Contre les théories conspiratrices de Washington by James Petras Thursday October 04, 2001 at 01:19 PM |
Depuis les attaques contre le World Trade Center et le Pentagone, les théoriciens de la conspiration ont prospéré.
Si, dans le passé, les théories de la conspiration, trouvaient leur origine dans des groupes marginaux se retrouvant en périphérie du pouvoir politique, dans le cas présent, les partisans de la conspiration se retrouvent dans les hautes sphères du gouvernement, des moyens de communication qui comptent la plus large audieuce au niveau mondial et parmi les universitaires les plus respectés. Les théories de la conspitation avancées par les États-Unis et l'Europe se sont diffusées sur toute la planète et sont répétées par les leaders, d'illustres personnages rigieux, par les moyens de communication en Asie, en Afrique et en Amérique latine.
La "conspiration", selon les arguments des principaux porte-parole des États-Unis est le fruit de conspirateurs islamiques regroupés autour d'un leader fondamentaliste, Osama Ben Laden. (Selon cette théorie), Ben Laden et ses fidèles seraient organisés dans un réseau terroriste global, et conspireraient pour renverser les gouvernement occidaux et al-Qaeda voudrait établir des régimes islamiques dans le monde entier en commençant par des attaques contre le World Trade Center et le Pentagone. Les concepteurs de ces théories contre le fondamentalisme islamique ne se basent sur aucun fait concret.
L'identification des terroristes suspectés a déjà commencé à être questionnée pour ne pas mentionner tout ce qui concerne leurs commanditaires politiques, leurs affiliations organisationnelles et leurs liens avec les réseaux internationaux.
Comme cela arrive dans la majorité des théories de la conspiration, les preuves sont les premières à faire tomber les notions préconçues que chacun véhicule. Les bases sur lesquelles Washington attribue au fondamentalisme islamique en général et à Ben Laden et au régime taliban en particulier les attaques terroristes se fondent sur des extrapolations d'incidents s'étant produits antérieurement et dans d'autres contextes, ainsi que sur des notions préconçues concernant la capacité, la politique et les activités des fondamentalistes islamiques.
Les concepteurs des théories de la conspiration tirent leurs conclusions de la façon suivante: Ben Laden en particulier et le fondamentalisme islamique en général ont été impliqués ou ont soutenu les incidents terroristes dans le passé. Les deux sont des ennemis déclarés des États-Unis et de l'Occident et ont publiés des édits appelant à la «guerre sainte» contre Washington. Ben Laden et ses disciples dirigent un réseau clandestin international (Al-Qaeda). En conséquence, et en accord avec les auteurs des théories de la conspiration, cette caractérisation générale mène à la conclusion que le réseau international de Ben Laden est responsable des attaques contre New York et Washington.
Cette logique déductive serait impeccable si elle ne manquait pas de preuves pour la fonder. Aucun des suspects identifiés ont les caractéristiques qu'on attribue aux disciples les plus fidèles de Ben Laden, les talibans ou tout autre groupe fondamentaliste islamique.
Les principaux suspects ne suivaient en rien les préceptes de base du code de conduite islamique, sans parler des pratiques austères de Ben Laden et des Talibans. Selon la BBC (22 septembre 2001), un des principaux suspects, Ziad Jarrahi, «aimait boire de temps à aute, se divertir; il était sociable et n'exprimait aucun sentiment anti-américain.» La famille de Zia a un vidéo qui montre Ziad à un mariage d'un de ses proches en janvier 2001, dansant, récemment rasé. D'autres informations récentes sur les terroristes suspectés les décrivent buvant dans un bar en Floride.
Aussi selon la BBC, «les 19 suspects identifiés par la BBC, provenaient d'un même milieu au Moyen-Orient... Ils étaient membres d'une petite classe moyenne capable de se payer des études de qualité dans des pays comme l'Allemagne et les États-Unis.» Ziad avait demandé un prêt de 2 000 $ à sa famille avant l'attaque pour se payer un voyage. Apparemment, l'appui familial semble être plus important qu'un quelconque financement d'un réseau international dirigé par Ben Laden.
Tous ces faits contredisent ce qui est affirmé par les théories de la conspiration dans tous ses points fondamentaux. En premier lieu, les supsects ne sont pas des musulmans pratiquants, et encore moins des fondamentalistes. Ils boivent, dansent, sortent avec les filles... Ils se comportent en réalité comme toute personne de classe moyenne laïque et contrairement aux disciplines terroristes de Ben Laden et d'autres groupes islamiques ou qui reçoivent l'appui des Talibans, ils ne sont ni pauvres, ni semi-éduqués; ce ne sont pas des personnes qui ont grandi dans des quartiers populaires ou qui ont été endoctrinées par des maîtres religieux. Troisièmement, les suspects partagent une expérience de formation commune dans la même zone géogrpahique: sept des suspects ont été étudiés à Hambourg, et pour une grande partie d'entre eux dans des disciplines techniques. Ils n'ont pas été recrutés dans des camps de réfugiés et n'ont pas été endoctrinés dans des écoles religieuses par des maîtres religieux fondamentalistes.
Une étude approfondie du profil des principaux suspects ne concordent pas avec les spéculations des théoriciens de la conspiration pour justifier leur guerre contre le «fondamentalisme islamique», Ben Laden, al-Qaeda, ou le régime taliban en Afghanistan.
Les preuves qui existent sur les terroristes suggèrent que les attaquants formaient en toute probabilité un petit groupe indépendant et très fermé de personnes laïques et éduquées, qui, probablement se connaissaient personnellement avant et cela depuis longtemps.
L'appartenance à ce groupe aurait été limité à des personnes qui se connaissaient entre elles depuis longtemps, sans aucune ou rare lien avec des groupes teroristes, fondamentalistes ou de quelque autre type. Ces caractéristiques expliqueraient l'incapacité des services secrets, puisque ces services contrôlaient et s'infiltraient dans les groupes fondamentalistes. Bien que quelques terroristes puissent avoir été une personne religieuse, le plus probable est que leurs actions ont été soutenues par une idéologie laïque. Le choix de leurs objectifs manifeste que ce dernier se basait sur une analyse économique et politique des centres du pouvoir global économique et militaire.
Il est très improbable que les Talibans ou Ben Laden auraient pu planifier, diriger et mener à terme ces actions depuis leurs cachettes en Afghanistan, étant donné la précision des détails et la coordination requise. Il est très improbable que l'Iraq, la Syrie ou l'Iran aient pris part à ce type d'action et avec ces susppects sans avoir été détecté, étant donné l'importance des services d'espionnage des États-Unis, de l'Union européenne et du Mossad.
Si la théorie de la conspiration est si faible, s'il existe une théorie alternative plus plausible, sur l'existence d'un groupe autonome, petit, et très localisé (responsable des attaques), pourquoi Washington prépare-t-il la guerre contre l'Afghanistan et d'autre pays du Golfe et du Proche-Orient.
Une hypothèse, c'est que Washington, avant les attaques terroristes planifiait déjà le renversement du régime taliban et qu'il utilise les attaques pour justifier sa politique. Un haut officier paskitanais a confirmé qu'en août 2001 un officier américain lui a raconté que Washington planifiait d'éliminer les tabiban au début d'octobre 2001. La raison: les talibans offraient leurs bases pour l'entraînement de militants islamiques opposés au pouvoir des États-Unis et à leur présence dans le monde islamique. Une seconde hypothèse est celle que la mobilisation pour la guerre et les réglements qui lui sont concomittants permettraient à Washington et aux autres pays de l'Union européenne d'envoyer des troupes terrestes pour le combat, en finissant ainsi avec l'opposition citoyenne aux guerres sur le terrain (l'ainsi nommé syndrome du Vietnam). Admettre que l'attaque fut menée par une petit groupe autonome de professionnels laïques sans lien aucun avec les réseaux internationaux et sans l'appui d'un quelconque État affaiblirait la mobilisation pour la guerre et les politiques d'intimidation et de force utilisées pour réaffirmer le pouvoir des États-Unis dans le monde.
Les théories de la conspiration peuvent servir à justifier les attaques violentes contre l'Iraq, la Syrie et possiblement l'Iran et la Lybie, et contre tout autre pays qui s'opposerait à la construction de l'Empire nord-américain. La doctrine Bush de «qui n'est pas avec nous est contre nous» renforce le terrorisme d'État israélien dans les territoires occupés et justifie la répression des mouvements anti-globalisaiton au nord et les mouvements de masse du Sud contre le libéralisme.
La théorie de la conspiration divise le monde en deux: entre l'empire américain et le terrorisme. Et elle mythifie aussi le véritable conflit entre un empire en crise et les mouvements sociaux d'opposition en plein essor.
(Traduction, La Gauche, Québec)