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Presse et répression
by Le Grain de sable Tuesday February 06, 2001 at 02:36 PM
journal@attac.org

La presse au Québec est curieusement myope et s'intéresse à la longueur des matraques de la police sur le pied de guerre.

LE DISCOURS

Cette lettre a pour but de dénoncer le vide entretenu par les médias sur la question des enjeux du Sommet des Amériques. Fait peu étonnant de la part des médias du duo monopolistique Desmarais/Péladeau, plusieurs médias "alternatifs' se rabaissent à faire ce travail
abrutissant.

Depuis près de 6 mois, la population est victime d'une
campagne d'intimidation spectaculaire basée non pas sur les enjeux politiques, économiques, sociaux et culturels de la ZLÉA (Zone de Libre-Échange des Amériques), mais plutôt sur le 'comment vont se faire matraquer les manifestantEs'. Le tout a commencé par l'entartement de Jean Chrétien à l'Île du Prince Édouard, qui a permis au Soleil de nous dire que la S.Q. serait en nombre suffisant pour protéger notre Johné 'peppergate' Crétin national. Depuis, c'est la folie furieuse. Une autre première page indique 'Manque de spécialistes' et nous explique qu'il n'y a pas de pompiers spécialisés dans la région sur la question des gaz toxiques comme le gaz sarin et les gaz orange!

Malgré le fait qu'aucun sommet du genre de celui d'avril n'a été victime d'aucun groupe armé, on justifie la crainte d'attaques par des gaz ayant massacré des milliers de personnes lors de la guerre du VietNam par le fait que 'Montréal est une plaque tournante du terrorisme'!?`! Le show médiatique continue avec une description détaillée du véhicule de Toronto qui servira de canon à eau et d'autres questions fondamentales pour notre avenir collectif comme : où seront transférés les prisonniers d'Orsainville? Semaine après semaine, la bêtise se
perpétue. Je fais mes prédictions, voici les prochains
grands enjeux qui animeront le débat public : Quelle sera la longueur des matraques des policiers? Quelles seront les chances de traverser le mur grâce au saut à la perche? Comment les groupuscules terroristes azerbaïdjanais
de tendance cubiste devraient réaliser une série
d'enlèvements ciblés?

Ce vide intellectuel entretenu par les médias sert
principalement les politiciens et les corps de police, ceux-ci ayant une stratégie de désinformation particulièrement efficace. C'est que les responsables du Sommet ont appris de Seattle, Washington, Prague , Nice et cie.
Maintenant, il faut à tout prix éviter le débat sur la
question du libre-échange et de la mondialisation, car la population, si elle est informée, se mobilisera contre eux. En effet, le principe de 'réduire les entraves au commerce', à la base des accords qui sont négociés,
implique une réduction des lois et des programmes sociaux et environnementaux en les nivelant vers ce qui est en vigueur aux États-Unis et dans les pays du Sud. Du côté des policiers l'intérêt est clair. Il faut se servir de l'événement pour se refaire une garde-robe pare-balles et une série de formations payées à grand prix (devinez par qui?).

QUELLE VIOLENCE?

Pour en terminer une fois pour toutes, la violence, c'est
d'abord les millions de personnes qui meurent à chaque année de malnutrition dans les pays du Sud à cause des politiques de réduction de la dette imposées par le FMI et la Banque Mondiale, au grand profit de nos banques multinationales. La violence, c'est aussi les malades qui
souffrent dans nos couloirs d'hôpitaux, c'est les enfants
d'ici, de plus en plus nombreux, qui vivent dans la pauvreté, c'est notre environnement de plus en plus pollué qui cause des morts, comme à Walkerton.

S'il y a violence au Sommet, il ne faut pas oublier que les
agitateurs de la police seront probablement de la partie,
pour justifier leur dispositif. On n'a qu'à penser à l'agent de la GRC qui s'était fait prendre à poser des bombes au nom du FLQ, ou aux policiers de Seattle, qui ont poussé les quelques casseurs hyper-médiatisés vers les vitres des magasins pour ensuite justifier la répression sur les militants plus dangereux politiquement, faisant
de la désobéissance civile non-violente. Mentionnons par
ailleurs qu'un certain nombre de groupes font une erreur importante en axant principalement leur discours public sur la condamnation avant coup de violence potentielle de certains groupes. Ces propos ne font que renforcer la campagne de peur décrite ci-haut en détournant une fois
de plus l'attention des médias du débat de fond.

LES IMPACTS DES ACCORDS DE LIBRE-ÉCHANGE

Alors que les multinationales se fusionnent sans cesse pour
créer des quasi-monopoles dans la plupart des grands secteurs de l'économie (pétrole, automobile, métallurgie, information et média,etc.), elles cherchent à augmenter les échanges entre les différentes composantes de l'entreprise, qui se positionnent un peu partout sur la planète à la recherche des conditions de travail et environnementales les plus basses. Comme le disait le PDG de la multinationale ABB dans une citation célèbre : «Je définirais la mondialisation comme la liberté pour mon groupe d'investir où il veut, le temps qu'il veut,
pour produire ce qu'il veut, en s'approvisionnant et en vendant où il veut, et en ayant à supporter le moins de contraintes possible en matières de droit du travail et de conventions sociales.» (Percy Barnevik, président d'ABB, 1995).

Depuis la mise en place des accords de libre-échange avec les États-Unis et le Mexique, que constatons-nous? Des coupures massives dans la santé et l'éducation, une stagnation du salaire moyen et du salaire minimum par rapport à la hausse des prix, une réduction de la
lutte à la pauvreté. Il faut concéder qu'il y a eu une
hausse des exportations, mais aussi des importations. Ainsi, on se retrouve avec une faible hausse globale de la production et de la richesse, mais une dépendance très accrue face aux États-Unis qui ruineront notre économie lors de leur prochaine récession.

Alors qu'aucune véritable analyse des conséquences sociales
de l'ALENA n'a été faite, nos dirigeants des Amériques, à l'abri des regards du public, des ONG et même de leurs propres parlements,dirigent les négociations de la Zone de Libre-Échange des Amériques. De concert avec ses partenaires du secteur privé officiellement invités, ils
rédigent un accord qui viendra changer de fond en comble nos
législations et notre constitution. Cet accord viendra
subordonner les programmes sociaux, la santé, l'éducation, la culture et l'environnement au privilège des investisseurs qui seront institutionnalisés au niveau supra-national.

Face à ce processus antisocial, il faut opposer une
mobilisation importante et ouverte. Dans ce sens, un débat avec le ministre Petitgrew est organisé le 2 février à 12h au pavillon Desjardins de l'Université, un colloque du 16 au 18 février à l'Université et une manifestation contre le périmètre le 17 mars sont prévus.
Lors du Sommet, du 16 au 23 avril, une série de conférences et spectacles seront organisés, le tout culminant à la manifestation du 21. Dans ces différentes activités, des alternatives comme l'abolition des paradis fiscaux, la taxe Tobin, l'annulation des dettes du Tiers Monde et le refinancement massif dans nos programmes sociaux, pourront être abordées. Face à un processus de mondialisation qui montre de plus en plus clairement sa nature antisociale, il faut opposer une mobilisation importante et ouverte.

Sébastien Bouchard
Membre de la Coalition de Québec OQP 2001

Pour en savoir plus sur la ZLEA :
http://attac.org/quebec/zlea/index.htm
Pour plus d'informations : quebec@attac.org