arch/ive/ief (2000 - 2005)

Chiapas et Seattle en Italie - Chiapas y Seattle en Italia (fr/esp)
by Tania Molina (traduction:Fred) Monday November 20, 2000 at 08:08 PM
fredolev@hotmail.com

Ils ne sont pas tous d'accord avec toutes les formes de protester, mais « aucun n'essaie d'exclure les autres en disant que certains sont violents et d'autres institutionnels ». Les « salopettes blanches » (monos blancos) italiens ont appris de nouvelles manières de manifester grâce à d'autres jeunes comme ceux de Seattle...

Chiapas et Seattle en Italie
Les profs des « salopettes blanches »

Ils ne sont pas tous d’accord avec toutes les formes de protester, mais « aucun n’essaie d’exclure les autres en disant que certains sont violents et d’autres institutionnels ». Les « salopettes blancs » (monos blancos) italiens ont appris de nouvelles manières de manifester grâce à d’autres jeunes comme ceux de Seattle ; comme ils avaient appris, avant, des Zapatistes mexicains « la revalorisation des différences au sein de pactes d’amitiés : la diversité, non pour se diviser, mais pour pouvoir être meilleur ensemble ». Il s’agit - dit Sergio Zulian, du comité de solidarité Ya Basta - de construire depuis le bas l’idée de société civile et non pas (de mener) une guerre entre tribus ».

A la fin janvier de cette année, plus de 15 milles personnes marchèrent à travers les rues de Venise vers un des centres de détention pour migrants avec l’intention de le « clotûrer ». Bien qu’ils s’affrontèrent durement avec la police, ils y arrivèrent quelques heures. Cette après-midi-là, le ministre de l’intérieur déclara que le centre serait fermé.

Durant tout ce mois-là, il y eut des manifestations similaires pour rejeter la politique migratoire italienne. Selon Sergio Zulian, du comité de solidarité zapatiste italien Ya Basta, la manifestation de Venise fut la première menée par les « monos blancos », qui utilisent des stratégies de résistance civile apprises de leurs camarades de Seattle et de Washington.

Les « monos blancos » étaient, dans un premier temps, un groupe de jeunes qui proclamaient : «Les Zapatistes sont les sans visages, nous sommes les invisibles ; les indigènes sont exclus du développement au Mexique, nous aussi le sommes en Italie ».
Pour « se rendre visibles », ces jeunes se vêtissent d'une "salopette" blanche quand ils « occupent » des « locaux » et prennent des autobus pour exiger que soit gratuit l’accès à la culture et au transport public.
Le mouvement s’est répandu. Maintenant il regroupe « les nouvelles figures professionnelles qui, dans ce modèle économique, ont peu de possibilités d’accès à un travail fixe, à une pension et aux services », dit Sergio.
« Le zapatisme fut la première étape des mouvements planétaires du 21ième siècle, la seconde fut celle de Seattle », affirme l’activiste italien.
Pour Sergio, les indigènes révoltés apportèrent un langage nouveau et une « attitude d’ouverture » ; tandis que le « vent de Seattle » renouvela les manières de manifester.
« Le langage ironique et poétique des Zapatistes a rompu beaucoup de schémas de la gauche, qui était très sérieuse et ennuyeuse », explique Zulian. Par exemple, les chiapanèques insurgés ont établi que l’on pouvait changer le monde avec gaité et aussi avec des armes ».
Cela attire les jeunes : « le Zapatisme est subversif, mais il ne construit pas une nouvelle idéologie ». Ses apports sont paradoxaux : « l’armée qui ne cherche pas à prendre le pouvoir ».
En fin de compte, assure Sergio, c’était une question de sensibilité, les Zapatistes ont apporté des choses très simples, comme la revendication de la dignité.
Depuis 1994, le « discours zapatiste » a déclenché un grand débat dans des secteurs de la gauche européenne ; les indigènes ne parlaient pas "des grandes idéologies, comme le communisme, le socialisme et l’anarchisme ", mais de dignité, de justice, et de démocratie. Sergio raconte qu’il y en a qui se réfèrent aux Zapatistes comme des « réformistes armés » : avec des armes, mais sans une idéologie révolutionnaire.
Il y a d’autres Italiens de gauche qui croyaient que les Chiapanèques étaient en train de poser des questions « plus modernes que les Européens ».
Selon Sergio, un autre des aspects de la lutte zapatiste qui impressionna les « gauchistes » italiens était qu’ils cherchaient à donner aux principes de dignité, de démocratie et de justice « un nouveau et véritable sens qui n’est pas seulement ancré dans le passé ; nous devons avoir la capacité d’imaginer le futur.
Les concepts zapatistes de « commander en obéissant » (mandar obedeciendo), d' "avancer en questionnant " (caminar preguntando) et d’un « monde où coexistent beaucoup de mondes » (un mundo donde quepan muchos mundos) rompirent avec ces vieux schémas et ouvrirent la possibilité de changer beaucoup de gens comme nous », explique Sergio. Quand il dit « nous », il se réfère au mouvement de gauche «extraparlementaire » initié il y a 30 ans dans le nord-est de l’Italie, et duquel provient le comité Ya Basta.

Ce mouvement était l’espace « naturel » où pouvait fleurir les propositions du Zapatisme parce que ses membres ont toujours opté pour des luttes « réels », comme les mobilisations contre la politique migratoire et la création de « centres sociaux » (lieux occupés où s’organise travail social en relation, par exemple, avec le logement et la santé). Par contre, ils n’entrèrent pas dans le « champs de la représentation et de la gestion », dans la création d’un parti ni dans l’arrivée au pouvoir via des élections.

Avec le Zapatisme, en quoi changea la lutte de ce secteur de la gauche italienne ?
Zulian détaille : « nous en sommes une part, mais pas les dépositaires de la ligne qui nous emmènera à la révolution ». Si « la communication est forte et ouverte, la relation cesse d’être seulement instrumental : elle est réelle », dit Sergio ; « Au moins l’essai de créer un débat réel se réalise, avec l’idée que nous aussi nous pouvons apprendre d’autres gens ».
Dans ce processus, « le Zapatisme donne une grande poussée pour que s’ouvre toutes ces fleurs », conclut Zulian .
Comme échantillon de preuve : le projet de la turbine d’énergie électrique à La Realidad, au Chiapas. Le comité Ya Basta invita d’autres groupes à participer au financement d’une turbine pour le village de La Realidad. A la convocation répondirent des personnes des centres sociaux, des groupes indépendants et plus de 40 mairies, lesquelles ne mirent pas seulement l’argent pour financer le projet, mais s’investirent au point qu’un des maires voyagea au Chiapas avec l’équipe de Ya Basta. En novembre, la turbine commencera à fonctionner.
Selon Zulian, cet esprit d’ouverture "permet que se développe davantage ce type de projets et mouvements".

« Bien que tous les manifestants ne sont pas d’accord avec toutes les formes de protester, personne n’essaie d’exclure les autres en disant que certains sont violents et les autres institutionnels. L’identité est forte, nous sommes clairvoyant sur ce que nous voulons, et nous avons l’intelligence de maintenir ouvert la communication », affirme l’activiste italien.
Cette attitude est étroitement fondée sur le mouvement des municipios autonomes zapatistes : « la revalorisation des différences au sein de pactes d’amitié : la diversité, non pas pour se diviser, mais pour pouvoir être meilleur ensemble », dit Sergio.
Depuis le soulèvement de janvier 1994, il s’est avéré qu’il fallait travailler « depuis les terrains où les gens vivent, avec toutes leurs différences » ; construire depuis le bas l’idée de société civile (c’est dans ces processus qu’il est possible de construire une option différente dans la vie quotidienne des gens) et non pas(de mener) une guerre entre tribus ».

« Les apprentissages du Zapatisme se sont déjà ensemencés dans les principaux secteurs de gauche en Italie », affirme Sergio.
L’activiste italien explique que maintenant la gauche est passée de l’étape de « construction du tissu de la société civile au développement de luttes impliquant plus de gens » et qu’ils développent (questionnent) les grandes thèmes de la globalisation, comme celui des produits transgéniques, qui unifie beaucoup de monde parce que cela affecte la santé de la population riche et les pauvres par l’exploitation de l’agriculture ».

En quoi cela se différencie-t-il d’autres mouvements ?
« La majorité des personnes qui participent aux mobilisations n’appartiennent pas à des organisations. Cela crée un climat de mouvement réel, et pas d’organisations qui se mobilisent », conclut Sergio.

Tania Molina (traduit par Frédéric Lévêque)

La Jornada, 13 août 2000

EN ESPAÑOL:

Chiapas y Seattle en Italia
Los maestros de los monos blancos

No todos están de acuerdo con todas las maneras de protestar, pero "nadie intenta excluir a los demás diciendo que unos son los violentos y otros los institucionales".
Los "monos blancos" italianos aprendieron nuevas maneras de protestar de otros jóvenes como ellos en Seattle, como antes habían aprendido de los zapatistas mexicanos "la revalorización de las diferencias dentro de pactos de amistad: la diversidad, no para separarse, sino para poder estar mejor juntos". Se trata -dice Sergio Zulian, del comité de solidaridad Ya Basta- de "construir desde abajo la idea de sociedad civil y no una guerra entre tribus"

Afines de enero de este año, más de 15 mil personas marcharon por las calles de Venecia hacia uno de los centros de detención para migrantes con la intención de "clausurarlo". Aunque sostuvieron fuertes enfrentamientos con la policía, lo lograron por algunas horas. Esa misma tarde, el ministro de Asuntos Interiores declaró que el centro sería cerrado.
Durante todo ese mes, hubo manifestaciones similares para repudiar la política migratoria italiana. Al parecer de Sergio Zulian, del comité de solidaridad zapatista italiano Ya Basta, la de Venecia fue la primera manifestación encabezada por los "monos blancos", quienes utilizan estrategias de resistencia civil aprendidas de sus compañeros de Seattle y Washington.
Los "monos blancos" fueron primero un grupo de jóvenes desempleados que proclamaban: "Así como los zapatistas son los 'sin rostro', nosotros somos 'los invisibles'; los indígenas están marginados del desarrollo en México, nosotros también lo estamos en Italia".
Para "hacerse visibles", estos jóvenes visten un overol blanco cuando ocupan locales y toman autobuses para exigir que sea gratuito el acceso a actos culturales y al transporte público.
El movimiento se fue expandiendo. Ahora agrupa a "las nuevas figuras profesionales que en este modelo económico tienen pocas posibilidades de acceso a un trabajo fijo, una pensión y servicios", dice Sergio.
* * *
"El zapatismo fue la primera etapa de los movimientos planetarios del siglo XXI, y la segunda fue la de Seattle", afirma el activista italiano.
Para Sergio, los indígenas sublevados aportaron un lenguaje novedoso y una "actitud de apertura", y el "viento de Seattle" renovó las maneras de protestar.
"El lenguaje irónico y poético de los zapatistas rompió muchos esquemas de la izquierda, que era muy seria y aburrida", explica Zulian. Por ejemplo, los sublevados chiapanecos planteaban que "se podía cambiar el mundo con alegría y con las armas también".
Esto atrajo a los jóvenes: "El zapatismo era subversivo, pero no construía una nueva ideología". Sus planteamientos eran paradójicos: "el ejército que no busca la toma del poder".
A final de cuentas, asegura Sergio, fue una cuestión "de piel", pues los zapatistas planteaban cosas muy simples, como la reivindicación de la dignidad.
Desde 1994, el "discurso zapatista" desató un gran debate en sectores de la izquierda europea. Los indígenas no hablaban de "las grandes ideologías, como el comunismo, el socialismo y el anarquismo", sino de dignidad, justicia y democracia. Cuenta Sergio que algunos se referían a los zapatistas como los "reformistas armados": con armas, pero sin una ideología revolucionaria.
Había otros italianos de izquierda que creían que los chiapanecos estaban planteando cuestiones "más modernas que los europeos".
Según Sergio, otro de los aspectos de la lucha zapatista que impresionó a los izquierdistas italianos fue que buscaban dar a principios como dignidad, democracia y justicia "un nuevo y verdadero sentido que no esté sólo anclado al pasado; que tengamos la capacidad de imaginar el futuro".
Los conceptos zapatistas de "mandar obedeciendo", "caminar preguntando" y "un mundo donde quepan muchos mundos" rompieron con estos "viejos esquemas y abrieron la posibilidad de cambiar a mucha gente como nosotros", explica Sergio. Cuando dice "nosotros" se refiere al movimiento de izquierda "extraparlamentaria" iniciado hace unos 30 años en el noreste de Italia, y del cual proviene el comité Ya Basta.
Este movimiento era el espacio "natural" donde podía aflorar la propuesta del zapatismo porque sus integrantes siempre optaron por las luchas "reales", como las movilizaciones contra la política migratoria y la creación de "centros sociales" (lugares ocupados donde se organiza trabajo social vinculado, por ejemplo, con la vivienda y la salud). En cambio, no entraron al "campo de la representación y la gestión", a la creación de un partido ni al ascenso al poder a través de elecciones.
* * *
Con el zapatismo, ¿en qué cambió la lucha de este sector de la izquierda italiana?
Zulian detalla: "Somos una parte, pero no los depositarios de la línea que nos llevará a la revolución".
Si "la comunicación es fuerte y abierta, la relación deja de ser sólo instrumental: es real", dice Sergio; "por lo menos se hace el intento de crear un debate real, con la idea de que también nosotros podemos aprender de otra gente".
En este proceso, "el zapatismo dio un gran empujón para que se abrieran todas esas flores", concluye Zulian.
Como botón de muestra: el proyecto de la turbina de energía eléctrica en La Realidad, Chiapas. El comité Ya Basta invitó a otros grupos a participar en el financiamiento de una turbina para el poblado de La Realidad. A la convocatoria respondieron personas de centros sociales, grupos independientes y más de 40 alcaldías, las cuales no sólo pusieron el dinero para financiar el proyecto, sino que se involucraron al grado de que uno de los alcaldes viajó a Chiapas con el equipo de Ya Basta. En noviembre comenzará a funcionar la turbina.
Según Zulian, este espíritu de apertura "permite que se desarrollen más estos proyectos y movimientos".
"Aunque no todos los manifestantes estén de acuerdo con todas las formas de protestar, nadie intenta excluir a los demás diciendo que unos son los violentos y otros los institucionales. La identidad es fuerte, tenemos claridad en lo que se quiere, y la inteligencia de mantener abierta la comunicación", afirma el activista italiano.
Esta actitud está estrechamente vinculada al movimiento de los municipios autónomos zapatistas: "la revalorización de las diferencias dentro de pactos de amistad: la diversidad, no para separarse, sino para poder estar mejor juntos", dice Sergio.
A partir del levantamiento de enero de 1994, se planteó que había que trabajar "desde los territorios donde la gente vive, con todas sus diferencias"; construir desde abajo la idea de sociedad civil (es en estos procesos que es posible construir una opción diferente en la vida cotidiana de las personas) y no una guerra entre tribus".
* * *
"Los aprendizajes del zapatismo ya se sedimentaron en los principales sectores de izquierda en Italia", afirma Sergio.
El activista italiano explica que ahora la izquierda pasó de la etapa de "construcción del tejido de la sociedad civil al des-arrollo de luchas que involucren a más gente" y que planteen los grandes temas de la globalización, como el de los productos transgénicos, que unifica a muchos porque "afecta la salud de la población rica y a los pobres por la explotación de la agricultura".
¿En qué se diferencia con otros movimientos?
"La mayoría de las personas que participan en las movilizaciones no pertenecen a organizaciones. Esto da un clima de movimiento real, y no de organizaciones que se movilizan", concluye Sergio.

Tania Molina

La Jornada, 13 de agosto de 2000