Belgique - L'état de siège

A l'occasion de l'Euro 2000, durant le long week-end de la Pentecôte, la mobilisation exceptionnelle des forces de police des
Pays-Bas et de Belgique n'aura pas servi seulement à maîtriser les possibles débordements des hooligans. Elle aura servi contre
les militants antimondialisation.

A l'approche de l'ouverture de l'Euro 2000, samedi 10 juin, la Belgique se retrouve en état de siège: 6500 policiers mobilisés et 30000
autres placés en réserve. Des tenues antiémeutes futuristes font leur première apparition: équipements laser, casques équipés de
récepteurs radio, masques à gaz, lanceurs de grenades à gaz paralysant De nouveaux lieux d'incarcération sont ouverts, avec cellules
spéciales en principe réservées aux hooligans
Avant même que ces derniers ne fassent leur apparition, ce dispositif a servi à réprimer les militants européens qui s'étaient mis en tête de
perturber, à Bruxelles, le 9 juin, le sommet de l'Unice (le Medef européen), réuni en présence du président de la Commision européenne,
Romano Prodi. Bilan: un matraquage particulièrement brutal, une cinquantaine d'arrestations.
Le lendemain était prévue une manifestation européenne place Rogier. Deux lectrices de Dunkerque, Marion Gomard et Dominique
Laffont, auront eu le "plaisir d'expérimenter" le savoir-faire des superflics du roi. Elles racontent: "Des barrières en croix surmontées de
barbelés et des policiers empêchent d'accéder au lieu prévu du rassemblement. Nous repérons 5 hommes portant des drapeaux enroulés,
nous nous approchons d'eux pour nous renseigner. A ce moment, un groupe de policiers s'est précipité sur nous, matraque à la main,
nous a encerclés et nous a conduits manu militari jusqu'à un fourgon grillagé où ils nous ont fait grimper après une fouille au corps. (...).
Arrivés à la gendarmerie, on nous sépare des 5 hommes. Troisième fouille au corps, on pose montre, bijoux, lacets, soutien-gorge On
nous photographie, mais nous ne comprenons pas pourquoi il est inscrit "Euro 2000" sur le tableau blanc derrière nous. On nous conduit
ensuite dans une "cellule spéciale" et là, nous comprenons: cette cellule ressemble à celle montrée la veille à la télévision, le journaliste les
disait "réservées aux hooligans". Nous étions donc arrêtées dans le cadre de cette loi, le "snelrecht", qui permet d'arrêter des hooligans et
de les mettre en rétention "administrative" pour 12 heures maximum, sans avoir à justifier du motif de l'arrestation. Ils nous ont libérées
au bout de 9 heures. Nous avons insisté pour être entendues, rien à faire. Nous nous sommes retrouvées à une heure du matin dehors, à
plusieurs kilomètres du centre-ville."
Marion et Dominique concluent: "L'Euro 2000 est un test de répression grandeur nature, et pas seulement des hooligans: de toute
expression populaire. Cette loi, votée en Belgique, sera-t-elle le premier pas vers une Europe encore plus policière, surveillée?"

arch/ive/ief (2000 - 2005)