arch/ive/ief (2000 - 2005)

droit à l'intégration sociale
by Comité de Citoyen(ne)s Sans-Emploi Thursday August 23, 2001 at 09:20 AM
citoyenssansemploi@hotmail.com Chaussée de Wavre 148 B-1050 Bruxelles

Voilà quelques semaines que le Ministre de l'Intégration sociale a fait connaître son projet d'instauration d'un droit à l'intégration sociale. Il semble que plusieurs personnes, qui parfois ont lu le projet, n'ont pas conscience de la porté réelle et pratique de celui-ci. L'exemple qui suit est réaliste et indique à quel point ce projet est une remise en cause du droit du travail et la fin d'un système qui a permis de réduire la pauvreté.

Pierre a bénéficié du droit à l’intégration sociale :
Pierre est âgé de 23 ans, il a terminé sa 7éme professionnelle en travaux de bureau il y a cinq mois. Il a travaillé pendant trois mois dans le cadre d’un contrat à durée déterminé.

Pendant qu’il travaillait, il a décidé de vivre seul. Sa mère est exclue du chômage depuis plusieurs années et son père gagne 42.000 FB à l’usine. L’ambiance à la maison étant un peu tendue, Pierre économise depuis quelques années dans le but de vivre seul. Ses 50.000 FB et son premier salaire lui permettent de payer la garantie de son nouvel appartement et d’acheter quelques armoires bon marché.

Tout allait bien jusqu’au jour où son patron lui explique que, contrairement à ce qui avait été prévu au départ, son contrat ne pourra pas être renouvelé.
Pierre ne s’inquiète pas trop, il retourne dans les agences d’intérim où il était inscrit et explique qu’il est prêt à travailler n’importe où. Toutefois, ne voyant aucune proposition arriver, Pierre commence à s’inquiéter. Il sait qu’il n’aura droit aux allocations d’attente que dans six mois. Un copain lui explique que s’il va au CPAS il aura droit au minimex.

Pierre hésite, mais finalement il sera contraint de s’y rendre. Le propriétaire le menace d’expulsion et ses amis ne veulent plus continuer à lui prêter de l’argent.
Au CPAS on lui explique qu’il n’a plus droit au minimex, mais à l’intégration sociale. Pierre s’étonne. Il savait qu’il était dans la merde, mais il ignorait qu’il était désintégré. Pour le rassurer l’assistante sociale du CPAS lui dit que ce n’est pas grave qu’au début il aura droit au revenu vital (l’ex-minimex) et qu’en plus dans trois mois au plus tard il pourra travailler.

Pierre est rassuré et va remercier son copain pour le tuyaux.
Le loyer est payé et même si pour l’instant le budget est un peu serré Pierre sait que dans quelques semaines il travaillera. D’ailleurs après deux mois d’attente, il en a marre et va à moins 20.000 sur son compte en banque. Il se dit qu’il remboursera cette somme en moins de cinq mois quand il travaillera.
D’ailleurs il est convoqué la semaine prochaine chez l’agent d’insertion du CPAS.

Aujourd’hui cela fait deux mois que Pierre travaille. Au début il se plaignait pas. L’agent d’insertion lui avait expliqué que le Conseil du CPAS avait décidé de ne plus mettre au travail via l’article 60 § 7 ou 61 car le budget ne suivait plus et que par ailleurs le CPAS avait rempli sa mission puisqu’il a respecté la convention où le Ministre lui impose une augmentation du nombre de personnes mises au travail via l’article 60 et 61..

Depuis quelques jours pourtant Pierre n’a plus la forme.
D’abord il y a eu cet épisode lors de la signature du contrat. Alors que son copain l’avait averti de lire attentivement son contrat de travail Pierre se rend compte que c’est un contrat d’intégration qu’on lui demande de signer et non un contrat de travail. Il s’agit plutôt d’un contrat du type de celui qu’il signait pour ses stages à l’école. Il n’est donc pas protégé par la loi sur les contrats de travail.
Et puis on lui a dit qu’il continuait a avoir des avantages (carte médicale, VIPO-mex, …) car il restait « minimexé », à condition qu’il aille régulièrement voir son agent d’insertion.

Mais ce qui a le plus fait mal à Pierre c’est de touché les 40 frs /heure qui lui sont alloués en guise d’indemnité. Surtout que point de vue horaire rien n’est défini. Cela varie entre 10 et 20 heures semaines en fonction des besoins du CPAS.
Pierre est mal.
Il réalise qu’il n’a pas de salaire et qu’il n’arrive pas à remonter en positif sur son compte. Les promesses qui lui sont faites d’être engagé comme article 60 § 7, il n’y croit plus. Il se rend compte que la même promesse a été faite aux nombreux jeunes dans son cas et qu’ils attendent toujours.
En plus l’ambiance au travail n’est pas géniale. Les travailleurs engagés dans le cadre d’un contrat de travail ont peur d’être remplacés par des jeunes mis au travail et donc acceptent de plus en plus de boulot.

Et pour couronner le tout, la mère de Pierre l’a contacté pour lui dire que son père est furieux. Il est convoqué au tribunal pour fixer le montant de la pension alimentaire qu’il devra verser à son fils.
Pierre est tellement mal qu’il craque. Il ne se rend plus au travail. Suite à une rencontre avec son assistante sociale, il apprend que son revenu vital a été supprimé parce qu’il n’est pas disponible pour travailler. Pierre ne dit rien. Son assistante sociale embarrassée lui explique qu’elle n’y est pour rien, que le Conseil a décidé et que la loi c’est la loi.

Son copain l’héberge provisoirement chez lui, mais s’interroge : Que dira l’Onem quand tu ouvriras ton droit aux allocations d’attente sur base de tes études ? Vont-ils considérer que le fait que tu aies abandonné ton travail dans le cadre d’un contrat d’intégration indique que tu ne veux pas travailler et donc que tu n’as droit à rien ?
Pierre est exclu, mais la majorité des responsables politiques sont fières d’avoir pu l’intégrer…

¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯¯
Comité de Citoyen(ne)s Sans-Emploi
Chaussée de Wavre 148
B-1050 Bruxelles
Mail: citoyenssansemploi@hotmail.com <mailto:citoyenssansemploi@hotmail.com>
<http://www.chez.com/sansemploibxl/>