arch/ive/ief (2000 - 2005)

L'école en danger
by Jean Thursday March 28, 2002 at 12:12 AM

Fragilisée de l'extérieur par la crise sociale, l'école a été fragilisée de l'intérieur par ses responsables ET EN BELGIQUE ? CELA SE PASSE COMMENT ?

L'effondrement du service public alimente la violence

Les événements récents qui se sont déroulés au Havre (agressions d'enseignants pendant leurs cours, intrusions punitives de parents, incendie criminel dans un collège), ont attiré l'attention des média et fortement mobilisé les enseignants. Ces violences semblent défrayer la chronique, mais n'ont pas étonné ceux qui travaillent dans ces zones difficiles. On aurait pu les prévoir.

Depuis longtemps en effet se met en place une destruction générale de l'école, que nous dénonçons, et les violences dans le milieu scolaire sont, en grande partie, la conséquence d'une politique délibérée d'abandon d'un véritable service public. Les mesures successives n'ont fait qu'adapter l'école aux principes de la société libérale, qui renforce toutes les formes de ségrégation, travaille à renforcer les exclusions, en soumettant l'école aux ordres de la marchandisation.

Les rafales de réformes imposées ne font qu'augmenter les inégalités scolaires et confirmer les inégalités sociales. Les quartiers populaires sont en effet frappés de plein fouet par les suppressions, diminutions, amputations de toutes sortes (fermetures de classe, baisse d'horaires, baisse d'apprentissages), alors qu'un véritable service public devrait travailler à corriger les inégalités ; or le système actuel et son évolution les renforcent, en délégitimant le rôle, le fonctionnement et les personnels de l'école.

Les droits de tous les élèves à recevoir un enseignement de qualité ne cessent d'être amputés :

les horaires de français à l'école primaire vont diminuer de 2 heures par semaine à la rentrée prochaine
les horaires des matières vont diminuer dans les collèges, pour être ramenés à un minimum " plancher ", et les heures de remédiation ou d'aide aux devoirs sont supprimées
la notion de programmes nationaux disparaît, car un volume important de l'horaire du collégien (de 15 à 20 %) va être consacré à des activités sans programme précis (les " itinéraires de découverte ") à partir de septembre prochain.
en lycée, les horaires ont diminué, notamment en langues vivantes, pour introduire des " travaux personnels encadrés " qui ne profitent qu'aux élèves déjà autonomes et introduisent au lycée une baisse des exigences, de la rigueur et de l'approfondissement.
le nombre de postes de postes d'enseignants et de surveillants n'augmente pas ; au contraire on en supprime dans les établissements de ZEP sous prétexte de baisse démographique.

La soumission à la marchandisation de l'école apparaît nettement dans les réformes :

la baisse de l'offre publique d'enseignement prépare la nécessité de formations ultérieures payantes.
les inégalités des chances et des réussites servent les objectifs marchands, qui n'ont pas besoin de beaucoup de travailleurs très formés.
il est prévu que le sport scolaire (l'UNSS) disparaisse du service public pour être livré aux clubs privés
la réforme des lycées professionnels conduit à une inégalité des diplômes qu'ils vont délivrer : les lycées " labellisés " délivreront des diplômes qualifiants et nationalement reconnus, les autres, des diplômes de moindre valeur conduisant à la précarité.
la baisse générale des savoirs enseignés et la disparition de la formation de l'esprit critique conduira à la soumission à une société marchande et consommatrice.

Ces inégalités et ce formatage ne sont pas acceptables. Ils donnent lieu à une école à plusieurs vitesses qui renforce la ghettoïsation. Les chances des plus favorisés seront préservées par les différences dans les programmes et les horaires d'enseignement, pour les autres il y aura de moins en moins d'école à l'école.

Pour préserver les chances de chacun, faire accéder tous les élèves à des savoirs nationalement définis, à des formations égales et garanties, ce n'est pas moins d'enseignement, ce n'est pas " une autre logique d'enseignement " qui abandonne l'enfant à lui-même qu'il faut, mais étendre et améliorer le service public, rétablir les heures de cours, augmenter l'encadrement d'enseignement et de surveillance.

Nous dénonçons la politique délibérée d'abandon de ses responsabilités par l'Etat.

Nous demandons que soient prises les mesures qui pourraient faire de l'école le recours contre les inégalités, les exclusions, l'ignorance et la soumission.

Nous demandons que soit dispensée à l'école la formation intellectuelle exigeante et qualifiante à laquelle tous les élèves doivent avoir accès.