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Un centre fermé brûle en Angleterre
by yannindy Friday April 19, 2002 at 05:15 PM
yannindy@yahoo.fr

Le 14 février dernier, un centre fermé, Yards Wood, brûlait en Angleterre. Le centre est géré par une boîte privée. Voici un article concernant cet incendie.. assez impressionnant.

L'URL dirige vers l'article original (en anglais)

Incendie dans un centre de détention pour réfugiés à Yarls Wood.

"Lorsque j'ai demandé ce que les gardes faisaient pour régler la situation, on m'a répondu qu'il n'y avait pas de gardes, parce qu'ils s'étaient tous enfuis. Je ne pouvais simplement pas le croire. J'ai vu que toutes ces portes et ces barrières (il y en a le long de tous les corridors) étaient fermées. Pas de gardes, pas de police, pas de pompiers ni qui que ce soit d'autre. Seulement des gens paniqués partout. A ce moment, quelques détenus (surtout des hommes noirs) ont essayé de faire sortir les gens de l'immeuble. S'ils n'avaient pas été là, nous aurions tous brûlés."
Témoignage d'une détenue de Yarls Wood.


Cela fait un mois que le centre de détention de Yarls Wood a brûlé, en Angleterre dans le Bedfordshire. Mais ce qui c'est réellement passé ce jour-là n'est toujours pas clair. La seule réponse du gouvernement a été de promettre un renforcement de leur politique avec plus de centres de détention pour demandeurs d'asile, plus de mesures de sécurité, des expulsions plus rapides pour les demandeurs déboutés, et un accès réduit au système judiciaire.
Yarls Wood n'a ouvert qu'en novembre passé. La construction a été estimée à 100 millions de livres (162.884.160
EUR). La gestion en a été confiée à Group 4 (une société privée) sous contrôle du Ministère de l'Intérieur. Pour faire en sorte que les demandeurs d'asile se sentent chez eux, ils ont installés des systèmes de sécurité digne d'une prison de catégorie B, entourée par des grilles de près de 5 mètres surmontées de barbelé avec des caméras et des unités de détection par micro-ondes pour éviter toute évasion. Selon le gouvernement, le centre est censé accueillir des demandeurs d'asile déboutés sur le point d'être expulsés, mais leurs propres statistiques révèlent que seuls 46 des 385 détenus à Yarls Wood la nuit de l'incendie étaient en attente d'expulsion.
Depuis que les premières personnes sont arrivées là-bas, il y a eu sans arrêt des plaintes sur les conditions de détention. En janvier, presque tous les détenus ont fait une grève de la faim de 24 heures. L'après-midi de l'incendie, le 14 février, il y a eu un début de révolte lorsqu'une femme a été emmenée à l'hôpital une fois menottée. Quelque temps plus tard, le feu prenait. On ne sait pas exactement où, mais beaucoup de détenus croient que l'origine est dans les locaux d'accueil, auxquels ils n'ont pas accès.
Les histoires de ceux qui ont été pris au piège ce jour-là commencent à sortir, et elles sont effroyables.
"L'incident a commencé lorsque les détenus ont vu une femme d'environ 55 ans être menottée, et ils ont eu peur pour sa sécurité. Les gardes ont ordonné aux femmes de rester dans leurs chambres. Les familles attendaient dans la salle d'attente que le personnel de Group 4 leur dise que faire. Trois heures plus tard, quand ils se sont rendus compte que le bâtiment brûlait, et qu'il se remplissait de fumée, ils étaient toujours en train d'attendre.
Les sorties et les portes étaient fermées. Group 4 n'a procédé à aucune évacuation. Les détenus se sont sortis l'un l'autre hors du bâtiment. Une fois dehors, ils ont vu d'autre détenus coincés dans leurs chambres, appelant à l'aide, incapables de respirer. Un homme a ouvert sa porte, et vu les flammes dehors. Les détenus appelaient les hommes de Group 4 ou de la police, leur demandant d'aider ceux qui étaient coincés. Avec toutes les issues fermées, le seul chemin vers l'extérieur du bâtiment en feu aurait été par des fenêtres renforcées pour quartiers de haute sécurité, qui ne s'ouvrent que de quelques centimètres.
Certains détenus ont essayé de maîtriser l'incendie eux-mêmes, mais ont vite du renoncer. Ils ont alors demandé aux pompiers d'entrer dans l'immeuble. D'autres ont dit que la police et les gens de Group 4 essayaient de les repousser à l'intérieur de l'immeuble, ou ont bloqué leur sortie lorsqu'ils sont arrivés à sortir.
Les détenus, y compris un bébé de deux ans, ont été gardés dehors pendant la plus grande partie de la nuit, dans le gel. La mairie du Bedfordshire avait les moyens de transport nécessaires, et pouvait fournir des abris y compris une école où donner les premiers soins, mais ils n'ont pas été utilisés. Les gens ont été rassemblés par la police et les employés de Group 4, qui ont essayé en criant de les rassembler sur des courts de tennis juste à côté du bâtiment en flammes. Lorsque les détenus ont protesté, ils ont été poussés dans les parties inoccupées du bâtiment."
Le département de la déportation.
Pendant le temps où les employés de Group 4 empêchaient les détenus de sortir, il semble que les pompiers étaient empêchés de rentrer dans le bâtiment en flammes. S'ils en avaient eu l'occasion, ils auraient probablement pu éviter une grosse partie des 38 millions de Livres Sterling de dégâts (61.907.712 EUR). Le ministre de l'intérieur Dvaid Blunkett a immédiatement reporté la responsabilité du manque d'accès des pompiers sur les détenus, se plaignant que "Maintenant qu'on les (les demandeurs d'asile) a retirés de prison, notre récompense est l'incendie d'une partie du complexe. C'est lamentable".
Le syndicat des pompiers (FBU) refuse cependant la ligne officielle, et ont attaqué l'état et Group 4 pour avoir refusé de mettre en place une système d'extinction automatique. Andy Gilchrist du FBU a dit qu'il "était clair qu'ils ont fait passer leurs bénéfices avant les vies des demandeurs d'asile, les transformant en citoyens de seconde zone. Group 4 a froidement refusé de mettre en place un système d'extinction pour diminuer les coûts". Les pompiers qui étaient à Yarls Wood ont aussi réfuté les accusations selon lesquelles ce seraient les demandeurs d'asile qui les auraient empêchés de rentrer. Un porte-parole a déclaré: "Aucun des pompiers n'a quelque reproche à faire aux demandeurs d'asile. Nous sommes seulement démoralisés parce que nous avons été empêchés de faire notre travail." Au vu de la situation à Yarls Wood, le FBU demande maintenant la libération immédiate de tous les demandeurs d'asile jusqu'à ce qu'ils aient pu rendre les centres de détention sûrs.
Group 4 est la première société de sécurité au monde. Ils sont aussi impliqués dans la gestion du centre de détention de Campsfield. En 1997, après des manifestations de masse à Campsfield, 10 détenus ont été accusés de rébellion. Le procès qui suivit a tourné court lorsqu'il est devenu clair que non seulement les gardes de sécurité du Group 4 mentaient, mais qu'ils avaient eux-mêmes commis des délits. Il n'y a jamais eu le moindre procès envers la compagnie.
Quand à ceux qui étaient présent à Yards Wood la nuit de l'incendie, 70 ont été transférés dans des prisons, certains en isolement, alors qu'aucun n'a été accusé du moindre délit. 19 sont toujours portés disparus. La version officielle veut qu'ils se soient enfuis, mais on ne peut écarter la possibilité qu'ils soient morts dans le sinistre. En effet, l'analyse détaillée du bâtiment n'a commencé que fin février, et elle devrait durer 2 mois. Dans ce qui ressemble à une tentative de dissimulation, les amis et la famille de ceux qui savent ce qui s'est passé ne reçoivent plus l'autorisation de les voir, et des témoins-clé des événements ont été expulsés. Shalir Hussain, un avocat qui représente plusieurs des demandeurs d'asile, s'est vu enlever un client sans la moindre explication. "Il me semble que tous les témoins potentiels ont été mis au secret et expulsés le plus vite possible."
Il est à craindre que ces expulsions puissent empêcher les enquêteurs de faire un jour toute la lumière sur cette affaire.