politique pro-capitaliste des dirigeants socialistes — même si, en réalité, aucun des candidats d'extrême gauche n'a présenté un programme réellement révolutionnaire.
Que faire?
L'heure n'est plus au compromis avec un système qui génère l'exploitation, le chômage, la misère, et qui nourrit le racisme. Si on veut engager une lutte sérieuse et implacable pour éradiquer le danger du Front National et engager un combat sérieux contre l'ensemble de la droite, une réorientation radicale du programme et des méthodes de lutte s'impose, dans les partis de gauche comme dans les organisations syndicales.
Sur le plan de la mobilisation sociale, les militants des syndicats, y compris des syndicats étudiants, ont un rôle crucial à jouer. Dès aujourd'hui, sans attendre le résultat des législatives, ils doivent lancer une vaste campagne de sensibilisation et de mobilisation, afin de préparer une riposte massive et foudroyante à la régression sociale, que ce soit sous un gouvernement de droite ou de gauche.
Les législatives, dont le résultat est plus important que celui des présidentielles, doivent se préparer dès aujourd'hui. La colère et la déception des électeurs de gauche, dans les entreprises, dans les quartiers, dans les lycées et les facultés, doivent se traduire dans un immense effort de mobilisation et d'explication, afin d'assurer une majorité aussi large que possible aux députés socialistes et communistes dans la nouvelle Assemblée Nationale. Halte à la division, aux comportements sectaires! A chaque fois qu'il y a la moindre possibilité qu'une répartition des voix entre deux candidats de gauche augmente le risque d'une victoire de la droite, il faut éliminer ce risque au moyen d'une candidature unique. Dans le même temps, à l'intérieur comme à l'extérieur du PS et du PC, il faut exiger avec force l'adoption d'un programme conforme aux aspirations des salariés, des jeunes et des retraités. Les éléments essentiels de ce programme, du moins en ce qui concerne les revendications immédiates, ont déjà été élaborés par les organisations syndicales, dans les différentes branches des secteurs public et privé.
Mais pour que la gauche, au lieu de se contenter de gérer le capitalisme, se donne les moyens de satisfaire les revendications sociales, il est impératif de compléter son programme par des mesures susceptibles de mettre fin à la dictature des grands groupes industriels et financiers. Concrètement, cela signifie la réintégration des idées fondamentales du socialisme dans le programme de la gauche. Il faut mettre définitivement fin au pouvoir écrasant dont les grandes entreprises usent et abusent pour imposer la régression sociale; il faut en prendre le contrôle au nom de tous ceux qui subissent cette régression, c'est-à-dire les nationaliser — ou, pour utiliser un meilleur terme, les "socialiser" — afin que l'économie puisse être gérée selon les critères du bien public et non plus du profit privé.
Quant aux dirigeants socialistes ou communistes qui préfèrent que la gauche reste figée dans cette démarche qui consiste, pour reprendre l'expression favorite de Robert Hue, à être "à l'écoute des salariés", mais qui, dans la pratique, revient à se plier aux intérêts de la Bourse et des capitalistes, le mieux est de les inviter à se retirer pour faire place à des individus plus combatifs. La gauche n'a besoin ni d'énarques, ni d'hommes fortunés, ni de cerveaux fatigués et empêtrés dans la "modération". Elle a besoin de sang neuf, d'hommes et de femmes désintéressés, dévoués corps et âme à la défense des intérêts des travailleurs, et munis d'une compréhension claire de ce qu'est le socialisme.
En finir avec le capitalisme
N'écoutez pas les sirènes démoralisantes qui parlent de l'avènement du fascisme. Regardez plutôt la mobilisation magnifique des travailleurs italiens contre Berlusconi, dont le programme ressemble très fortement à celui de Jacques Chirac. Quand Noël Mamère, ou encore les intellectuels exubérants qui dirigent ATTAC, font un parallèle entre la France de 2002 et l'Allemagne de 1933, ils nous prouvent seulement qu'ils ne comprennent strictement rien, ni à ce qui s'est passé en 1933, ni à ce qui se passe aujourd'hui en France. En réalité, quel que soit le résultat des présidentielles et des législatives, c'est une perspective toute autre qui se dessine à l'horizon des mois et des années à venir. Juppé en sait quelque chose. Si le camp de Chirac obtenait une majorité parlementaire, il lancerait une grande offensive contre le monde du travail, sur le modèle de celle de 1995. Cependant, comme à l'époque, cela provoquerait infailliblement une immense mobilisation de la part de ceux dont elle menacerait les intérêts, à savoir pratiquement tout le monde.
La déroute de la gauche aux présidentielles est la conséquence du caractère pro-capitaliste de la direction actuelle du PS, ainsi que de l'incapacité des dirigeants communistes à présenter une alternative sérieuse. Au cours des luttes à venir, la question des programmes du PS et du PCF, ainsi que des organisations syndicales, se posera d'une manière franche et incontournable. Tous les dirigeants, toutes les tendances politiques, seront soumis à une rude épreuve. Si les militants de gauche, les militants syndicaux et la jeunesse tirent les bonnes conclusions de cet échec, ils pourront, dans les années à venir, infliger une défaite décisive à la droite et à l'extrême-droite, c'est-à-dire en finir avec le capitalisme, et inaugurer un nouvel ère, celle du socialisme démocratique, qui débarrassera la société de l'exploitation, de l'inégalité, de la pauvreté, et du racisme.
La Riposte
Paris, le 24 avril 2002.