Israël sur le chemin de La Haye: Crimes de guerre et sécurité d'Israël by Gush Shalom Wednesday April 03, 2002 at 10:50 AM |
Forum de Discussion organisé par Gush Shalom le 9 janvier 2002 Salle Tzavta à Tel Aviv
Intervenants :
Dr Yigal Shohat, colonel de l'armée de l'air à la retraite
Dr Eyal Gross, Faculté de Droit - Université de Tel-Aviv
Prof. Adi Ophir, Département de Philosophie - Université de Tel-Aviv
Dov Tamari, brigadier général à la retraite
Michael Tarazi, conseiller juridique au département des négociations de l'OLP - Ramallah
Shulamit Aloni, ancienne Ministre de l'Éducation et ex-dirigeante du parti Meretz
Modérateur : Haim Hanegbi
Note : Dans plusieurs des prises de parole qui suivent, le terme «drapeau noir» apparaît. Cette expression est tirée du verdict de la Cour Suprême d'Israël, qui déclara coupables les auteurs des massacres de Qafr Qasem, rejetant leur plaidoyer selon lequel ils avaient suivi des ordres, et statuant qu'un soldat a le droit et le devoir de refuser «un ordre manifestement illégal, au-dessus duquel flotte le drapeau noir de l'illégalité». Il n'y a néanmoins aucune définition qui fasse autorité quant à ce qui peut constituer un tel ordre.
Haim Hanegbi :
Je n'ai pas l'intention d'entrer en compétition avec les intervenants et de faire de longs discours de mon cru. J'aimerais commencer cette soirée en lisant quelques lignes de Yéhudah Amihaï:
Des trois ou quatre qui sont dans la pièce
Il y en a toujours un près de la fenêtre
Pour voir
Les méfaits entre les buissons
Et les feux sur la colline
Et comment des personnes parties entières le matin
Sont ramenées chez elles en miettes.
Yigal Shohat :
Je suis présent ce soir à cause d'une lettre à l'éditeur écrite en juillet. Dans cette lettre, je ne parlais pas d'objection de conscience complète. En vérité, je n'ai encore qu'une opinion partielle concernant le refus complet de servir dans l'armée israélienne.
Je soutiens l'État d'Israël, la défense de sa sécurité, la défense de ses frontières, et aussi le combat contre le terrorisme local et international qui nous menace. Pour cela, une armée est nécessaire. Mais d'un autre côté, je ne peux me résigner à accepter systématiquement l'occupation actuelle. Le fait qu'une génération après l'autre de soldats perpétue cette occupation donne en fait aux gouvernements successifs le pouvoir de s'accrocher à l'occupation et aux colonies et d'oppresser la population palestinienne. Par conséquent, je me trouve plongé dans un dilemme majeur, que j'ai résolu pour moi-même, au moins provisoirement, en m'opposant au service militaire effectué dans les Territoires occupés, plutôt que de refuser complètement de servir.
Je sais qu'il y a là quelque hypocrisie. Un soldat qui travaille au quartier général à Tel-Aviv à des taches administratives peut faire plus de mal qu'un soldat à un barrage dans les Territoires.
Cependant, je pense que refuser de servir dans les Territoires occupés est un message ayant plus d'impact politique et moral. Cela veut dire que vous êtes prêt à protéger votre pays et vous battre pour lui, mais que vous ne voulez pas opprimer une autre nation pendant longtemps, et agir de façon contreproductive sur la sécurité de l'État d'Israël. En fait, actuellement, le service militaire dans les Territoires occupés est dommageable à la sécurité d'Israël et sert seulement la sécurité des colons. Je pense que tout le monde est d'accord là-dessus.
En ce qui concerne les pilotes, pilotes de combat, pilotes d'hélicoptères, tous les pilotes, ils ne peuvent simplement refuser de servir au-delà de la Ligne Verte (frontière d'avant 1967). Les pilotes ne servent pas là où ils sont stationnés. Ils doivent décider de nouveau chaque jour, parfois chaque heure, ce qu'ils doivent ou ne doivent pas faire d'un point de vue moral et légal.
Je ne suis pas naïf. Je sais qu'un pilote qui refuse une ou deux fois de bombarder Naplouse ou Ramallah mettra fin prochainement à sa carrière - et c'est vraiment une carrière. Voler, c'est une façon de vivre, une profession. Ce n'est pas simplement une période de service, comme pour un appelé ou un réserviste, à effectuer rapidement et rentrer à la maison sain et sauf. C'est pourquoi, quand on discute avec des pilotes, je suis pour examiner le concept de «drapeau noir».
À mon avis, les pilotes doivent examiner minutieusement les ordres qu'ils reçoivent, poser beaucoup de questions sur l'objectif, et refuser d'exécuter un ordre qui leur semble illégal. En pratique, j'ai bien peur qu'ils ne soient pas du tout concernés par ces problèmes. Ils sont en compétition entre eux pour la prochaine mission d'assassinat de quelqu'un dans la principale rue de Naplouse ou de largage d'une bombe sur un bâtiment de Ramallah. Ils reviennent probablement satisfaits s'ils ont touché leur cible, même s'ils regrettent un peu lorsque des civils ont été tués. Je me souviens de ces sentiments moi-même. Les gens veulent exceller dans leur travail et ils veulent de «l'action». C'est pour cela qu'ils sont devenus des pilotes de combat en premier lieu. Je pense que les pilotes de F-16 devraient refuser de bombarder des villes palestiniennes. Ils devraient réfléchir à l'impact d'une telle attaque sur la ville qu'ils habitent. Imaginons qu'Arafat décide d'envoyer un avion de combat pour détruire les quartiers généraux de la police dans la rue Dizengoff (à Tel-Aviv). Imaginons qu'Arafat aie un avion de combat pour le faire, et qu'il puisse ainsi convaincre Sharon de quitter les Territoires. Accepterions-nous des bombardements aériens au milieu de nos villes comme moyens légitimes de guerre? L'attaque ce matin contre un avant-poste de l'armée est déjà considérée en Israël comme du «terrorisme»!
Je peux imaginer comment on a réagi à Ramallah quand les quartiers généraux de la police ont été bombardés par un F-16. Je ne me réfère même pas aux personnes qui ont été tuées là-bas - des cuisiniers de Gaza, plutôt que des combattants. Je parle du bombardement d'une ville densément peuplée. Je parle d'assassinat dans une rue principale en tirant des missiles d'un hélicoptère, quand trois passants sont tués. Ceci ne peut être décrit comme «dommage collatéral»; on ne peut prétendre qu'il n'y avait aucune intention de faire du mal aux civils. Quand un avion bombarde une ville densément peuplée, les victimes civiles doivent être prises en compte. Même lorsque les bombes sont supposées viser des cibles précises. Par conséquent, il y a assassinat prémédité de civils. Un crime de guerre.
Nous avons vu ces derniers mois ce que des «bombes intelligentes» peuvent faire, à la fois ici et en Afghanistan. Je ne pense pas que l'objectif soit à ce point important qu'il nous faille payer un tel prix, surtout parce que nous ne sommes pas confrontés à une armée mais plutôt à des civils. Surtout quand notre cause est injuste. Et un objectif moindre, détruire un bâtiment de police afin de faire pression sur Arafat pour faire cesser le terrorisme, n'est pas légitime non plus. Je n'ai d'ailleurs pas non plus accepté comme légitime (en 1986) la campagne militaire «Raisins de la Colère» qui avait pour but de chasser les villageois libanais en les bombardant, et ainsi faire pression sur le gouvernement libanais pour qu'il combatte le Hezbollah. Mais les pilotes ne sont pas les seuls à être impliqués dans des crimes de guerre. C'est possible, je pense, que les pilotes soient en fait moins impliqués que d'autres. Chaque conducteur de bulldozer devrait refuser l'ordre de destruction de maisons afin de créer un «champ net de tir» pour l'armée. Cette semaine, j'ai lu dans Ha'aretz une interview du général de brigade Dov Zadka, chef de l'administration militaire. J'ai lu l'information sur les autorisations qu'il donne sur la destruction de champs cultivés et de vergers palestiniens, et ses plaintes sur le fait que des officiers sur le terrain deviennent hyperactifs et déracinent le double du nombre d'arbres prévus.
Mais quelle autorité a-t-il pour autoriser de telles choses, quelle qu'en soit l'ampleur? Je suis surpris à la pensée qu'un homme puisse, de façon routinière, se lever le matin pour aller accomplir un tel travail. Nous ne parlons pas d'une jeune recrue, mais d'un général avec beaucoup d'années d'expérience et d'entraînement. Que se dit-il en lui-même à la fin de chaque journée? Aujourd'hui j'ai autorisé la destruction de cinquante ares de champs de fraises? Dans quel but? Pour la sécurité d'Israël? Je vois que le général Zadka se soucie maintenant du fait qu'il pourrait éventuellement se retrouver devant le tribunal de La Haye pour crimes de guerre, et c'est vrai qu'il le pourrait. Ainsi, il est conscient de ce qu'il fait, et néanmoins il continue de commettre ces méfaits?
Je pense que la destruction de maisons d'habitation civiles, parce qu'elles obstruent le champ de vision des tireurs d'élite, est une action immorale par définition. Je ne suis pas un juriste et ne sais pas ce qui est légal ou illégal, mais je peux imaginer que c'est aussi illégal. On ne devrait pas attendre, parce qu'alors l'action a déjà eu lieu - comme ce fut le cas avec Ehud Yatom (un membre israélien des services de sécurité qui tua deux prisonniers palestiniens en 1984). Il y a des gens qui ne voient jamais flotter les drapeaux noirs, même lorsqu'il s'agit du meurtre d'un Arabe ligoté. Il y a des gens qui voient des drapeaux noirs seulement lorsqu'ils vieillissent, comme moi. Quand j'étais un jeune pilote, je n'ai jamais remis en question mes ordres, j'ai fait ce qui m'était ordonné.
Je suis en faveur d'élargir le concept de «drapeau noir», qui veut dire un refus d'obéir à un ordre manifestement illégal. Mais je sais que ni les recrues ni les soldats de carrière ne l'utiliseront souvent. Quand vous êtes à l'intérieur (de l'armée), vous voyez les choses différemment. Je pense que même le fait d'être à un point de contrôle dans les Territoires occupés et de sélectionner quelle personne se rendra à l'hôpital et celle qui n'ira pas, quelle femme ira à la maternité et celle qui sera retenue et accouchera au point de contrôle, est manifestement illégal. Par conséquent, je pense que quiconque est appelé à servir à ces points de contrôle, devrait refuser, même au prix d'être poursuivi. Ce serait une bonne chose si ces «sélections» aux points de contrôle étaient examinées par un tribunal. Je pense que ceux qui refusent de servir dans les Territoires ne devraient pas se contenter simplement d'aller en prison - ils devraient combattre pour que leur cas soit porté devant un tribunal civil, de sorte que l'affaire y soit examinée et rendue publique. Ils devraient porter leur cas devant la Haute Cour de Justice.
Ils devraient déclarer que les ordres qui leur ont été donnés sont illégaux. Ceux qui vont directement en prison n'ont pas d'impact réel. L'armée ne doit pas être autorisée à établir des points de contrôle selon sa volonté, et empêcher les gens de vivre leur vie, aller au travail, aller chez le docteur. Nous ne devons pas accepter cette situation comme si elle avait été de droit divin. C'est une punition collective contre des civils. C'est illégal selon la Convention de Genève.
Je pense que c'est honteux que si peu refusent de servir dans les Territoires, mais je trouve difficile de réprimander qui que ce soit, parce que moi-même je n'ai pas refusé quand j'aurais dû le faire.
Il y a presque vingt ans, j'ai rendu visite au professeur Isaiah Leibowitz. Il m'a demandé alors, en 1983, comment il se faisait qu'on ne puisse trouver 500 officiers pour refuser de servir dans les Territoires occupés. Selon lui, 500 officiers auraient mis fin immédiatement à l'occupation. Il avait raison.
Bientôt, il ne sera plus possible de parler d'occupation, parce que notre présence dans les Territoires sur une si longue période de temps a créé une nouvelle situation. Les gens qui ont servi comme nouvelles recrues dans les Territoires y retournent comme réservistes, et leurs enfants vont au même endroit. La nouvelle génération ne connaît même pas de Palestiniens, parce que les bouclages prolongés et les Territoires ressemblent au Liban. Une attitude d'apartheid à l'égard des Palestiniens est transmise de génération en génération. Ceci est vrai non seulement pour les colons, mais pour nous aussi. S'il n'y avait pas de violents incidents, nous ne nous souviendrions même pas que les Palestiniens existent.
Je ne peux pas dire que toutes les opérations militaires auxquelles j'ai participé en temps que pilote d'active de combat étaient légales ou morales. Je pense que non. Des amis de cette période, qui ont bombardé des cibles avec moi, m'accusent d'avoir pris la décision de devenir sensible à la morale trop tard. Que ce n'est pas une grande affaire de parler d'objection de conscience alors que cela n'a plus rien à voir avec moi, que je ne serai pas celui qui ira derrière les barreaux. Ils disent que je suis resté silencieux tant que j'étais encore concerné par une promotion dans les rangs de l'armée, mais que maintenant que je n'ai plus rien à perdre, je deviens brusquement un héros.
À ceci je réponds: c'est vrai que j'ai atteint une maturité politique et morale très tard. Mais je peux aussi dire qu'en gros les cibles visées étaient militaires. Que quand j'ai bombardé des zones civiles, c'était dans le contexte d'une véritable guerre, alors qu'il y avait des avions, des tanks et des soldats combattant des deux côtés, et qu'on ne pouvait savoir qui serait le vainqueur. Dans les guerres auxquelles j'ai participé, nous avions en général le sentiment qu'Israël était en position d'infériorité, que nous combattions pour notre vie et nos maisons.
En ce qui concerne les Territoires et le combat contre les Palestiniens, je ne vois pas d'armées se confrontant. Et en ce qui concerne cette guerre actuelle, je ne sais même pas de quel côté je suis - et certainement pas du côté des colons. Ce que je vois, c'est une population occupée, qui possède quelques centaines de fusils et mortiers, essayant de nous faire partir, et que nous refusons de le faire parce que nous avons investi quelques centimes dans des colonies inutiles.
Je suis familier avec les arguments utilisés contre les objecteurs de conscience. D'abord, il est dit que dans une démocratie c'est au gouvernement élu de déterminer ce qui est ou n'est pas un objectif légitime. Je ne suis pas d'accord. Justement parce que nous sommes en démocratie, c'est le droit et la responsabilité de chaque citoyen de s'opposer à des combats illégaux. Dans les régimes totalitaires, ceux qui refusent, les objecteurs, sont fusillés.
Ici, ils vont juste en prison pour une courte période. C'est dans une démocratie que chacun a la possibilité de ne pas choisir de suivre le troupeau.
Le deuxième argument, c'est que des personnes plus humaines devraient devenir des soldats et se tenir aux points de contrôle pour améliorer la situation des Palestiniens, et que ces points de contrôle ne devraient pas être laissés à la merci des fanatiques de droite. Mais je doute de l'importance placée sur la conduite individuelle d'un soldat en poste au point de contrôle, car avec le temps, tout le monde devient indifférent à la souffrance quotidienne. Je pense que l'individu soldat a plus de poids quand il refuse de servir.
Le troisième argument, c'est que chacun choisit ceux des ordres auxquels il obéit ou non, et que quand le temps viendra, les colons et leurs supporters refuseront de participer à l'évacuation des colonies. Sur ce point, je dis que je suis d'accord là-dessus. Des soldats qui sont eux-mêmes des colons refuseront d'évacuer les colonies, nous le ferons à leur place. Moi, par exemple, j'aurais refusé de conduire un bulldozer pour détruire la maison d'une famille palestinienne; un colon refusera d'évacuer une famille de colons. Je suis d'accord avec cela. Le plus important, c'est que les soldats de l'armée israélienne conservent leur humanité, et qu'ils soient aux prises avec des dilemmes moraux.
Selon moi, toutes les actions de l'armée israélienne sont en train d'approcher la ligne rouge du «drapeau noir». Je ne suis pas à même de dire en détails ce qui est légal et ce qui constitue des crimes de guerre. Dans une période où les Américains tuent 7000 personnes pour attraper un homme, il est difficile de parler de moralité dans une guerre. Depuis la création de l'Autorité Palestinienne après les accords d'Oslo, nous avons commencé à la traiter comme un État alors que cela n'en est pas un. Cela rend plus facile pour nous de l'attaquer avec des armes qui sont conçues pour se battre entre armées, comme les tanks, et les avions de combat. Je pense que nous avons déjà dépassé une sorte de tournant fondamental. Je crains beaucoup que dans un futur pas trop éloigné nous allons bombarder les Arabes citoyens d'Israël, comme nous leur avons déjà tiré dessus au cours des manifestations de 2000. Le jour viendra où l'armée de l'air bombardera Umm el-Fahm, comme Saddam Hussein a bombardé ses propres citoyens kurdes. Je ne sais pas non plus si les pilotes refuseront cet ordre. Quelqu'un les convaincra que c'est logique et vital, que les bombes sont «intelligentes», qu'ils ne vont bombarder que les bureaux administratifs, le mouvement islamiste. Ils se convaincront qu'ils ne vont pas blesser de civils. Je ne peux pas voir beaucoup de différence entre ceci et le bombardement de Ramallah.
Haim Hanegbi :
Avant de céder la parole au prochain intervenant, j'aimerais citer un cas concret de crime de guerre, l'ordre opérationnel donné à une unité militaire israélienne qui mena un raid frontalier en octobre 1953, et qui ne fut révélé que 40 ans plus tard. Le 9 septembre 1994, Ha'aretz publiait la photo du document original, écrit de la main du commandant: «L'objectif est d'attaquer le village de Kibiya, de l'occuper et d'y causer un maximum de dégâts en vies humaines et biens matériels.» Cet ordre est signé du major Ariel Sharon, commandant des Forces Spéciales de l'Unité 101.
Dr Eyal Gross :
D'abord je voudrais féliciter Yigal Shohat pour les choses importantes et émouvantes qu'il a dites ici. S'il ne tenait qu'à moi, ces mots paraîtraient en première page de tous les journaux. Récemment, j'ai été invité à parler sur le sujet des crimes de guerre dans des forums différents et variés: le Conseil du Mémorial de l'Holocauste, le Conseil pour la Paix et la Sécurité (des ex-généraux «colombes», des officiers retraités), et l'Association des Magistrats. L'intérêt du sujet, c'est les rapides changements apparus là-dessus dans les attitudes internationales. J'aimerais expliquer ce qui est en train de se passer dans les cours internationales de justice, et ce que cela veut dire quand on prononce le mot magique de «La Haye». Ces dernières années ont vu s'intensifier une tendance qui n'est pas nouvelle en soi: la définition de crimes universels, pour lesquels une personne peut être jugée peu importe où ces crimes ont été commis. Généralement, la loi est territoriale. Si je vole en Israël, seule une cour de justice israélienne peut juger - sauf si j'ai volé un citoyen d'un autre pays. Mais il y a toujours eu quelques exceptions. Un crime universel très connu, reconnu depuis des siècles, c'est la piraterie. En l'absence d'un tribunal international, un pirate peut être jugé par le tribunal de n'importe quel pays, même un pays dont les bateaux n'ont pas été volés.
De nos jours, il y a deux tendances: donner pouvoir séparément aux tribunaux des pays pour qu'ils jugent les accusés de crimes universels, et la création de tribunaux internationaux spéciaux. Une affaire récente importante fut l'affaire Pinochet. L'Espagne demanda à l'Angleterre d'extrader Pinochet afin qu'il puisse comparaître devant un tribunal en Espagne pour des actes de torture qui n'avaient pas été commis en territoire espagnol. La chambre des Lords décida qu'il pouvait effectivement être extradé. Finalement, il a échappé à l'extradition après que le gouvernement anglais ait décidé que sa santé était trop fragile. (Suite au retour au pays de l'ex-dictateur, l'air chilien a fait des miracles sur son état de santé et celle-ci s'est améliorée rapidement). Néanmoins, le précédent établi par la chambre des Lords tient: une personne peut être extradée pour des crimes universels, et le fait d'avoir été chef de l'État au moment des faits ne confère pas d'immunité. La loi belge rend possibles les poursuites judiciaires pour violations de la Quatrième Convention de Genève, qui statue sur la protection des civils en temps de guerre et spécialement des civils sous occupation. Les premiers à être jugés selon cette loi furent des citoyens du Rwanda, ce qui a créé un certain malaise, parce que le Rwanda est une ancienne colonie belge. (La même chose peut être dite concernant l'Espagne et le Chili, bien que cela soit une histoire plus ancienne; il faut espérer que les prérogatives de juridiction concernant les crimes universels ne se développeront pas dans le sens d'ex-pouvoirs coloniaux prétendant avoir juridiction pour juger des ex-colonies). C'est sous cette loi belge que présentement le cas de Sharon est en cours d'étude à Bruxelles. La loi belge est claire en matière d'immunité - pas d'immunité, bien que Sharon soit Premier Ministre. Le sujet qui donne lieu à des débats passionnés, également en Belgique, c'est une juridiction rétroactive portant sur des crimes commis avant la promulgation de cette loi.
Il faut noter que le premier précédent international en la matière a été créé par Israël - spécialement dans le procès d'Eichmann. Un précédent de juridiction rétroactive fut établi quand les tribunaux israéliens prirent le droit de juger une personne pour des actes commis bien avant la promulgation de la loi israélienne dite «loi pour faire justice des nazis et de leurs collaborateurs», en fait avant même la création de l'État d'Israël. Les Belges (et bien d'autres) prennent exemple des verdicts dans le procès d'Eichmann, en particulier celui rendu par la Haute Cour de Justice. Il existe une différence significative entre les deux tribunaux devant lesquels a comparu Eichmann: le tribunal de district de Jérusalem qui le condamna en premier lieu a mis l'accent principalement sur l'aspect juif, les victimes d'Eichmann étant principalement juives, et le droit d'Israël en temps qu'État juif à le juger. La Cour Suprême, en rejetant l'appel d'Eichmann, a mis l'accent à l'opposé sur le caractère universel - le droit et le devoir de n'importe quel État de punir les auteurs de génocide, que cet État ait ou non un lien direct avec le cas à juger.
Vous pouvez dire: comment pouvez-vous faire une telle comparaison? En fait, je ne compare pas Sharon à Eichmann; cependant, d'un point de vue purement légal, le procès d'Eichmann reste le plus pertinent précédent international en vue, et il a été créé par Israël. Israël a aussi participé activement à la création d'une juridiction universelle promulguant sa «loi sur le crime de génocide», sous le coup de laquelle tout responsable d'un génocide - disons du Rwanda - aurait pu être jugé par un tribunal israélien, sans qu'Israël n'aie aucun lien direct avec l'affaire.
Maintenant, concernant l'autre voie - des tribunaux spéciaux internationaux. Le premier cas connu fut celui des procès de Nuremberg. Ce fut, cependant, un tribunal très spécifique, établi pour juger les membres d'un régime spécifique dans un État spécifique, et plutôt de nature controversée. Après qu'il eut terminé sa tâche et qu'il fut démantelé, il y a eu des décades sans l'existence de tels tribunaux, jusqu'en 1990, quand le Conseil de Sécurité de l'ONU établit les tribunaux spéciaux pour le Rwanda et la Yougoslavie.
Ceci fut suivi par la Conférence de Rome qui aboutit à la décision d'établir un Tribunal International Permanent localisé à La Haye pour juger les crimes de guerre. Ce tribunal, qui n'a pas encore été établi, doit être strictement différencié de la Cour Internationale de La Haye, qui existe déjà depuis presque un siècle, au même endroit. Devant cette Cour, seuls des États peuvent poursuivre d'autres États, des individus ne le peuvent pas, et parmi les États, seuls ceux qui ont accepté l'autorité de cette Cour sont soumis à ses lois. Le Tribunal International Permanent pour juger les crimes de guerre doit être établi à La Haye lorsqu'au moins 60 États auront signé et ratifié le Traité de Rome qui fut à l'origine de sa création. Ce chiffre est presque atteint. Pour leur part, Israël et les États-Unis ont signé, mais n'ont pas ratifié le Traité. Les États-Unis ont fait connaître leur opposition; ils ne le ratifieront que s'ils sont assurés qu'aucun de leurs ressortissants ne sera jamais jugé par le tribunal.
Le Traité de Rome a défini les crimes que le tribunal est habilité à juger: crimes de génocide, crimes contre l'humanité, incluant des dommages systématiques ou étendus causés à la population civile en ayant recours au meurtre, extermination, torture, expulsion, viol, ou apartheid; et des crimes de guerre qui incluent de graves violations de la Quatrième Convention de Genève, parmi ceux-ci le meurtre de civils et la destruction de biens sans rapport avec des besoins militaires immédiats. Cela inclut également le transfert de population du territoire de la force occupante dans le territoire occupé, c'est-à-dire la création de colonies. À cause de cet article, Israël a refusé de ratifier le traité. Un autre crime que le tribunal est habilité à juger, c'est celui d'agression, mais cela ne rentrera en vigueur que lorsqu'on se sera mis d'accord sur une définition du mot «agression», une question légalement compliquée.
Concernant le Tribunal International pour les Crimes de guerre, à la différence des autres cas mentionnés auparavant, il a été spécifié qu'il n'y aura pas de juridiction rétroactive - le tribunal se prononcera sur des offenses commises après sa création.
Le principal problème, c'est comment le tribunal fonctionnera une fois créé, et qui pourra être jugé par lui. Trois catégories sont établies. D'abord des citoyens d'États qui ont ratifié le Traité peuvent être jugés par le tribunal. Deuxièmement, ceux accusés de crimes ayant été commis sur le territoire d'un État qui l'a ratifié peuvent être jugés, même si leur propre État ne l'a pas ratifié: par exemple, si le Liban le ratifie, des Israéliens pourront être jugés pour des crimes commis sur le sol libanais. (Le territoire de l'Autorité Palestinienne, qui n'est pas un État, est un cas beaucoup plus compliqué). Une troisième possibilité, c'est que le Conseil de Sécurité des Nations unies soit habilité à décider de poursuivre une personne en particulier pour des crimes spécifiques; ceci, évidemment, dans le cadre des procédures habituelles de fonctionnement du Conseil de Sécurité et du droit de veto de ses membres permanents.
Une autre limite du Tribunal International, c'est qu'il n'a pas le pouvoir d'intervenir si un État décide de mener une enquête sincère sur des accusations portées sur l'un de ses citoyens - même si à la fin d'une telle enquête sincère, cet État décide de ne pas poursuivre ce citoyen devant ses propres tribunaux.
Pour le moment, jusqu'à l'établissement de ce tribunal à la Haye, il y a les poursuites actuellement menées contre ceux accusés de crimes de guerre devant des tribunaux ordinaires de certains États. Il en est ainsi de la plainte judiciaire contre Sharon en Belgique, et de la tentative avortée de poursuivre Karmi Gilon au Danemark. En fait, ces deux cas sont problématiques, à cause du problème de l'immunité - immunité d'un chef de gouvernement en place dans le premier cas, immunité diplomatique dans le second. Un cas beaucoup plus simple serait par exemple si quelqu'un entamait une procédure contre un ancien chef des services de la sécurité israélienne en visite au Danemark pour des affaires personnelles et ne bénéficiant pas de l'immunité diplomatique. S'il y a quelque chose qui effraie réellement ces gens-là, c'est la possibilité qu'ils ne puissent pas voyager à l'étranger.
Et pendant ce temps, en dehors de ce qui concerne les lois internationales, nous devrions nous souvenir de la loi israélienne définissant ce qu'est un acte manifestement illégal, «au-dessus duquel flotte le drapeau noir de l'illégalité». De mon point de vue, un ordre de torture d'un prisonnier, de détruire une maison appartenant à un civil, etc. sont manifestement des ordres illégaux. Par conséquent, un appel à désobéir à un tel ordre est un appel pour garantir la loi contre ceux qui la transgressent. Un soldat assis dans un bulldozer et refusant l'ordre de démolir une maison mérite l'appui total des organisations défendant les droits civiques et humains. Personnellement, en tant que président du comité juridique de l'ACRI (Association pour les droits civiques en Israël), je proposerai certainement que l'association prenne en charge la défense légale et publique d'un soldat refusant cela.
Dov Tamari :
Ce que je veux dire n'est pas nécessairement en contradiction avec ce qu'ont dit les intervenants précédants, mais j'aimerais y introduire une autre façon de voir les choses: la différence entre les guerres anciennes et les nouvelles.
Les guerres anciennes, celles du 19ème siècle et une partie de celles du 20ème siècle, comme la Seconde Guerre mondiale et bien d'autres guerres, étaient des guerres État contre État, une armée contre une autre armée. Des guerres dont le but des deux côtés était de défendre l'État, d'utiliser l'appareil de l'État de façon à réaliser aussi pleinement que possible les intérêts de cet État. Mais dans les dernières décennies, il y a eu un important changement, une diminution considérable des guerres de ce type et un accroissement correspondant de l'autre type de guerre - «la petite guerre», ce qu'à l'origine le mot «guérilla» signifiait, bien que ce mot ait accumulé bien d'autres sens et connotations.
C'est la petite «sœur» marginalisée de la «grande guerre» conventionelle. Des théoriciens tels que Clausewitz ont ignoré cet autre genre de guerre peut-être parce que cela ne rentrait pas dans les catégories rigoureuses de leur idéalisme allemand. Un concept théorique de symétrie a été inventé pour décrire et analyser la guerre. Ce n'est pas obligatoirement symétrique en terme de forces en présence des deux côtés - des guerres sont possibles même entre deux armées qui sont largement disproportionnées en force et en nombre. Même dans ces cas, cependant, les deux États et les deux armées partagent la même logique. Ceux qui pensent et agissent selon les termes de cette logique sont incapables de comprendre ce qui se passe dans le cadre d'un conflit asymétrique, un conflit entre un État et une entité non étatique - un État insaisissable, sans présence visible, face à la présence d'une armée conventionnelle visible, elle; une entité décentralisée, combattant pour sa survie ethnique, ou parfois pour sa survie culturo-religieuse, comme c'est le cas de Ben Laden.
Le concept très actuel «d'infrastructure terroriste» n'a pas de sens très clair. En 1982, cela comprenait des écoles et des associations religieuses dans les camps de réfugiés. Plus tard, des mosquées furent inclues également. Le fait est qu'une «infrastructure terroriste» est composée de personnes, de beaucoup de personnes. Si vous voulez détruire cette infrastructure, vous devez commencer par tuer les gens en masse, et si vous ne voulez pas faire cela il faut abandonner cette idée.
Les lois actuelles sur la guerre ne correspondent pas à la situation de guerre asymétrique. On peut douter quelles puissent être changées pour y correspondre. Il y a un fossé entre la perception occidentale de la guerre, et l'autre perception d'une guerre insaisissable, nomade. Ce qui ne correspond pas à la logique de la «grande guerre» est tout simplement criminalisé et regroupé sous le terme de «terrorisme», ce qui est complètement inadéquat.
Près de nous, il y a une entité palestinienne - et je dis volontairement «entité» et non «autorité». Quand vous l'examinez, vous voyez effectivement une Autorité, qui se comporte comme un État, qui a un cabinet ministériel, un parlement, une armée. Mais à ses côtés, il y a une entité insaisissable, que vous l'appeliez Hamas, Jihad ou Tanzim. Une entité changeante, sans règles fixes, voulant comme but principal à tout prix tuer - mais aussi avec la capacité d'arrêter parfois la tuerie, avec une grande capacité pour apprendre.
Tout ceci est une seule entité. Non pas que cela soit une conspiration, qu'Arafat ait des rencontres secrètes avec les gens du Hamas pour tout planifier comme certains l'affirment parfois. C'est tout simplement que le concept palestinien de la lutte est différent du nôtre, une différente culture de la lutte que nous insistons pour interpréter selon nos propres termes, avec comme résultat que nous tirons en permanence des conclusions erronées. C'est pourquoi le fameux concept de Sharon «sept jours de calme» est complètement faux. C'est la même chose pour l'idée d'une «théorie palestinienne des étapes» - si cela était correct, les Palestiniens aurait créé un État en utilisant l'offre de Barak et l'auraient utilisé comme tremplin pour la prochaine «étape».
Nous rencontrons cette situation problématique en permanence depuis 1967. Nous avons une façon binaire de penser, qui demande un clair «oui» ou «non», ainsi nous nous dérobons sans cesse. «Une guerre exige un accord pour signifier la fin de conflit.» «Prendre l'initiative de l'offensive crée la dissuasion.» «Quand on tire, on ne discute pas, pas de négociations sous le feu.» «Si nous cédons sur un point, il y aura un effet domino.»
Notre politique est complètement réceptive. Il y a des procédés d'apprentissage. Nous voulons voir une solution demain. Le temps est venu d'apprendre à vivre la situation sans solution. Je ne veux pas parler d'optimisme ou de pessimisme. C'est tout simplement que je ne vois pas de solution ou d'accord imminent, sauf d'apprendre à vivre avec cette situation pendant longtemps.
Ma perception de la situation a débuté vraiment une nuit, celle entre le 7 et le 8 août 1970, quand le cessez-le-feu prit effet entre nous et les Égyptiens (mettant fin à trois ans de guerre d'usure le long du canal de Suez).
Depuis 1967, Israël a raté toutes les opportunités. Immédiatement après que les Territoires soient tombés entre nos mains, nous aurions pu créer un État palestinien, même imposer sa création. Plus tard, la proposition d'autonomie palestinienne à Camp David, lors de la rencontre de Begin et Sadate à Camp David, fut volontairement émasculée, et n'aboutit à rien. Puis l'application des accords d'Oslo fut conditionnée par de nombreuses étapes de mesures de confiance, mais en pratique la confiance fut détruite plutôt qu'établie. En mordant sur la Ligne Verte, cela fit venir les Palestiniens à l'ouest plutôt que de les pousser à l'est. Les colonies furent conçues pour pousser les Palestiniens à partir vers l'est, c'est toute la logique de leur création. En fait, malgré cela, l'occupation a poussé les Palestiniens vers l'ouest, prenant des petits boulots à l'intérieur de la Ligne Verte et aussi y menant des attaques.
Nous sommes en fait revenus au temps où le mouvement des kibboutz Mapam parlait d'un État binational. Si vous ne voulez pas de cela, vous avez besoin d'une frontière. Une frontière, c'est la seule référence entre États. Vous ne pouvez pas avoir une situation dans laquelle d'un côté de la frontière vous avez un État et de l'autre vous n'en avez pas.
Nous n'avons pas fait la paix avec le Hezbollah au Liban, pourtant, il y a une frontière précise entre nous et le Liban, la référence c'était «où est la frontière». Israël a tendance à penser en terme de lignes, non de frontières. Lignes d'armistice, lignes de cessez le feu. Nous avons ignoré le concept de frontière jusqu'à ce que nous établissions une frontière avec l'Égypte et la Jordanie, mais nous ne l'avons pas appliqué à d'autres endroits.
Adi Ophir :
L'armée israélienne est impliquée dans des crimes de guerre - là-dessus je pense que nous sommes tous d'accord. La question est, devant quels tribunaux est-il possible de juger ceux qui les commettent. Il existe déjà des tribunaux, et d'autres seront peut-être créés dans le futur. Il est peut-être possible de créer de tels tribunaux qui pourront au moins faire comparaître certains responsables devant le tribunal de l'opinion publique. Et il existe des organisations non gouvernementales dont le but est de documenter, rassembler des preuves, montrer qui sont les coupables.
En se basant sur ce qui est dit plus haut, nous ne devrions pas poser la question abstraite de savoir si Israël est sur le chemin de La Haye, mais poser une question beaucoup plus concrète: pourquoi n'en faisons-nous pas plus pour nous assurer que des personnes physiques y seront amenées, des personnes dont les noms, adresses et détails de leurs méfaits sont tous très bien connus? Par exemple, construire un dossier sur le Ministre de la Défense et chef du Parti Travailliste Ben Eliezer? Nous savons tous ce qu'il a fait, les responsabilités qui pèsent sur lui. Et plus de dossiers, aussi nombreux que possible, sur tous ceux qui peuvent être liés et tenus pour responsables de méfaits particuliers. Des généraux jusqu'aux commandants de brigade, commandants de bataillon, jusqu'aux sergents et caporaux brutaux des points de contrôle. Pourquoi B'Tselem, par exemple, ne peut-elle commencer à rassembler des dossiers?
Ceci a une portée immédiatement dérangeante. Des officiers réfléchiront s'ils doivent ou non voyager à l'étranger, demanderont des conseils juridiques. De plus, faire cette demande augmentera le processus d'internationalisation du conflit - un processus vital parce qu'il apparaît que la société israélienne est incapable de s'extirper d'elle-même du gouffre où elle se trouve plongée.
Évidemment, faire un tel pas a un prix. D'abord, parler de crimes de guerre peut avoir l'effet de dépolitiser le débat, le centralisant sur la personne visée et l'ordre spécifique donné, en ignorant les causes plus générales de l'occupation en cours. Deuxièmement, si un groupe démarrait la compilation de dossiers sur des personnes particulières et les distribuait à travers le monde, via Internet, auprès des missions diplomatiques etc., ce serait une radicalisation, une radicalisation qui marginaliserait encore plus le groupe qui ferait cela. Comme si nous n'étions pas déjà suffisamment marginalisés et rejetés.
Néanmoins, cela devrait être fait. Nous devrions nous rappeler le contexte général. Depuis le début de l'Intifada, en fait depuis l'échec de Camp David, une nouvelle situation s'est développée. L'occupation est rentrée dans une nouvelle phase, cela surtout depuis l'élection de Sharon. La différence entre de facto et de jure, qui existait depuis Oslo, a disparu. Entre 1993 et 2000, il y avait une occupation de facto sur le terrain, à l'intérieur de la vie quotidienne palestinienne - mais de jure, dans les accords et le processus politique, il y avait l'idée selon laquelle l'occupation est temporaire, une situation qui donne de l'espoir, une fenêtre ouverte sur un avenir meilleur. En février 2001, cette fenêtre s'est fermée. Il n'y a actuellement aucune dimension politique, aucun plan significatif pour un quelconque processus politique. Il y a l'occupation, une période - malgré les performances occasionnelles de Peres et ses spectacles. Occupation de facto et occupation de jure, pas de différence. Une chose importante est restée du processus d'Oslo: le temporaire. Personne ne pense que cette situation est ou peut être permanente. Tout est temporaire: les bouclages sont temporaires, le siège est temporaire, la délivrance de documents est temporaire. Tout est temporaire, le temporaire est la règle. Et ceci est terrible. Sous le couvert du temporaire, l'occupant peut faire n'importe quoi, parce qu'on est dans une situation d'urgence. Sous le couvert du temporaire, il y a plus de crimes de guerre. Sous le couvert du temporaire, la société peut être mobilisée pour fermer les yeux et tout ignorer.
À cause de cette dynamique, côté palestinien on n'a pas le choix, sinon de résister - une résistance qui est légitime suivant la définition commune sioniste. Si vous placez dans le cadre du discours commun sioniste la situation actuelle des Palestiniens et demandez «que feriez-vous dans une telle situation?», alors tous les exécutants de l'occupation vous répondront «dans une telle situation, je résisterais». Comme Barak a dit une fois: «Si j'étais un Palestinien, je serais devenu un terroriste.» Mais bien sûr, cette équation n'est généralement pas faite, c'est même rare dans le cas de Barak. Habituellement, il y a un aveuglement complet ou presque sur la situation de l'autre, l'absence de volonté de se placer ne serait-ce qu'un court instant à la place de l'autre.
C'est cette situation qui crée le nouveau régime de l'occupation, faisant de la société israélienne une société plus nationaliste et en même temps formalisant un régime d'apartheid à l'intérieur Israël. Non seulement les formes traditionnelles de discrimination envers les Palestiniens citoyens israéliens, concernant la propriété de la terre, le service militaire, et les droits qui en découlent, etc. Le processus s'amplifie. Je viens justement de lire que le Ministre de l'Intérieur ne veut pas accorder la citoyenneté israélienne aux épouses de citoyens arabes, et qu'il veut faire passer un décret ministériel qui rendra ceci possible. Et il y a aussi la tentative d'exclure les députés arabes du parlement. Les poursuites judiciaires contre Azmi Bishara sont un exemple concret de cela. Yigal Shohat disait vrai lorsqu'il évoquait la possibilité que l'armée de l'air puisse à l'occasion bombarder Umm el-Fahm (ville de Palestiniens citoyens israéliens en Israël, N.D.T.).
Si nous nous dirigeons vers un régime d'apartheid, alors notre réponse devra aller plus loin que le refus de servir dans les Territoires. Ce sera un régime auquel vous ne pouvez être loyal. Il n'y a aucune loyauté à avoir envers un régime d'apartheid!
(Applaudissements)
Quiconque comprend que l'occupation et l'apartheidisation sont liés ne peut pas rester «à l'intérieur». Vous devez vous situer à l'extérieur. Ainsi l'argument comme quoi le fait de parler de La Haye et du droit international pourrait nous isoler est hors de propos. Nous devrions aller dans cette direction, non seulement agiter La Haye comme un slogan, mais commencer à rassembler les plaintes pour les procès futurs contre les crimes de guerre, qu'ils aient lieu ou non.
Michael Tarazi :
Je suis un conseiller juridique au Département des Affaires de négociations à Ramallah. En tant que juriste, j'aimerais parler du problème palestinien sous l'angle du droit international - problème non pas avec le texte, mais avec son application. La plupart des articles du droit international consacrés aux Territoires occupés devraient être en faveur des Palestiniens, mais dans la pratique, l'occupation est vivante et se porte bien. Au cours des négociations avec les Israéliens, avant Camp David, un membre de la délégation palestinienne a essayé de soulever la question de l'extension permanente des colonies, extrêmement dommageable pour la confiance de la population palestinienne dans le processus, et illégale au regard de la loi internationale. Le négociateur israélien ignora simplement cette demande. Nous avons demandé si nous étions en train de conduire des négociations dans le cadre du droit international, ou sur la base des rapports de force sur le terrain. En premier lieu, notre interlocuteur israélien continua d'ignorer la question. Alors, puisque nous insistions pour avoir une réponse, il s'est brusquement écrié: «Nous mettrons en application la Convention de Genève seulement si nous y sommes obligés.» Même avant, c'était clair pour nous que telle était la politique israélienne. Cependant, l'entendre énoncer avec cette brutale franchise fut un choc. Nous avons compris qu'aux échelons supérieurs du gouvernement Barak, ils avaient l'intention de conduire les négociations sur la base des rapports de forces, plutôt que selon le droit international. En regardant en arrière, nous avons réalisé que cela avait été la politique menée même depuis que les négociations ont commencé en 1993. Ceci se retrouva également dans la terminologie propagée dans le monde. Il ne s'agissait plus de parler de «Territoires occupés» mais plutôt de «Territoires disputés» - c'est-à-dire des territoires sur lesquels personne n'a un droit inhérent, et dont le sort devrait être décidé sur la base des rapports de force sur le terrain. Ils ne faisaient pas de distinction entre Jérusalem-Est et Jérusalem-Ouest, seulement une «Jérusalem». Gilo n'est pas considérée comme une colonie, mais une banlieue. Les gens qui y vivent ne savent même pas qu'ils sont au-delà de la Ligne Verte. Comment dans ce cas les gens partout dans le monde peuvent-ils comprendre la nature du conflit d'ici, quand les termes utilisés sont faux et délibérément trompeurs?
L'homme assis en face de la table des négociations dit qu'Israël se comporterait selon la Convention de Genève seulement s'il y était obligé. Comment nous, Palestiniens, pouvons-nous forcer Israël à le faire? Ceci est lié à ce que M. Tamari a dit ici, une affaire État contre État. Nous ne sommes pas un État.
Nous sommes obligés de rechercher quelqu'un qui fasse appliquer la Convention de Genève. Ce n'est pas la première occupation de l'Histoire. Des règles ont été définies délimitant comment on doit se comporter, ce que l'on peut faire ou ne pas faire dans des conditions d'occupation. La Convention de Genève avait pour but de contrôler ces règles.
Certains Palestiniens sont fâchés contre moi quand je dis que l'occupation en soi n'est pas illégale au regard du droit international. Mais la destruction de maisons est, elle, illégale, ainsi que la déportation, refuser le libre déplacement, la torture. Tout ceci est totalement interdit. Les colonies sont illégales, bien sûr. La Convention de Genève interdit expressément de transférer la population de l'occupant à l'intérieur du territoire occupé. Ceci, comme le précise le texte de la Convention, est nécessaire pour prévenir toute possibilité que l'occupant puisse «menacer l'existence en tant qu'ethnie de la population locale» comme le dit la Convention. L'État d'Israël a signé cette Convention; c'était une condition pour son acceptation comme État membre des Nations unies en 1949. Mais Israël ne fait aucun cas de sa signature, il n'en tire aucune conclusion pratique.
Le droit international interdit l'extension des frontières par la force. Les frontières légales sont celles de 1967. Il n'y a pas de différence entre les différentes zones du Territoire occupé. L'occupation ne commence pas après Maale Adumim. Maale Adumim est une colonie, il en va de même de Gilo, et French Hill, qui sont souvent décrites comme des «banlieues de Jérusalem».
Alors, comment le droit international peut-il être appliqué? Nous sommes allés à l'ONU. Nous avons obtenu des centaines de résolutions, des milliers. Que valent-elles? Nous nous sommes adressés aux pays signataires de la Quatrième Convention de Genève. Nous leur avons demandé qu'ils appliquent la convention qu'ils ont signée. Ils étaient d'accord, ont souri, nous ont caressé la tête. Mais ils continuent d'acheter des produits des colonies, ils n'envisagent aucune forme de sanction contre Israël. Des sanctions sont une mesure réservée à l'encontre des États arabes et musulmans seulement.
Ceci revient à demander à la victime d'un violeur de s'occuper elle-même de l'application de la loi à l'encontre de celui-ci. Si elle avait eu un tel pouvoir, elle n'aurait probablement pas été violée en premier lieu. Cette dernière décennie, cependant, il y a eu de nouveaux développements dans le cadre du droit international humanitaire. La principale avancée, selon notre point de vue, c'est: qui peut poursuivre qui. La nouvelle loi belge rend possible de poursuivre quiconque enfreint les lois sur la guerre, peu importe qui en est l'auteur, et qui en est la victime. Il n'est plus réservé aux seuls États de poursuivre devant les tribunaux internationaux. Désormais, des individus peuvent également le faire.
L'une des demanderesses dans le cas de Sharon à Bruxelles est Souad Srour, une femme qui a été violée durant les massacres de Sabra et Chatila en 1982. Elle a assisté aux meurtres de ses parents et de ses cinq frères. Puis, trois jours plus tard, elle a essayé de quitter le camp, mais elle fut reconnue par les soldats qui l'avaient violée, et par conséquent fut de nouveau violée. Les gens qui ont fait cela étaient des miliciens de la phalange libanaise, des alliés de Sharon, les hommes qu'il a introduits dans les camps sous la protection de l'armée israélienne. On exige de nous, l'Autorité Palestinienne, d'agir comme un État, alors que nous contrôlons seulement 18% du territoire, dans 13 enclaves séparées. Si nous avions essayé de poursuivre Sharon en Belgique, pour ce qui est arrivé à cette femme et bien d'autres, nous aurions été accusés de provocation et de causer des dommages au processus de paix, et Sharon aurait reçu le support des Américains là-dessus. Mais maintenant, elle peut elle-même s'adresser au tribunal de Bruxelles, ensemble avec les 23 autres Palestiniens du Liban, survivants du massacre.
Et ici, dans les Territoires occupés, des organisations non gouvernementales palestiniennes sont en train d'agir pour saisir le droit international. Elles sont en train de collecter des preuves, non seulement contre Sharon et les chefs de l'armée israélienne, pas seulement contre les soldats aux points de contrôle, mais également contre les colons, contre ceux qui détruisent des biens en Cisjordanie, contre des entrepreneurs qui construisent des colonies, et les agences immobilières qui font de l'argent dessus. Tout ceci est en train d'être documenté, et couché par écrit. Ceci nous aidera beaucoup plus, selon moi, que des actes de terrorisme particulièrement destructeurs.
Shulamit Aloni :
J'aimerais continuer à partir de ce qui vient être dit par l'intervenant précédent. La violation du droit international continue, jour après jour - dans l'impunité. Nous ne comprenons pas tout simplement les limites du pouvoir. Nous expliquons aux non juifs que les lois ne doivent pas s'appliquer à nous, et s'ils ne comprennent pas le message, cela veut dire qu'ils sont antisémites.
Golda Meir a dit qu'après le procès d'Eichmann nous avions le droit de tout faire. Pendant la guerre du Liban, Begin a dit que personne n'avait le droit de nous dire quoi faire, certainement pas ceux qui ont bombardé Dresde. Il fit également une violente attaque contre le chancelier allemand Schmidt, alors même qu'il savait parfaitement que le grand-père de Schmidt était juif et qu'aucune accusation ne pouvait être portée contre cette famille concernant la période de l'Holocauste. Un jour après que Begin eut fait cette déclaration, survint le pire bombardement de Beyrouth. Parce que si tout est permis, alors effectivement tout est permis. Nos diplomates sont en train d'essayer de vendre à l'ONU la version selon laquelle les Territoires ne sont pas du tout occupés, en dépit du fait que nous ne les avons jamais annexés, mais les avons plutôt placés sous administration militaire, ce qui est caractéristique d'une occupation. Mais le professeur Yehudah Blum, dont les théories légalistes sont déclamées à chaque fois que nos diplomates parlent à l'ONU, a émis la brillante idée que nous avons conquis ces territoires sur un occupant et que par conséquent ils sont à nous. Le fait est que la Cisjordanie est passée sous tutelle jordanienne lors des accords d'armistice de 1949, avec l'accord total de toutes les parties et sous les auspices de l'ONU. Et les Jordaniens ne se comportèrent pas comme des occupants, pas comme nous. Ils octroyèrent la citoyenneté aux Palestiniens, et la possibilité d'entrer au parlement et dans l'armée.
Plus tôt, la déclaration Balfour et le mandat sur la Palestine de la Ligue des Nations, documents qui sont souvent cités de notre côté, promettaient effectivement la création d'un foyer national juif dans cette région - mais ceci était lié au fait de préserver les droits des populations existantes, une réserve qui est aujourd'hui commodément oubliée. Le nouvel ambassadeur israélien à l'ONU s'est assis en ma compagnie pendant deux heures et a essayé de me convaincre qu'il n'y a pas d'occupation et que le territoire nous appartient dans sa totalité. Je lui ai dit que s'il rejetait la carte de l'armistice de 1949, qui eut cours jusqu'en juin 1967, alors la conclusion logique, ce n'est pas que tout nous appartient. La conclusion logique serait alors que nous retournions au plan de partage de 1947, ce que nous aimerions beaucoup moins.
Nous n'avons signé aucun traité touchant aux droits de l'homme. Il n'y a pas de traité régional dans notre région, et nous n'avons pas endossé celui de l'Europe. Nous désirons tellement être européens, nous demandons le droit de faire partie de toute institution européenne, mais pas quand il s'agit de droits humains, non monsieur! Et nous n'avons pas signé le Traité de Rome, nous ne souhaitons pas qu'il nous soit applicable.
Depuis 1995, nous avons cessé d'être un État démocratique. La loi fut passée disant que si vous ne reconnaissez pas Israël comme «État du peuple juif», vous ne pouvez vous présenter au parlement. La victoire de Kahane.
Les colonies sont illégales. Tout le monde sait qu'elles le sont. Les premières colonies avançaient comme prétextes qu'elles sont utiles pour des raisons sécuritaires et militaires, et la Haute Cour de Justice a appuyé cette revendication fallacieuse. Quand ils ont créé la colonie de Gilo, ils ont prétendu au début faire des fouilles archéologiques. D'une colonie à une nouvelle colonie, leur avidité s'accroît. Les crimes augmentent, les vols de terre se font en plein jour.
Sachant ce qui se passe en ce moment dans les Territoires, des observateurs internationaux auraient dû venir, pour mettre fin à cet expansionnisme. Mais les observateurs ne viendront pas. Ils ne viendront pas à cause de la tactique qui consiste à abuser des sentiments de culpabilité du monde chrétien occidental. Quand les plaintes contre Sharon ont été déposées en Belgique, quelle a été sa réaction? «Ceci n'est pas contre moi. C'est contre Israël, contre le peuple juif, contre toutes les générations du peuple juif.» Ainsi lui, Sharon, est Israël. Il est le peuple juif. Il est toutes les générations du peuple juif. Il est sacro-saint. Et si les Belges continuent néanmoins la procédure, alors cela veut dire que les Belges sont antisémites.
Quelle arrogance, combien de techniques pour passer outre toutes les lois! Ce qui a été investi pour ces propriétaires brutaux, les colons de la bande de Gaza, qui cultivent la terre à la sueur des travailleurs émigrés, aurait pu largement résoudre les problèmes des handicapés qui demandent simplement une petite augmentation de leur pension. L'ambassadeur des États-Unis en Israël, qui se trouve être juif, l'a dit. Et alors, qu'a dit le député du parlement, notre seigneur de la colline? Le colon a dit que l'ambassadeur est «un petit merdeux juif».
Le gouvernement n'a aucun plan pour redémarrer ou faire avancer le processus de paix. Rien n'est plus éloigné de ses intentions. Les États-Unis approuvent, parce qu'aux États-Unis il y a des juifs, et des considérations politiques et électorales. Par conséquent, il n'y aura probablement pas d'observateurs dans les Territoires, non plus que d'inculpations d'Israéliens devant le tribunal jugeant les crimes de guerre.
Notre opinion publique est devenue un collaborateur. Les gens répètent comme des perroquets la ligne gouvernementale. Une fois, j'ai entendu à la radio des informations que je savais être fausses. J'ai appelé la rédaction et elle m'a dit: «je sais, mais c'est ce que les patrons veulent que je diffuse».
Le gouvernement est en train de pratiquer progressivement l'escalade, et Shimon Peres est là-dedans, portant sa part de responsabilité dans ce qui se passe. Le Parti Travailliste ne sait-il pas ce que c'est que d'être dans l'opposition? Peres dit que s'il était dans l'opposition, il devrait implorer les journalistes pour avoir droit à deux lignes dans la dernière page. Uri Avnery a été au parlement et dans l'opposition - parfois constituant à lui tout seul l'opposition. Si Peres se tenait à l'extérieur, notre situation aurait été beaucoup plus facile, beaucoup plus facile pour tous ceux qui veulent conserver leur humanité et ne pas devenir des collaborateurs.
Je n'ai pas beaucoup d'espoir dans le tribunal international, à cause des manipulations et des accusations d'antisémitisme. Par exemple, les Allemands, malgré tout leur pouvoir en Europe, n'oseront jamais confronter le gouvernement d'Israël sur quoi que ce soit. Le chancelier Kohl était le haut représentant d'Israël dans les réunions de l'Union Européenne. Tout cela à cause du sentiment de culpabilité et d'appréhension qui est systématiquement et cyniquement manipulé.
Cela peut changer si nous, Israéliens qui croyons en la paix et la justice, expliquons aux Européens que ce qui est en train de se passer maintenant est pire que l'antisémitisme. Chaque village ou ville palestinienne est quasiment devenu un camp de détention. Ils sont empêchés de se déplacer, les routes leur sont fermées. L'avidité augmente en permanence. Ils parlent de démographie, de la «menace démographique» dans le but de préparer un «grand plan» de conquête et déportation. Comme ce que Sharon a essayé de réaliser au Liban. Benny Elon et Avigdor Liebermann, les ministres d'extrême droite, en parlent ouvertement. Sharon les félicite, et parle de «notre droit» aux deux rives du Jourdain, et de la «générosité» possible qu'il pourrait manifester en «renonçant» à la partie Est. Nous n'avons jamais vraiment compris ce que c'est qu'être un État de droit, d'adhérer à des lois et des règles. Avant 1948, nos chefs pensaient que c'était digne d'éloge de voler les Anglais, et de telles attitudes ont laissé des empreintes profondes.
Nous, citoyens, nous devons protester et élever nos voix. Autrement, nous finirons comme des parias du monde, et nous le mériterons. Nous, ici, sommes une grande partie de ce public. Nous pouvons élever notre voix pour protester, nous pouvons manifester avec des pancartes. Les médias ne pourront pas nous ignorer en permanence. Nous ne pouvons pas compter sur la communauté internationale ou les tribunaux internationaux. Nous ne pouvons pas, sauf si nous leur demandons de venir, et ignorons le chantage émotionnel être traités d'antisémites. Nous devons appeler un chat un chat. Notre gouvernement est en train de commettre des crimes de guerre. Nous devons le répéter, et le répéter, comme Caton l'ancien répéta son avertissement. Le répéter sans faiblir. Il est arrivé le temps de préparer les dossiers des crimes de guerre.