arch/ive/ief (2000 - 2005)

Rudy Demotte: " le Travers fut le premier et reste l’un des rares clubs à salarier les musiciens."

"Le Travers n’est pas un simple jazz club. C’est une institution et un symbole culturel fort dont la disparition, annoncée pour le 9 septembre, aurait freiné de façon catastrophique le développement de plusieurs éléments que je considère capitaux, comme : la création musicale, non seulement en Communauté française, mais également en Belgique ; l’image internationale du jazz belge : depuis 23 ans, la plupart des artistes de jazz présents sur la scène internationale ont été et continuent d’être soutenus par le Travers ; le statut de l’artiste : le Travers fut le premier et reste l’un des rares clubs à salarier les musiciens. Le Travers a également mis en place un secrétariat social et fiscal pour les artistes. Je suis très sensible à cet aspect. J’avais déjà, en tant que ministre fédéral de l’Economie, commandé une étude sur cet important sujet. En tant que ministre de la Culture, je veux continuer à travailler pour que les artistes bénéficient enfin d’un véritable statut social. Il y a quelques semaines, j’ai été alerté par plusieurs courriers électroniques : le Travers est menacé de disparition, et devra fermer ses portes définitivement le 9 septembre si aucune solution à ses difficultés financières n’est trouvée ! Après avoir consulté Jules IMBERECHTS et après plusieurs réunions avec les acteurs concernés, j’ai proposé la solution suivante, dans le cadre de mes compétences. Je suis en effet compétent pour les infrastructures culturelles. C’est donc dans cette direction que j’ai cherché une solution pour que continue à vivre le célèbre jazz club. Le Travers, devenu entre-temps Bruxelles Ville des Musiques, sera donc hébergé momentanément au théâtre Marni à Ixelles pendant 12 à 18 mois, le temps pour ses responsables de construire une solution définitive fiable. Le bâtiment du Marni est loué par la Communauté française depuis 1999. La programmation du théâtre est diversifiée et hétéroclite : Ligue d’Impro, Ars Musica, etc. Son architecture moderniste, ses niveaux en hauteur, son foyer dont la convivialité suscite un esprit participatif du public peuvent convenir au style du Travers. Le Travers sera accueilli dans le foyer du Marni. Il faut préciser que si certains concerts l’exigeaient, la grande salle à l’italienne de l’étage, dont la capacité est de 300 places, pourrait également être mise à la disposition du Travers. Bruxelles Ville des Musiques va donc s’installer au Marni, le temps de trouver un lieu totalement adapté à son activité. Je suis conscient que cette installation temporaire implique un changement d’optique du point de vue de la programmation. Mais je pense que la solution proposée permet de garder un lieu d’expression pour la construction du jazz à Bruxelles. Le Marni est en fait la transition vers un lieu définitif. Contrairement aux activités permanentes du Travers, Bruxelles Ville des Musiques aura au Marni des activités ponctuelles.

Le Travers n’est plus, Bruxelles Ville des Musiques est là, avec une nouvelle âme à créer. Je suis conscient que cet aspect temporaire ne permet plus de se fixer un jour hebdomadaire, comme par exemple les jam’s du lundi. Mais je trouve qu’il est important de soutenir des projets qui fonctionnent, et qui, en plus, assurent un rôle social. Je pense ici au secrétariat juridique et social pour les artistes. L’ex-Travers a été impliqué, entre autres, dans la fondation de SMART, la Plate forme, Magasin 4, le Barob’Art de Nivelles, etc. Bref, tout un acquis social, artistique et culturel. En ce qui concerne l’espace bureau, je ferai une proposition d’ici quelques semaines, que ce soit au Marni ou ailleurs. Je suis en tous cas ravi et heureux d’avoir permis de trouver une solution qui, sans être idéale et définitive, garde l’esprit construit par Jules, son équipe, les musiciens et le public."

Rudy DEMOTTE, ministre de la Culture de la Communauté française

Précision du Cabinet !

Après avoir reçu cette note, le cabinet de Demotte a cru bon de préciser "qu'il vaudrait mieux parler systématiquement de l"ex-Travers" plutôt que du "Travers" pour éviter tout problème. D'autre part, quand le ministre parle du temps pour trouver une solution définitive et fiable, il ne parle pas du lieu définitif - qu'il s'est engagé à chercher -, mais de la structure de l'ex-Travers, devenu maintenant Bruxelles Ville des Musiques."

Le courrier des lecteurs.

"C'est avec plaisir que j'ai lu l'entretien avec Jules Imberechts."
Tout à fait autre chose de ce que raconte Belga! Malheureusement...
An Mertens

"Déçue de l'aspect poujadiste de gauche que prend Aden"

Non le Travers n'est pas fini, le projet dans sa globalité peut continuer! Le Travers, ce n'est pas que des jam's gratuites le lundi! C'est autre chose. (…) C'est BM promotions (agences d'artistes : Nathalie Lories, Linx, Wissels, Etienne Richard...). Je trouve ça positif que l'on propose à Jules du Travers un nouveau lieu de 250 places (c'est qu'on le considère encore comme crédible et son projet aussi). Il y a 20 ans qu'il réclame cela : 50 places c'est trop peu!! Oui, sans doute que le Travers va changer d'image, que la conception laboratoire ne sera pas aussi présente que maintenant… mais bon je préfère ça qu'un Jules de 50 ans au chômage et plus de chouettes salles pour les musiciens... Le Travers va garder sa philosophie (là , je fais toute confiance à Jules et aux musiciens) et je pense que la scène du jazz belge pourra s'y retrouver. Il sera tout à fait possible de monter des créations, de belles rencontres : un plus grand lieu, c'est plus d'entrées et la possibilité de payer de bons salaires aux musiciens (si on travaille correctement sur la promotion). L'équipe du Travers réfléchit tous les jours à la possibilité de continuer son ouverture sur les jeunes musiciens, sur ce côté laboratoire. C'est important qu'une scène comme ça existe à Bruxelles, et des solutions se profilent... Il n'y a pas de raisons que cela ne fonctionne pas au Marni... en attendant le nouveau lieu que les pouvoirs publics proposent à Jules.
La situation est complexe et je trouve ton article réducteur et dirigé... Tu aurais pu présenter le projet Travers dans son ensemble avant de poser des questions avec les réponses écrites dedans... Je suis aussi triste que tout le monde que le Travers ferme ses portes, mais je suis contente qu'il y ait d’autres projets dans l'air, où les idées de Jules, de ses amis et des musiciens belges pourront prendre toute leur ampleur,
Elisabeth, une lectrice déçue de l'aspect poujadiste de gauche que prend Aden. Oui, il faut critiquer et se battre pour des principes, mais il faut être constructif et garder un minimum d'objectivité. Gilles, tu tombes dans le répétitif et c'est même plus drôle...

La réponse d'@den…

D'abord, cela me rassure franchement qu'on ne soit pas d'accord avec moi. C'est sain. Pour rentrer dans le vif du sujet, il est vrai que la philosophie qui animait le Travers va continuer de vivre. Tant mieux ! Cependant, il est normal de se poser la question de savoir si cela se passera dans des conditions optimales. C'est bien beau de dire que le Travers n'est pas fini, mais on est en droit de s'inquiéter. Dans la note du Cabinet de Demotte que nous publions, on parle d'ex-Travers. Cela prouve que dans la tête de Demotte, on passe à autre chose.

Je voudrais, aussi, réagir à des propos inqualifiables qui relèvent de l'insulte. Premièrement, les questions que j'ai posées à Jules Imberechts reflètent mes propres inquiétudes et interrogations quant à l'évolution du Travers. Elizabeth voudrait-elle m'interdire de poser certaines questions ou, mieux, me les souffler ? Dire que mes questions impliquaient des réponses toute faites n'est pas très sympa pour Jules. Cela signifie que j'ai pu lui faire dire ce que je voulais. Je ne crois pas Jules aussi faible et aussi manipulable. Au contraire. L'interview de Jules a aussi donné un contre poids aux nouvelles toutes roses qui apparaissaient dans la presse en général. Cette avalanche médiatique autour du Travers était le meilleur moyen de dire aux gens: "Ne vous en faites pas, le problème du Travers est résolu. Tout va bien dans le meilleur des mondes et nos politiciens sont merveilleux." @den a voulu prévenir les gens, démythifier la version angélique médiatique dans l'unique but de préserver la vigilance de tous les gens qui sont prêts à s'engager dans la défense des droits des artistes et pour une culture de qualité. La trentaine de personnes qui m'ont écrit cette semaine pour nous remercier du sérieux de notre travail ne trompe pas. Enfin, je voudrais terminer par l'insulte qu'Elizabeth professe à l'encontre d'@den. Le courrier parle de "dérive poujadiste de gauche". Poujade était un homme politique d'extrême droite. Il faudrait donc qu'on m'explique, si quelqu'un y parvient, ce qu'est le poujadisme de gauche. Pour moi, le poujadisme, c'est toujours de droite et toujours avec une sale odeur de fascisme. Il est donc pour moi gravissime d'utiliser ce terme vu que toute l'action d'Aden s'inscrit dans une logique progressiste claire et sans équivoque. Soit cette remarque est fondée et j'aimerais qu'on me l'explique de A à Z, soit c'est de la pure méchanceté, ou pire, de la bêtise. Si Aden déçoit notre lectrice, ce n'est finalement pas grave, il lui reste toute la presse du monde pour la consoler. Avec, malgré tout, toute mon amitié bienveillante.

Gilles Martin.