arch/ive/ief (2000 - 2005)

Le Service canadien de la sécurité s'intéresse au mouvement antiglobalisation
by han Soete Monday August 28, 2000 at 04:23 PM
han@skynet.be

Sous le titre "L'antimondialisation, un phénomène en pleine expansion", le service canadien du renseignement de sécurité publie un rapport sur le mouvement antiglobalisation. Il s'agit d'un rapport extrêmement précis sur le mouvement et la façon dont il s'organise. Un document à la fois étonnant et inquiétant... Voyez vous-même pourquoi et comment le service de sécurité s'informe sur ce mouvement.

Publication du SERVICE CANADIEN DU RENSEIGNEMENT DE SÉCURITÉ


Rapport N° 2000/08

L’ANTIMONDIALISATION, UN PHÉNOMÈNE EN PLEINE EXPANSION

22 août 2000

Ce document, inspiré de sources ouvertes, porte sur un sujet susceptible de représenter une menace pour la sécurité publique ou nationale.

INTRODUCTION

1. La violence des manifestations qui ont perturbé la conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) à Seattle du 29 novembre au 3 décembre 1999 a étonné et secoué tout le monde. Elles n’étaient pourtant pas sans précédent et le choix de la cible, une puissante institution internationale, était prévisible. La mondialisation de l'économie se heurte depuis plusieurs années à une opposition sans cesse croissante dont les médias se font de plus en plus l’écho depuis 1995. Malgré tout, les responsables de la sécurité à Seattle ont été pris au dépourvu devant le nombre extraordinaire de manifestants et de mouvements divers qui ont réussi à faire dérailler la conférence en utilisant des méthodes modernes et les nouvelles technologies.

2. Six mois à peine avant Seattle, le 18 juin 1999, un autre mouvement de protestation similaire, le « J18 », avait marqué le Sommet économique du G8 à Cologne en Allemagne. Il avait culminé dans les rues de la City de Londres où un immense rassemblement de 2000 personnes avait dégénéré en émeute. Quarante-deux manifestants avaient été blessés et les dégâts avaient été évalués à un million de livres sterling(1). Londres n’avait pas été le seul théâtre de telles activités. D’autres villes européennes et nord-américaines, le plus souvent les quartiers financiers, avaient aussi été touchées.

3. J18, qui regroupait un large éventail d’intérêts et de causes, a fait appel autant à l’intervention humaine qu’à la technologie. Pendant que les manifestants descendaient dans la rue, les établissements d’affaires étaient la cible de cyberattaques. Pendant cinq heures, une vingtaine d’entreprises au moins ont été victimes de plus de 10 000 attaques de pirates(2). Comble d’ironie, c’est grâce à Internet que le concept même du mouvement de protestation est né et a été coordonné.

4. Ni les manifestations contre l’OMC à Seattle ou de J18, ni celles de A16 lors de la réunion du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale (BM) à Washington, DC, n’étaient exceptionnelles. Elles se sont répétées à l’occasion de la réunion ministérielle de l’Organisation des États américains (OEA) à Windsor et de la conférence du Congrès mondial du pétrole (CMP) à Calgary et il y en aura sûrement d’autres. Leur nature et leur ampleur varieront, mais elles viseront toutes, à court terme, le même type de cible, une puissante institution internationale. Ces vastes mouvements de protestation, qui rappellent ceux des années 60 et 70 contre le nucléaire et la guerre du Vietnam, défendent toutes sortes de causes et se déroulent partout dans le monde. Il y en a d’ailleurs déjà eu plusieurs au Canada.

MISE EN CONTEXTE

5. Les réunions des organisations internationales à vocation financière, commerciale et écologique qui suscitaient, au mieux, un intérêt très mitigé dans le passé, attirent aujourd’hui l’attention de milliers d’opposants à la mondialisation. Peu importe l’organisation, le groupe de pression ou le réseau plus ou moins unique auquel ils appartiennent, ils partagent tous une même aversion pour les grandes multinationales, ce que certains éléments extrémistes violents n’hésitent pas à exploiter pour causer des troubles. Certaines multinationales, dont il est souvent dit qu’elles sont plus influentes et plus puissantes que les gouvernements, gèrent des budgets plus élevés que le produit intérieur brut (PIB) de certains pays. Au tableau des cent entités économiques les plus importantes, cinquante et une sont des multinationales et quarante-neuf seulement, des États(3).

6. Les abus de pouvoir présumés des multinationales sont la cible première des activités de protestation. Elles sont accusées d’encourager les inégalités sociales, d’avoir des pratiques déloyales de travail, par exemple en versant des salaires de misère et en obligeant les ouvriers à travailler et à vivre dans des conditions épouvantables, de ne pas se soucier de l’environnement, de mal gérer les ressources naturelles et de provoquer des catastrophes écologiques. Les manifestations antimondialisation ont rallié l’appui des populations partout dans le monde parce que leurs cibles et leurs représentants sont présents sur toute la planète et que leurs retombées se font sentir partout. De grandes marques, dont Nike, Starbucks, McDonalds et Shell Oil, sont les principales cibles de ce mouvement. Comble d’ironie, c’est le succès retentissant de leurs vastes campagnes publicitaires, conçues pour les hisser au premier rang, qui les désignent aujourd’hui au ressentiment populaire.

7. Les activités de protestation n’ont toutefois pas uniquement pour but de dénoncer les pratiques répréhensibles des grandes entreprises. Les organisations économiques internationales tels l’OMC, la BM et le FMI sont vues non seulement comme les gendarmes des pratiques commerciales internationales, parce qu’elles en définissent les règles, en surveillent l’application et arbitrent les litiges, mais aussi comme le fer de lance de la mondialisation de l’économie. Ces institutions, accusées de servir les intérêts des multinationales, d’être plus puissantes que les gouvernements élus et de ne chercher qu’à maximiser les profits, sont de plus en souvent la cible de grandes manifestations. Enfin, l’antimondialisation se double d’une critique du capitalisme, des credos chers aux activistes de centre gauche et aux anarchistes.

8. L’éventail même des dénonciations encourage la participation de groupes et d’individus disparates. À Seattle et à Washington, par exemple, la foule bigarrée des mécontents évoquait l’ambiance colorée des « foires rurales ». Ces grands mouvements de masse attirent aussi les éléments extrémistes marginaux favorables à la violence représentés le plus souvent par les anarchistes du Black Bloc et les groupuscules de défense des droits des animaux et de protection de l’environnement. Le regroupement d’éléments divers et la formation, le temps d’une manifestation, d’alliances pour le moins inattendues expliquent le caractère unique de ces mouvements et leur impact.

EXAMEN DE LA QUESTION

Cibles

9. L’opposition active croissante à la mondialisation vise d’abord les « grandes entreprises » — les multinationales —, puis le « pouvoir de l’argent » — les accords internationaux sur la croissance économique. Les accusations d’exploitation de la main-d’oeuvre et de violation des droits de la personne remontent au milieu des années 90 quand un certain nombre de fabricants de produits de marques réputées — espadrilles Nike, jeans Gap et café Starbucks —, ont été accusées d’être antisyndicales, d’imposer des conditions de travail épouvantables à leurs ouvriers et d’exploiter la main-d’oeuvre infantile sur une grande échelle. D’autres multinationales bien connues, McDonalds, Monsanto et Shell Oil, ont également été dénoncées. La liste des critiques est très longue : salaires dérisoires, prestations de maladie minimales, destruction des forêts anciennes et pluviales, emploi d’insecticides dangereux, utilisation du génie biologique en agriculture, violation des droits des animaux, collusion aves des régimes violents et répressifs, etc.

10. Les accusations continuent de pleuvoir. Les étudiants se rassemblent toujours devant le siège de Nike à Eugene, en Oregon, pour protester contre les pratiques de travail du géant dans le Tiers monde. Ils sont cependant graduellement relégués au second plan par les manifestations contre les institutions internationales comme l’OMC, le FMI et la BM. Les militants les accusent de soutenir et de favoriser les grandes entreprises commerciales et de reléguer les gouvernements élus à un rôle de figurants plus sur la scène politique mondiale, dans l’ombre d’institutions économiques qui ne visent qu’un objectif : orchestrer et augmenter la croissance économique. Les adversaires de la mondialisation sont cependant divisés. Ils souhaitent tous une restructuration des entreprises pour les responsabiliser et rendre leurs activités plus transparentes, mais une fraction d’entre eux, les anarchistes et certains militants écologistes notamment, militent aussi en faveur du démantèlement pur et simple des structures internationales, dont l’OMC.

11. La doctrine capitaliste est aussi dénoncée au motif qu’elle fait fi du bien-être individuel et sacrifie les cultures et l’environnement sur l’autel de la croissance et du profit. Certains groupes, les défenseurs des droits des animaux et les écologistes entre autres, s’efforcent de tirer profit de la publicité et du battage médiatique qui entourent les attaques contre les marques prestigieuses pour dénoncer aussi l’exploitation. Pour certains observateurs, le mouvement traduit la « montée de la nouvelle gauche »(4) et le compare à l’« été des barricades » à Paris en 1968. Cette fois-ci, cependant, la contestation s’est cristallisée contre le pouvoir des grandes entreprises, les marques prestigieuses, la mondialisation et les intérêts du capital et dénonce, entre autres, le sort réservé aux travailleurs et l’exploitation de l’environnement. De nombreux facteurs interviennent et certains incidents jouent un rôle de déclencheurs, telles la mort de l’activiste nigérian Ken Saro-Wiwa et les campagnes de boycottage des vêtements sports Kathy Lee, de Wal-Mart, de Mattel, de Disney et des pétrolières Shell et Chevron, qui ont attiré l’attention sur les revendications des protestataires et donné un certain poids aux manifestations.

12. Dans son ouvrage No Logo, l’auteure canadienne Naomi Klein déclare :

...les investissements des grandes sociétés dans les pays du Tiers monde ont été vus comme une des solutions au problème de la pauvreté et de la misère. Dès 1996, toutefois, cette stratégie était ouvertement critiquée et il est apparu que de nombreux gouvernements protégeaient des investissements lucratifs - dans les mines, les barrages, les champs pétrolifères, les centrales électriques et les zones franches industrielles - et fermaient les yeux sur les violations flagrantes des droits de leurs populations par les entreprises étrangères(5).

Elle ajoute plus loin :

Ce mouvement d’opposition aux grandes sociétés... s’articule autour d’un constat : elles ne sont pas uniquement de simples fournisseurs des produits que nous voulons tous. Elles sont les forces politiques les plus puissantes de notre époque... Dès lors, en décrivant souvent les campagnes organisées contre Nike, par exemple, comme un « boycottage des consommateurs », les médias ne révèlent qu’une facette de la contestation. Il serait en effet plus juste de parler de campagnes politiques dirigées contre des cibles à la portée de tous, à savoir les produits de consommation courante, de leviers de relations publiques et d’outils de sensibilisation populaire(6).

13. Malgré les nombreuses critiques dont les multinationales et les institutions internationales du commerce sont la cible, tous les observateurs ne les clouent pas au pilori. Ils sont nombreux à se porter à leur défense et à faire valoir que leurs décisions, notamment celles des institutions internationales, sont souvent fort avantageuses et très positives. Le libre-échange est l’un des phénomènes dont ils se font les apôtres :

Le libre-échange global favorise la croissance économique mondiale. Il crée des emplois, rend les entreprises plus concurrentielles et entraîne une baisse des prix à la consommation. Il permet aussi aux pays pauvres de développer leur économie grâce à l’infusion de technologies et de capitaux étrangers et il introduit les conditions favorables à l’éclosion de la démocratie et au respect des droits de la personne en répartissant la richesse(7).

14. Les militants anarchistes regroupés au sein d’un mouvement connu sous le nom de Black Bloc sont relativement peu nombreux, mais ils sont violents et particulièrement bruyants. La cause des partisans de cette doctrine disparue, à toutes fins utiles, de l’horizon politique a reçu un solide coup de pouce en 1995 avec la publication du manifeste de Unabomber. Paradoxalement, il dénonçait la technologie comme l’un des grands maux de la société moderne et préconisait la destruction du système et, surtout, d’Internet, qui a pourtant grandement aidé les anarchistes à diffuser leur message d’un bout à l’autre de la planète. Certains militants préconisent une approche pacifique, respectueuse du sens moral, mais la majorité d’entre eux est convaincue que seule la violence permettra l’avènement de la société telle qu’ils la conçoivent, c’est-à-dire constituée de petites communautés indépendantes, libres de toute autorité politique élue.

15. La plupart des gens qui participent à des manifestations ou sont membres de groupes de contestation mènent leurs activités dans le respect des lois, sans troubler l’ordre public. Ce n’est pas le cas des activistes et des extrémistes. Peu importe la cause qu’ils défendent, les éléments radicaux et extrémistes sont d’avis que les formes courantes de protestation - marches, discours et pancartes - n’ont jamais permis de remporter de victoires décisives. Ils jugent par conséquent nécessaires de recourir à l’« action directe » et d’infliger des dommages aux sociétés qui globalisent les échanges commerciaux et la technologie au détriment de la Terre et de ses habitants les plus pauvres. Certains parmi les plus agressifs escaladent des immeubles ou d’autres structures élevées ou encore organisent des sit-in et accrochent des banderoles pour attirer l’attention. Quant aux plus extrémistes - le plus souvent des anarchistes, des défenseurs des droits des animaux ou des écologistes - ils fracassent les fenêtres, déclenchent des incendies ou vandalisent des boutiques et des établissements de restauration rapide.

16. Peu importe l’opinion professée — pour ou contre la mondialisation —, les craintes que le phénomène suscite chez les responsables de la sécurité et de l’application de la loi sont bien réelles. Les citoyens et les groupes ont le droit de manifester leur mécontentement, dans le respect des lois, en organisant des rassemblements de masse plus ou moins importants, mais ils n’ont pas le droit d’empêcher la tenue de réunions politiques. C’est ce que font valoir deux professeurs de l’Université Carleton dans un article publié dans le The Ottawa Citizen :

Les démocraties ont le droit et le devoir de protéger la liberté de parole et de réunion des citoyens, activistes et critiques compris. Elles doivent cependant aussi protéger le droit des élus de se réunir et d’exprimer leurs opinions. La tyrannie exercée par les groupuscules, les minorités ou même les majorités qui veulent empêcher l’exercice de ces droits en cherchant à faire dérailler des réunions est inacceptable dans une démocratie(8).

Groupes

17. L’une des grandes caractéristiques des activités de protestation et des manifestations antimondialisation, dont il est souvent dit qu’elles « comblent le fossé des générations », « abolissent les différences de classe » et « défendent une multitude de causes », réside dans la diversité(9). La mondialisation n’est bien souvent pas la préoccupation première des manifestants. Pour certains, elle éclipse tous les autres problèmes, pour d’autres, ce n’est qu’un objectif commun et les manifestations, un moyen de parvenir à ses fins. La rencontre de ces groupes et de ces individus en un même lieu produit un effet spectaculaire dont l’impact est carrément démesuré par rapport à leur pouvoir d’action individuel. La fusion de ces groupes en une multitude innombrable crée une illusion de puissance qui retient l’attention et suscite l’intérêt des médias, ce qui a pour effet de l’amplifier et de grossir les rangs des manifestants. Nombreux sont ceux qui ne participent à ces grands rassemblements qu’en raison, justement, de l’attention qu’ils génèrent. C’est un peu comme si le mouvement était auto-entretenu. Les manifestations de Seattle et de Washington ont révélé toute l’ampleur de la contestation et montré jusqu’où les participants sont prêts à aller pour arrêter la mondialisation ou en limiter l’expansion. L’opposition, qui vient davantage de la gauche que de la droite, rallie énormément de jeunes.

18. L’affluence aux activités de protestation et aux manifestations dépend dans une certaine mesure de l’ordre du jour de la réunion ou de la conférence prise pour cible. Les propositions que devaient examiner les délégués à la réunion de l’OMC à Seattle inquiétaient beaucoup les travailleurs. Ils étaient donc bien organisés et bien représentés et ils avaient même versé une contribution financière. Par contre, la réunion de la BM et du FMI à Washington les intéressait moins directement. Elle a donc attiré nettement moins de syndiqués et les organisations de travailleurs s’y sont faites beaucoup plus discrètes. La réunion de l’OEA à Windsor inquiétait elle aussi les milieux syndicaux, mais quand ils ont compris que certains des points les plus litigieux ne figuraient pas à l’ordre du jour des discussions, leur intérêt s’est émoussé. Et comme Windsor est avant tout une ville ouvrière, ils risquaient davantage de se nuire en mobilisant leurs troupes inutilement. Les divergences d’opinion et les dissensions influent naturellement sur la participation aux manifestations et sur les activités connexes. Ainsi, lors de la conférence de l’OEA à Windsor, les représentants syndicaux ont tenté d’empêcher les manifestants les plus violents de franchir les barrières mises en place par les policiers.

19. Les manifestants défendent un large éventail de causes et d’objectifs : environnement, droits des animaux, droits des travailleurs, droits de la personne, doctrine anarchiste et même suprématie de la race blanche. Leurs groupes, exception faite des grandes organisations comme Greenpeace, sont le plus souvent inconnus du public. Il s’agit dans bien des cas de factions dissidentes qui ne comptent qu’une poignée de membres et ne sont créées que pour la circonstance. Ils changent fréquemment de nom et leur action est souvent circonscrite à une région. Il n’est pas rare que des individus épousent plusieurs causes ou appartiennent à plusieurs groupes. Les causes et les motivations de chacun revêtent toutefois de l’importance, car elles fournissent des indications sur la nature des activités de protestation qui marqueront probablement une manifestation.

20. Certaines organisations relativement bien connues qui défendent des causes bien précises, par exemple la Fédération américaine du travail et le Congrès des organisations industrielles (FAT-COI), deux organisations de travailleurs, ou encore People for Ethical Treatment of Animals (PETA), l’un des nombreux mouvements de défense des droits des animaux, sont souvent représentées dans les manifestations contre la mondialisation. Il en va de même de certains mouvements écologistes comme Rainforest Action Network, Earth First! et Sierra Club et de groupes de défense des droits de la personne comme Global Exchange, Direct Action Network, Nader’s Group, Radical Roots et Global Trade Watch. Deux organisations qui n’existaient pas il y a quelques années à peine, The Ruckus Society en Californie et Co-Motion Action à Calgary, jouent un rôle de premier plan. Elles se spécialisent dans la formation des manifestants ainsi que dans l’organisation et la gestion des manifestations. Ces deux volets de leurs activités sont étudiés plus en détail à la rubrique Stratégie et technologie.

21. Les manifestants les plus militants et les plus violents appartiennent à des groupes extrémistes qui épousent de nombreuses de causes dont la protection de l’environnement, les droits des animaux et l’interdiction de l’avortement. Ceux qui font le plus parler d’eux se recrutent parmi les anarchistes et les membres de Third Position. Les premiers appartiennent à Black Bloc, Anarchist News Service, Black Army Faction et Anarchist Action Collective. Des membres de Black Bloc sont soupçonnés d’être les auteurs de la plupart des actes de violence commis à Seattle et à Washington. Black Bloc n’est pas un organisme structuré. Il se compose, en Amérique du Nord, de quelques centaines de groupes et d’individus ayant des affinités avec les anarchistes qui unissent leurs forces lors d’activités de protestation et de manifestations(10). Quant à Third Position, ce curieux amalgame de groupes politiques violents d’extrême gauche et d’extrême droite, il est actif en Europe surtout, mais étend rapidement ses ramifications aux États-Unis(11).

Stratégie et technologie

22. L’hétérogénéité a certes contribué à moderniser et à renforcer les mouvements de protestation et les manifestations, mais les nouvelles stratégies et technologies, prises dans leur ensemble ou individuellement, en ont profondément modifié la nature même et en ont complètement renouvelé la dynamique. Fini le temps où les manifestants se contentaient de brandir des pancartes et des banderoles, d’écouter des discours et de défiler calmement le long d’un parcours bien défini. Les manifestations d’aujourd’hui ne sont d’ailleurs pas sans rappeler les gigantesques rassemblements, souvent tumultueux, des années 60 et 70 contre la guerre du Vietnam et la bombe atomique. S’inspirant des anarchistes, qui ne juraient que par l’« action directe », les manifestants de l’an 2000 emploient une foule de nouvelles méthodes qui ajoutent une dimension plus complexe aux activités de protestation. L’élaboration et l’utilisation de tactiques nouvelles sont directement attribuables aux nouvelles technologies que les organisateurs ont su mettre au service de leurs intérêts.

23. Internet, l’agent de ces profonds bouleversements, a eu un impact important, entre autres en permettant aux organisateurs de planifier rapidement et facilement les manifestations, parfois à l’échelle de la planète. Les individus et les groupes peuvent désormais fixer les dates, partager leurs expériences, accepter des responsabilités, régler la logistique et lancer une foule d’autres initiatives, ce qu’ils n’auraient jamais pu faire aussi facilement et aussi rapidement avant. Il est désormais possible de faire en sorte que des manifestations et des activités de protestation se déroulent simultanément en plusieurs endroits. La communication et la coordination par Internet ont donné un nouveau souffle au mouvement anarchiste, qui n’est désormais plus soumis à une direction centralisée, et en permettant des actions coordonnées dont l’organisation requiert un minimum de ressources et de formalités administratives. Il a permis aux groupes et aux individus de consolider leurs liens, de se communiquer leurs succès par courriel et de recruter des membres.

24. Les opposants à la mondialisation comptent sur la force du nombre pour faire dérailler les réunions et, ce faisant, paralysent les activités dans la ville hôte. Ce type de sabotage, depuis longtemps privilégié par les écologistes, a un impact économique immédiat certain. Dans les mois qui précèdent une action, les militants reçoivent une formation intensive, conçue spécialement en fonction des activités et des manifestations prévues. En organisant des contre-sommets qui se déroulent en même temps que les rencontres internationales, comme ce fut le cas à Calgary en juin 2000 lors de la rencontre du Congrès mondial du pétrole, les organisateurs s’assurent de la participation des militants. Des sujets propres à soulever l’indignation, par exemple l’exécution du militant Ken Saro-Wiwa par le gouvernement nigérian en 1995 ou encore la situation des droits de la personne en Bolivie et au Guatemala, sont abordés au cours des séances préparatoires. L’idéalisme joue aussi un rôle important. Les manifestants sont de mieux en mieux renseignés sur la cause qu’ils défendent et ils utilisent des méthodes de plus en plus pointues. Ils organisent par exemple des tournées de présentation et des séminaires pour accroître l’efficacité de leur action.

25. Le nouveau mouvement de protestation se distingue par l’éventail de groupes aux intérêts divergents qui décident d’unir leurs efforts et manifestent dans une harmonie quasi complète. Le concept stratégique de Reclaim The Streets, une initiative britannique née au milieu des années 90 des fêtes de rue et des « raves », a été adopte par les organisateurs qui misent sur les manifestations de masse(12) pour faire valoir leur point de vue, comme ce fut le cas à Seattle et à Washington. Tout a été organisé de main de maître, ne serait-ce que parce que le concept d’un « directeur » unique n’est pas facile à concrétiser. L’absence de conflits internes a également contribué au succès des opérations. Comme Internet lui-même, le mouvement antimondialisation survit et même se développe sans personne aux commandes, ce dont les éléments radicaux et les extrémistes tirent profit pour se livrer à des actes de violence au cours de ses grandes manifestations, faisant fi des intentions pacifiques déclarées des manifestants.

26. L’une des innovations les plus saisissantes concerne toute la logistique opérationnelle et administrative — organisation, coordination et direction — des manifestations. Le mode de fonctionnement adopté est un modèle d’efficacité et ne semble soumis à l’influence d’aucune autorité ni d’aucun organe de direction ou de contrôle central. Il se rapproche, à bien des égards, du modèle préconisé par les anarchistes partisans du socialisme auto-gestionnaire. Toute activité est mise en branle par des individus animés des mêmes idées qui se réunissent en groupes d’affinité dispersés sur l’ensemble d’un territoire, planifient leur rôle et se rendent à l’endroit où la manifestation doit avoir lieu. Une fois sur place, ils se joignent à d’autres groupes d’affinité qui partagent les mêmes idées, formant ainsi un ensemble pluricellulaire, et choisissent un porte-parole qui assiste aux réunions quotidiennes du conseil des porte-parole. Les membres de ce conseil discutent des activités opérationnelles et administratives — hébergement, ravitaillement, consultations juridiques, types d’actions — et échangent de l’information. Ils choisissent les endroits où certaines activités se dérouleront et s’entendent sur le type d’action. Les décisions ne font pas toujours l’unanimité, les éléments extrémistes ou plus militants faisant habituellement comme bon leur semble.

27. Certains ensembles se voient confier des tâches et des responsabilités bien précises, par exemple assurer le ravitaillement, le transport et l’hébergement, prendre les dispositions d’ordre juridique et former des sous-groupes chargés des aspects logistique, administratif et opérationnel essentiels au succès d’une manifestation (médias, formation, aspects juridiques, transport, obstacles, actions permises, stratégies, propagande, soins médicaux, financement, communications, etc.). Ainsi, un certain nombre de groupes d’affinité ainsi que les représentants du conseil des porte-parole et des sous-groupes se sont rencontrés plusieurs mois avant la manifestation contre le FMI et la BM à Washington. Des commanditaires, des représentants syndicaux et une foule de défenseurs des causes les plus diverses ont formé des coalitions pour « mobiliser » les participants. Une fois encore, Internet leur a permis d’échanger des idées, de partager leurs expériences et de s’entretenir des problèmes qui affligent le monde.

28. Les cellulaires constituent un moyen de communication et de contrôle simple. Il permet aux organisateurs des manifestations de miser sur la mobilité et les « troupes » de réserve et de déplacer les groupes d’un endroit à l’autre, au gré des besoins. La mobilité des manifestants empêche les autorités policières et les responsables de la sécurité de chercher à contrer leurs actions en massant leurs forces en un endroit bien précis. Elles doivent elles aussi accroître la mobilité de leurs forces, constituer des forces supplétives, intercepter les communications des manifestants et, dans la mesure du possible, anticiper leurs intentions. Il arrive parfois que les éléments extrémistes, par exemple les anarchistes de Black Bloc, restent derrière les éléments modérés pour éviter que les policiers les voient commettre des actes de violence et cherchent à les en empêcher.

29. Les manifestants ont pris l’habitude de se munir de bouts de tissu imbibés de kérosène ou de vinaigre pour se prémunir contre les effets des bombes lacrymogènes et du poivre de Cayenne. Ils ont aussi appris à se servir de broche à poulet et de tuyaux en PCV pour ériger des barricade de rue pratiquement imprenables ou encore à faire des chaînes humaines pratiquement infranchissables. Il a été proposé d’utiliser des billes et des roulements à billes contre les policiers à cheval, comme le faisaient il y a au moins trente ans les participants aux rassemblements antinucléaires et aux manifestations de la gauche et de la droite en Grande-Bretagne. Parmi les nouvelles technologies, le logiciel de cryptage Pretty Good Privacy, est le plus couramment utilisé sur Internet. Les militants antimondialisation ont également adopté les techniques de communication mises au point et perfectionnées par les écologistes. Ainsi, lors de la conférence sur la biotechnologie, BIO 2000, qui s’est déroulée à Boston du 26 au 30 mars 2000, les opposants aux aliments modifiés génétiquement ont mis sur pied un centre de communications indépendant, le « Boston Independent Media Centre », et affiché des photos et diffuser des nouvelles et des audioclips sur leur site Web tout au long de la semaine de protestation.

30. Ruckus Society, un groupe formé à Berkeley, en Californie, en 1995 se spécialise dans la formation des manifestants. Il leur apprend comment manifester efficacement, par exemple où accrocher les banderoles et où poster les manifestants pour atteindre le but recherché, comment surmonter les obstacles et déjouer les contrôles de sécurité, etc. Il a joué un rôle de premier plan dans la préparation des manifestants à Seattle et à Washington et c’est lui qui avait initié les écologistes de l’Alberta et de la Colombie-Britannique aux règles de la désobéissance civile. Le groupe avait dépêché des représentants à Windsor et à Calgary avant les conférences de l’OEA et du CMP pour enseigner diverses techniques de manifestation améliorées(13). Une antenne canadienne du groupe, Co-Motion Action, avait organisé un camp de formation à Banff pour préparer les manifestants à la conférence du Congrès mondial du pétrole. Diverses techniques d’action directe et de désobéissance civile ont été enseignées à cette occasion, notamment l’utilisation d’Internet, de téléphones cellulaires et de caméras vidéo, l’escalade de murs, l’art de grimper aux arbres, la formation de chaînes humaines, la reconnaissance des lieux et la préparation de plans pour contrer les stratégies policières(14).

Financement

31. Le financement et le soutien logistique, qui sont assurés en partie par les participants eux-mêmes et en partie grâce à des dons de parties intéressées, reposent avant tout sur l’initiative individuelle et l’imagination de chacun. Là encore, Internet, ce moyen de communication rapide, simple et bon marché, facilite les démarches et permet de planifier des activités, de motiver les troupes, d’encourager la participation, de partager son expérience, d’échanger des idées et de solliciter des dons. De nombreux participants se rendent sur place par leurs propres moyens et assument leurs frais d’hébergement et de repas. Il leur arrive souvent de partager leur moyen de transport et leur lieu d’hébergement avec d’autres manifestants et de recevoir de l’aide de groupes et d’individus animés des mêmes idées. Dans certains cas, une partie du financement est assurée par des organisations plus importantes et plus connues comme Direct Action Network et Alliance for Global Justice(15). Enfin, les participants aux manifestations jugées importantes pour les travailleurs reçoivent souvent une aide financière de syndicats et de groupes affiliés qui prennent aussi en charge leurs frais de transport, de repas et d’hébergement.

32. Global Action, l’organisme de défense des droits de la personne basé à San Francisco, fournit un exemple de l’esprit de coopération et de la collégialité qui l’animent et qui est mis au service des organisateurs et des manifestants. Avant la manifestation contre le FMI et la BM à Washington, une équipe de neuf personnes a emprunté et partagé des véhicules pour effectuer une tournée dans vingt villes. Toute la logistique avait été arrêtée par courriel, y compris l’hébergement et les repas. En échange, ses membres ont animé des réunions et des séminaires, organisé des rassemblements et diverses activités pour encourager les gens à aller à Washington.

33. Le financement est aussi assuré par la sollicitation directe de dons et grâce à la vente de macarons, de T-shirts et de divers autres objets qui font la promotion des diverses causes. Les cours de formation permettent aussi d’amasser des fonds. Ainsi, les frais d’inscription à ceux de The Ruckus Society et de Co-motion Action s’élèvent à 125 $ par personne, mais les participants sont invités à verser plus s’ils le peuvent(16). Dans les faits, l’organisation des manifestations et la participation des manifestants n’exigent pas un financement important. La plupart des activités sont improvisées et décidées selon l’inspiration du moment et ne résultent pas des efforts d’importants groupes de pression préoccupés de leurs seuls intérêts, ni de vastes complots. Le seul soutien pour ainsi dire organisé dont ces groupes ont bénéficié leur a été fourni par les milieux syndicaux qui ont fait de la publicité et loué des autobus pour assurer le transport des manifestants.

Répercussions sur le Canada

34. Le Canada, en sa qualité de membre de bon nombre des organisations qui ont été ou seront la cible d’activités de protestation (OMC, FMI, BM, OEA, CMP) sur son territoire et à l’étranger, est fréquemment choisir pour accueillir leurs rencontres. Tous les niveaux de gouvernement ont pris l’habitude d’inviter ces institutions et de les encourager à tenir leurs réunions et leurs conférences en divers endroits du pays. Ces rencontres sont une source de revenus et permettent de mettre en valeur le caractère démocratique du Canada auprès de la communauté internationale. Les activités de protestation et les manifestations pourraient cependant ternir cette belle image, surtout si la couverture médiatique est négative. Certaines autorotés laissent entendre que la réputation et les intérêts du Canada à l’étranger pourraient aussi en souffrir s’il est présenté comme l’un des membres des institutions prises pour cible par les manifestants étrangers.

35. Les organisateurs de la plupart des manifestations rejettent toute idée de violence, mais ne peuvent pas toujours l’empêcher. Les activités de protestation peuvent avoir des effets très perturbateurs et se révéler fort coûteuses. Les responsables de la sécurité doivent être renseignés sur les manifestants qu’ils doivent contenir et se préparer en conséquence et planifier soigneusement le caractère et l’importance de leur intervention. Des mesures excessives peuvent produire un effet contraire à celui qui est recherché et fournir aux manifestants du matériel de propagande qu’ils utiliseront contre le gouvernement et les forces de sécurité elles-mêmes. Ils doivent aussi veiller à éviter de créer une atmosphère de camp retranché qui entraverait la libre circulation des délégués, les gênerait dans leurs déplacements et irriteraient les commerçants locaux. Enfin, les responsables de la sécurité et les décideurs politiques doivent prévoir les risques de violence accrue de la part de certains éléments extrémistes que les mesures de protection mises en place sur les lieux des conférences et des réunions pourraient excéder.

PERSPECTIVE

36. La mondialisation continuera de donner lieu à des activités de protestation et des manifestations. En fait, de nombreux groupes qu’elle laisse totalement indifférents saisiront les occasions qui leur seront ainsi fournies pour participer à des manifestations, compliquant ainsi la planification des mesures de sécurité. Les organisateurs des conférences, les services de sécurité et les responsables de l’application de la loi devront accepter cette nouvelle réalité et les défis qui s’y greffent et planifier soigneusement les mesures d’urgence. Ils devront absolument disposer de renseignements sûrs pour mettre en place un dispositif de protection adapté à la situation et, surtout, éviter de mobiliser trop ou trop peu de ressources et de provoquer une réaction violente parmi les manifestants en adoptant des mesures draconiennes. Le moindre prétexte sera bon pour la frange radicale de recourir à la provocation et de commettre des actes de violence. Les affrontements entre les manifestants ou entre les forces de l’ordre et la foule sont devenus monnaie courante lors des conférences et certains groupes anarchistes cherchent à les rendre encore plus violents.

37. L’Amérique du Nord, l’Europe et le Royaume-Uni seront sans doute les plus touchés, étant donné que la plupart des rencontres et des conférences contre lesquelles des manifestations sont organisées s’y déroulent. Londres, Paris, Berlin, Vienne et Prague, comme Washington et Seattle, attirent les délégués et les médias, mais aussi les manifestants. Ces métropoles, facilement accessibles en quelques heures, même pour les visiteurs d’outre-Atlantique, offrent toutes les commodités et les communications y sont excellentes. Le cachet de ces importantes capitales accroît d’autant la couverture médiatique et encourage la présence de manifestants et les pousse à des actions extraordinaires.

38. La distance et l’endroit choisi influent aussi, dans une certaine mesure, sur le nombre de manifestants, mais ils ne sont pas un gage de sécurité et ne suffisent pas à limiter l’influence des groupes de pression. Au début du mois de mai, par exemple, l’assemblée annuelle de la Banque asiatique de développement à Chiang Mai, en Thaïlande, a attiré une foule de 4 000 manifestants qui revendiquaient l’abrogation des politiques qui, selon eux, défavorisent les pauvres. S’inspirant des événements de Washington et de Seattle, ils ont complètement surpris les forces policières lorsqu’ils ont renversé les barrières de sécurité(17). En juillet, le sommet du G-8 à Okinawa n’a donné lieu à aucun débordement en raison surtout de l’imposant dispositif de sécurité qui avait été mis en place, mais aussi du coût élevé du voyage, de l’hébergement et du soutien logistique qui en a découragé plusieurs de s’y rendre. Néanmoins, la veille de la conférence, des milliers de personnes ont manifesté dans tout le Japon et les étudiants ont défilé dans Tokyo en criant « Annulez le sommet »(18).

39. Le nombre de manifestants et les causes représentées varieront évidemment suivant l’endroit où se déroulera une conférence, mais la nature même de la rencontre et son objectif seront beaucoup plus déterminants. Les réunions importantes et celles, surtout, auxquelles participent des hauts fonctionnaires et des dirigeants de grandes entreprises, les sommets du G-8 et les réunions du FMI entre autres, attireront un grand nombre de manifestants plus ou moins susceptibles de recourir à la violence. De même, l’absence de résultats probants lors de rencontres précédentes, par exemple l’impossibilité pour les participants de s’entendre sur l’annulation de la dette des pays pauvres, peut contribuer à mobiliser des milliers d’autres manifestants qui exprimeront leur colère et leur indignation à l’occasion de rencontres subséquentes. À Okinawa, les représentants de groupes d’intérêts ont clamé leur insatisfaction à l’issue de la rencontre et promis que leur frustration donnera lieu à des activités de protestation qui « éclipseront celles de Seattle »(19).

40. Internet demeurera un facteur important du succès ou de l’échec des activités de protestation et des manifestations contre la mondialisation. Les groupes s’en serviront pour désigner et faire connaître leurs cibles, solliciter des appuis et encourager la participation, organiser et communiquer informations et instructions, faire du recrutement, recueillir des fonds et promouvoir leurs objectifs individuels et collectifs. Internet reste un outil important de motivation et de planification des activités de protestation. Les planificateurs des conférences devront être aux aguets pour connaître à l’avance les intentions et les objectifs des manifestants et prévenir ainsi tout incident imprévu.

41. La présence constante de nombreux policiers, la mise en place de barrières de sécurité, l’adoption d’autres dispositifs de contrôle des foules et le mauvais temps tempéreront peut-être l’ardeur des manifestants et contribueront peut-être à réduire graduellement l’importance de certains rassemblements. Par contre, comme l’ont démontré les éléments extrémistes parmi les défenseurs des droits des animaux et les écologistes, ces mesures provoquent parfois des réactions plus violentes encore. Les manifestants ne se contentent alors pas de fracasser des vitrines, mais allument des incendies, utilisent des engins explosifs et même menacent des personnes de blessures corporelles, par exemple en leur envoyant des lettres de mise en garde contenant, disent-il, des lames de rasoir contaminées. Paradoxalement, les institutions prises pour cible et leurs membres hésiteront peut-être à tenir leurs rencontres en territoire canadien s’ils doivent se soumettre à des mesures de sécurité très strictes et restreindre leurs déplacements. De même, les troubles du type de ceux provoqués à Seattle, par exemple, décourageront peut-être les organisateurs de conférences et de rencontres internationales de les tenir au Canada, de crainte d’attirer les manifestants. Cependant, tout indique que des opposants à la mondialisation planifient actuellement quelques activités en prévision de certaines rencontres d’organisations internationales prévues au Canada, notamment le Sommet des Amériques qui doit avoir lieu à Québec en avril 2001. Compte tenu du discours violent dirigé à l’encontre de l’Organisation des États américains (OEA), il n’est pas exclu que des actes violents puissent être posés à l’occasion de la réunion de Québec.


NOTES DE FIN DE DOCUMENT


1. The Globe Mail, 1er décembre 1999.

2. The Sunday Times, 15 août 1999.

3. The Ottawa Citizen, 20 avril 2000.

4. Minneapolis Star Tribune, 21 mai 2000.

5. Naomi Klein, NO LOGO, Alfred A. Knopf, Canada, 2000, p. 338.

6. Ibid., p. 339.

7. “After Seattle”, William Finnegan. The New Yorker, 17 avril 2000, p. 42.

8. The Ottawa Citizen, 1er juin 2000.

9. Time, 26 avril 2000, p. 21.

10. David Samuels, « Notes from Underground », Harper’s Magazine, mai 2000, p. 37.

11. « Neither Left, Nor Right », Southern Poverty Law Center, Intelligence Report, Winter 2000, p. 40.

12. Klein, op. cit., p. 311.

13. Calgary Herald, 15 avril 2000.

14. The Globe Mail, 12 mai 2000.

15. Time, 24 avril 2000, p. 21.

16. The Globe Mail, 12 mai 2000.

17. Globe Mail, 8 mai 2000.

18. CNN.Com, 21 juillet 2000.

19. Reuters, 23 juillet 2000.


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